Page:Lassalle - Capital et travail.djvu/136

Cette page n’a pas encore été corrigée

formés en hommes libres de facto, et chacun aurait depuis chassé pour son propre compte, chacun aurait acquis ni plus ni moins que son produit individuel de chasse ou de travail.

Mais les progrès de la division du travail, cette cause de la civilisation européenne, ont donné une tout autre forme au travail. Chacun ne travaille qu’à une partie abstraite d’un produit, sans créer des moyens complets de consommation dont il aurait pu vivre. La conversion en argent de ce produit se réalise pendant des semaines, des mois, des années, et pendant ce temps pour vivre on a besoin d’une avance. Le travail partitif suppose encore un travail partitif antérieur d’autrui, par conséquent une avance pour se procurer les résultats pour l’acquisition des matières premières, des instruments de travail et des produits industriels. Le travail partitif ne s’accomplit enfin que par le concours de beaucoup de personnes pour le même résultat de travail, et suppose de nouveau des avances pour leur entretien, etc. Ainsi chaque note du concert de la production hurle inexorablement : avances, avances, avances ! Quand les travailleurs, en 1789, furent déclarés libres, ils ne purent pas aller chasser dans leurs domaines, comme le fier fils des forêts, car ils n’avaient plus de domaines pour la chasse, et le procédé de l’alimentation sociale s’accomplissait dans une autre forme plus artificielle.

Ce surplus, ce travail précédent qui était indispensable pour leur nourriture, ils l’avaient accumulé dans les mains des classes possédantes, juridiquement privilégiées. De ce même travail, leur propre travail antérieur, malgré, et précisément par la libre concurrence, ils durent positivement s’en faire les forçats, et, après comme avant, li-