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Il ajoutait que l’artillerie faisait aujourd’hui la véritable destinée des armées et des peuples ; qu’on se battait à coups de canon comme à coups de poings, et qu’en bataille, comme à un siège, l’art consistait à présent à faire converger un grand nombre de feux sur un même point ; que, la mêlée une fois établie, celui qui avait l’adresse de faire arriver subitement et à l’insu de l’ennemi, sur un de ses points, une masse inopinée d’artillerie, était sûr de l’emporter. Voilà quels avaient été, disait-il, son grand secret et sa grande tactique.

Du reste, concluait-il, il ne pouvait pas y avoir ce que, dans sa pensée, il concevait être une véritable armée, sans une révolution dans les mœurs et l’éducation du soldat, peut-être même de l’officier. Il ne pouvait pas y en avoir avec nos fours, nos magasins, nos administrations, nos voitures. Il n’y aurait d’armée que quand, à l’imitation des Romains, le soldat recevrait son blé, aurait des moulins à bras, cuirait son pain sur sa petite platine, etc. Il n’y aurait d’armée que quand on aurait mis en fuite toute notre effroyable administration paperassière, etc., etc.

« J’avais médité, disait-il, tous ces changements ; mais, pour oser les