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Alors l’armée se partagea entre Menou et Regnier ; ce ne fut plus qu’un champ d’intrigues ; la force et le courage des Français restèrent les mêmes ; mais l’emploi ou la direction qu’en fit le général ne ressemblèrent plus à rien.

Menou était tout à fait incapable. Les Anglais vinrent l’attaquer avec vingt mille hommes ; il avait des forces beaucoup plus nombreuses, et le moral des deux armées ne pouvait pas se comparer. Par un aveuglement inconcevable, Menou se hâta de disperser toutes ses troupes, dès qu’il apprit que les Anglais paraissaient ; ceux-ci se présentèrent en masse, et ne furent attaqués qu’en détail. Ici l’Empereur disait : « Comme la fortune est aveugle ! Avec des mesures inverses, les Anglais eussent été infailliblement détruits, et que de nouvelles chances pouvait amener un tel échec ! »

Leur débarquement, du reste, fut admirable, disait le grand maréchal ; en moins de cinq à six minutes ils présentèrent cinq mille cinq cents hommes en bataille, c’était un mouvement d’opéra ; ils en firent trois pareils. Douze cents hommes seuls s’opposèrent à ce débarquement, et causèrent beaucoup de dommage. À très peu de temps de là cette masse de treize à quatorze mille hommes fut intrépidement attaquée par le général Lanusse, qui n’en avait que trois mille, et qui, brûlant d’ambition,