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site à ses enfants et fait un voyage à Paris, où il était curieux de voir les événements sur place. En 1801, le roi de Bavière voulant fonder à Munich une Académie des sciences, y appela Jacobi, qui était alors à peu près ruiné. Les événements politiques, son insouciance et l’indélicatesse d’autrui l’avaient amené à un état voisin de la misère. Il accepta donc avec empressement les propositions du roi de Bavière, et, en 1807, il fut nommé président de l’Académie des sciences de Munich. Le nouveau royaume de Bavière était alors le théâtre d’une lutte ardente entre les partisans des vieilles idées germaniques et les partisans des idées modernes accréditées dans l’ordre politique par la Révolution française. La vieillesse était venue pour Jacobi, et, fatigué des tiraillements auxquels il était contraint de prendre part, il ne tarda point à se démettre de ses fonctions académiques. Du reste, le roi de Bavière lui continua sa faveur et lui laissa son traitement. Il passa les dernières années de son existence laborieuse à revoir ses œuvres et s’éteignit tranquillement à Munich.

La vaste correspondance de Jacobi avec les hommes les plus remarquables de son temps jette un grand jour sur sa physionomie personnelle et sur ses doctrines. Il lui arriva de résumer tout son système philosophique dans quelques lignes d’une lettre : « La recherche de la vérité, écrit-il à Lavater, est la recherche de quelque chose de réel, qui n’est pas immédiatement présent à nos sens, mais que nous éprouvons en partie... Je me ris de ces philosophes qui se tourmentent à expliquer comment nous savons que quelque chose existe hors de nous. J’ouvre l’œil, j écoute, j’étends la main et je sens à l’instant le rapport du toi au moi et du moi au toi. Je vis par là même que je sens autre chose que moi ; toute chose que j’apprends à connaître ajoute au sentiment de ma propre existence. Et une vie que je viens à sentir hors de moi semblable à la mienne, quelle puissance nouvelle elle donne à ma vie ! Enfin, Dieu reconnu par moi porte au comble ce sentiment de ce que je suis. Dieu, s’il était seul, serait sans conscience, sans amour, sans puissance : aimer, c’est vivre réellement. »

« Il y a une grande différence, écrit-il dans une autre lettre à Claudius, entre la profondeur et la subtilité ou la pénétration, qui n’est profonde que sur les formes. Pythagore, Platon, Spinoza étaient autrement profonds qu’Aristote ou Hobbes : la subtilité désunit ; le sens profond unit. >

Une autre fois, il écrit à Lavater : « On court moins risque de se tromper en cherchant la valeur étymologique des mots. Je n’ai pas, quant à moi, d’autre manière de philosopher, et je crois pouvoir tout ramener à la grammaire. •

Et à Georges Forster : ■ Le grand secret de la philosophie spéculative est la magna scientia du P. Sanchez, quod nihit scitur. Lambert et Kant eux-mêmes ont reconnu que les philosophes n’en savent pas plus que les hommes ordinaires ; moi je prétends qu’ils en savent beaucoup moins et qu’ils ont en partage une ignorance acquise. » En 1791, il écrit à Lavater : ■ Dans sa partie mystique, le christianisme est pour moi la seule philosophie religieuse possible, mais j’ai d’autant moins la foi historique. » Il n’aimait pas que, pour porter les hommes à la vertu, on leur mît sous les yeux les jouissances du paradis ni les tourments de l’enfer. « Qu’importe, dit-il, pour la moralité des actions, que j’en attende la récompense sur l’heure, ou dans dix ans, ou dans de3 millions d’années ? Dans l’Eglise chrétienne, en présence du ciel ou de renfer, il n’y a plus de vertu proprement dite. La vertu qui ne repose que sur la foi en une autre vie est sans valeur aucune. Je suis un mystique, et le mysticisme n’est pas un système dogmatique, niais bien un état naturel de l’unie, lequel est partout et le même dans tous les siècles. »

