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cher ; l’objet n’en sera que plus curieux, il le fera voir et dira : C’est l’Empereur Napoléon qui l’a donné à mon père à Sainte-Hélène. »

Passant de là à l’examen d’un grand nécessaire, il parcourut des portraits de sa propre famille et des présents qui lui avaient été faits à lui-même : c’étaient les portraits de Madame, de la reine de Naples, des filles de Joseph, de ses frères, du roi de Rome, etc. ; un Auguste et une Livie des plus rares ; une continence de Scipion et une autre antique du plus grand prix donnée par le pape ; un Pierre le Grand sur boîte, une autre boîte avec un Charles-Quint, une autre encore avec un Turenne ; d’autres enfin, dont il se sert journellement, couvertes de médaillons rassemblés de César, d’Alexandre, de Sylla, de Mithridate, etc. Venaient ensuite quelques tabatières où était son portrait enrichi de diamants. Il en chercha alors tout à coup un sans diamants ; ne le trouvant pas, il appela son valet de chambre pour qu’on le lui donnât ; malheureusement ce portrait se trouvait encore à la ville avec le gros des effets : j’en fus fâché, je pouvais croire que j’y perdais quelque chose.

L’Empereur alors passa en revue plusieurs tabatières de Louis XVIII qui avaient été laissées sur sa table aux Tuileries, lors de son départ précipité. L’une présentait sur un fond noir, en pâte imitant l’ivoire, et dans une contexture bizarre, le portrait de Louis XVI, de la reine et de madame Élisabeth : ils formaient trois croissants adossés l’un à l’autre en forme de triangle équilatéral ; une quantité de chérubins fort serrés formaient la bordure extérieure. Une autre boîte représentait une chasse au lavis et croquée, et qui ne pouvait avoir d’autre mérite que la main qui l’avait faite, on la croyait de madame la duchesse d’Angoulême. Une troisième enfin présentait un portrait qui devait être, selon les apparences, celui de la comtesse de Provence. Ces trois objets étaient simples et même communs, et ne pouvaient avoir de précieux que leur historique.

En arrivant à Paris, le 20 mars au soir, l’Empereur trouva le cabinet du roi dans le même état où il avait été occupé ; tous les papiers demeuraient encore sur les tables. L’Empereur fit pousser ces tables dans les angles de l’appartement, et en fit apporter de nouvelles ; il voulut qu’on ne touchât à rien, se réservant d’examiner ces papiers dans ses moments perdus. Et comme l’Empereur a quitté lui-même la France sans rentrer aux Tuileries, le roi aura trouvé sa chambre et ses papiers à peu près comme il les avait laissés.

L’Empereur jeta les yeux sur quelques-uns de ces papiers. Il y trouva des lettres du roi à M. d’Avarai, à Madère, où il est mort : elles étaient de sa main, et lui avaient sans doute été renvoyées. Il y trouva aussi d’au-