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LES SUJETS.

tandis que l’archéologie est chose morte. Pour l’histoire comme pour le reste, il prenait son point de départ dans les connaissances moyennes de ses contemporains. Lebrun et Coysevox faisaient de même en peinture et en sculpture. Continuant les habitudes du moyen âge et de la Renaissance, ils habillaient et logeaient les personnages de la religion et de l’histoire comme les spectacteurs auxquels ils les présentaient.

Le romantisme, en donnant une importance exagérée à la couleur locale, remplaçait une convention par une autre. Sans faire la part trop belle à la tragédie du xviie siècle et lui comparer, par exemple, le Caligula d’Alexandre Dumas père, lorsque Victor Hugo, le plus attentif aux questions de ce genre, prétend évoquer au vrai le xvii espagnol ou le xvie siècle italien, époques relativement voisines de nous, on sait quelles erreurs matérielles et morales il commet. On ne joue déjà plus Ruy-Blas et Lucrèce Borgia avec les costumes de la création. On ne joue pas davantage Racine avec les costumes portés par Floridor et Mlle Champmeslé, mais la réforme de Mlle Clairon et de Talma, en mettant une exactitude relative dans le costume, a prouvé surtout la vérité permanente de la tragédie racinienne.

Au lieu donc de connaissances archéologiques, Racine nous offre le sentiment de l’histoire, ce qui est plus difficile et de plus grand prix. Par Britannicus et Mithridate, il permet au spectateur de lire dans l’âme d’un empereur romain et d’un roi barbare. Aussi les grands hommes, qui ont le droit d’être exigeants lorsqu’un poète prétend leur