« désintéressement » la qualité distinctive du
plaisir esthétique a eu sur la philosophie esthétique
moderne l’influence la plus étendue. Il n’est
pas possible de s’y opposer plus radicalement
que Nietzsche. Plaçant nos idées, nos imaginations,
nos tendances, nos goûts sous la dépendance
suprême de l’instinct vital, il ne saurait y
trouver un atome de désintéressement.
Depuis Kant, tout ce qui se dit de l’art, de la beauté, de la connaissance, de la sagesse, est dévirilisé et sali par le concept « désintéressé »[1].
Ces lignes sont d’une époque bien ultérieure à celle où nous nous plaçons. Mais c’était bien là sa pensée dès le début, quoiqu’il ne parlât de Kant que pour s’autoriser de sa philosophie à d’autres égards. À mesure que le pur psychologue se dégagera chez lui du métaphysicien, il s’appliquera à serrer de plus près, à définir en termes plus positifs la nature et les modes subtils de cet « intérêt » vital auquel pourvoit la jouissance esthétique. Il rêvera de faire de
- ↑ T. XIV, p. 132.