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division Friant, trompé dans ses projets, se montre le lendemain 17 devant Ratisbonne, et fait trop tard quelques tentatives sur le pont de la Régen. Les troupes commandées par Masséna se trouvaient à Augsbourg. Le centre de la ligne française semblait dégarni ; mais, barré par le Danube et le Lech, il était gardé par les Bavarois, les Wurtembergeois et la division ducale de Saxe. Cette ligne de notre armée était brisée : des deux ailes placées aux saillants, les corps français pouvaient tomber sur leurs ennemis, s’ils s’engageaient dans ce piège qui leur était tendu.

« En arrivant à l’armée ; Napoléon trouve le mouvement de la grande masse ennemie prononcé par la rive droite du Danube, entre ce fleuve et le bas Iser, de telle manière qu’elle ne peut plus atteindre la rive gauche du Danube qu’en forçant le passage de ce fleuve ou celui du Lech. Napoléon occupait par la place d’Augsbourg, qu’il fait mettre dans le plus grand état de défense par les postes retranchés de Landsberg, de Rain et de Donawert, tous les passages qui, sur la rive droite du Danube, portent en Souabe. Il donne aussi l’ordre de défendre à Ratisbonne le passage vers la Franconie. L’armée autrichienne étendue sur l’Iser, depuis Landshut jusqu’à Munich, mais attaquant en grande force sur Landshut, et débouchant par là, menaçait évidemment le centre de la ligne française. C’est au plus actif à réunir ses forces. Mais sommes-nous à temps de le faire sur la rive droite du Danube, et oserons-nous le tenter ? En marchant sur la rive opposée, il y aura un passage de fleuve à opérer, et par conséquent rien de décisif n’en peut résulter. Cependant l’ennemi était plus rapproché de Neustadt sur le Danube, et du point de concentration que de nos ailes ; il avait son ordre de marche en avant, ses derrières, ses lignes de retraite, tout bien assuré. Malgré tous ces avantages, Napoléon ordonne le mouvement général sur la rive droite, et par des marches de flanc : à Davoust, de Ratisbonne sur Neustadt ; à Masséna, d’Augsbourg sur Pfaffenhoffen ; lui-même se porte au centre, au poste du danger et des difficultés, pour arrêter les têtes de colonnes de l’ennemi et laisser le temps à ses rapides ailes de se rejoindre. Pour tout autre, et avec d’autres troupes, cette manœuvre eût été fort scabreuse ; mais pour Napoléon, c’est, comme il le disait, un calcul d’heures ; c’est aussi un calcul de terrain ; mais il ne faut s’y tromper ni de quelques minutes ni de quelques toisés ; car il y va du salut de l’armée. Quant à lui, il s’est rendu par ses dispositions cette manœuvre absolument sûre. Si l’ennemi s’avance sur le centre, Napoléon le battra ; s’il cherche à le tourner par son extrême gauche, il trouvera Augsbourg