Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 9, part. 3, J-K.djvu/133

Cette page n’a pas encore été corrigée

le piquant des détails et des observations le dispute à la couleur poétique du récit, etc. Et ces chapitres sont tour à tour vifs, alertes, émus, chaleureux, entraînants de verve et d’humour. On sent l’écrivain qui joue avec sa plume, qui la modère ou la lance au galop, au gré de son imagination et de sa fantaisie.

« Une chose à noter encore — et ce n’est pas la moins importante — c’est la haute moralité qui se dégage toujours de ces récits. On croit avoir lu un article expressément écrit pour plaire ou émouvoir, et, lorsqu’on a éprouvé toutes les sensations que fait naître un récit tantôt gai, spirituel, tantôt attendrissant ou élevé, on reste tout surpris de se trouver en présence d’une haute leçon admirablement déguisée ; sous l’empire du charme et de l’émotion, on croit tout d’abord que le livre scribitur ad narrandum, non ad probandum, et il se trouve que c’est justement le contraire : l’épigraphe a raison : Instruire, plaire et moraliser. Ce n’est certes pas là un mérite vulgaire, et tous ceux qui connaissent la difficulté de triompher de la banalité fatalement inhérente à ces sortes d’écrits penseront comme nous : faire du nouveau en ce genre et le faire bien, se creuser un sentier bordé de fleurs sur une route si aride et si battue n’appartient pas au premier venu. Pour l’oser, il a fallu à nos auteurs la triple cuirasse dont parle le poëte latin ; mais ils ont donné une fois de plus raison à cette devise des hommes intelligents et hardis : Audaces fortuna juvat. »

« Ces deux volumes, destinés aux jours de congés et aux heures de récréations, dit d’autre part M. Adrien Desprez, contiennent d’attrayants récits empruntés à l’histoire, à la légende, à la science, aux voyages ; enfances célèbres, traits remarquables de dévouement, fictions ingénieuses forment un ensemble qui captive l’imagination, éclaire à la fois le cœur et l’esprit. Le mérite vraiment littéraire de ces charmantes nouvelles les fera sortir du cadre trop restreint de l’école, et rechercher de tous ceux qui aiment le style simple et naturel, l’émotion franche et vraie. »


Jeudis de l’instituteur (LES), livre de lecture courante à l’usage des institutions de jeunes gens et des familles, par MM. Larousse et Alfred Deberle (Paris, 1872, 1 vol. in-18). V. l’article précédent.

JEUFFROY (R.-Vincent), graveur en pierres fines français, né à Rouen en 1784, mort à Saint-Germain-en-Laye en 1826. Il apprit son art sans maître, en imitant une pierre gravée que le hasard lui fit tomber entre les mains, parvint à se fabriquer lui-même un tour et des outils pour se livrer à ce genre de travail, et attira l’attention de quelques amateurs, qui lui fournirent les moyens d’aller se perfectionner à Rome. Là, il acquit une telle habileté qu’un marchand de cette ville, nommé Pichler, lui acheta ses ouvrages pour les revendre ensuite comme de véritables antiques. De retour en France, Jeuffroy alla se fixer à Paris, acquit en peu de temps une grande réputation, devint directeur de l’école de gravure sur pierres établie à l’Institution des sourds-muets et fut nommé, peu de temps après, membre de l’Académie des beaux-arts (1803). Jeuffroy a exécuté un grand nombre de travaux, parmi lesquels se trouvent de véritables chefs-d’œuvre du genre. Il excellait surtout à rendre les têtes de femmes. Nous citerons comme des morceaux hors ligne : les TVot’s] consuls de la République française, médaille de grand module, d’une exécution magistrale ; le Génie de Bacchus dans un char. Vainqueur buvant dans une coupe, deux petits bas-reliefs pleins de verve et d’élégance ; une Tête de Méduse, gravée en creux sur une améthyste, d’une grande puissance de modelé et d’un dessin excellent ; la Prison du Temple ; la Vénus de Médicis, deux médailles d’une brillante exécution ; une Bacchante ; une Tête de Jupiter ; une Tête de Régulas ; les portraits de Mirabeau, de Dancarville, de Muia d’Esprémesnil en Minerve, de Afwe Regnault de Saint-Jean-aV Angély, de.âfœe Cosway, du Dauphin, fils de Louis XVI, petits chefsd’œuvre d’une rare habileté d’exécution. On trouve à la Bibliothèque nationale des médailles et plusieurs camées de Jeuffroy.

