Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 8, part. 3, Frit-Gild.djvu/209

Cette page n’a pas encore été corrigée

GARN

sur la valeur des monnaies de compte chez les peuples de l’antiquité (1817-1818), fortement critiqués par Letronne, et refondus par l’auteur sous ce titre : Histoire de la monnaie depuis tes temps de In plus haute antiquité jusqu’au règne de Charlemagne (1819, 2 vol. in-8<>).

GARNIER DE SAINTES (Jean), conventionnel montagnard, né à Saintes (Charente-Inférieure) en 1754, mort en 1820. Il était avocat dans sa ville natale avant la Révolution, dont il accepta les principes avec enthousiasme. Elu procureur syndic du département, il fut ensuite envoyé à. la Convention nationale et prit place sur les bancs de la Montagne. Dans le procès de Louis XVI, il vota la mort en motivant ainsi Son vote : o Les peuples, lorsqu’ils sont trahis, ne jugent pas leurs rois : ils lancent la foudréet les exterminent. » Lors de la trahison de Dumouriez, il proposa à la Convention de confier le pouvoir exécutif à une commission de douze membres et de déclarer Pitt ennemi du genre humain. Envoyé dans l’Ouest, il y déploya une énergie extraordinaire contre les Vendéens et Tes contre-révolutionnaires, et paya souvent de sa personne dans les actions militaires. Il remplit encore d’autres missions dans la Charente-Inférieure et la Gironde, fut un de ceux qui tentèrent d’opposer une digue au ilôt de la réaction, réclama en faveur des patriotes opprimés, appuya la loi qui éloignait de Paris les ex-nobles, et néanmoins fit rendre un décret en faveur des veuves et des anfants des condamnés. Après l’insurrection populaire du 1er prairial, il se déclara avec certaine âpreté contre les insurgés, et, quelques mois plus tard, réclama des mesures énergiques contre les fauteurs royalistes du mouvement du 13 vendémiaire. Réélu au conseil des Cinq-Cents, il proposa l’exclusion des nobles des fonctions publiques, appuya le coup d’État du 18 fructidor contre les royalistes, demanda l’application d’une taxe sur les nouveaux enrichis et sortit du conseil en 1798, Président du tribunal de Saintes pendant la période de l’Empire, il siégea à la Chambre des représentants en 1815 ei lit décréter l’envoi de commissaires aux armées. Banni par la Restauration, comme régicide, il passa aux États-Unis, et se noya par accident avec son fils dans un voyage sur l’Ohio.

GAIIMER DE L’ACBE, conventionnel, né vers 17£>9, mort vers 1812. Compatriote et ami de Dan ton, il fut envoyé par son département à la Convention nationale, prit place sur les bancs de la Montagne, vota la mort du roi, fut chargé d’organiser le gouvernement révolutionnaire dans les départements de l’Yonne et de l’Aube, puis, après le 31 mai, de réprimer l’insurrection fédéraliste du Jura, missions qu’il remplit avec autant de modération que de succès. Il ne joua d’ailleurs qu’un rôle efface, et il est surtout connu par sa fameuse exclamation au 9 thermidor. Robespierre, luttant en vain contre les clameurs de l’Assemblée, était retombé sur son siège, brisé d’efforts et la voix étranglée. Garnier lui cria d’une voix terrible : « C’est le sang de Danton qui t’étouffe 11

En brumaire suivant, il fut nommé membre du comité de Sûreté générale, participa à la réaction, fut désigné par la Guyane pour le conseil des Cinq-Cents, mais vit son élection annulée par le conseil. Sous le Directoire, il fut employé comme commissaire prés de l’administration centrale de son département.

