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mais on apprit que la jeune fille n’avait ni une origine assez illustre, ni d’autre dot que son instruction romanesque et ses duettos, hypothèques ne suffisant pas à soutenir le train des personnes de son monde. Quant à la partie adverse, elle considéra que le jeune homme n’avait pas d’emploi, ne voulait pas donner une chiquenaude de sa noblesse, et lui tint ce langage : « — Caballerito, qu’êtes-vous venu chercher chez moi ? — Hélène, répondit mon neveu. — Pourquoi, caballerito ? — Pour l’épouser. — Mais vous n’avez ni emploi ni carrière. — Cela me regarde. — Vos parents ne consentiraient pas… — Si, monsieur, vous ne connaissez pas mes parents. — Fort bien ; ma fille sera à vous quand vous m’apporterez avec la preuve que vous pouvez la nourrir, l’autorisation de vos parents ; mais en attendant, si vous aimez Hélène autant que vous le dites, abstenez-vous de visites pour son bien même. — Je vous comprends. — Tant mieux, caballerito » ; et notre Rolland demeura immobile comme une statue, mais bien décidé à passer par-dessus tous les obstacles.

Notre plume, nous le regrettons, n’est ni assez adroite, ni assez hardie pour transporter sur le papier la scène qui eut lieu entre la demoiselle et sa maman ; mais nous en dirons le résultat : ce fut une défense expresse de sortir, de se montrer au balcon, de correspondre avec le jeune homme, tout ce à quoi la mauvaise répondit par quatre irrévérences, au sujet du libre arbitre et de la liberté qu’avait une fille de se choisir un mari ; les remontrances au sujet du manque de fortune de son préféré ne purent la persuader, tout était pour elle tyrannie des papas, jalousie qu’ils portaient à ses amours et à son bonheur, et elle conclut en disant que dans les mariages le principal était l’amour, que