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même à la tête de la création comme un chef ou comme un maître, nous n’y faisons aucune objection ; mais l’Homme ne réussit pas pour cela à rompre les liens par lesquels il se rattache au reste des créatures, et, roi de la création, il n’est pour nous que le premier des animaux,

Les caractères par lesquels l’homme se distingue des animaux qui se rapprochent le plus de lui par leur organisation sont de deux ordres : les uns sont des caractères d’ordre zoologique, les autres des caractères psychiques ou moraux. Le type humain est trop universellement connu pour qu’il soit utile d’en retracer les traits ; l’énoncé des caractères, à proprement parler différentiels, suffit à le distinguer de ses plus proches voisins, les anthropomorphes. C’est à l’énumération de ces seuls caractères que nous consacrons les lignes qui suivent.

Caractères zoologiques. L’homme est un animal vertébré, mammifère et bipède, d’une taille qui varie de 1m, 60 à 1m, 82 en moyenne, avec quelques écarts exceptionnels. Sa peau est à duvet ou à poils rares, de couleur variable ; sa tête est relativement petite, et le rapport de capacité du crâne à la face est plus grand que chez tous les autres animaux. Le nez est saillant au-dessus et au-devant de la bouche, le menton est distinct, l’oreille nue, fine, bordée, lobulée ; les cheveux sont abondants ; la mâchoire est parabolique et garnie de dents rapprochées sans lacune. De ces dispositions il résulte, chez l’homme, un angle facial plus ouvert, un angle sphénoïdal plus aigu.

L’homme a deux pieds et deux mains ; les doigts sont onguiculés et les pouces opposables dans les mains. La jambe est droite sur le pied, la hanche saillante et le fémur recourbé à angle droit au niveau de son col.

L’homme est d’abord embryon, puis fœtus ; il naît neuf mois après sa conception, commence vers l’âge de cinq à dix mois le travail de la première dentition (vingt dents), renouvelle ces premières dents vers sept ans, et en acquiert trente-deux dont les dernières apparaissent vers l’âge de vingt-cinq ans ; il croît le quart de sa vie, prolonge celle-ci assez souvent jusqu’à soixante-dix ans, exceptionnellement jusqu’à cent ans, très-rarement au-delà.

Aristote, dans l’antiquité, et, parmi les modernes, MM. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, Müller, de Quatrefages, Flourens et bien d’autres, ont affirmé l’existence d’un règne humain, ne comprenant d’ailleurs qu’un seul genre, le genre homme. Les caractères de ce groupe sont renfermés très-clairement dans cette définition empruntée à Isidore Geoffroy Saint-Hilaire : « La plante, dit ce naturaliste, vit ; l’animal vit et sent ; l’homme seul vit, sent et pense. »

M. de Quatrefages, qui soutient avec une certaine habileté la thèse du règne humain, et qui veut assurer à l’homme le bénéfice de cette place exceptionnelle, convient parfaitement qu’il ne faut chercher les caractères de supériorité de l’espèce humaine, ni dans les formes anatomiques, ni dans le mode d’accomplissement des fonctions vitales ; ni dans la station verticale, qui n’est pas absolument exclusive à l’homme ; ni dans son intelligence, puisque la plupart des animaux en possèdent une ; ni dans la faculté de parler, puisque les mammifères et les oiseaux Correspondent entre eux à l’aide d’un langage expressif, quoique incomplet ; ni même dans l’existence de facultés affectives, dont quelques animaux font encore preuve… Les caractères de supériorité, dit M. de Quatrefages, résident uniquement dans la présence de deux facultés spéciales à l’homme : la moralité et la religiosité. Nous croyons que des facultés de ce genre ne peuvent point être les caractéristiques d’un règne. Dans l’homme, nous trouvons les mêmes éléments organiques que dans tout le règne animal : ce sont les mêmes tissus appelés à donner naissance à des organes comparables, affectés eux-mêmes à des fonctions analogues. Quel motif y aurait-il donc de faire sortir l’homme du règne animal ? Serait-ce le fait d’une supériorité organique ? Mais le règne animal n’est pas au-dessus du végétal par une supériorité d’organisation ; ces deux règnes se touchent, non pas par leurs extrémités opposées, mais par leurs extrémités semblables, par leurs degrés inférieurs. À partir de ce point commun où se confondent le végétal le plus imparfait et l’animal le plus rudimentaire, les organisations se développent en divergeant, obéissant à des lois essentiellement différentes. Mais l’homme n’est pas dans ces conditions. Il représente, par rapport au singe, un degré d’organisation supérieur ; il est conforme sur un plan analogue, pour ne pas dire absolument semblable ; il diffère du dernier des animaux bien moins qu’un arbre, par exemple, ne diffère d’un chien,

