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gues réflexions en lui-même, il a été aussi loin que de me demander si les corrections qu’il avait faites étaient mon seul empêchement. Cette condescendance inusitée de sa part devenait pour moi un guide assuré ; aussi ai-je tenu ferme et coupé court, en lui disant que le soir même il recevrait de moi ma détermination irrévocable et mes motifs aussi bien que mes observations aux diverses pièces qu’il m’avait adressées. Je voulais en cela éviter des paroles fugitives, toujours faciles à nier, j’aimais bien mieux les consacrer d’une manière authentique sur le papier. Voici ma lettre :

« Monsieur le gouverneur, vous me renvoyez, avec vos corrections indiquées, la lettre que j’avais écrite au comte Bertrand sur l’offre verbale que vous m’aviez faite de retourner à Longwood. Ainsi, comme cela vous arrive presque toujours ici, l’offre n’était réelle qu’en apparence, et devait s’évanouir dans les détails de l’exécution. J’en suis peu surpris. Réfléchissant l’autre jour à votre offre, après votre départ, j’avais conclu qu’il en serait ainsi. Vous aviez eu la bonne foi de me dire que vous ne vouliez pas permettre qu’entre Longwood et moi nous combinassions nos idées, c’est-à-dire, en d’autres mots, que nous connussions nos véritables désirs. Vous pouvez avoir sans doute de bonnes raisons pour cela, je ne dis pas le contraire ; mais aussi, de mon côté, je ne dois pas me rendre dupe et concourir à induire en erreur peut-être ceux qui s’intéressent à moi. Vous êtes trop avantageusement situé, Monsieur, entre Longwood et moi, je ne dois point écrire au comte Bertrand, non mes pensées, mais ce que vous me dicteriez. Je m’en abstiendrai donc ; je regarderai votre offre comme non avenue, parce que l’acceptation en a été impraticable, et je me référerai irrévocablement, pour mes pensées, mes sentiments, mes décisions sur cet objet, à ma lettre du 30 novembre.

« Vous êtes dans l’erreur, Monsieur, si vous avez compris que je vous demandais des réponses à tous les arguments et à tous les articles de mes lettres. Je respecte vos occupations et le prix de votre temps ; aussi n’ai-je demandé que le simple accusé de réception, et pour la régularité des choses ; je ne pense pas que vous puissiez avoir aucune raison pour me le refuser.

« Vous paraissez surpris, Monsieur, de l’état déplorable de la santé de mon fils et de la mienne en cet instant ; et vous revenez deux fois à vous étonner que je ne vous en aie pas fait parvenir mes plaintes lorsque j’étais à Longwood. Monsieur, je ne songeais guère à mon corps à Longwood ; et d’ailleurs, quand je souffrais, je me plaignais