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voir chaque jour de l’influence funeste de ces grands préparatifs sur les esprits. Les partisans des Français tremblaient ; ceux de l’Autriche, au contraire, étaient fiers et menaçants. Mais tous s’étonnaient qu’une puissance comme la France laissât une armée qui avait si bien mérité d’elle, sans secours et sans appui. Ces observations pénétraient jusqu’aux soldats mêmes, par leur habituelle communication avec les habitants du pays.

À la fin de juillet, le général Soret avait son quartier-général à Salo : il était chargé de couvrir le débouché de la Chiesa, où passe une grande route qui communique de Trente à Brescia. Masséna était à Bussolengo, faisant occuper la Corona et Montebaldo par la brigade Joubert, et campait, avec le reste de sa division, sur le plateau de Rivoli. La brigade de Dallemagne était postée à Vérone ; la division d’Augereau occupait Porto-Legnago et le bas Adige. Le général Guillaume commandait à Peschiera, où six galères, sous les ordres du capitaine de vaisseau Lallemand, assuraient le lac de Guarda. Enfin Serrurier pressait le siège de Mantoue. Kilmaine commandait la cavalerie de l’armée.

III. Plan de campagne de Wurmser. — Wurmser pouvait passer la Brenta, déboucher par Vicence et Padoue, sur l’Adige. Par là il évitait les montagnes ; mais il se trouvait séparé de Mantoue par l’Adige, et obligé de la passer de vive force devant l’armée française ; ou bien il pouvait déboucher entre l’Adige et le lac de Guarda, s’emparer de Montebaldo, du plateau de Rivoli, faire venir son artillerie et ses bagages par la chaussée qui suit la rive gauche de l’Adige. Son armée se trouvait alors avoir franchi les montagnes et l’Adige, et n’avoir plus d’obstacle pour arriver jusqu’à Mantoue. Mais son artillerie et sa cavalerie ne pouvaient se joindre à son infanterie qu’après la prise du plateau de Rivoli. Il pouvait donc se trouver attaqué, et obligé de livrer une bataille décisive, avant d’être joint par son artillerie et sa cavalerie.

Cependant il ne tint pas compte de cet inconvénient, et adopta ce dernier parti. Wurmser, instruit de la prise du camp retranché de Mantoue et des dangers de la place, précipita son mouvement de huit à dix jours. Il divisait son armée en trois corps : le premier et le plus considérable, formant son centre, déboucha par Montebaldo et s’empara de tout le pays entre l’Adige et le lac de Guarda ; il était composé de quatre divisions formant quarante mille hommes. Le second, formant sa gauche, composé d’une division d’infanterie de dix à douze mille hommes avec toute l’artillerie, la cavalerie et les bagages, suivit la chaussée qui de Roveredo conduit à Vérone, le long de la rive gauche de l’Adige, et devait se réunir à l’armée en passant l’Adige, soit au plateau de Rivoli,