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çons des vieux chefs-d’œuvre, et il a si bien communiqué à ses contemporains sa foi et son ardeur que ses doctrines furent une sorte de religion. C’est de lui que procèdent, de près ou de loin, tous ceux qui chez nous se sont fait un nom dans les lettres depuis 1830, même ceux qui l’ont renié pour maître. Certes, c’est là un des plus beaux rôles qu’une intelligence humaine ait jamais joués. Comme homme politique, son rôle a moins d’unité ; Victor Hugo a flotté au gré des événement » et des circonstances. La foi de ses dernières années l’a rattaché invinciblement au parti radical et lui a suscité de violents adversaires ; mais même dans ce que ceux-ci considèrent comme ses plus grands écarts, c’est-à-dire dans ses prédications socialistes et dans ses sympathies pour la Commune de 1871, il est juste de voir tout au plus l’exagération des sentiments généreux dont il a toujours été l’apôtre.

Hugo (VICTOR) raconté par un témoin de sa vie (1863, 2 vol. in— 8°). Le témoin qui a voulu initier le public à la vie intime du célèbre poëte, c’est Mme Victor Hugo elle-même, morte à Bruxelles en 1868. Cet ouvrage est un simple récit, une biographie écrite d’un style simple, naturel, clair, sans prétention. Son historiographe prend le poète au berceau et nous le fait suivre pas à pas dans la vie, à travers toutes les joies, tous les chagrins et tous les deuils domestiques, toutes les luttes, toutes les contrariétés, tous les déboires et aussi tous les succès littéraires, jusqu’à son élection à l’Académie en 1841.

La partie la plus neuve et la plus intéressante de ce livre, au point de vue de l’histoire des lettres, c’est celle qui raconte l’existence littéraire du poète et retrace minutieusement les diverses circonstances de temps, de lieux, de personnes, de dispositions morales auxquelles se rattachent les différentes productions de l’écrivain, et souvent même l’idée de ces productions. Ainsi, d’après le récit de Mme Hugo, c’est au pied de l’échafaud de Louvel, l’assassin du duc de Berry, que l’écrivain conçut, en 1820, l’idée du Dernier jour d’un condamné. Hernani naquit du dépit qu’inspira à l’orateur le veto opposé par Charles X à la représentation de Marion Delorme, à cause du rôle de Louis XIII. On ne lit pas non plus sans un vif intérêt les pages dans lesquelles l’auteur rappelle les mille tracasseries, les déboires, les cabales, les impertinences même auxquels Victor Hugo fut en butte, non-seulement lors de ses débuts littéraires, mais encore lorsqu’il produisit d’incontestables chefs-d’œuvre.

On ne s’appelle pas Victor Hugo sans s’être trouvé en rapports, soit amicaux, soit hostiles, avec les principales sommités littéraires et artistiques de son temps. Dans le cours du récit, nous rencontrons quelques-unes de ces figures, chacune avec son caractère particulier. Chateaubriand, Lamartine, Béranger, Lamennais, Sainte-Beuve, Gustave Planche et la bonne face épanouie d’Alexandre Dumas défilent tour à tour sous les yeux du lecteur. Leurs portraits à la plume sont un des charmes de ce livre simple et vrai, dont la publication a été interrompue par la mort de Mme Hugo. Le reproche le plus sérieux qu’on puisse adresser à l’auteur de ce livre, c’est d’avoir trop complaisamment imprimé les vers d’enfance de Victor Hugo, dont la gloire n’avait rien à gagner à cette exhibition.


HUGO (Charles-Victor), littérateur et publiciste, fils aîné du précédent, né à Paris en 1826, mort à Bordeaux, au mois de mars 1871. Il fit de brillantes études au lycée Charlemagne, et obtint des succès au concours général. En 1848, Lamartine l’attacha au ministère des affaires étrangères et le prit comme secrétaire. Quelque temps après, Victor Hugo ayant fondé, avec Meurice et Vacquerie, le journal l’Événement, le jeune Charles en devint un des plus actifs collaborateurs, et attira particulièrement sur lui l’attention publique par un article sur la peine de mort qui le fit condamner à deux mois de prison, Dans ce procès, il eut pour défenseur son père, qui prononça un plaidoyer resté célèbre. À cette époque, en même temps que Charles Hugo, les autres rédacteurs de l’Événement, Paul Meurice, Auguste Vacquerie et François-Victor Hugo, étaient emprisonnés. C’est à ces prisonniers que Victor Hugo adressa une pièce de vers, insérée dans les Châtiments:

Mes fils, soyez contents ; l’honneur est où vous êtes.