Toute la philosophie de Jacobi se résume assez bien dans le passage suivant, écrit en 1803 : « J’ui toujours cherché la vérité de toutes mes facultés, non pour m’en parer, comme de quelque chose que j’eusse découvert ou produit : j’aspirais à une vérité qui éclairât la nuit dont j étais environné, et qui m’apportât la lumière dont j’avais en moi la promesse et le pressentiment. C’est la religion qui fait l’homme ; elle a toujours été l’objet de raa philosophie. Je m’appuie sur un sentiment invincible, irrécusable, qui est le fondement de toute science et de toute religion. Ce sentiment m’apprend que j’ai un organe pour les choses intelligibles, spirituelles, et cet organe, je l’appelle raison. Ma philosophie demande qui est Dieu, et non ce qu’il est. La liberté de l’homme et la Providence sont si peu incompatibles, que la conviction de Dieu est en raison de celle de la personnalité. Dieu me paraît plus sublime comme créateur de personnes comme Socrate ou Fénelon, que comme auteur du mécanisme céleste. Je crois à la Providence, parce que je crois à la raison et à la liberté. La science spéculative, au lieu de dissiper notre ignorance et nos erreurs, souvent y ajoute une confusion nouvelle. Elle s’égale à Dieu : elle prétend créer son objet et la vérité. Ouvrage de la réflexion, elle rejette tout savoir primitif. Les Arabes, en disant qu’Aristote avait été une coupe qui puisait partout sans pouvoir épuiser l’univers, ont parfaitement ca JACO

ractérisé cette science de réflexion. C’est contre elle, et non contre la philosophie véritable, que sont dirigées mes objections. Ma philosophie part du sentiment et de l’instruction. Il n’y a pas de voie spéculative pour s’élever à Dieu, et la spéculation peut servir uniquement à prouver qu’elle est vide sans les révélations du sentiment, et à les confirmer par là même, mais non à les fonder. A travers les ténèbres qui nous environnent, la raison armée de la foi entrevoit la vérité, ainsi que l’œil armé du télescope reconnaît dans les nébulosités de la voie lactée une armée innombrable d’étoiles. Cette foi est la lumière primitive de la raison, le principe du vrai rationalisme. Sans elle toute science est creuse et vide. La vraie science est celle de l’esprit qui rend témoignage de lui-même et de Dieu... L’objet de mes recherches a été constamment la vérité native, bien supérieure à la vérité scientifique. C’est elle que je n’ai cessé de défendre contre les systèmes changeants du siècle. •

Les publications les plus importantes de Jacobi sont : Lettres sur la philosophie de Spinoza (Leipzig, 1785), avec un Supplément consacré à la querelle de Jacobi avec Mendelssohn ; David Hume sur la foi ou Idéalisme et réalisme (Leipzig, 1787) ; AUwill, roman (1792) ; Woldemar, roman (1792)  ; Des choses divines (Leipzig, 1811), ouvrage dirigé contre la philosophie de Schelling. Parmi ses œuvres moins remarquables, on distingue : Un mot de Lessing (1782), petit traité de politique ; Épître à Fiente (1799) ; Entreprise du criticisme de rendre la raison raisonnable (1801). On cite encore : Quelques considérations sur la fraude pieuse (1788) ; les Epanchements d’un penseur solitaire (1793). M. Roth a publié de nombreux extraits de sa correspondance (Leipzig, 1825-1827, 2 vol. in-8°).

JACOBI (Morin-Hermann), physicien allemand, inventeur de la galvanoplastie, né à Potsdam vers 1790. Il se rendit en Russie, vers 1818, avec des lettres de recommandation de M. de Humboldt, s’adonna à des recherches de physique, et établit, en 1830, un télégraphe électrique entre le palais d’hiver, à Saint-Pétersbourg, et le ministère du comte Kleinmichl. Chargé, en 1832, d’établir un autre télégraphe entre le palais d’hiver et le palais d’été de Tsarskoô - Selo, il fut amené, en plaçant sous terre des fils conducteurs dans des tubes de verre, à découvrir ce fait important, qu’on peut à volonté former le courant avec la terre, et éviter, par suite, les doubles fils dans la construction des télégraphes électriques. En 1834, M. Jacobi fut nommé professeur à Dorpat. En 1837, ayant remarqué que le cuivre déposé par le courant galvanique sur des lames de platine reproduisait fidèlement les plus petites irrégularités de leur surface, essaya de reproduire ainsi des médailles et d’autres objets analogues. C’est ainsi qu’il fit sa belle découverte de la galvanoplastie, découverte que cette année même Spencer faisait à Londres. L’empereur de Russie le nomma alors conseiller de cour, et l’Académie des sciences de Saint-Pétersbourg l’admit au nombre de ses membres. Vers la même époque, il fut chargé, sur son initiative, de former un régiment modèle de sapeurs galvaniques, qu’il exerça au maniement de l’électricité et dont il devint capitaine. On a de M. Jacobi de nombreux mémoires, insérés, de 1834 à 1857, dans le recueil de l’Académie de Saint-Pétersbourg, et parmi lesquels nous citerons : Application de Vélectro-magnétisme ; Sur les phénomènes d’induction dans la pile voltaïque ; Sur tes lois des aimants électriques ; Rapports circonstanciés sur les travaux d’application du galvanisme à la galvanoplastie, à l’inflammation de la poudre à de grandes distances, etc.

