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LES IDÉES DE NIETZSCHE SUR LA MUSIQUE


mes de conduite et de ménager l’accord du bonheur avec la vertu. La philosophie et la science prenant dès lors une valeur absolue, la création esthétique deviendrait, en comparaison,la chose la plus frivole. Il n’est pas besoin de dire quelle illusion le rationalisme socratique constitue au regard de la philosophie de Nietzsche. À ceux qui dédaigneraient son esthétique au nom de la valeur du vrai, il répond que la poursuite de l’explication universelle par une synthèse philosophique ou scientifique quelconque est elle-même un « divertissement ».


C’est un phénomène éternel : toujours l’avide vouloir-vivre trouve un moyen pour maintenir ses créatures dans la vie et les forcer à continuer de vivre à l’aide d’une illusion répandue sur les choses. Celui-ci est attaché à la vie par le bonheur socratique de la connaissance et par la chimère de pouvoir grâce à elle guérir les éternelles blessures de l’existence ; celui-là est entouré du voile séducteur de la beauté de l’art qui flotte devant ses yeux[1].


3. La célèbre théorie kantienne qui fait du

  1. Naissance de la Tragédie, p. 125.