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pête de neige fait rage et que le vent siffle à travers les « bardeaux » j’ai souvent assisté à la prière du soir, en famille. Et quel est le peintre qui composera ce joli tableau : un prêtre, dans un traîneau, à la campagne, portant le Saint Sacrement dans la nuit, les lanternes éclairant la route blanche. De chaque côté et derrière, l’immense désert de la neige canadienne. Le traîneau est attelé d’un vigoureux cheval que le médecin de campagne conduit lui-même.

Écoutez cette conversation entendue dans un wagon de chemin de fer, au cours d’un voyage dans la Beauce. Mais oui dans la Beauce, au Canada ! Il y a ainsi dans tous les centres canadiens-français des noms bien évocateurs. Oh ! ces jolis noms canadiens : — Mont Laurier, Trois-Rivières, Grand-Mère, le lac Noir, La Rivière du Loup, l’Île d’Orléans, Saint-Henri, Notre-Dame des Neiges, etc… etc…

Toutes les fois que le conducteur crie le nom de ces petites gares on croit respirer un parfum de France.

Mais revenons à la conversation entendue dans le wagon : c’était dans le compartiment des fumeurs. Il y avait là, comme bien souvent, un ou deux commis-voyageurs, un docteur, un prêtre, un avocat, un commerçant, un ouvrier, un paysan, un maquignon. Tout le monde se connaissait : on savait qu’un tel est de tel village, qu’il était en deuil de sa mère,