GARNIEH (Étienne-Barthélémy), peintre français, né à Paris en 1759, mort dans la même ville en 1849. Issu d’une famille riche, il « reçut une brillante éducation littéraire. Ses parents le destinaient à la magistrature ; mais son amour pour la peinture, qui avait pris rapidement les proportions d’une véritable passion, en décida autrement. En sortant du collège, il "se lit admettre dans l’atelier do Doyen, puis dans celui de Vien. Il suivait encore les conseils de ce dernier maître, quand il se présenta au concours du prix de Rome. 11 fut couronné vainqueur en 1788, bien qu’il eût pour concurrents (jirodet et Gérard. Durant son séjour en Italie, et tout en satisfaisant aux engagements réglementaires, il exécuta plusieurs tableaux qui signalèrent son nom au public. Aussi, quand il revint à Paris, en 1793, était-il déjà fort connu. L’année même de son retour, il exposa la Désolation de la famille de Priant, esquisse excellente, qui eut un immense succès. Le Directoire lui en commanda l’exécution. En 1795, malgré les graves préoccupations du moment, son Ulysse et Nausicaa fut encore accueilli très-favorablement. Mais le succès qui avait signalé chacune de ses expositions devint un véritable enthousiasme, quand parut le tableau commandé par le Directoire, la Désolation de la famille de Priam. Cette immense peinture, actuellement au Louvre, est une des plus belles pages de l’art français. D’une composition sérieuse et sévère, elle est pleine de ligures superbes, de groupes poignants, dramatiques, d’une poésie sombre et sauvage. Ce n’est pas l’œuvre d’un coloriste, et cependant la couleur en est bien supérieure à tout ce qu’on voyait en ce temps-la. Cet excellent tableau, l’un des meilleurs du maître, mit le comble à sa réputation. En 1801, après son exposition de la Charité^ romaine, Garnier fut chargé de peindre au L’ouvre, dans une salle

GARN

des antiques, un sujet décoratif. Il exécuta Diane apparaissant à Hercule sur les bords du Ladon. Mais ce tableau, plein de qualités cependant, ne vaut pas ses œuvres antérieures. Au Salon de 1808, parut le Napoléon méditant dans son cabinet sur une grande carte de l’Europe, portrait d’un grand caractère. Après plusieurs autres expositions, il peignit, en 1814, l'Enterrement de Dogobert, qu’on voit encore dans la sacristie de l’église Saint-Denis. À la rentrée des Bourbons, l’artiste sut retrouver auprès de Louis XVIII la faveur dont il jouissaifauprès de Napoléon, et les commandes continuèrent d’occuper sans cesse son infatigable pinceau. Ainsi, en 1827, il n’avait pas moins de trois énormes tableaux au Salon : la Procession de saint Charles Borromée durant la peste de Milan, qui décore aujourd’hui l’église de Saint-Germain ; Saint Louis pris pour arbitre entre le roi d’Angleterre et ses barons ; Réception du duc d’Angoulème, à Chartres, à son retour d’Espagne. En 1831, l’artiste, déjà vieux, exécuta cependant d’une main vigoureuse le tableau qui est aux Sourds-Muets. Cette composition fut suivie de plusieurs autres, qui se ressentent de l’âge du peintre. Citons, par exemple, le Mariage de Napoléon et de Marie -Louise, que l’on voit à Versailles. Cette énorme toile, terminée seulement en 1847, est encombrée de petites figures insignifiantes, de chevaux, de voitutures d’un caractère grotesque, d’une exécution pauvre et timide.

Garnier était de l’Institut depuis 181S. Son œuvre est considérable, bien plus par la dimension et l’importance de ses peintures que par leur nombre. Quelques-uns de ses tableaux sont d’un mérite hors ligne ; presque tous ont do grandes qualités. Garnier, bien que contemporain de David, s’éloigna sensiblement de ia manière du peintre des

Uoraces, qui était pourtant, à cette époque, la loi suprême de 1 art français, la condition sine qua non de (a notoriété d’un artiste. Le genre de ce peintre forme la transition entre les écoles classique et romantique. Sa fécondité est inépuisable dans les détails, son coloris d’une grande richesse ; mais on lui reproche de la froideur dans l’expression, et Une grâce qui va jusqu’à, la mignardise. Son modelé manque de précision, ses ombres sont lourdes et sans transparence. Enfin, trop •Souvent il ne sait pas dégager les groupes principaux des groupes accessoires ; de sorte que la composition manque d’ordre et do clarté. Malgré ses imperfections, Garnier restera toujours un des maîtres de la grande école dont Ingres est la plus haute expression, et son nom sera toujours un des grands noms de l’art français.

