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CHAPITRE III

RUINE DE MARIVAUX DANS LA BANQUE DE LAW. — SON MARIAGE. — MARIVAUX MORALISTE ET ROMANCIER. — SES DÉMÊLÉS AVEC VOLTAIRE ET LE PARTI PHILOSOPHIQUE ; — AVEC LA CRITIQUE : — AVEC CRÉBILLON FILS.

L’absence d’amertume et la facilité de résignation dont Marivaux faisait preuve sembleront d’autant plus méritoires, si l’on songe qu’à l’époque où il refusait de croire aux cabales montées contre ses pièces, il n’avait plus pour vivre d’autres ressources que le produit de son travail. Jusqu’en 1722 il pouvait écrire à son heure et sans préoccupation de gain, car il était relativement riche ; son père lui avait laissé « une honnête fortune[1] », qui lui assurait l’indépendance. Très désintéressé, il se contentait d’en jouir, sans songer à l’augmenter, ce qui pourtant lui eût été facile, grâce aux relations que son origine lui créait parmi les gens de finance : malgré sa médiocre estime pour l’ensemble de la corporation, il était l’ami de quelques-uns, d’Helvétius notamment et de Lallemant de Bez[2]. Il avait décliné toute proposition

  1. Lesbros, p. 5 ; et aussi de La Place, Pièces intéressantes, t. II, p. 357.
  2. Lesbros, p. 37. On connaît Helvétius ; quant à Lallemant de Bez, son nom revient assez souvent dans les écrits du temps, notamment dans le Journal de Barbier. On verra ci-après que sa maison était une de celles que fréquentait Marivaux.