JACODl (Charles-Gustave-Jacob), le plus grand géomètre du xixc siècle, l’émule d’Abel, le successeur d’Euler et de Lagrange, né à Potsdam le 10 décembre 1804, mort à Berlin le 18 février 1851. Son père était négociant et s’était acquis une certaine aisance. Jacobi reçut de son oncle maternel, M. Lehmann, les premières leçons sur les langues et les mathématiques, et fit, sous sa direction, des progrès tellement rapides, qu’avant sa douzième année il fut reçu dans la seconde classe du gymnase de Potsdam, d’où il passa six mois après dans la première. Il resta encore quatre années dans cette institution, ne pouvant entrer a l’université avant d’avoir accompli sa seizième année ; mais déjà il osait aborder les questions les plus difficiles ; ainsi, il donna la mesure de ce qu’il devait être plus tard, en apportant quelques réductions à la solution du problème de l’équation du cinquième degré, qui, à la vérité, ne pouvait être traité complètement par la méthode algébrique, la seule qu’il pût avoir en vue.

À l’université de Berlin, Jacobi partagea d’abord son temps entre les études philosophiques, philologiques et mathématiques ; mais il prit bientôt exclusivement parti pour ces dernières.

« Après avoir quelque temps étudié la philologie assez sérieusement pour réussir à mesurer, au moins du regard, les sulendeurs de la vie de la Grèce antique, il m en coûte, écrivait-il à son oncle, de renoncer à en poursuivre l’étude. Mais l’édifice colossal elevô par les travaux des Euler, des Lagrange, des Laplace exige, de celui qui veut en approfondir la nature intime et ne pas se borner à

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en considérer la surface, une puissance et des efforts prodigieux de réflexion. Un désir violent pousse aie dominer, pour n’avoir plus à craindre, à chaque instant, d’en être écrasé ; désir qui ne connaît ni trêve ni repos, jusqu’à ce qu’arrivé au faîte on plane du regard sur tout l’ouvrage. C’est alors seulement que l’on peut espérer contribuer à l’agrandissement de cet ensemble immense. ■

Aussitôt pourvu du grade de docteur, lacobi ouvrit, à vingt et un ans, un cours sur la théorie des surfaces courbes et des courbes à double courbure. Les succès qu’il y obtint déterminèrent le gouvernement à lui offrir, à Kœnigsberg, la chaire de mathématiques qui venait de vaquer. Jacobi lia, dans cette ville, une étroite amitié avec l’illustre astronome Bessel, qui, par son étonnante activité, exerça la plus heureuse influence sur son jeune collègue.

Crelle venait alors de fonder son célèbre journal. Ce fut une circonstance heureuse pour Jacobi, qui, dès son entrée dans la carrière, vit donner à ses travaux une immense publicité. Il est resté, jusqu’à sa mort, fidèle a ce recueil, qu’il a le plus contribué à enrichir.

Ses premiers mémoires le montrent déjà géomètre consommé : ils se rapportent à la méthode de Gauss pour le calcul approximatif des intégrales, a la méthode de Pfaff pour l’intégration des équations aux différences partielles, aux résidus cubiques, etc. Mais il ne tarda pas à aborder la grande théorie des fonctions elliptiques, qui devait lui mériter tant de gloire, et sur laquelle il devait jeter tant de lumière.

