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dié la loi. Il avait de la chaleur et de l’énergie. C’est lui qui, à la consulte extraordinaire de Corse, où l’on proposait de se soumettre à la France, prononça un discours qui enflamma tous les esprits ; il n’avait alors que vingt ans. « Si, pour être libre, il ne s’agissait que de le vouloir, disait-il, tous les peuples le seraient. L’histoire nous apprend cependant que peu sont arrivés au bienfait de la liberté, parce que peu ont eu l’énergie, le courage et les vertus nécessaires. »

Charles Bonaparte, en 1779, fut député, pour la noblesse des États de Corse, à Paris, et mena avec lui le jeune Napoléon, alors âgé de dix ans. Il avait passé par Florence, et y avait obtenu une lettre de recommandation du grand-duc Léopold pour la reine de France Marie-Antoinette, sa sœur. Il dut cette lettre au rang et à la considération que la notoriété publique, à Florence, assignait à son nom et à son origine toscane.

À cette époque, deux généraux français se trouvaient en Corse, fort divisés entre eux ; leurs querelles y formaient deux partis : c’étaient M. de Marbeuf, doux et populaire, et M. de Narbonne Pellet, haut et violent. Ce dernier, d’une naissance et d’un crédit supérieurs, devait être naturellement dangereux pour son rival : heureusement pour M. de Marbeuf, beaucoup plus aimé en Corse, la députation de cette province arriva à