Ordre, classe, famille. Linné plaçait l’homme parmi les primates, à côté des singes, des lémuriens, des chauves-souris et mème des paresseux. Cuvier admettait une division dans l’ordre des primates, et faisait de l’homme le représentant d’un groupe, classe ou famille des binanes. Le caractère invoqué par Cuvier, pour justifier la création de ce groupe, était la comparaison du pied de l’homme et de celui du singe ; il rangeait celui-ci parmi les quadrumanes.

Entre le pied de l’homme et la main du membre inférieur du singe, il n’y a pas de différences de structure radicales ; les mêmes muscles entrent dans la composition de ces deux organes, et, chez les enfants, on observe bien visiblement la mobilité des gros orteils. Si l’habitude de porter des chaussures ne nous condamnait pas à faire de nos pieds un usage très-restreint, il n’y a pas de doute que le pouce du pied ne restât opposable aux autres doigts ; l’exemple de plusieurs individus nés sans bras et devenus fort adroits de leurs pieds est, à cet égard, un argument sans réplique, On a souvent cité le peintre Ducornet, né sans bras, et auteur de plusieurs bons tableaux.

À côté de cela, nous retrouvons une sorte de main dans certains marsupiaux, tandis que les singes du genre cebus, privés de mains, restaient, pour Cuvier, dans le groupe des bimanes. La main perd ainsi singulièrement de sa valeur taxonomique, et il nous paraît plus conforme aux principes de la classification zoologique d’admettre que l’homme appartient au groupe naturel des singes, et au sous-ordre des pithéciens, ou singes anthropomorphes. Telle est du moins la manière de voir d’un grand nombre de naturalistes qui, d’ailleurs, n’entendent établir que des rapports de conformation organique, sans rien préjuger sur le rang que doit occuper l’homme dans la série des êtres, si l’on a égard aux caractères d’ordre psychique. V. ANTHROPOMORPHE,

Genre, espèce. Linné était peu généreux à l’égard de notre espèce. Il plaçait l’homme à côté du chimpanzé et des singes anthropomorphes alors connus. Pour lui, le genre homme comprenait à la fois : l’homme lui-même, homo sapiens ; le chimpanzé, homo troglodytes : l'orang, homo satyrus, et le gibbon, homo lar. Ces rapprochements sont injustes, et les espèces de Linné sont des genres bien accusés ; mais la question, loin d’être vidée, se représente sous une forme plus discutable encore, car il reste à déterminer si l’homme forme un genre divisible en plusieurs espèces, ou une seule espèce dans un genre unique lui- mème. Ainsi posé, le problème a reçu des solutions fort différentes, et excité entre les naturalistes et entre les philosophes des controverses violentes et souvent passionnées, qui se sont pas encore près de s’éteindre. Quoi qu’il en soit au point de vue zoologique, et abstraction faite des attributs d’ordre psychique, l’homme peut se définir : un animal vertébré, mammifère, de l’ordre des primates, de la famille du singe, de genre et d’espèce homme. C’est tout ce que la zoologie peut nous enseigner, et c’est la conclusion inévitable des considérations qui précèdent.

— II. ORIGINE DE L’HOMME. Toutes les grandes questions anthropologiques dont Le monde savant est aujourd’hui saisi gravitent autour d’un problème unique : déterminer l’origine du groupe humain. Trois solutions principales ont été proposées. La première, dont nous ne parlons que pour être complet, ferait de l’homme un être de hasard, engendré fortuitement par la nature. Celle que nous plaçons la seconde, en raison de son ancienneté, nous représente l’homme comme une manifestation spéciale de la puissance créatrice, ayant, à un moment donné, créé l’espèce humaine distincte de toute autre. La troisième, non moins hypothétique d’ailleurs, nous montre l’humanité comme un produit de l’évolution continue et indéfiniment perfectible des êtres, comme le résultat ultime des transformations multiples de l’animalité. Ces trois hypothèses se présentent avec une série d’arguments que nous allons sommairement faire connaître.

