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Une centaine d’hommes essayèrent de résister, au Théâtre de la République ; quelques obus les délogèrent en un instant : à six heures tout était fini.

Si l’on entendait dans la nuit, de loin en loin, quelques coups de canon, c’était pour empêcher les barricades que quelques habitants avaient cherché à établir avec des tonneaux.

Il y eut environ deux cents tués ou blessés du côté des sectionnaires, et presque autant du côté des conventionnels ; la plus grande partie de ceux-ci, aux portes de Saint-Roch.

Trois représentants, Fréron, Louvet et Sieyes montrèrent de la résolution.

La section des Quinze-Vingts, faubourg Saint-Antoine, est la seule qui ait fourni deux cent cinquante hommes à la Convention ; tant ses dernières oscillations politiques lui avaient indisposé toutes les classes ; toutefois, si les faubourgs ne se levèrent point en sa faveur, du moins ils n’agirent pas non plus contre elle. Il est faux qu’on ait fait tirer à poudre au commencement de l’action ; cela n’eût servi qu’à enhardir les sectionnaires et à compromettre les troupes ; mais il est vrai que le combat une fois engagé, le succès n’étant plus douteux, alors on ne tira plus qu’à poudre.


VIII. Le 14 vendémiaire. — Il existait encore des rassemblements de la section Lepelletier.

Le 14, au matin, des colonnes débouchèrent contre eux, par les boulevards, la rue de Richelieu et le Palais-Royal. Des canons avaient été placés aux principales avenues. Les sectionnaires furent promptement délogés, et le reste de la journée fut employé à parcourir la ville, à visiter les chefs-lieux des sections, à ramasser les armes et à lire des proclamations. Le soir tout était rentré dans l’ordre, et Paris se trouvait parfaitement tranquille.

Lorsque, après ce grand évènement, les officiers de l’armée de l’intérieur furent présentés en corps à la Convention, celle-ci, par acclamation, nomma Napoléon général en chef de cette armée, Barras ne pouvant cumuler plus longtemps le titre de représentant avec des fonctions militaires.

Le général Menou fut traduit à un conseil de guerre ; on voulait sa mort. Le général en chef le sauva en disant aux juges que si Menou méritait la mort, les trois représentants qui avaient dirigé les opérations et parlementé avec les sectionnaires la méritaient aussi ; que la Convention n’avait qu’à mettre en jugement les trois membres, et qu’alors on jugerait Menou. L’esprit de corps fut plus puissant que la voix des ennemis de Menou.