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sur l’ignorance des travailleurs qui surpasse encore quelque peu la vôtre, car ils ne peuvent pas s’expliquer comment leur sort individuel se détermine par les rapports du marché universel, et en ignorent même les causes, — vous appelez tout cela, excellent Schulze, la responsabilité de soi-même et la responsabilité morale des travailleurs ! Et par ces mots sacramentels, vous cherchez à aigrir les travailleurs précisément contre les gens qui veulent établir pour eux la vraie responsabilité, tandis qu’à présent ils ne sont que les souffre-douleurs neutres du jeu de la spéculation.

On pourrait trouver une circonstance à demi atténuante à cet abus de l’ignorance du peuple, en ce que vous ne connaissez pas, même de loin, les choses dont vous vous faites le professeur.

Et d’où pourriez-vous le savoir ? Vous avez été juge d’un district seigneurial, ensuite juge au tribunal de première instance dans une petite ville, et sûrement vous vous êtes efforcé dans cette position de juge d’adjuger honnêtement à chacun ce qui lui est dû. Mais cette activité judiciaire et ces petits rapports ne pouvaient pas vous offrir une connaissance plus profonde des liens sociaux, des rapports du marché universel et du procès commun perpétuel des destinées en apparence individuelles. Les grands commerçants et les grands industriels se trouvent dans une tout autre position et rient fort sous cape de la naïveté de vos « leçons » !

Si par votre position pratique vous n’avez pu acquérir la connaissance de ces rapports, vous n’avez jamais saisi l’autre voie qui y mène, la voie de la science. De la science, en général, vous n’avez pas le moindre soupçon.

Quant à vos connaissances spéciales en écono-