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– L’impératrice Marie-Louise se plaint qu’en quittant la France, M. de Talleyrand s’était réservé l’honneur de venir lui demander la restitution des diamants de l’État, et vérifier si elle s’était faite avec exactitude.

En 1814, lors des désastres de la France, le prince Eugène fut l’objet de beaucoup de séductions et d’un grand nombre de propositions fort brillantes : un général autrichien lui offrit la couronne d’Italie au nom des alliés, s’il voulait, se joindre à eux. Cette offre lui vint de plus haut encore et à diverses reprises. Déjà il avait été question de lui, sous l’Empereur, pour les trônes de Portugal, de Naples et de Pologne.

En 1815, des hommes importants dans la diplomatie européenne le sondèrent pour savoir si, dans le cas où Napoléon serait contraint d’abdiquer de nouveau, et le choix du peuple se tournant vers lui, il accepterait. Dans ces circonstances, comme dans tant d’autres, ce prince fut inébranlable dans une ligne de devoir et d’honneur qui le rend immortel : honneur et fidélité fut sa constante réponse, et la postérité en fera sa devise.

Lors de la distribution des États en 1814, l’empereur Alexandre, qui allait très souvent à la Malmaison chez l’impératrice Joséphine, voulait procurer à son fils la souveraineté de Gênes. Celle-ci le refusa, à l’instigation d’un des diplomates dirigeants qui la flattait faussement de quelque chose de mieux.

Au congrès de Vienne, le même empereur Alexandre, qui honorait le prince Eugène d’une bienveillance toute particulière, exigeait pour lui au moins trois cent mille sujets. Il lui témoignait alors une très vive amitié, et se promenait régulièrement chaque jour bras à bras avec lui. Le débarquement de Cannes vint mettre un terme, sinon au sentiment, du moins aux démonstrations et à l’intérêt politique de l’empereur de Russie. Il fut même question alors, de la part de l’Autriche, de se saisir de la personne d’Eugène, et de l’envoyer prisonnier dans une forteresse de Hongrie ; mais le roi de Bavière, son beau-père, courut avec indignation chez l’empereur d’Autriche, lui représenter qu’Eugène était venu à Vienne sous sa protection et sa garantie, et que sa confiance ne serait point trompée ; aussi Eugène demeura-t-il libre sur sa parole et celle du roi son beau-père.

– Alexandre, depuis la chute de Napoléon, a montré dans plusieurs circonstances particulières un éloignement vif et décidé contre lui. C’est Alexandre qui, en 1815, a été l’âme et le promoteur ardent de la seconde croisade contre Napoléon : il a tout dirigé avec la dernière chaleur, sem-