Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome I.djvu/734

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nues, et, durant mon insomnie, je repassais minutieusement dans mon esprit tout ce que j’avais connu du Conseil d’État, le local de ses séances, les habitudes, les formes, etc., etc. ; et je ne crois pouvoir mieux employer l’oisiveté de notre solitude de Sainte-Hélène que de les consigner ici. J’y joindrai de temps à autre ce qui me reviendra des séances dont j’ai été le témoin, à mesure qu’elles se présenteront à ma mémoire. Il en est pour qui tous ces détails seront de quelque prix.

La salle du Conseil d’État aux Tuileries, lieu ordinaire des séances, était une pièce latérale à la chapelle et de toute sa longueur ; le mur mitoyen présentait plusieurs portes pleines, qui, ouvertes le dimanche, formaient les travées de la chapelle ; c’était une très belle pièce allongée. À l’une de ses extrémités, vers l’intérieur du palais, était une grande et belle porte qui servait de passage à l’Empereur, lorsque, suivi de sa cour, il se rendait le dimanche à sa tribune pour y entendre la messe. Cette porte ne s’ouvrait le reste de la semaine que pour l’Empereur, quand il arrivait à son Conseil d’État. Les membres de ce Conseil n’entraient que par deux petites portes pratiquées à l’extrémité opposée.

Dans toute la longueur de la salle, à droite et à gauche, était établie accidentellement, et pour le temps du conseil seulement, une longue file de tables assez éloignées du mur pour y admettre un siège et une libre circulation extérieure. Là s’asseyaient hiérarchiquement les conseillers d’État, dont la place d’ailleurs se trouvait désignée par un carton portant leur nom, et renfermant leurs papiers. À l’extrémité de la salle, vers la grande porte d’entrée et transversalement à ces deux files de tables, il en était placé de semblables pour les maîtres des requêtes ; les auditeurs prenaient place sur des tabourets ou des chaises, en arrière des conseillers d’État.

À l’extrémité supérieure de la salle, en face de la grande porte d’entrée, se trouvait la place de l’Empereur, sur une estrade élevée d’une ou deux marches. Là étaient son fauteuil et une petite table recouverte d’un riche tapis et garnie de tous les accessoires nécessaires, ainsi qu’en avaient devant eux tous les membres du conseil : papier, plumes, encre, canifs, etc.

À la droite de l’Empereur, mais au-dessous de lui et à notre niveau, le prince archichancelier, sur sa petite table séparée ; à sa gauche, le prince architrésorier, qui y assistait fort rarement ; et enfin, à la gauche encore de celui-ci, M. Locré, rédacteur des procès-verbaux du Conseil.

Quand il venait accidentellement des princes de la famille, ils avaient une pareille table placée sur le même alignement, et selon leur rang