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RACINE.

haute intelligence réservait une place au bel esprit. L’histoire de Racine présente le conflit de ces divers penchants. Leurs effets tantôt s’accordent et tantôt se combattent, jusqu’à ce que, après une production de chefs-d’œuvre exquis et puissants, au sein desquels la finesse piquante et quelque faux goût auront conservé leur place, l’amour de Dieu l’emporte définitivement.

Au mois d’octobre 1658, après trois ans de séjour, Racine, âgé de dix-neuf ans, quittait Port-Royal pour rejoindre son cousin Antoine Vilart au collège d’Harcourt et y faire à son tour sa philosophie. Ce collège était encore une maison amie de Port-Royal : il aurait abrité l’impression clandestine des Lettres provinciales. Peut-être, à ce moment, Racine songeait-il à se tourner vers le barreau. M. Le Maître l’y aurait poussé et lui aurait donné des leçons de diction, développant ainsi un talent que son élève mettra plus tard au service de Mlles du Parc et Champmeslé. Cette intention ne dura pas, car, sa logique terminée, nous trouvons le jeune homme désœuvré et cherchant sa voie.

Il est, semble-t-il, confié aux soins d’un de ses cousins Vitart, Nicolas, frère aîné d’Antoine, riche, marié et intendant du duc de Luynes. Il éprouve beaucoup d’amitié pour ce cousin, une amitié confiante et sans contrainte. Il loge à part et choisit librement ses compagnons. Le plus intime de ceux-ci, l’abbé Le Vasseur, n’a rien d’ecclésiastique dans le caractère, ni la conduite. Cet abbé est entêté de poésie légère et de galanterie. Il a toujours quelque amour en tête, et la correspondance de Racine avec