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sans les 1,000 litres d’eau qu’il emprunte par seconde aux réservoirs de Lannemeznn, serait incapable de faire mouvoir ie moindre moulin uveo régularité. La navigation n’y existe pas de fait.

GERS (département du), division administrative de la région S.-O. de la France, ainsi nommée de la rivière qui la traverse dans toute sa largeur. Ce département, formé de cinq pays de l’ancienne Gascogne : l’Armagnac, 1 Astarae, la Lomagne, le Comminges et Je Condomois, est borné au N. par le département du Lot-et-Garonne, au S. par ceux des Basses et des Hautes-Pyrénées, à l’E. par celui de la Haute-Garonne, au N.-É. par celui de Tarn-et-Garonne, et à l’O. par celui des Landes. Il est compris entre 430 18’46"-44<> 5’ 17" de lat. N., et 1" 18’ 20"- 2° 36’ 8" de long. O. Superficie : 058,031 hectares. Le département du Gers comprend 5 arrond. : Auch, ch.-l., Condom, Lectoure, Lombez, Mirande ; 29 cant. ; 468 comm., et 295,092 hab. Il forme le diocèse d’Auch ; la 3e subdivision de la 13e division militaire du 6e corps d’armée ; il ressortit à la cour d’appel d’Agen, à l’académie de Toulouse, à la 130 légion de gendarmerie, à la 22« conservation des eaux et forêts, à l’arrondissement minéralogique de Bordeaux, etc.

Les chaînes de collines du Gers, qui se détachent du plateau des landes de Lannemezan, appartiennent aux terrains tertiaires et reposent sur des roches argilo-calcaires. Ces chaînes courent vers le N.-E., le N. et le N.-O. Dans l’ensemble, elles se déploient en un gigantesque éventail. Les collines du Gers atteignent leur point culminant (4,000 met.) au S., sur la limite des Hautes-Pyrénées. A leur sortie du Gers, elles n’ont plus que la moitié ou le tiers de cette hauteur. Entre elles s’ouvrent de jolies et fertiles vallées. Les rivières du département du Gers sont tributaires de la Garonne et de l’Atlour. Les

Îilus importantes sont : l’Aussonnelle, la Save, a Gimone, l’Arrats, l’Auroue, le Gers, l’Auvignon, la Bayse, l’Arros, le Bergons, le Saget, le Larcis, la Douze et le Midou. Parmi Tes canaux, nous signalerons : le canal de navigation de la Bayse, de Condom à la limite du département de Lot-et-Garonne ; les canaux d’irrigation de la Neste, alimentant les principaux cours d’eau du département ; les canaux Alaric, des Moulins, des Rouges et de Plaisance, alimentés par l’Adour. Le département du Gers renferme de nombreux

étangs et quelques sources d’eaux minérales, notamment celles de Castera-Verduzan, de Barbotan, de Lavardens, du Mosca, de Ramouzens, de Mourra, de l’Isle-Noé et de Bassouès.

Le climat est essentiellement variable. Vers la fin de novembre, le thermomètre descend assez souvent a 10» au-dessous de zéro ; cette température, il est vrai, ne se maintient guère que pendant quinze jours ou trois semaines au plus. Aux mois de juillet et d’août, la chaleur est fréquemment de 30" à 36° centigrades. L’hiver et le printemps sont généralement humides. Cette dernière saison, est presque toujours signalée par de violents orages, cause fréquente de désastres pour l’agriculture. L’automne est de toutes les saisons la plus agréable. La quantité moyenne de pluie pour chaque année est de 865 a 890 millimètres. Les vents dominants sont ceux de l’est et de l’ouest. Le premier est, en été, un indice de chaleur ; au printemps, il amène la pluie. Le vent d’ouest est toujours le précurseur de la pluie. L’autan, ou vent du sud-est, qui souffle assez fréquemment, est très-malsain pour les hommes et produit sur les récoltes des effets désastreux. La composition géologique est très-variée. La partie occidentale du département, qui dépend du bassin de l’Adour, est formée de terrains tertiaires marins. Le reste appartient aux formations d’eau douce qui constituent le bassin sous-pyrénéen. Quelques carrières de marbre rouge ou vert, de gypse, de sable pour verrerie, d’argile à potier, de pierre à, bâtir constituent toutes les richesses minérales du Gers.

