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rière eux que le vide retentissement de grands noms !

Le bourgeois fait des banquets en l’honneur de nos penseurs, parce qu’il n’a jamais lu leurs œuvres ! S’il les lisait, il les brûlerait. Car ces œuvres sont remplies du plus amer dédain pour cette bourgeoisie !

Il s’enthousiasme pour nos poètes parce qu’il peut citer quelques-unes de leurs poésies, et qu’il connaît tel ou tel morceau ; mais il ne connaît pas, et ne s’est jamais donné la peine de connaître leur manière d’envisager le monde !

Telle est la physionomie intellectuelle de notre bourgeoisie ; j’ai dévoilé dans le quatrième chapitre sa physionomie économique et morale, et dans les deux cas j’ai démontré que la première résulte de la seconde.

Mais le culte des journaux ne peut pas être ouvertement reconnu. Ce serait trop honteux pour une nation si elle avouait ouvertement qu’elle dépend, dans sa pensée et dans sa croyance, d’une poignée de littérateurs démoralisés, trop mauvais même pour un métier bourgeois, incapables de pensée indépendante, et bons seulement (tellement les antithèses sont brusques) à déterminer par des écrits anonymes le procédé de pensée d’une nation.

C’est pourquoi le culte des journaux a besoin, comme tout autre culte, de sa déesse mystique !

Cette déesse mystique c’est l’opinion publique.

Quelle est cette opinion publique devant l’autel de laquelle la bourgeoisie danse comme David devant l’arche d’alliance, et exige que nous l’imitions en cela ?

De tous nos penseurs, c’est Hegel qui l’a jugée avec le plus justesse et d’indulgence : « C’est pour-