— 1° Origine de l’homme par génération spontanée. Cette supposition étrange, dont on pourrait trouver les traces dans la plus haute antiquité, a été scientifiquement soutenue par Oken en 1819. Suivant ce naturaliste, tout être vivant vient de la mer, vaste réceptacle, utérus immense de la nature. Le fœtus humain y prit naissance, enveloppé dans un amnios en forme de sac sans ouverture ; il y vécut par imbibition, à la façon des infusoires, absorbant les éléments nutritifs du liquide suffisamment albumineux au sein duquel il était plongé ; sa gestation, plus longue, s’y prolongea jusque vers la fin de la deuxième année, et il sortit enfin de la poche qui le contenait, pourvu des organes qui lui permettaient d’emprunter sa nourriture aux milieux ambiants. Nous jugeons inutile de nous arrêter plus longtemps sur cette hypothèse.

— 2° Hypothèse de la création distincte d’un ou plusieurs couples primitifs. À cette hypothèse se rattachent les partisans de la fixité immuable des espèces ; elle se présente, en effet, comme une inévitable conséquence de l’invariabilité absolue des formes organiques. Dans la théorie à laquelle nous faisons allusion, chaque espèce réclame une création distincte ; elle représente, en quelque sorte, une catégorie spéciale de la pensée créatrice, se multipliant par voie de génération indéfinie et sans altération de la forme créée immuable dans son éternité relative. Il est évident que cette doctrine reste exposée à toutes les critiques qu’on peut opposer aux partisans de la fixité de l’espèce, (V. ESPÈCE.) Elle a toutefois, pour elle, l’assentiment tacite de tous les peuples disciplinés sous le joug des religions révélées ; elle a l’autorité des livres saints ; enfin, elle semble seule consacrer In supériorité de l’espèce humaine, conséquence importante qui lui assure un appui considérable.

Doit-on admettre qu’il y ait eu, originairement, un ou plusieurs couples humains ? Généralement parlant, les partisans de la création distincte s’accommodent mieux de l’hypothèse qui fait descendre l’homme d’un seul couple. Cette opinion était celle de Buffon ; Flourens, en France, et surtout M. de Quatrefages, lui donnèrent une sanction scientifique très-sérieuse. Pour ces naturalistes, l’espèce humaine est exclusive de toutes les autres ; l’homme n’a nulle espèce consanguine ; son espèce est une par toute la terre, et les races ne sont que les variétés de l’espèce, dérivées d’un type primitif immuable. « L’homme, dit Buffon, blanc en Europe, noir en Afrique, rouge en Amérique, n’est que le même homme teint de la couleur du climat. »

Les individus composant la grande famille humaine, disent d’autres naturalistes, partisans, comme Buffon, du monogénisme, se ressemblent autant entre eux, et souvent plus, que deux animaux appartenant à une même espèce bien reconnue, que deux chiens, par exemple. C’est ainsi que les différences qui séparent le blanc du nègre le plus dégénéré ne semblent pas plus considérables que celles qui séparent un carlin d’un dogue ou un poney d’un gros cheval limousin. Les mêmes naturalistes font observer qu’il n’existe aucune infériorité absolue entre les représentants des races les plus éloignées les unes des autres, et que les individus appartenant aux races inférieures possèdent, à l’état virtuel, les mêmes aptitudes intellectuelles, que l’éducation peut, d’ailleurs, développer chez eux au même degré que chez le blanc.