Le département du Gers est essentiellement agricole. Le sol argilo-calcaire en est généralement fertile. Les légumes de toute espèce, le chanvre, le lin, les arbres fruitiers y viennent parfaitement. Aussi les foires sont-elles nombreuses : on en compte 420, durant ensemble 440 jours. Les transactions s’exercent de ’préférence sur les bestiaux, les céréales, les planches et la tonnellerie. Les mules et les mulets forment l’objet d’un commerce considérable. Les deux tiers et plus de la surface totale de ce département sont occupés par des terres très-riches, propres il toutes les cultures. On y récolte plus de 9 millions d’hectolitres de blé. Le rendement moyen est de 20 hectolitres à l’hectare. Les variétés les plus recherchées sont le blé turc, la blavette ou blé d’Udessa sans barbe, le blé rainot et le blé bleu Noé. Presque tous ces blés sont convertis en minots par les usines de Barbaste, de Pont-de-Bordes et de Nérac, puis expédiés par Bordeaux vers l’Amérique. Outre cette production principale, on récolte encore du seigle, do l’avoine, de l’orge, des fèves, des pois, etc. L’assolement biennal, suivi dans la majeure partie du département, consiste en blé et jachères. Depuis quelques années, les prairies artificielles prennent sou-Vent la place de la jachère. Ou trouve aussi,

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mais plus rarement, l’assolement triennal suivant : blé deux années consécutives, puis fourrages artificiels ; quelquefois, le blé est remplacé, la seconde année, par une récolte d’avoine. Les instruments agricoles sont encore peu perfectionnés ; cependant, les anciennes charrues en bois cèdent peu à peu la place à des instruments plus parfaits, dont la charrue Dombasle est le type. La vigne occupe une portion notable de la superficie de ce département, de 110,000 à 120,000 hectares environ. On y récolte de bons vins ordinaires, dont une notable partie est convertie en eaude-vie. Ces vins sont de trois sortes : les uns, dits vins blancs de chaudière, servent à faire les eaux-de-vie dArmagnac ; les deux autres, vins rouges ordinaires et vins rouges de coupage, sont dirigés vers les • stations thermales des Pyrénées ou expédiés ailleurs par Condom et Bordeaux. La vinification a fait de véritables progrès dans ces dernières années. Les méthodes du Bordelais se propagent tous les jours davantage, grâce aux relations de plus en plus fréquentes des deux pays. On taille la vigne de décembre en février ; puis on lui donne un premier labour en mars, un déchaussage en avril, et enfin un deuxième labour vers la fin d’avril ou au commencement de mai. L’espèce bovine du Gers comprend environ 136,000 têtes. Les principales races sont, au sud, vers les Hautes-Pyrénées, les races lourdaise, béarnaise et baretonne. À l’ouest, du côté des Landes, on trouve encore la race baretonne, et, en outre, la landaise, la bazadaise, etc. Au nord, dans le voisinage de Condom et de Lectoure, on rencontre les races néraquaise et garonnaise. On voit par là que la population bovine du Gers est loin d’être homogène. L’espèce chevaline, offre plus de caractère. Elle se compose, en général, d’animaux légers, ayant beaucoup d’analogie avec la race des environs de ’farbes. L’industrie mulassière, très-prospère, peut rivaliser, pour la beauté de ses Î>roduits, avec celle du Poitou. Elle a un démuehé toujours ouvert vers l’Espagne, par les foires célèbres de Masseube, Lectoure, Mauvesin, Mirande, Saint-Clar etCastelnau-Magnoac. La race ovine du pays n’a pas encore subi de croisements étrangers. Les poules . noires du Gers sont remarquables pour la finesse de leur chair. On les exporte-vers Toulouse, Marseille, et jusqu’en Algérie.

L’industrie est très-peu active dans le département du Gers ; elle est représentée par de nombreuses distilleries d’eau-de-vie, la verrerie de la forêt du Ramier, près de Lectoure, et 1,100 à 1,200 moulins à vent et à eau.

Le département du Gers est- traversé par 8,432 kilom. de voies de communication, se subdivisant ainsi : 71 kilom. de chemins de 1er, 417 kilom. de routes nationales, 004 kilom. de routes départementales, et 2,712 kilom. de chemins vicinaux. Il possède ; 1 lycée, 1 collège communal, 10 institutions secondaires libres, 773 écoles primaires, 13 salles d’asile, etc. Sur 713 jeunes gens atteints par la conscription en 18G6, 139 ne savaient ni lire ni écrire, 9 savaient lire seulement, 565 savaient lire et écrire.

