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convaincu d’impuissance. Mais, hélas ! le philosophe socialiste devait mourir jeune ! Il retourna sur les bords du Rhin, il visita de nouveau ce château de Mme de Hatzfeld, à Düsseldorf, où il avait passé les plus calmes années de sa vie, et il voulut donner une dernière conférence près de là, à Rondsdorf ; les prolétaires de cette petite ville accueillirent la nouvelle avec enthousiasme, des arcs de triomphe furent dressés aux portes de la ville et sur les banderoles multicolores qui pavoisaient la ville étaient écrits le nom du défenseur du peuple et des louanges à son honneur.

Lassalle, très ému par ce touchant accueil, commença son dernier discours politique ; il refit la théorie historique qu’il avait tant de fois formulée après Marx et par laquelle il est démontré que le règne delà bourgeoisie est épuisé, que l’avenir du prolétariat ou Quatrième État est inévitable, et que c’est par lui que l’humanité va être régénérée.

Dans ce qui suivit, on put trouver de la fatigue et du découragement chez l’homme politique. Son succès, si grand qu’il fût, n’avait pas répondu à ses ambitieuses espérances. L’opposition haineuse qu’il avait toujours rencontrée dans la bourgeoisie l’avait aigri ; les tendances socialistes autoritaires de quelques conservateurs et, disons-le aussi, la fascination de Bismarck, alors démocrate par nécessité, avaient agi sur lui. Lassalle fut donc plus violent que jamais contre la bourgeoisie, mais il rappela que le roi de Prusse venait de recevoir les délégués silésiens et qu’il leur avait promis des lois favorables ; il rappela aussi que l’archevêque de Mayence, Ketteler, dans un mandement à ses diocésains, s’était rallié à quelques-unes des théories socialistes.

« Vous le voyez, s’écria le grand agitateur,