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ENFANCE ET JEUNESSE.

en effet un sanglier, ou la hure d’un sanglier, qui fût à la place de ce vilain rat. » Le poète profita de l’enregistrement de ses armoiries, en 1697, pour faire supprimer « le vilain rat ». Cette répugnance est un trait de caractère. En art. Racine choisit et épure ; il écarte ce qui est vulgaire et bas. Il faisait de même pour tout ce qui le touchait.

On ne choisit pas sa famille et on ne devrait pas choisir ses armoiries. Mais, sauf ce rat, la destinée favorisait Racine dans son origine, sa condition et son pays. Il appartenait à la classe dont le siècle allait voir l’élévation sociale. C’était une bonne place pour observer, et il lui suffira de se pousser un peu au-dessus d’elle pour prendre sa part d’expérience personnelle. Du jour où il aura fait ses premières preuves de talent, il profitera du changement qui se produit dans la condition des écrivains, jusque-là domestiques des grands et désormais traités avec égard par le roi. Il fera partie de la cour. Il sera le familier de tout ce que le royaume compte de plus éminent. Tournant en acquisition définitive et richesse foncière les résultats de l’observation et de l’expérience, il ne cessera de se développer.

Le coin de l’Île-de-France où Racine allait passer sa première jeunesse, offre un caractère de vigueur élégante. La Ferté-Milon s’élève en amphithéâtre, au bord de l’Ourcq, sur une colline dont la façade ruinée d’un superbe château, bâti à la fin du xive siècle par Louis d’Orléans, couronne le sommet. Une muraille flanquée de tours, dont une partie subsiste encore, entourait la cité proprement dite, laissant en dehors de l’enceinte, le long de la rivière, le