GEItSAINT (Edme-François), antiquaire français, mort à Paris en 1750. Doué d’un goût très-vif pour les arts, auquel se joignait une instruction très-variée, il appréciait avec une remarquable sagacité la valeur d’un tableau, d’un dessin, d une gravure, d’un meuble de prix, etc. Il entreprit en grand le commerce d’objets d’art et de curiosités, et composa, à l’occasion de ventes publiques, des catalogues très-estimés pour l’exactitude de ses descriptions et la justesse de ses remarques. Gersaint, encouragé par ses succes, avait entrepris de faire le catalogue détaillé des gravures des meilleurs maîtres, et il avait achevé celui de Rembrandt et celui de Wischer lorsque la mort vint le frapper. Nous citerons : son Catalogue raisonné des coquilles et autres curiosités naturelles (1736, in-12) ; Catalogue raisonné des tableaux de M. de L’Orangère (1744), où se trouve la liste la plus complète de l’œuvre de Callot ; Catalogue raisonné des œuvres de Rembrandt (1751, in-12).

GERSAU, en latin Gersovia, bourg de Suisse, cant. et à 9 kilom. O.-S.-O. de Sehwitz, sur le lac de Lucerne ou des Quatre-Cantons, au pied du Righi ; 1,600 hab-, catholiques. Préparation de la soie et filatures de coton. Église et hôtel de ville remarquables. Gersau fut longtemps la plus petite république de l’univers. « La république de Gersau, dit Hélène-Marie Williams, dame anglaise qui s’est fait un nom distingué dans les lettres, et qui la visita vers la fin du siècle dernier, en y comprenant sa régence, ses conseils, simple, double, triple, ses trésoriers, grand-psautier, secrétaire, juges, ministres, officiers de marine et militaires, forces de terre, forces navales, enfiu, généralement tous les gouvernants et les gouvernés, de tous états, de tout sexe et de tout âge, contient bien de 900 à 1,000 personnes environ. Cet État n’a pas besoin de cavalerie, les rochers qui le couvrent au nord étant inaccessibles aux chevaux, aussi bien que le lac qui le baigne du côté du sud ; mais il possède une flotte nombreuse de batelets, quittaient à l’ancre à l’entrée du port, et qui arrêtèrent même, pendant quelque temps, notre bateau. » Eu 1798, la république de Gersau fut incorporée au canton de Wuld GERS

sfœtten. En 1803, l’acte de médiation la réunit à celui de Schwytz, dont elle forme encore un des districts. Tous les efforts qu’elle a faits pour recouvrer son indépendance sont demeurés sans résultat.

GEUSDOlU’tJeanDE), chirurgien allemand, né en Silésie. Il exerça, au commencement du xvie siècle, la chirurgie à Strasbourg. Il inventa certains instruments chirurgicaux, notamment pour extraire les balles, et lit d’intéressantes études sur les pendules. On a de lui : Manuel de chirurgie (Strasbourg, 1517, in-fol.).

GERSDORF (Auguste-Traugott), physicien allemand, né à. Regensdorf (haute. Lusace) en 1744, mort en 1S07. Il fonda, en 1779, la Société scientifique de la haute Lusace. Ce savantr’qui était très-versé dans les sciences physiques et naturelles, a publié, outre des mémoires : Essai sur la manière de déterminer la hauteur du mont des Géants (Leipzig, 1772) ; Indication des précautions les plus urgentes à employer quand il y a menace d’orage, et des moyens tes ]>lus efficaces pour se garantir des effets nuisibles de la foudre (1798) ; De mes propres observations de l’électricité atmosphérique (1802).

GERSDORF (Charles-Frédéric-Guillaume de), général allemand, né à Glossen (Saxe) en 1765, mort eu 1829. Entré au service en 1785, il combattit contre les Français en 1794 et 1796, devint major de brigade en 1805, chef d’état-major du corps saxon qui se joignit à l’armée française en 1809, et se distingua au siège de Dautzig, à la bataille de Linz, à Wagram, où il se battit avec le grade de général major. En 1810, Gersdorf fut chargé de réorganiser l’armée saxonne. Il reçut eusuite le commandement de l’artillerie, dirigea, en 1811, les travaux de fortification de Torgau, fut nommé, en 1S12, officier de la Légion d’honneur par Napoléon, et lieutenant général par le roi de Saxe, suivit en 1813 son souverain à Leipzig, où il fut retenu prisonnier, et, après la chute de Napoléon, se vit en butte à de vives attaques de la part des Allemands, qui ne lui pardonnaient pas le dévouement qu’il avait montré à la France. Lorsque, en 1815,1e roi de Saxe eut recouvré une partie de ses États, il réintégra dans sesemplois le général Gersdorf, à qui il n’avait cessé d’accorder toute sa confiance, le nomma inspecteur général de l’armée de réserve (1817), et le mit à la tête de l’école et du corps des cadets. On a de lui des Leçons sur des sujets militaires (Dresde, 1S26).