…………

Ils vous ont condamnés ; que l’avenir les juge !
Toi, pour avoir crié : « La France est le refuge
Des vaincus, des proscrits ! » Je t’approuve, mon fils.
Toi, pour avoir, devant la hache qui s’obstine,

Insulté la guillotine,
Et vengé le crucifix !

Après le coup d’État de 1851, Charles Hugo voulut partager l’exil de son père. Il quitta la France, habita tantôt Jersey, tantôt la Belgique, et s’occupa à la fois de travaux littéraires et de photographie. En 1869, il fut, avec Paul Meurice et Vacquerie, un des fondateurs du Rappel, où il fit à l’Empire une guerre sans relâche, et dont il était encore un des plus actifs collaborateurs lorsqu’il mourut subitement à Bordeaux d’une congestion cérébrale. Son corps, transporté à Paris, fut conduit au Père-Lachaise le jour même de la révolution du 18 mars, Charles Hugo était un écrivain de talent. Il avait une imagination ardente et vive. Dans ses écrits littéraires, son style est souvent maniéré et précieux. Comme journaliste, il avait de la verve et du trait. On lui doit un certain nombre d’ouvrages : le Cochon de saint Antoine (1857) ; la Bohême dorée (1859) ; la Chaise de paille (1859) ; une Famille tragique (1860) ; une comédie en un-acte : Je vous aime (1861). Lorsque Victor Hugo publia les Misérables, M. Charles Hugo tira de ce roman un drame qui fut représenté à Bruxelles, mais qui n’obtint que très-peu de succès.

HUGO (François-Victor), littérateur, frère du précédent, né à Paris en 1828. Comme son frère Charles, il fit avec succès ses études au lycée Charlemagne, collabora, de 1848 jusqu’au coup d’État, au journal l’Événement, où il traita principalement les questions relatives à la politique étrangère, et fut condamné, en 1851, à la prison pour délit de presse.

M. François Hugo quitta la France, avec son père, après le 2 décembre 1851. Il employa ses années d’exil à étudier à fond la littérature anglaise et fut, en 1869, un des rédacteurs fondateurs du journal le Rappel, où ses articles lui valurent, à la fin de l’Empire, plusieurs condamnations. Plus froid, mais plus instruit que ne l’était son frère, il écrit d’un style plus ferme et plus châtié. Comme journaliste, il aime, à propos des événements contemporains, à chercher des leçons dans le passé et à s’appuyer sur l’histoire, surtout sur celle de la Révolution française. On lui doit : l’Île de Jersey, ses monuments, son histoire ou la Normandie inconnue (1857, in-8°); les Sonnets de Shakspeare, traduits pour la première fois, avec une introduction (1857, in-18), et aussi la traduction des Œuvres complètes de Shakspeare (1860-64, 13 vol. in-8°), avec des études sur les œuvres et un classement nouveau. Dans cette traduction, d’une remarquable fidélité, et dans les études qui l’accompagnent, M. François Hugo a fait preuve d’un esprit critique plein de pénétration, et d’une connaissance approfondie de l’histoire et de la littérature anglaise du temps d’Élisabeth.

HUGOLÀTRE s. m. (u-go-lâ-tre— de Hugo, et de latrie). Partisan outré des opinions littéraires de Victor Hugo ; admirateur outré de cet écrivain.

— Adjectiv. : M. Carré fut jadis un romantique à tous crins, hugolâtre et racinophobe. (Th. Gaut.)

HUGON s. m. (u-gon ; h asp. — du germanique : ancien haut allemand hugu, hugi, intelligence, anglo-saxon hyge, scandinave hugr, gothique hugs, d’où hugjan, penser, and-hugjan, révéler, af-hugjan, aveugler, tromper, ga-hugs, pensée. Pictet soupçonne une affinité entre ces formes et les noms germaniques de l’œil : gothique augô, anglo-saxon eage, scandinave et ancien allemand auga, etc. Le nom propre Hugon, de hugu, intelligence, signifiait proprement homme d’esprit, homme intelligent). Superst. Sorte de fantôme qui, au dire des habitants de Tours, parcourait, pendant la nuit, la campagne et les remparts, maltraitant tous ceux qu’il rencontrait. || On l’appelait souvent le roi Hugon ou le roi Huguet.

