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Mais, nous le répétons, si ces classes sont exclues du jeu de hasard des conjonctures, les charmes ne les frappent pas moins d’une manière indirecte, mais à un degré différent, sans aucun doute.

Les conjonctures favorables (période de la prospérité, de la production augmentée) agissent indirectement sur les travailleurs de tout genre, en ce qu’elles tendent à hausser quelque peu le salaire. Mais lors même que cette tendance parvient à une réalisation, il en résulte une amélioration à peine sensible et très-passagère dans la situation des travailleurs.

Il y a deux circonstances qui agissent ordinairement contre cette tendance. Si la conjoncture favorable n’est pas une conjoncture durable et générale de toutes les branches de travail, la résistance qu’opposent les entrepreneurs à toute hausse de salaire, conjointement avec la durée médiocre de la conjoncture favorable, fait que c’est à peine s’il y a hausse de salaire, ou bien elle est tout à fait insignifiante. Si au contraire la conjoncture favorable est une conjoncture durable et générale, la hausse successive du salaire de travail produit sur ces entrefaites un si grand accroissement de mariages et de familles parmi les ouvriers et par conséquent une si grande augmentation de demande de travail, qu’ordinairement l’offre de travail qui avait d’abord pris le pas sur la demande est vite dépassée par celle-ci, et le salaire retombe à son niveau précédent et souvent même au-dessous[1].

Si ordinairement les conjonctures favorables exercent sur la condition de la classe ouvrière[2] une

  1. Voir à ce sujet mon Manuel des Travailleurs et mon écrit : Les Impôts indirects et la situation de la classe ouvrière.
  2. Nous traduisons Arbeiterstand, littéralement état ouvrier, par classe ouvrière, quand le sens le demande. (Note du traducteur.)