GERSEAU s. m. Cèr-sô). Mar. Corde qui soutient une poulie ou qui sert à la renforcer pour empêcher qu’elle n’éclate.

GERSÉE s. f. Cèr-sé). Suc de racine d’arum séché au soleil, et autrefois employé par les dames d’Italie pour se blanchir la peau.

GEIISFELD, bourg de Bavière, cercle de la basse Franconie, à 77 kilom. N. de Wurtzbourg, dans une situation pittoresque, près de la Fulda, qu’on y traverse sur un beau pont ; 2,000 hab. Excellente argile à poterie. Châteaux et orphelinat.

GEBSON (Jean Charlibr, dit), célèbre théologien, né au village de Gerson, près de Réthel, en 1303, mort à Lyon en 1429, Issu d’une famille de cultivateurs, il commença ses études à Reims, et vint les achever à Paris, au collège de Navarre, où il obtint une bourse. Il eut pour professeur le célèbre Pierre d’Ailly, et, à peine âgé de vingt ans, il fut nommé procureur de la nation de France, charge des plus importantes dans l’Université. Reçu bachelier en théologie en 1387, il fut attaché à l’ambassade envoyée par le gouvernement de Charles VI auprès du pape Clément VII, alors résidant à Avignon. On devait agiter devant le chef de 1 Église la question de l’immaculée conception, qui n’était encore qu’une simple opinion, non érigée eu dogme. Il paraît que le spectacle de la cour pontificale remplit l’âme de Gerson d’une profonde tristesse (il y avait de quoi), et qu’à partir de ce moment il n’eut qu’une pensée : mettre fin au grand schisme d’Occident, et amener la pacification de l’Eglise. Reçu docteur en 1392, puis nommé curé de Saint-Jean-en-Grève et chanoine de Notre-Dame, il fut appelé en 1395 aux difficiles fonctions de chancelier de l’Université et de l’Église de Paris. Mais quand il voulut rétablir la discipline dans les écoles, reformer les mœurs, corriger les abus, les plaintes et les récriminations s’élevèrent de toutes ports. Abreuvé de dégoûts, il voulut alors résigner ses fonctions, et ne consentit à les conserver que sur les sollicitations pressantes de ses amis et du duc de Bourgogne. Supérieur à quelques préjugés d’un siècle qui alliait la corruption de 1 ignorance à l’énerfie violente de la barbarie, il dut se regarer comme préposé au maintien et à la défense des principes de la religion, de la morale, de la science et de la théologie. Le premier combat qu’il livra fut dirigé vers la scolastique, qu’il voulait bannir de renseignement pour lui substituer la théologie pure, indépendante des autres sciences. Cette première réforme avait une portée considérable, que Gerson ne prévoyait certainement pas. La scolastique disparaissant, le champ des études se trouvait débarrassé d’une science fausse, issue de la sophistique grecque, et qui entravait les progrès de l’esprit