Ses débuts dans cette carrière, parcourue déjà si glorieusement par Legendre, jie lui laissaient pas d’abord grand espoir de mieux faire que notre illustre compatriote. Pendant qu’il étudiait les Exercices, il dit à un de ses amis qui l’était venu voir : «Décidément, je joue de malheur avec ce livre ; toutes les fois que j’ai étudié un ouvrage important, il nVa toujours suggéré quelques idées neuves et j’y ai toujours gagné quelque chose. Cette fois, ma lecture me laisse les mains complètement vides et ne m’a pas inspiré la moindre idée. • Mais les idées neuves allaient bientôt se présenter en foule et jeter un éclat inattendu sur cette belle théorie que Legendre avait, durant quarante années, cultivée absolument seul.

Jacobi débuta par introduire dans la nouvelle théorie les deux idées qui devaient contribuer le plus à ses rapides progrès. Il sentit d’abord la nécessité de ne plus se borner, comme l’avait fait Legendre, a étudier exclusivement les valeurs de l’intégrale correspondant à des valeurs réelles de la variable ; il laissa prendre indifféremment à cette variable toutes les valeurs réelles ou imaginaires possibles. C’était le seul moyen d’établir la continuité, c’est-à-dire de relier entre elles les diverses phases que présente le phénomène dans les limites de la réalité. En second lieu, renversant la question que s’était posée Legendre, au lieu de considérer l’intégrale comme fonction de sa limite supérieure, ce fut au contraire la limite qu’il considéra comme une fonction de l’intégrale, devenue la variable indépendante. C’était prendréla marche analogue à celle qui avait été suivie dès l’origine dans l’étude des fonctions circulaires. À la vérité, Abel l’avait précédé de quelques mois dans l’invention de ces deux idées fondamentales, mais ils étaient jusque-là restés étrangers l’un à l’autre.

C est à l’introduction de ces deux points de vue nouveaux qu’Abel et Jacobi durent en même temps de reconnaître la plus importante propriété des nouvelles fonctions, leur double périodicité. La considération simultanée des valeurs réelles et imaginaires de la variable et de la fonction était évidemment le prolégomène le plus indispensable de cette découverte ; quant au renversement de la question elle - même, il a été prouvé depuis que si, à d’autres points de vue, il a des avantages considérables, en ce qu’il conduit à substituer l’étude de fonctions bien déterminées, c’est-à-dire n’ayant qu’une seule valeur, pour chaque valeur de la variable, à celle de fonctions présentant, au contraire, une double indétermination, il ne fournissait pas, toutefois, le moyen le plus simple ni le plus direct de reconnaître la double périodicité. L’avantage capital que présente la méthode suivie aujourd’hui dans l’étude des fonctions elliptiques tient bien plus réellement à ce fait, que le développement en séries des fonctions déterminées ne présente plus les difficultéspresque inextricables qu’offre, au contraire, celui des fonctions multiples.

Quoi qu’il en soit, la découverte de la double périodicité des fonctions elliptiques avait fourni à Abel une interprétation lumineuse des différentes racines des équations auxquelles conduit le problème de la division de lintégrale, interprétation en tout analogue à celle qu’avait donnée Viète des racines des équations trigonoinétriques du problème correspondant ; et cette première découverte

l’avait bientôt conduit, en supposant le multiplicateur infini, à de remarquables développements des fonctions étudiées, en séries infinies.

Jacobi, de son côté, prenait alors corps à corps le problème de la transformation des fonctions elliptiques, et, rapprochant ce pro JAÇO

blême de celui de leur multiplication, qu’il y fit rentrer, il fut conduit à cette conjecture, qu’il vérifia bientôt, que des fonctions rationnelles d’un degré quelconque devaient être propres à transformer une intégrale elliptique en une autre de même forme. Il reconnut de la sorte que la multiplication peut toujours s’effectuer par la combinaison de deux transformations. Peu de temps après, reprenant la solution donnée par Abel du problème de la division, il y apportait un perfectionnement considérable et donnait les expressions définftivos des racines pour un degré quelconque. Il avait espéré exciter l’admiration d’Abel, à qui il rendait lui-même pleine justice : Abel venait de mourir à vingt-sept ans.

C’est alors que l’Académie des sciences de Paris, bien qu’elle n’eût pas ouvert de concours sur la théorie des fonctions elliptiques, décerna aux travaux d’Abel et de Jacobi un grand prix, qu’elle partagea entre Jacobi et les héritiers d’Abel.