GARNIER (Jean-Guillaume), mathématicien français, né à Wassiguy, près de Guise, en 1766, mort en 1840. Il fut successivement professeur de mathématiques à l’Académie militaire de Cohnar (1788), examinateur des aspirants à l’École polytechnique (1795-1809), adjoint à l’illustre Lagrange dans la même école (1802), professeur à l’École militaire de Saint-Cyr (1814), puis à l’université de Gand (1817-1830). Garnier était un savant laborieux, un vulgarisateur plutôt qu’un homme de génie. Ses ouvrages sont nombreux. Nous citerons les suivants ; Cours d’analyse algébrique (1S03, in-8°) ; Réciproques de la géométrie (1807, in-8°) ; Leçons de statique (1811, in-S») ; 'Traité de météorologie (Bruxelles, 1837, in-8") ; le Cours complet de Bezoul, avec des notes (6 vol. in-8°). En 1825, il a fondé, avec Quetelet, la Correspondance mathématique et physique.

GARNIER (Athanase), littérateur français, né à Véron, près de Sens, en 1767, mort à Paris en 1827. Il occupa des emplois dans l’administration avant la Révolution, et fut, après la création de l’Empire, nommé vérificateur du Garde-meuble de la couronne. Garnier employa ses loisirs à la culture des lettres. Nous citerons, parmi ses écrits : l’Appréciateur du mobilier ou Moyen de faire l’estimation et la vérification du mobilier le plus étendu (1821) ; Alanucldu tapissier décorateur et du marchand de meubles (1830) ; des romans publiés sous le pseudonyme a A t hier : Vingt uns de folie (1823, 3 vol. in-12) ; Lucile ou les Archives d’une jolie femme (1825, 2 vol. in-12). On lui doit aussi : Mémoires sur ta cour de Louis Bonaparte et sur la Hollande (1828).

GA11MEU (François-Xavier-Paul), jurisconsulte français, né à Brest en 1793. Il quitta la marine militaire pour aller faire son droit à Paris, où il fut reçu licencié en 1813. ] En 1820, il devint avocat au conseil d’État et à la cour de cassation, fut, à deux reprises, nommé président du consejl de son ordre, et se démit de sa charge en 1846. Les principaux ouvrages de M. Garnier sont : Èéyime des eaux ou des rivières navigables, flottables ou non (1822, in-8» ; 4e édit., 18Ô0-1851, 5 vol. in-8°) ; Traité des chemins de toute espèce, comprenant tes grandes routes, chemins de halage, vicinaux, etc. (1828, in-8") ; Supplément au ’Traité des chemins (1836, in-8°) ; Traité des actions possessoires (IS33, in-8<>) ; 30 édit., sous le titre de Traité de la possession, de la propriété, etc. (1847-1853, 2 vol. in-8o) ; Législation et jurisprudence nouvelles sur les chemins et voies publiques de toutes espèces (1855, in-8°), etc. Tous ces ouvrages, fruit d’études approfondies, sont très-estimés. M. Garnier a créé, avec M. Roger, en 1824, les Annales

GARN

universelles de législation et de jurisprudence commerciales, et fourni plusieurs articles à l'Encyclopédie du xixo siècle.