HUGON (Herman), érudit et jésuite belge. V. Hugo. HUGONET ou HUGON (Guillaume), chancelier du duché de Bourgogne, exécuté à Gand en 1477. Il prit une part des plus actives aux affaires de son temps, accompagna à Trêves Charles le Téméraire, qui eut dans cette ville une entrevue solennelle avec l’empereur Frédéric, et contribua puissamment à amener la paix entre le duc de Bourgogne et Louis XI (1474). Ayant livré au roi de France le connétable de Saint-Pol, réfugié dans les Pays-Bas, Hugonet excita contre lui la haine du fils du proscrit (1476), qui saisit la première occasion de se venger. Ce tut, en effet, le comte de Saint-Pol qui excita contre Hugonet le peuple de Gand, lorsqu’on apprit que le chancelier avait consenti a remettre l’Artois entre les mains de Louis XI, à la condition quo ce monarque donnerait des secours à Marie de Bourgogne contre les Gantois. Après la bataille de Nancy, Hugonet tomba entre les mains de ce3 derniers, et fut mis à mort malgré tous les efforts faits par la princesse Marie pour le sauver.

HUGONIACÉ, ÉE adj. (u-go-ni-a-sé ; Aasp.

— rad. hugonie). Bot. Qui ressemble ou qui se rapporte au genre hugonie.

— s. f. pi. Famille de plantes dicotylédones, composée du seul genre hugonie : Les hugoniacées son/ des arbrisseaux de l’Inde. (C. d’Orbigny.)

— Encycl. Les hugoniacées sont des arbrisseaux à feuilles alternes, presque opposées au voisinage des fleurs, ovales, entières ou un peu dentées, coriaces, lisses en dessus, tomenteuses en dessous, à stipules caduques. Les fleurs, solitaires à l’aisselle des feuilles, ont un calice à cinq sépales persistants ; une corolle à cinq pétales oblongs ; dix étamines hypogynes, à anthères introrses ; un ovaire arrondi, à cinq loges, surmonté de cinq styles filiformes distincts. Le fruit est une baie charnue, divisée en cinq coques à une ou deux loges, renfermant chacune une ou deux graines. Cette famille ne comprend que le genre hugonie, qui a l’Inde pour patrie.

HUGONIE s, f, (u-go-nt ; h asp, — de # «  HUGU

gon, méd. allem.). Bot. Genre d’arbrisseaux, type de la famille des hugoniacées, comprenant plusieurs espèces, qui croissent dans l’Inde.

— Encycl. Les hugonies sont des arbrisseaux à feuilles alternes, à rameaux souvent munis de deux vrilles ligneuses, recourbées en forme de corne ; les fleurs simulent, par leur réunion, des corymbes axillaires ou terminaux ; le fruit est charnu et renferme un noyau strié. Ces arbrisseaux croissent dans l’Inde ; leur racine et leur écorce ont une odeur qui rappelle celle de la violette ou do l’iris de Florence ; elles sont réputées, dans la médecine du pays, diurétiques et sudorifiques, On les emploie beaucoup contre la morsure des serpents, les poisons, contre les fièvres intermittentes et d’autres maladies. Elles sont inusitées en Europe.

HUGOU DE BASSVILLE, littérateur et diplomate français. V. Bassvillk.

HUGUENIN (Sulpice), révolutionnaire français, né en Lorraine vers 1750, mort vers 1803. Il avait été successivement-avocat à Nancy, cavalier dans un régiment de carabiniers et commis de l’octroi de Paris, lorsque éclata la Révolution. Huguenin devint rapidement alors un des chefs des mouvements populaires du faubourg Saint-Antoine. Il prit part à la prise de la Bastille (14 juillet 1789), envahit, à la tête d’une bande, 1 Assemblée législative, puis les Tuileries (20 juin 1792), s’empara, la veille du 10 août, de l’Hôtel de ville, d’où il chassa la municipalité, et se fit nommer président de la Commune. Il signa, le 30 août, des ordres qui remplirent de détenus les prisons.de Paris, et donna le signal des massacres de septembre. Chargé ensuite de missions à Lyon, en Savoie, en Belgique, il se livra à des rapines et à des concussions de tout genre, fit, si l’on en croit Prudhomme, dont le témoignage est au reste fort suspect, amener à sa maison de Paris douze chariots chargés d’objets précieux pris en Belgique, se vit accusé de deprédaiions devant le conseil de la Commune, et parvint à se soustraire à une condamnation. Depuis lors, il vécut dans la plus profonde obscurité.

