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vrer le surplus de leur travail dépassant le strict nécessaire à leur entretien au maître, autrefois de jure et maintenant de facto.

Le travail antérieur, le capital, écrase le travail vivant dans une société qui produit dans les conditions de la division du travail, de la loi de la concurrence libre et de l'aide-toi. Les propres produits de son travail étranglent le travailleur ; son travail d'hier se soulève contre lui, le terrasse et le dépouille de son produit de travail d’aujourd’hui.

Et plus le travailleur produit, depuis 1789, plus il accumule de capitaux au service de la bourgeoisie dont il augmente la propriété, plus il facilite par là les progrès ultérieurs de la division du travail, plus il augmente le poids de sa chaîne, plus il rend déplorable la situation de sa classe[1]. Et c’est la raison pourquoi cette situation est plus pénible en Angleterre qu’en France et en Belgique, en France et en Belgique plus pénible qu’en Allemagne !

En tout cas, je crois vous avoir suffisamment prouvé, monsieur Schulze, que l’origine des capitaux, même par rapport à leur répartition juridique privée, n’a rien de commun avec l'épargne, et aussi peu avant 1789 qu'après, sous le règne de la concurrence libre et jusqu’à nos jours ! Je crois vous avoir prouvé qu’après comme avant 1789, les travailleurs ne pouvaient pas accumuler, et que ceux qui accumulent n’accumulent pas leur propre pro-

  1. Les économistes bourgeois le savent très-bien, et de temps à autre en conviennent ; voir, par exemple, le professeur Rocher, Considérations sur l'économie politique, 1861, p. 217 : « Presque avec chaque nouveau degré de perfectionnement le travailleur devient plus dépendant de son maître. »