GARNIER (Adolphe), psychologue français, un des principaux représentants de l’école éclectique, et le disciple le plus éminent de Jouffroy, né à Paris le 27 mars 1801, mort au mois de mai 1864. Il fit avec succès ses études au collège Bourbon, où il eut pour professeur celui qui devait être son maître et décider plus tard de sa carrière philosophique, Le prix d’honneur de philosophie, obtenu par lui au concours général, le signala d’abord à l’attention de l’Université. Mais comme il n’avait encore pris aucune détermination relative au choix d’un état, il abandonna la philosophie pour entrer à l’École de droit, et se fit recevoir avocat. La littérature militante le tenta un moment. Il collabora à la llevue encyclopédique, au Producteur et surtout au journal le Globe, où débutaient brillamment plusieurs jeunes gens d’avenir. Le Globe n’appartenait pas encore aux adeptes de l’école saint-simonienne, et assurément Jouffroy ne s’attendait pas ù avoir pour successeurs ceux à propos desquels il dira plus tard : « Il n’est personne qui, en cherchant sérieusement ce qui est bien et ce qui est mal, ne puisse purifier son intelligence et son âme de ce Ilot d’idées fausses, immorales, bizarres, qu’une licence incroyable d’esnrit encore plus que de cœur verse aujourd hui sur la société, . Nul n’est excusable de ne pas sauver sa raison et son caractère dans un temps comme celui-ci ; car s’il y a dans les circonstances sociales au milieu desquelles nous nous trouvons des excuses pour ceux qui laissent l’une s’égarer et l’autre se corrompre, ces obstacles ne les absolvent pas. » Garnier comprenait très-bien la justesse du raisonnement de son maître, et quand le Globe changea de mains pour devenir saint-simonien, il s’empressa de le quitter. La fréquentation de, Jouffroy et le succès d’une brochure relative à la légitimité de la peine de mort le ramenèrent à la philosophie, que sa position de fortune et les nécessités du moment ne lui permettaient de cultiver avec fruit qu’en entrant dans l’enseignement public. Une noble ardeur le poussait vers ces belles études ; elle ressemblait à l’impatience qui pousse le missionnaire à évangéliser les nations sauvages. M.Garnier voulait contribuer aussi au renouvellement moral que l’école éclectique se

croyait appelée à accomplir. C’est dans cette vue qu’il se présenta à | agrégation, et il fut nommé, en qualité de suppléant, U la chaire de philosophie du lycée de Versailles, sous le ministère Martignac. Eu 1830, devenu titufaire de la même chaire, il ne tarda pas à donner des preuves d’une aptitude extraordinaire pour le professorat. Il était doué de « cette qualité souveraine et exquise, la simplicité, une simplicité nue, niais pleine de grâce et de distinction, qui attirait, retenait, rappelait ceux qui venaient l’écouter, dit M. Paul Janet. Cette parole toujours pure et précise semblait craindre de vous surprendre en touchant l’imagination : elle se dissimulait en quelque sorte et laissait parler les choses elles-mêmes. » Un exemple suffira pour la faire apprécier. Il est tiré du Précis d’un cours de psychologie, publié par l’auteur en 1831 (l petit vol. in-8°). Voici comment il raconte l’origine de la métaphysique : « Depuis les temps les plus reculés de 1 antiquité grecque jusque vers le milieu du vie siècle avant Jésus-Christ, les hommes qui, poussés par le

désir de savoir, naturel à 1 humanité, cherchèrent à pénétrer la raison des choses furent appelés sages, aX uoooi... Pythagore déclara que la méditation des penseurs ne devait pas s’appeler science, uoola, mais recherche do la science, ydonoyia... Lorsque Sylla revint d’Athènes, il en rapporta les manuscrits d’Aristote, qu’il remit entre les mains d’Andronicus de Rhodes. Celui-ci ayant trouvé après les livres intitulés : Ta euirixà(les Choses naturelles), cinq livres qui n’avaient point de titre particulier, voulut en marquer la place, et la désigna par ces-mots Ta ustà ta euaucâ (Livres faisant suite uux choses physiques...). Ils composent ce qu’on appelle la métaphysique dans la philosophie scolastique. » Ce sont de ces notions simples qui entrent dans l’esprit pour n’en plus sortir. M. Garnier avait ce talent austère et sans prétention, qui consiste à mettre un enseignement, abstrait de sa nature, à la portée des intelligences ordinaires, ce qui est le cas de la majorité des lecteurs, pour lesquels les livres sont faits en général, tandis que le petit nombre d’hommes d’élite n’a pas besoin de livres pour apprendréU penser. Ces qualités spéciales le désignaient d’avance au choix de l’Université pour les grandes chaires de Paris. Il y fut appelé en 1833. Il professa dans différents lycées avant d’entrer comme maître de conférences à l’École normale, et, dans toutes ces fonctions où il fut successivement appelé, il déploya un talent remarquable. En 1838, la santé chancelante de M. Jouffroy l’ayant contraint à quitter sa chaire, tout le monde pensa aussitôt à M. Garnier pour le remplacer. Celui-ci monta en effet dans cette chaire, illustrée par tant de philosophes, et soutint dignement l’honneur de la cause qu’il défendait. Il n’en descendit qu’à la mort de son maître, en 1842, et M. Damiron fut chargé de le remplacer. Garnier fut alors donné comme adjoint à Royer-Collard, pour la chaire