Jeufoue (affaire), cause célèbre jugée en 1857. Le Ujuin 1857, versdixheureset demie du soir, un coup de feu retentissait dans le parc du château de Mme veuve de Jeufosse, près de Gaillon, dans le département de l’Eure, tin homme tombait mortellement blessé et expirait dans la poussière après une courte agonie. Cet homme se nommait Emile Guillot, propriétaire du domaine d’Anbevoie, non loin de Jeufosse. Celui qui venait de le frapper était Crépel, garde particulier de la famille de Jeufosse. La justice se transporta sur le lieu du meurtre. Le cadavre était encore étendu dans une avenue du parc ; il présentait dix petites blessures disséminées sur les reins et les cuisses, et qui paraissaient faites avec des chevrotines du n« 4 ou 5.

Un jeune domestique de Guillot, nommé Gros, raconta qu’ayant, comme cela lui était arrivé plusieurs fois, suivi son maître jusque sous les murs du parc de Jeufosse, dans lequel celui-ci avait l’habitude de s’introduire, il n’avait pas tardé k entendre une voix crier ; Halte là ! tu es mort ! puis un coup de feu suivi d’un cri et de ces paroles proférées par Guillot : ■ Ah 1 mon ami Gros, viens a mon

JEUN :

secours, je suis mort ! • Gros avait alors fait le tour des murs, était entré dans le parc par une porte qu’il avait ouverte, et avait trouvé son maître gisant dans la poussière. Guillot disait : • Ce sont des lâches ; je ne suis pourtant pas méchant ! C’est Crépel, le garde, qui m’a tué... Tu demanderas pardon pour moi à ma femme et à mes enfants... Tu diras adieu a mes amis ! ■

On arrêta Crépel, qui parut frappé de surprise : « Voilà ce qui arrive, s’écna-t-il ; on vous dit de tirer, de tuer s’il le faut ; puis on vous abandonne et il faut aller en prison ? » Mine de Jeufosse, de son côté, répondait au magistrat qui l’interrogeait : iJecroyais, monsieur, avoir lo droit de défendre ma propriété. ■ — Un des deux rtlsdeM™o de Jeufosse ajouta : « Si Crépel avait été assez lâche pour ne pas le faire, je l’aurais fait à sa place 1 > Cette attitude mettait immédiatement la justice sur la trace d’un mystère qui ne tarda pas à être éclairci.

La famille de Jeufosse et la famille Guillot avaient été pendant quelques années liées d’amitié ; puis ces relations avaient brusquement cessé au commencement de 1857. Quoique marié et père de deux enfants, Guillot, sorte de Lovelace campagnard, avait essayé de nouer une intrigue galante avec l’institutrice de MUe Blanche de Jeufosse ; ayant échoué, il se rejeta sur Blanche • qui, selon l’acte d’accusation, eut le tort de ne pas en avertir sa mère et de n’en faire confidence à personne... Elle devint rêveuse, distraite et agitée, elle d’ordinaire calme et réservée jusqu’à la froideur ; elle prenait souvent le soir un prétexte pour quitter la table et aller dans le parc. » Eclairée enfin par l’institutrice Laurence Thouzery, qui > ne dissimulait pas sa haine contre Guillot, » Mme de Jeufosse avait rompu ses relations avec lui.

À partir de ce moment, Guillot fit tout ce

?u’il put pour compromettre cette honorable

« mille. Il sonnait du cor dans le bois, près du parc de Jeufosse, simulant des appels, des signaux d’amour. Il s’introduisait presque toutes les nuits dans le parc, n’en faisant du reste mystère à personne. L’un des fils Jeufosse provoqua Guillot, mais cette provocation n eut pas de suite ; la lettre qui la contenait avait été interceptée par Mme Guillot et envoyée par elle à son beau-frère, qui avait parlé de prévenir la justice.

Sans tenir compte de cet avertissement et de plusieurs autres, le don Juan d’Aubevoie continua ses visites nocturnes. Une foisj il pénétra dans l’ancienne chambre de M. de Jeufosse et souilla de terre le portrait du chef de la famille. L’exaspération de Mme de Jeufosse devint telle qu’un jour, devant tous ses domestiques réunis, elle porta la main sur un fusil et s’écria : • N’y en aura-t-il pas un d’entre vous qui aura assez de cœur pour me débarrasser de cet homme ?« Elle s adressa plus particulièrement à Crépel, lui ordonna dé faire bonne garde, et, à plusieurs reprises, elle lui dit : • Tirez, n’ayez pas peur ; quand même vous tueriez, il ne peut rien vous arriver ; j’ai le droit de faire tirer dans ma pro- ’ priété. • Les deux fils donnèrent au garde le même ordre. C’est à la suite de ces faits que Guillot avait été trouvé frappé de mort.

