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blements des palais impériaux, aux grandes économies qu’il y avait introduites. Il nous a donné le prix du trône, celui des ornements impériaux, etc., etc… Quoi de plus curieux que de tenir de sa bouche ces détails, ces comptes, le mode de ses économies ! Combien je regrette de ne les avoir pas consignés dans le temps ! Mais veut-on connaître un de ses moyens de vérification. Il revenait aux Tuileries, qu’on avait magnifiquement meublées en son absence ; on n’eut rien de plus pressé que de lui faire voir et admirer le tout : il s’en montre très satisfait, et s’arrêtant à une embrasure de fenêtre, devant une fort riche tenture, il demande des ciseaux, coupe un superbe gland d’or en pendant, le met froidement dans sa poche et continue son inspection, au grand étonnement de ceux qui le suivaient, incertains et cherchant à deviner son motif.

À quelques jours de là, à son lever, le gland ressort de sa poche, et le remettant à celui qui était chargé des ameublements : « Tenez, mon cher, lui dit-il, Dieu me garde de penser que vous me volez ! mais on vous vole ; vous avez payé ceci un tiers au-dessus de sa valeur : on vous a traité en intendant de grand seigneur, vous eussiez fait un meilleur marché si vous n’aviez pas été connu. »

C’est que Napoléon, dans une de ses promenades matinales, et déguisé, ce qui lui arrivait fréquemment, était entré dans plusieurs magasins de la rue Saint-Denis, avait fait évaluer ce qu’il avait emporté, proposé des entreprises analogues, et amené le résultat, disait-il, à sa