Cette doctrine a pour elle encore, en apparence du moins, l’autorité des livres saints, et l’opinion universellement adoptée depuis dix-huit siècles dans le monde chrétien. Disons même qu’une raison d’humanité plaide en faveur de l’unité de l’espèce humaine, et que la croyance à cette unité est presque seule capable de s’opposer à l’injuste asservissement des races inférieures ; disons que l’instinct de sociabilité qui a poussé les uns vers les autres les hommes de races éloignées les a également portés à s’unir, à se croiser de mille manières, tandis que les animaux d’espèces différentes ne se recherchent jamais que quand ils sont placés hors de l’état de nature ; disons que les renseignements historiques que nous possédons nous permettent de croire à de vastes émigrations ayant originairement disséminé les premiers hommes autour d’un berceau primitif ; opposons enfin aux polygénistes un dernier argument : c’est qu’en se reportant à l’hypothèse de plusieurs espèces primitives il est si difficile d’en déterminer seulement le nombre, que les partisans de cette doctrine en ont admis tantôt trois, tan- tôt cinq, tantôt quinze, vingt, et quelques-uns plus de trente.

Nous verrons, dans un moment, en quels termes les polygénistes répondent à ces arguments.

Maintenant, d’autres questions se présentent : le couple étant supposé unique, quel était ce premier couple ? à quelle variété, à quelle race convient-il de le rapporter ? quels furent son premier habitat, sa condition première ? à quelle date convient-il de fixer cette première apparition de l’homme sur la terre ? enfin, par quelles voies et par quels moyens l’homme parvint-il à disséminer sa descendance sur la surface entière du globe ? De ces questions nous ne traiterons ici que celles qui regardent directement le naturaliste.

L’histoire ne nous fournit que des renseignements bien insuffisants sur la nature du premier couple humain ; la Bible le fait rouge, les livres sacrés des Indiens le font brun, et ceux des Chinois le disent jaune. Pour le naturaliste qui se rattache à la doctrine de la perfectibilité indéfinie des êtres, et pour les philosophes qui ont adopté cette doctrine, le premier couple devait être quelque obscur représentant des races inférieures, un noir hideux. Tant que cette assertion n’est pas justifiée par l’observation, elle demeure sans valeur. Il ne faut pas admettre théoriquement, sans preuves à l’appui, que la perfectibilité indéfinie soit une conséquence inévitable de notre organisation ; les faits trop récents de dégénérescence, très-rigoureusement observés d’ailleurs, viendraient bientôt démentir cette manière de voir.

Les anthropologistes n’ont pas beaucoup plus avancé la question que les philosophes. M. de Quatrefages, s’appuyant sur l’apparition isolée de certains caractères identiques chez presque toutes les races actuellement existantes, pense que cette observation conduit à présumer que le type original de notre espèce a dû être in homme prognathe, à peau jaune et aux cheveux roux.

Les quelques débris humains des races primitives, retrouvés à l’état fossile dans les couches quaternaires, étaient seuls capables de fournir à la question quelques éléments de certitude ; malheureusement, ces débris sont encore trop rares et trop contestés. En observant la structure des crânes d’Engis et du Neanderthal, MM. Huxley, S.-J. Lubbock, C. Vogt, Schauffhausen, et tous les naturalistes à qui il a été donné d’étudier ces restes humains, ont, d’une manière presque unanime, conclu que l’homme le plus ancien, dont les débris aient été retrouvés, était un être hideux, prognathe et dolichocéphale, portant autour des orbites un bourrelet saillant rappelant celui des singes, ayant les sinus frontaux très-développés, et tenant le milieu entre l’Esquimau et l’Australien. M. Lartet, d’autre part, affirme que, par sa capacité crânienne, le premier homme s’éloignait beaucoup du singe. Toutes ces observations sont peu concluantes ; les restes humains fossiles sont trop peu nombreux. D’ailleurs, l’homme des cavernes de France et de Belgique est-il l’homme primitif ? Nous l’ignorons, et nous l’ignorerons peut-être toujours,

Nous venons d’exposer l’hypothèse du monogénisme ; parlons maintenant du polygénisme, c’est-à-dire du système qui admet la création directe de plusieurs couples en des temps et des lieux différents.

Nous devons commencer par dire que l’autorité des livres saints est invoquée à tort par les monogénistes ; les polygénistes n’ont pas manqué de trouver dans les Écritures des textes tout aussi concluants en leur faveur.