Après une longue instruction, Crépel, Mme de Jeufosse et ses deux fils furent envoyés devant la cour d’assises de l’Eure, le premier comme auteur, les autres comme complices d’homicide volontaire avec préméditation et guet-apens. L’affaire fut évoquée le 14 décembre 1857. Admirablement défendus par Me Berryer, les quatre accusés obtinrent un verdict d’acquittement.

JEUMÉRANTEs. f, (jeu-mé-ran-te).Techn. Petite planche qui sert de patron pour tailler’

les jantes des roues. v JEUN (A) loc. adv. (a-jeun — du lat. jejunus, qui est à jeun). Se dit quand on n’a encore pris aucune nourriture de la journée : Être encore k jeun. Combien d’étudiants se sont endormis gaiement k jeun deux fois par semaine.’ (G. Sand.) ll’lui fallut à jeun retourner au logis, Honteux comme un renard qu’une poule aurait pris.

La Fontaine. Qu’un peuple est grand qui, pauvre, gai, modeste. Seul maître, après tant de sang et d’efforts, Chasse en riant des princes qu’il déteste, Et de l’État garde.à jeun les trésors !

BÉRANOEE.

— Fam. Se dit d’un ivrogne qui, par ha■ sard, n’est pas pris de boisson : Lorsque cet

homme est À jeun, oh peut lui faire entendre raison.

— Allus. blst. J’en appelle à Phillppo 4 jeun, Réponse faite au roi Philippe, père d’Alexandre. V. APPELER.

JEUNE adj. Ceu-ne — lat. juvenis, le même que l’allemand jung, russe ioûhi, persan adjuoan, sanscrit yavau. Selon Pictet, c’est à la racine yu, aider, protéger, défendre, qu’il faut rapporter le sanscrit yuvan pour yavan, ainsi que le prouve le comparatif yaviyas et le zend yava au nominatif. Ce mot a dû désigner, dans l’origine, le jeune homme, en tant que défenseur naturel de la famille ou du pays. C’est exactement le sens que les Romains donnaient au mot juvenes, et Tite-Live appelle ainsi les citoyens propres au service militaire, depuis vingt ans jusqu’à quarante. Le latin juvenis trouva également sa racine

JEUN

indigène dans juvare ; aider, secourir, qui correspond au sanscrit yu, yavay et au grec iaàmat ; et ainsi se justifie l’étymologie de Varnon, qui fait dériver juvenis de juvando, scilicet qui ad eam setaient pervenit ut juvare possit). Qui est peu avancé en âge : Un jeune enfant. Une jeune fille. Un jeune professeur. Un jeune poulain. Si je suis jeune, considère moins les aimées que les raisons. (Sophocle.) Jeunes ou vieilles, les femmes font bien de se cacher. (Mme Necker.)

Jeunes cœurs sont bien empêchés

A tenir leurs secrets cachés.

La Fontaine.

— Qui est né après un nutre, cadet : Martin jeune, marchand de vin. il Qui est moins ancien qu’un autre de même nom : Pline le Jeune. Uenys le Jeune.

— Qui ne date pas de loin, en parlant des choses : La médecine, si ancienne comme art, est irès-jEUNE comme science positive. (F. Pillon.) Bien des choses, et des choses excellentes dans l’ordre de l’esprit, sont jeunes dans le monde. (Renan.)

Ou despotisme natt la jeune liberté !

A. Baeipibu.

— Qui appartient à quelqu’un de jeune : Les premiers livres accordés à l’enfance ne devraient tendre qu’à fortifier sa jeune raison. (L. Figuier,)

Frère, ta langue est jeune et facile a. mentir.

