« création », la « projection » spontanée d’un état
d’âme lyrique ou orgiastique qui échappe à la
douleur de son ivresse par le rêve. Les tragédies
sophocléennes ne seraient que des combinaisons
du rêve, dont la beauté apporterait à la déchirante
ivresse dionysiaque le baume de la contemplation
apollinienne, mais qui naîtraient de
cette ivresse même, telles les consolantes hallucinations
paradisiaques que le martyr contemple
au milieu des supplices. La tragédie grecque
commença par n’être que le chœur chantant les
infortunes surhumaines de Dionysos, symbole
mythique du mal radical du monde. Première
objectivation élémentaire du sentiment torturant
et ineffable de la vie universelle qui agitait
les choreutes inspirés, Dionysos prit bientôt,
par le développement croissant du génie
apollinien, d’autres noms et d’autres visages,
Prométhée, Philoctète, Œdipe, Admète, etc.
Au chœur dithyrambique incombe désormais la tâche de porter les auditeurs à un tel état d’exaltation dionysiaque que lorsque apparaît sur la scène le héros