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humain. La séparation de la théologie et des sciences avait pour résultat d’ulïmnehir ces dernières, de les séculariser. La discipline et les mœurs ne préoccupèrent pas moins le chancelier de Paris. Il attaqua avec une grande vigueur l’astrologie et la magie, fit condamner celle-ci comme une idolâtrie par la Faculté de théologie, obtint que les condamnés à mort ne fussent plus privés des secours spirituels, s’éleva contre ces bacchanales grossières nommées fêtes des fous, et dans lesquelles des prêtres parodiaient les cérémonies de la religion, réprima le fanatisme des flagellants, et, malgré les menaces du duc d’Orléans, rejeta courageusement sur l’ambition des princes les calamités publiques, dans un discours prononcé devant Charles VI, au nom de l’Université, qui était un pouvoir dans l’État, comme on sait. Si ces lunes continuelles donnaient au grand docteur la célébrité, elles lui attiraient aussi des inimitiés puissantes, dont il eut à souffrir une partie de sa vie. Après le meurtre du duc d’Orléans, on sait que Jean sans Peur fit prononcer l’apologie de son crime par un rhéteur gagé, nommé Jean Petit. Plus tard, pendant une réaction des Armngnacs, Gerson demanda et obtint la condamnation des propositions de Jean Petit (1414), fit l’éloge du duc d’Orléans et attaqua le duc de Bourgogne avec une grande véhémence. Il n’était pourtant pas absolument opposé à la doctrine en vertu de laquelle il est permis de tuer les tyrans dont on ne peut se défaire autrement. Mais, quoique d’un tempérament d’ordinaire modéré, il ne pouvait se défendre d’une sympathie secrète pour les Armagnacs, qui représentaient en France le parti conservateur de l’époque. Il expia son imprudente intervention dans les luttes des partis par le pillage de sa maison, et, quelques années plus tard, par l’exil. Mais 1 affaire capitale de sa vie est la part active qu’il prit à la lutte entreprise pour faire cesser le grand schisme et réformer l’Église. En 1378, deux papes avaient été élus à la fois, l’un à Rome, l’autre à Avignon. Le monde chrétien se partagea entre les deux pontifes, qui se renouvelèrent sans que la division cessât. Les intrigues, les polémiques violentes, les brigues scandaleuses et les troubles auxquels donna lieu cette séparation mirent à nu la profonde corruption du corps sacerdotal, corruption dont les plus austères ecclésiastiques du temps (d’Ailly, Gerson, Clémangis, etc.) nous ont laissé 1 effraj-ant tableau. Les prêtres vertueux, les chrétiens fervents appelaient de tous leurs vœux, tout à la fois l’extinction du schisme et ~la réformation de l’Église. C’est à la réalisation do ce noble rêve que Gerson consacra sa vie, son gunie, son âme tout entière. Il apporta d’abord "une modération remarquable dans cette lutte ardente, tant qu’il espéra que Benoit XIIf, comme il,1’avait promis, mettrait fin & lutte par une abdication volontaire. Mais quand il eut perdu cet espoir, il démontra, dans des écrits d’une hardiesse singulière, -la nécessité et la légitimité d’un concile général, mit en question l’infaillibilité et l’inviolabilité du pape, proclama la souveraineté des conciles généraux, leur indépendance absolue, et. remontant aux maximes de l’Évangile, n hésita pas à conclure que le pape peut être déposé par l’Église, lorsqu’il travaille notoirement à sa ruine. Ces principes furent adoptés par Te concile de Pise (1409), qui prononça la déchéance des deux papes, et nomma à leur place Alexandre V. Mais le schisme se ranima avec plus de violence : les deux prétendants refusèrent de reconnaître l’élu du concile, et la chrétienté eut alors trois papes, qui, semblables aux soldats romains au jour de la Passion, se disputaient les lambeaux de la robe du Christ. Gerson persista, malgré l’épreuve décevante de Pise, dans sa croyance à l’efficacité des conciles généraux. Dans celui de Constance (1414), où il parut comme ambassadeur du roi, de l’Université et du diocèse de Sens, il exerça une autorité considérable, et fut 1 inspirateur de la plupart des résolutions. Il fit aumettre au droit de suffrage les députés des princes, les docteurs laïques, les ecclésiastiques inférieurs et même de simples prêtres. Rien de plus remarquable que sa définition du concile général, qui devairtomprendre l’Église universelle, et ne pouvait même exclure de son sein tout fidèle qui demanderait à se faire entendre. En même temps, il demandait la périodicité de ces grandes assemblées, le droit pour elles de se réunir, même sans convocation du pape, les armait d’un pouvoir supérieur à celui du saiui-siège, qu’elles pouvaient juger et réformer, leur donnait l’infaillibilité doctrinale, et imposait leurs décisions à toute la chrétienté. C’était la démocratie dans l’Église. Gersou l’excluait du gouvernement de l’État, peut-être par un mouvement de rancune contre la faction populaire des cabochiens, qui l’avait persécuté. Le concile de Constance admit une partie de ces idées, déposa les papes schismatiques, élut Martin V, pour les remplacer, et parla beaucoup de la réformation de l’Église et de la destruction des abus, mais ne prit aucune résolution a. ce sujet. Le nouveau pape promit des réformes, n’en exécuta aucune, et tout fut dit. Les espérances des chrétiens les plus einiuents et les plus vertueux du.siècle lurent anéanties ; Gerson ne s’en consola jamais. Il est assez curieux de constater que