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les bannières de la cause du peuple, et il s’est fait l’homme du pouvoir et de l’arbitraire. Si on lui fait justice, il doit être exécré des Irlandais, ses compatriotes qu’il a trahis, et des Anglais dont il a détruit les libertés au-dedans et les intérêts au-dehors.

Il a eu l’impudence de produire au parlement, comme faits authentiques, ce qu’il savait très bien avoir été falsifié, ce qu’il avait peut-être fait falsifier lui-même ; et c’est pourtant sur ces actes qu’on a prononcé le détrônement de Murat ! il fait métier de se mentir publiquement à lui-même chaque jour en plein parlement, et dans des assemblées publiques, en mettant dans ma bouche des paroles et des projets propres à m’aliéner ses compatriotes, bien qu’il sache qu’il n’en était rien ; et cet acte est d’autant plus bas, qu’il me tient lui-même dans l’impuissance de répondre.

« Lord Castlereagh, élève de M. Pitt, dont il se croit peut-être l’égal, n’en est tout au plus que le singe : il n’a cessé de poursuivre les plans et les complots de son maître contre la France. Et ici sa pertinacité, son obstination, ont été peut-être ses véritables et seules qualités : mais Pitt avait de grandes vues ; chez lui, l’intérêt de son pays marchait avant tout ; il avait du génie, il créait ; et de son île, comme point d’appui, il gouvernait et faisait agir à son gré les rois du continent : Castlereagh au contraire, substituant l’intrigue à la création, les subsides au génie, s’important fort peu de son pays, n’a cessé d’employer le crédit et l’influence de ces lois du continent pour asseoir et perpétuer son pouvoir dans son île. Toutefois, et voici la marche des choses d’ici-bas, Pitt, avec tout son génie, m’a cessé d’échouer, et Castlereagh, incapable, a complètement réussi. Ô aveuglement de la fortune !!!…

« Castlereagh s’est montré tout à fait l’homme du continent ; maître de l’Europe, il a satisfait tout le monde, et n’a oublié que son pays. Ses actes blessaient tellement l’intérêt national, ils étaient tellement au rebours des doctrines du pays, ils portaient tellement le caractère de l’inconséquence, qu’on ne comprend pas qu’une nation sage se soit laissé gouverner par un tel fou !!!

« Il prend pour base la légitimité, dont il prétend faire un dogme politique, lorsqu’elle saperait dans ses fondements le trône de son propre maître ; et néanmoins il reconnaît Bernadotte, en opposition au légitime Gustave IV, qui s’est immolé pour l’Angleterre. Il reconnaît l’usurpateur Ferdinand VII, au détriment de son vénérable père Charles IV.

Il proclame avec les alliés, comme une autre base fondamentale, le