A. db Musset.

Il Qui convient à la jeunesse : Cette couleur est trop jeune pour moi. Il Qui a les caractères, la vigueur, l’entrain de la jeunesse : On peut être jeune à quarante ans, et déjà vieux à vingt-cinq. (Laténn.) Il n’y a de bon, dans l’homme, que ses jeunes sentiments et ses vieilles pensées. (J. Joubert.) On ne naît pas jeune en France, mais on le devient. (Michelet.) Le cœur est toujours jeune, et peut toujours saigner,

V. Huoo.

Il Simple, naïf, crédule : Vous croyez cela ? que vous êtes jeune I il Jeune âge, Jeunes ans, Jeune saison, Enfance et jeunesse : La simplicitésiedàlapudeurduj&WEÂGE. (G. Sand.)

Jeune hçmme, Homme de dix-huit à vingt-cinq ans environ : Les premiers jours du printemps ont moins de grâce que ta vertu naissante d’un jeune homme. ("Vauven.) Lejeune homme, toujours bouillant dans son caprice, Est prompt à recevoir l’impression du vice.

Boileao. Un jeune homme est souvent indiscret, vain, léger ; Mois, quand le cœur est bon, tout peut se corriger.

Cresset.

H Pop. Avoir son petit jeune homme, Être un peu gris : Un indiuidu en blouse, qui semblait

AV01B SON PETIT JEUNB HOMME, fut expulsé

avec force, parce qu’il avait fait du bruit. (Gér. de Nerval.)

Jeune fille, Jeune personne, Fille nubile, mais peu avancée en âge.

Jeunes gens, Jeunes hommes et jeunes filles ; pluriel de jeune homme, plus usité que jeunes hommes : Les temps calmes veulent des vieillards, les révolutions veulent des jeunes gens. (Lainart.)

Il faut avec vigueur ranger les jeune» gens.

Molière.

Jeune-France, Jeunes gens ardemment épris des idées libérales ou d’idées nouvelles

JEUN

985

indomptés, pour ne pas être vaincus par tant de belles et bonnes grâces. (J. Janin.)

La Jeune ’Italie, Célèbre association fondée par Mazzini.

Dans le jeune temps de, Au temps de la jeunesse de : Dans notre jeune temps, les choses se passaient tout autrement.

— Fam. Avoir la barbe trop jeune, Être trop jeune pour se permettre certaines choses : Tu as la barde trop jkune pour t’attaquer à moi.

— Prov. Jeune procureur et vieil avocat, Un procureur doit être jeune et actif, un avocat vieux et expérimenté. Il Jeune chair, vieux poisson. Les animaux de boucherie, le gibier, la volaille doivent être mangés jeunes ; mais le poisson doit être mangé gros, et partant vieux.

— Législ. Jeunes détenus. Jeunes gens mineurs, mais âgés d’au moins seize ans, qui ont subi une condamnation et sont détenus dans des maisons spéciales.

— Théâtre. Jeune premier, jeune première, Acteur, actrice qui joue les rôles d’amoureux, de jeune fille distinguée.

— Eaux et for. Se dit des baliveaux de l’âge du taillis.

— Substantiv. Personne jeune : Les jeunes poussent les vieux.

Tu murmures, vieillard ! vois ces jeune» mourir.

Vois les marcher, vois les courir A des morts, il est vrai, glorieuses et belles, Mais sûres, cependant, et quelquefois cruelles.

La Fontaine.

— Féod. Officier subalterne d’un seigneur : Les jeunes d’un comte.

— Administr. Jeunes de langues, Jeunes gens entretenus aux frais du gouvernement, pour étudier les langues orientales, afin de pouvoir un jour servir d’interprètes.

— Zool. Animal non encore adulte : Le soin des jeunes occupe longtemps les femelles.

— Encycl. Théâtre. Jeunes premiers, jeunes premières. V. amoureux.

— Hist. Jeune-France. V. France (Jeune-).

Jeune Italie. V. Italie.

— Administr. Jeunes de langues. Les jeune* de langues sont nommés par le ministre des affaires étrangères. Ils ne peuvent être admis que de huit a douze ans, et on les choisit de préférence parmi les fils, petits-fils ou neveux des secrétaires interprètes.

