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possible, à la société bourgeoise, et le mettre sous la domination inhumaine de cette loi impérieuse !

Voulez-vous vous élucider encore toute cette antithèse des périodes de civilisation par des exemples brefs et frappants ?

Savez-vous ce que pensait de ses esclaves ce même Marcus Crassus, dont je vous ai dit qu’il était possesseur de 9.900.000 thalers et que pour cette raison vous saluez probablement chapeau bas ?

Plutarque nous en parle. Après avoir parlé de la légion d’esclaves que possédait Crassus, il dit[1] : « Il était présent quand ses esclaves prenaient leurs leçons, écoutant aussi bien qu’enseignant lui-même ; en général il pensait que les premiers soins du maître étaient dus aux esclaves, comme organes vivants de l’économie. Et Crassus avait raison quand il disait : Tout le reste pouvait être dirigé par les esclaves, mais les esclaves devaient être gouvernés par lui-même[2] ».

Voyez seulement en passant, quelle saine conscience économique, quelle plénitude de connaissances économiques il a en comparaison de vous et de Bastiat cet antique Romain, qui vivait deux mille ans avant nous.

Il considère les esclaves comme les pourvoyeurs et les producteurs de ses biens et de ses richesses ; quant à lui, il se sent leur souverain politique et leur éducateur.

  1. Plut., vita Crassii., T. III. p. 250, éd. London.
  2. Et Plutarque dit vrai, quand il ajoute en manière d’explication : « L’économie (την γαρ οικονομικην, la science économique) qui, par rapport aux choses inanimées, s’appelle science industrielle, par rapport à l’homme devient {science gouvernementale) politique. »