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pu fonder la réputation de l’auteur parmi les travailleurs, mais il n’en fut rien, car le succès vient au nom plus qu’à l’œuvre même.

Cependant l’heure de Lassalle était venue ; un événement fortuit allait fixer sa destinée et faire du philosophe socialiste, relativement obscur, l’agitateur le plus puissant, le plus brillant et le plus populaire de notre génération.

L’ère dite libérale avait commencé en Prusse, vers 1858. Dans toutes les villes d’Allemagne, des sociétés patriotiques bourgeoises s’étaient formées, ayant pour programme l’unité allemande et de légères réformes politiques. En même temps, s’était formée à Leipzig une société ouvrière à tendances plus radicales et qui réclamait, avant tout, le suffrage universel. Cette société envoya des délégués à M. Schulze-Delitsch qui les reçut assez froidement, n’étant pas partisan du suffrage universel.

La délégation allait quitter Berlin assez mécontente, quand un jeune progressiste, M. Lôwe, lui conseilla de voir un docteur en philosophie nommé Lassalle qui avait publié un programme des Travailleurs où les droits du peuple étaient éloquemment revendiqués.

Les délégués se rendirent chez Lassalle, ne le trouvèrent pas, mais lui écrivirent, et bientôt il fut convenu que Lassalle répondrait publiquement à leurs questions. Lassalle publia dans ce but la Lettre ouverte. Dans ce livre la loi de fer des salaires était exposée avec une précision mathématique, et Lassalle disait aux travailleurs comment ils devaient agir pour cesser d’être de simples forces de travail à vendre, de simples marchandises à la disposition de la Bourgeoisie.

« À la lecture de cette brochure, la bourgeoisie se leva violemment contre lui ; mais le jeune philo-