HUGUENIN (Jean-Pierre-Victor)f statuaire français, né à Dôle en 1801, mort à Paris en 1860. Il étudia sous Ramey, puis à l’École des beaux-arts (1825-1829). Au Salon de 1835, il envoya un Hyacinthe mourant qui lui valut une médaille, puis il exécuta un assez grand nombre de statues, notamment : Odette de Champdivers, Charles VI, la Chute d’Eloa, Hébé, Scène du massacre des Innocents, Baigneuse, Psyché évanouie, Mater Dolorosa, Vatentine de Milan (1846), qu’on voit au jardin du Luxembourg, etc. ; enfin des bustes, entre autres ceux du Marquis de Fontanes, de j^iio de Fitz-James, du Baron Renaud. Huguenin était un artiste laborieux, un praticien habile : mais il manquait d’originalité, et aucune de ses œuvres n’a eu un succès complet.

HUGUENINE s. f. (u-ghe-ni-ne ; h asp.de Huguenin, bot. savoisien.). Bot. Genre de plantes de la famille des crucifères, formé aux dépens des sisymbres, — et dont l’espèce type croit sur les pelouses des Alpes.

HUGUENOT, OTE s. (u-ghe-no, o-te ; h asp.

— V. l’étym, à la partie encycl.). Nom injurieux donné aux calvinistes par les catholiques de France : On mande de tous côtés que ce grand armement du prince d’Orange tombe enfin sur la France, où les huguenots remuent de toutes parts. (Boss.)

— Fam. Catholique peu fervent, qui ne se conforme pas aux prescriptions de sa religion : Vous manques la messe, huguenote !

— s. f. Métrol. Monnaie de peu de valeur, qui remontait à Hugues Capet.

— Econ. domest. Petit fourneau de terre ou de fer, sur lequel on place une marmite.

Il Vaisseau de terre sans pieds, pouvant se placer sur un fourneau.

— Art. culin. Œufs à la huguenote, Œufs cuits dans du jus de mouton, manière de les accommoder que les catholiques ne pouvaient se permettre aux jours maigres, et qui ne convenait qu’aux huguenots.

— Adj. Qui a rapport aux huguenots : Parti huguenot. l’action huguenotis. Quand le fiel huguenot s’épanche sur un catholique, ce n’est pas pour quelques gorgées. (L. Veuillot.)

— Encycl. Huguenot, que l’on trouve aussi écrit huguenaud et aignot dans les documents du temps, est un terme de mépris sous lequel les catholiques français du xvic siècle désignaient les protestants et plus particulièrement les calvinistes, et dont ceux-ci se parèrent ensuite, comme il arriva pour les gueux des Pays-Bas et pour les sans-culottes de notre histoire révolutionnaire.

Les auteurs sont restés longtemps indécis sur l’origine aussi bien que sur Ta signification du mot huguenot ; « chacun en a devisé à son appétit, > dit Pasquier, qui, lui-même, n’a pas trouvé l’étymologie véritable ; et ce qu’il y a de remarquable, c’est que les contemporains eux-mêmes en ont été réduits à émettre une curieuse série de conjectures, que nous allons dérouler, et parmi lesquelles il y en a de véritablement folles. Cependant Tavannes et Jean Diodati avaient donné l’étymologie vraie, celle qui fait dériver huguenot <)u mot allem.an<j eidgenossen (liés par serment,

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confédérés) ; mais leur opinion avait été rejetée. Nous allons passer en revue toutes les conjectures que M. Rabutaux a très-bion résumées dans un excellent article de l’Encyclopédie moderne.

II est peu de mots, dit-i), sur l’origine desquels on ait plus disputé et l’on se soit moins accordé. Il forme certainement un des chapitres les plus curieux de la philologie pendant les deux derniers siècles, et il donna lieu aux conjectures les plus extravagantes. Loin de moi la pensée de médire de la science étymologique ; mais il n’en coûte rien, même à ceux qui, comme moi, l’estiment le plus, d’avouer qu’à son début elle s’est bien souvent fourvoyée. » Héraud et le maréchal de Montluc ne font pas difficulté de confesser leur ignorance. Ceux-là sont les sages, il convient de les mettre hors de cause. Pasquier, moins prudent, consacre tout un chapitre à l’exposition des opinions émises de son temps sur ce sujet. Son témoignage n’a de poids qu’en ce qu’il affirme avoir entendu cette appellation « dans la bouche de quelques siens amis tourangeaux, » huit ou neuf ans avant l’affaire d’Amboise. Le mot daterait donc, suivant lui, de 1551 ou 1552 ; mais les auteurs sont unanimes à dire qu’il n’était employé jusqu’alors qu’en Touraine et que ce ne fut qu’après 1562 qu’il se répandit dans le resta de la France.