L’institution des jeunes de langues est de date fort ancienne, à Réglementée, dit M. de Vallat, par les arrêts du conseil des 18 novembre 1SG9 et 31 octobre 1G70, elle fut modifiée car celui du 7 juin 1718. À cette époque, 1 État faisait simultanément les frais de l’éducation de dix jeunes Orientaux au Collège des jésuites à Paris, |et de douze enfants français aux couvents de Constantinople et de Smyrne. Ce système, qui pouvait avoir pour résultat d’engager l’État dans des dépenses faiti.s pour des enfants qui ne deviendraient jamais capables de le servir utilement dans les emplois qui leur étaient destinés, dut être bientôt abandonné. L’arrêt du conseil du 20 juillet 1721 statua qu’à l’avenir on élèverait dans le Collège des jésuites de Paris, au lieu de douze jeunes Orientaux, dix jeunes enfants français, de l’âge de huit ans, pris dans les familles françaises établies au Levant, ou faisant en France le commerce des Echelles, et que ces enfants, après avoir reçu à Paris une première éducation et suivi un cours d’arabe et de turc, seraient ensuite envoyés au Collège des capucins à Constantinople, pour se perfectionner dans l’étude des langues orientales, de manière & devenir aptes a l’emploi de drogmans. »

Le collège spécial de Constantinople a disparu, par suite des modifications nombreuses apportées à notre système consulaire nu Levant. Aujourd’hui, les jeunes de langues, en sortant de l’école du drogmanat, attachée au lycée Louis-le-Grand à Paris, sont ordinairement envoyés à Constantinople ou dans les consulats généraux d’Orient pour y terminer leur éducation. Ils portent le titre d’élèves drogmans.

— Allus. littér. Je «nie Jeune, Il eal vrnl, maie aux auaes bien nées, La valeur n’aUend

pu le nombre do» année*, Vers de Corneille, dans le Cid. V. £me.

Jemio Arlislci (THÉÂTRE DES), l’un des

plus charmants et des plus aimés du public, de tous ceux qui virent le jour pendant la période révolutionnaire. Il était situé au coin des rues de Lancry et de Bondy, et la salle qu’il occupait avait été construite pour le Théâtre-Français-Coinique-et-Lyrique, sur l’emplacement des anciennes Variétés-Amusantes. Un comédien du nom de Robillon, après la déconfiture du Théâtre-Comique-et Lyrique, était venu s’emparer de cette salle, qu’il rouvrit en 1795 sous le titre nouveuu de théâtre des Jeunes-Artistes, avec une troupe composée en grande partie d’élèves comédiens. L’exploitation de ce théâtre fut très-heureuse. Robillon céda son entreprise à un nommé Boirie, qui la conserva jusqu’à sa mort, arrivée au mois de mars 1801. Mats celui-ci, moins heureux que son prédécesseur, fut dépouillé par ses créanciers, qui vendirent le théâtre à Foignet. Celui-ci, musicion de talent, géra le théâtre en compagnie de son fils, compositeur ainsi que lui, et, do plus, comédien assez distingué.

Foignet connaissait très-bien les choses du théâtre. Il avait fait jouer une quinzaine d’opéras-comiques, et prenait une part fort importante à l’administration du théâtre Montansier, dont il était déjà l’un des cinq directeurs. Il donna une nouvelle et salutaire impulsion à l’entreprise dont il se chargeait, et celle-ci prospéra entre ses mains. Musicien distingué, il lança surtout son théâtre dans la voie musicale, et appela à lui, avec quelques artistes déjà connus, tels que Le Brun, Piccinni fils, Propiac, Solié père, nombre de jeunes compositeurs. C’est ainsi qu’il présenta successivement au public Morange, Lélie, Beauvarlet-Charpeatier, Tomeoni, Solié fils, ûubarrois, Lafont, Gautier, Lanusse, etc. Quant aux auteurs, ils s’appelaient Désaugiers, Patrat, Rougeinont, d’Orvigny, Guilbert de Pixérécourt, Cuvelier, Jacquelin, Brazier, Coupart, Servières, Corsanges, Hapdé, etc.

Certaines pièces firent courir tout Paris au théâtre des Jeunes-Artistes, entro autres deux opéras-féeries, le Chat botté et la Naissance d’Arlequin. La musique de ces deux pièces avait été écrite par Foignet fils, qui remplissait le rôle d’Arlequin avec un vrai talent. Pourtant, vers 1804 ou 1305, Foignet père, fatigué sans doute de diriger tout à la fois cet établissement et de coopérer d’une façon active à l’administration du théâtre Montansier, céda le premier à l’un de ses anciens propriétaires, Robillon. Ce dernier changea peu à peu les habitudes prises par Foignet ; il délaissa l’opéra-comique, réduisit considérablement les frais d’exploitation, "et s’en tint au draine et à la féerie. Le publie accepta ces modifications d’assez bonne grâce, et l’entreprise était dans un état prospère, lorsque la décret de 1807 vint faire brutalement disparaître le théâtre.

124