Les travaux ultérieurs de Jacobi sur les transcendantes elliptiques dérivent d’une autre idée neuve, celle d’introduire directement, comme de nouvelles fonctions, les produits infinis qui avaient servi à Abel à exprimer les fonctions primitives. C’est ainsi qu’il arriva à exprimer toutes les fonctions elliptiques au moyen de cette fonction, à laquelle les géomètres devraient bien, par reconnaissance, dit M. Lejeune-Dirichlet, attacher le nom de Jacobi.

Le plus beau travail d’Abel est celui qui, embrassant en même temps les intégrales de toutes les fonctions algébriques, en révèle la propriété fondamentale. Jacobi considérait le théorème d’Abel, «qui, sous une forme simple et sans appareil de calcul, énonce une des idées mathématiques les plus profondes et les plus étendues, comme la plus grande découverte du siècle, bien qu’il restât encore beaucoup à faire pour en comprendre toute la portée. ■ Il continua lui-même à avancer singulièrement l’intelligence de ce beau théorème.

Nous ne pouvons nous étendre ici sur une multitude de recherches spéciales de Jacobi sur différentes parties du calcul intégral, la théorie des nombres, etc. Nous nous bornerons à mentionner son mémoire sur l’attraction des ellipsoïdes, où il (..■’•cédait Poisson dans la découverte d’un imporumt théorème ; un autre mémoire où il établit, pour la première fois, cette vérité soupçonnée par Lagrange, que l’ellipsoïde à axes inégaux peut satisfaire à la condition d’équilibre dune masse fluide animée d’un mouvement de rotation ; les travaux de mécanique, qui le conduisirent à l’introduction de la méthode dus coordonnées elliptiques ; ses nouvelles recherches sur le calcul des variations, où il donne le moyen de distinguer les cas de maximum de ceux de minimum ; enfin, d’autres mémoires, en nombre considérable, sur la transformation des fonctions hoinogène3 du second degré, sur le retour des suites, sur la théorie des déterminants, etc.

«On m’a souvent accusé d’orgueil, disait Jacobi ; mais l’immense disproportion que l’on découvre, en les mesurant, entre le inonde extérieur et le monde qu’on sent en soi ^empêche toute estime exagérée de soi-raérae, lorsqu’on a devant les yeux la carrière sans terme et sa propre force bornée. »

Lorsque parurent ses recherches sur les fonctions elliptiques, Jacobi n’était encore que professeur privé. Il fut nommé bientôt après professeur extraordinaire, puis professeur ordinaire. Il fit alors son premier grand voyage : il visita Gauss à Gœttingue, pui3 vint à Paris, où il vécut deux mois dans l’intimité avec Legendre, Fourrier, Poisson et d’autres géomètres. Le gouvernement prussien fit royalement, en 1843, les frais d’un second voyage de Jacobi en Angleterre, où il devait, avec Bessel, représenter l’Allemagne dans un congrès scientifique. À son retour, les symptômes de la maladie qui devait terminer sesjours se manifestèrent d’une façon trop certaine. Jacobi avait, peu auparavant, perdu toute la fortune que lui avait laissée son père ; le roi, sur la proposition de Humboldt, nt les frais de son voyage à Rome, dont le climat était devenu nécessaire à sa santé, et lui fournit les moyens d’y subsister honorablement.

Il ne passa qu’un hiver à Rome. À son retour, il fut appelé à Berlin, dont le climat est plus doux que celui de Kœnigsberg, et y déploya encore pendant six années une dévorante activité. Mais son état était devenu incurable ; une maladie accidentelle, la petite vérole, étant venue le compliquer, il succomba en quelques jours.

Plus heureux qu’Abel, il ne lui avait pourtant été réservé qu’un quart de sièele pour accomplir de si grands efforts. Il a laissé un grand nombre de travaux qui paraissent presque achevés, mais auxquels il eût sans doute ajouté encore beaucoup s’il lui avait été donné de les publier lui - même, car il ne les considérait que comme des ébauches.

JACOBI-KLAEST (baron DE), diplomate prussien, mort à Dresde en 1817. Envoyé de la Prusse à Vienne, en 1791, il se trouvait en cette même qualité à Rastadt lorsque les ministres plénipotentiaires de la France furent lâchement assassinés par les hussards autrichiens (1799). Jacobi lit tous ses efforts pour