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même été de mise à l’époque des États généraux, du temps des « féaux » et fidèles sujets.

Mais pensez donc, hommes d’État éclairés, que par cela même vous vous rendez semblables aux chiens morts dont parle Schelling.

Comprenez-le bien : pour avoir à sa suite le pays, il faut le dépasser de toute la hauteur de la tête !

Mais il est impossible de faire pénétrer ces idées dans l’esprit de notre bourgeoisie actuelle !

Une haine instinctive contre les idées s’est emparée d’elle, et tandis qu’il n’y a de pratique que ce qui fait circuler l’air vital de la théorie dans les poumons, en principe elle tient pour pratique ce qui théoriquement depuis longtemps est mort et putréfié.

Et cet abrutissement intellectuel absolu de la bourgeoisie dans le pays de Lessing et de Kant, de Schiller et de Goethe, de Fichte, de Schelling et de Hegel !

Et ces héros de la pensée n’ont-ils réellement fait que passer par-dessus nos têtes, comme une nuée d’oiseaux ?

De tout l’immense travail intellectuel, de toute la révolution intérieure accomplie par eux, rien, absolument rien n’a donc rejailli sur la nation, et la pensée allemande s’est-elle réellement concentrée dans une série d’individus isolés, qui, acceptant chacun fidèlement sa part de l’héritage laissé par ses prédécesseurs, continuent dans un amer mépris du monde contemporain leur travail solitaire cl infructueux pour la nation ?

Quelle malédiction pèse donc sur la bourgeoisie et l’a déshéritée au point que de tous les puissants travaux de civilisation qui se sont faits dans son milieu, que de toute cette vivante atmosphère de