Selon Duverdier, il vient du nom de Jean Hus, le célèbre novateur qui fut brûlé par les Pères du concile de Constance, « comme qui diroit les guenons de Hus. • Jean de LaHaga le dérive du nom d’un certain Hugues, sacramentaire du temps de Charles VI. D’autres y voient une allusion à la conduite que suivaient les réformés, fidèles à la fortune des descendants de Hugues Capet et ennemis des Guises, rivaux de la maison de France. Coquille émet cet avis, et Le Duchat paraît l’adopter en faisant observer que huguenot est usité comme diminutif de Hugues. Valois affirme que les mots Hugues et Hue sont synonymes et qu’après avoir été longtemps employés comme noms d’hommes ils sont devenus aussi depuis, comme Gilte, des termes de mépris, et qu’ils furent appliqués, avec cette intention, aux réformés, comme qui dirait des huets ou des huguets. Castelnau, avec plus d’érudition que de sens commun, va chercher une maille ou petite monnaie du temps de Hugues Capet, nommée huguenot, pour en faire Ta marraine des calvinistes. Les femmes des environs d’Amboise, très-versées, comme chacun sait, dans la numismatique, voyant fuir les conjurés poursuivis, s’écriaient que c’étaient de pauvres gens qui ne valaient pas des huguenots. La ville de Tours ayant été l’une des premières en France où le mot huguenot fut en usage, on le rattacha à un certain roi Hugon, revenant sous forme de latin ou loupfarou, qui passait pour rôderdans lesruespenant la nuit, soit qu’à cause de leurs assemblées de nuit on considérât les réformés comme les disciples du roi Hugon, soit parce que ces assemblées avaient lieu dans une tour de la ville qui avait pris du célèbre farfadet le nom de Hugon. Cette opinion est celle de Théodore de Bèze, de d’Aubigné, de de Thou, de Pasquier, du P. Daniel et de la plupart des anciens historiens, comme La Popelinière, Davila et Strada. Voici ce que dit à ce sujet Th. de Bèze, dans son Histoire ecclésiastique (1580) :

« Or, pour ce qu’il a esté fait mention de ce mot de huguenot, donné à ceux de la religion réformée durant l’entreprise d’Amboise, et qui leur est demeuré depuis, j’en dirai un mot en passant, pour mettre hors de doute ceux qui en cherchent la cause assez à l’égarée. La superstition de nos devanciers jusques ù vingt et trente ans en çà estoit telle que, presque par toutes les bonnes villes du royaume, ils avoient l’opinion que certains esprits faisoient leur purgatoire en ce monde après leur mort, qu’ils alloient de nuict par la ville battans et outrageans beaucoup de personnes, les trouvans par les rues. Mais la lumière de l’Évangile les a fait esvanouir, et nous a appris que c’estoient coureurs de pavés et ruffiens, À Paris, ils avoient le moine bourru, à Orléans le mulet Odet, à Biois le lougarou, à Tours le roy Huguet, et ainsi des autres villes. Or,’est-il ainsi que ceux qu’on nppeloit luthériens estoient, en ce temps-là, regardés de jour si près qu’il leur falloit nécessairement attendre la nuict pour s’assembler, pour prier Dieu, prescher et communiquer aux saincts sacrements : tellement qu’encore qu’ils ne fissent peur ni tort à personne, n’est-ce que les prestres par dérision les firent succéder à ces esprits qui rôdoient la nuict. Do cela advint, ce nom estant tout commun en la bouche du menu peuple, d’appeler ceux de la religion huguenots au pays de Tonraine, et premièrement à Tours que ceux do la religion s’assemblans de nuict furent surnommés huguenots comme s’ils eussent esté la troupe de leur roy Huguet : et pour ce que la première descouverte de l’entreprise d’Amboise se fit à Tours, qui en baillèrent avertissement sous ’ce nom de huguenots, ce sobriquet leur en est demeuré. ■

Les historiens qui ont fait dériver huguenots de Hugues Capet sont moins nombreux. C’est cependant l’opinion qu’a adoptée Élie Benoît dans son Histoire de ledit d> Nantes. Fetizon, pasteur réfugié à La Haye, donne, dans son Apologie des réformés (1633), les raisons de cette hypothèse ; ■ Le titre de huguenots est