Quoi qu’il en soit, il est certain que, partout où l’homme a pénétré, il a trouvé d’autres habitants, essentiellement différents des races européennes et ayant perdu tout souvenir de ce berceau primitif qui avait dû les voir naître. Ne serait-il pas plus logique, en présence de ces faits, de songer à une création multiple ? Pour les autres animaux, le fait est avéré et admis par l’universalité des naturalistes, Tous admettent la multiplicité des centres de création. Quand on découvrit la Nouvelle-Hollande, et qu’on put étudier sa faune singulière, le doute ne fut plus permis à cet égard. Ce vaste continent, en effet, recélait comme une création nouvelle ; tous les animaux qu’on y découvrait étaient, en quelque sorte, marqués d’un sceau particulier, doués d’attributs spéciaux, qui caractérisaient la localité qui leur servait d’habitat, à l’exclusion de toute autre. Les mêmes observations s’appliquent encore à tout le continent américain, qui contenait à la fois une race d’hommes de type spécial, des espèces de singes, des espèces de carnassiers essentiellement différentes de toutes celles de l’ancien continent. En même temps, des animaux, aujourd’hui parfaitement acclimatés sur ce sol nouveau, comme le cheval, y faisaient complétement défaut. Agassiz, Desmoulins, Morton et d’autres naturalistes se sont crus autorisés à faire l’application de ces faits à l’homme, et ont imaginé qu’il y avait eu pour lui, comme pour d’autres espèces, plusieurs centres d’apparition.

Il est impossible de nier que les races humaines présentent de très-grandes différences, et tout semble annoncer que ces différences sont aussi anciennes que l’homme lui-même. Si l’on jette un coup d’œil sur les crânes d’Engis et de Neanderthal (seuls vestiges que nous possédions des races les plus anciennes), n’est-on pas amené à conclure que l’homme des cavernes d’Europe, intermédiaire entre l’Esquimau et l’Australien, dolichocéphale et prognathe, ne saurait descendre des races asiatiques, toutes brachycéphales ? Insistons maintenant sur le caractère de fixité. Aussi loin qu’on puisse remonter dans l’histoire par l’inspection des monuments les plus anciens, de ceux des Égyptiens par exemple, ne voyons-nous pas les types actuels reproduits sur ces monuments avec tous les caractères qui leur appartiennent aujourd’hui ? Et dans la succession des migrations nombreuses de ces races anciennes, ne voyons-nous pas se conserver presque inaltérables les caractères qui les distinguaient primitivement, même après une dissémination très-complète, ainsi qu’il arrive pour le juif, qui conserve le type de sa race dans les contrées les plus éloignées ?

En vain les monogénistes s’évertuent à établir que les races subissent, par la transplantation, des modifications suffisamment sensibles pour expliquer leurs transformations antérieures ; il n’y a pas d’exemples, dans une occupation de plusieurs siècles, qu’un blanc établi en Afrique ait tourné au nègre, ou qu'un nègre ait accusé le type blanc. Selon Baudin, aucune race ne s’acclimate en dehors de ses limites géographiques, à moins de se mélanger à la race autochthone. En dehors de cette voie, la mortalité l’emporte sur la somme des naissances, et la population décroît si elle ne s’entretient par les émigrations de la mère patrie. Invoquera-t-on les modifications qu’ont subies les Européens sur le continent américain comme preuve d’un acheminement à une transformation plus complète ? M. de Quatrefages semble indiquer que l'Anglo-Saxon établi aux États—Unis tourne au Huron et se transforme peu à peu en Peau Rouge ; C. Vogt fait observer que les modifications qu’a subies l’Anglo-Saxon yankee sont beaucoup trop légères pour infirmer le principe de la fixité de la race anglo-saxonne ; au reste, l’Allemand se modifie encore moins, ajoute ce naturaliste, ce qui conduirait à conclure que l’Anglo-Saxon ne serait pas lui-même de race pure. D’ailleurs. quels motifs y a-t-il de conclure qu’une modification donnée s’étant accomplie en un temps donné, cette modification deviendrait double pour un temps double, triple pour un temps triple, etc. ? Rien dans les faits ne justifie cette manière de voir. Lorsqu’une race est transplantée, il ne peut arriver que deux