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disant : « Vous verrez qu’il pèche par l’éducation de la peau ; ses langes auront été trop communs, trop sales. »

– L’Empereur, parlant du danger qu’il avait couru aux Cinq-Cents lors de brumaire, l’attribuait militairement au seul local de l’Orangerie, où il avait été obligé d’entrer par une des extrémités, pour en parcourir la longueur. « Le malheur fut, disait-il, que je ne pus me présenter de front ; je fus contraint de prêter le flanc. »

– On parlait de quelqu’un qui semblait croire pouvoir imposer par un ton et des expressions approchant parfois de la menace. « C’est ridicule aujourd’hui, disait l’Empereur ; personne n’a peur à présent ; un enfant n’a plus peur : et voilà le petit Emmanuel, montrant mon fils, prêt à tirer un coup de pistolet, j’en suis sûr, avec quiconque pourrait le désirer. » Ces paroles de Napoléon influeront peut-être sur le reste de sa vie.

– Napoléon, au retour de la campagne de Russie, se montrait si frappé de la force d’âme qu’il disait avoir été déployée par Ney, qu’il le nomma prince de la Moscowa, et qu’il répéta alors à plusieurs reprises : « J’ai 200.000.000 dans mes caves ; je les donnerais pour Ney. »

– L’Empereur, appuyant sur l’infaillibilité, en dernière analyse, du triomphe des idées modernes, disait : « Comment ne l’emporteraient-elles pas ? Observez bien le train des choses : même en opprimant, aujourd’hui on se pervertit selon eux ! Car voyez le style, les concessions, l’allure forcée des oppresseurs. »

– Dans une certaine circonstance où on appuyait sur ce qu’il n’aimait pas à se faire valoir : « C’est, répondait l’Empereur, que la moralité, la bonté, chez moi, ne sont point dans ma bouche, elles se trouvent dans mes nerfs. Ma main de fer n’était pas au bout de mon bras, elle tenait immédiatement à ma tête : la nature ne me l’a pas donnée, le calcul seul la faisait mouvoir. »

– Napoléon, dans un moment de dépit contre la malveillance et les murmures de Paris, demandait, après tout ce qu’il avait accompli, ce qu’on attendait donc de lui ! « Sire, se permit-on de lui répondre, on voudrait que Votre Majesté arrêtât son cheval. – Arrêter mon cheval ! c’est bientôt dit… Il est vrai que j’ai les bras assez forts pour arrêter d’un coup de bride tous les chevaux du continent ; mais je n’ai pas de brides pour arrêter les voiles anglaises, et c’est là que gît tout le mal ; comment n’a-t-on pas l’esprit de le sentir ? »

– Reprochant un jour à quelqu’un de ne pas se corriger des vices qu’il convenait connaître : « Monsieur, lui disait-il, quand on connaît