GARN

1043

d’histoire de la philosophie moderne, et, en 1845, il obtint celle de philosophie proprement dite, jadis occupée par Jouffrov. Il la conserva jusqu’à sa mort, c’est-k-dire jusqu’en 1864. En 1860, il avait remplacé M. de Tocqueville à l’Académie des sciences morales, où il eut lui-même pour successeur M. Cochin. Bien qu’associé à l’école éclectique par ses études et ses fonctions universitaires, M. Garnier ne fut jamais, en réalité, qu’un psychologue. Dans l’origine, la psychologie n’était pas exclue de la philosopnie éclectique. Science nouvelle, à peu près créée par Locke et les essayistes écossais, Laromiguière et Royer-Collard l’avaient mise à la mode en France ; ensuite, dominé par le prestige que des philosophes illustres avaient su donner à cette science, l’éclectisme avait affiché l’intention de diriger de ce côté une partie considérable de ses efforts. Cousin lui-même avait fait de la psychologie une des grandes divisions de son programme et n’avait pas- hésité à la proclamer la source profonde de la science philosophique. « Avant de se mettre librement à penser ou à sentir, disait-il (voir Damiron, Essai sur ta philosophie en France au xixe siècle, 1828, l vol. in-8<>, p. 328), il faut que l’àine ait d’abord la pensée et le sentiment, qu’elle les ait reçus en quelque sorte et les ait vus se développer par l’effet des circonstances au sein desquelles elle est placée ; en d’autres termes, avant d’agir comme force libre, il faut qu’elle agisse comme force fatale, avec une intelligence et une passion qui s’exercent finalement. C’est pourquoi i’àma ne devient une personne, n’est un être moral, ne peut parler d’elle et en son nom que quand elle est parvenue à être quelque chose dans les mouvements auxquels elle se livre. • Cousin entrevoyait qu’il y avait k la fois honneur et profit pour 1 âme a se rendre compte de ses opérations et, par conséquent, à les étudier d’une manière expérimentale. Jouffroy prit au sérieux les paroles et l’intention de Cousin, et fit de l’examen des phénomènes psychologiques l’objet propre de ses recherches. Il conseillait d ajûunier les problèmes de la métaphysique jusqu’à ce qu’on connût la nature intime de l’âme, de la conscience. Il mourut à la peine, après avoir émis une théorie, éclairci quelques points et préparé la voie à d’autres plus heureux. Cependant l’éclectisme ne tint pas ses promesses de la première heure. Après avoir reconnu la nécessité absolue de disséquer l’âme humaine avant d’entrer dans le domaine de la philosophie objective, la nécessité de donner des notions générales à des jeunes gens qui n’avaient point une vie entière à consacrer à la recherche de la vérité l’avait détourné de sa voie. Il s’était donc borné à faire l’historique de la question, à exposer, commenter, énumérer les problèmes à résoudre, et à indiquer la méthode à suivre. Seul, après Jouffroy, M. Garnier a regardé le programme de Cousin comme un engagement que l’éclectisme se devait à lui-même de remplir. U publia un Truite des facultés de l’âme, qui est, pour ainsi dire, le résumé de sa vie entière. L’auteur n’était pas un homme de génie ; mais c’était un penseur indépendant et original. « Ilavaitenoutreàuuhaut degré, dit M. Paul Janet, l’une des premières facultés philosophiques : il pensait par lui-même. Jamais il n’a admis une seule idée qui ne lui lut devenue propre, et qu’il n’ait en quelque sorte, comme le disait Jouffroy, repensée de nouveau. Aussi tenait-il à toutes ses idées, comme il arrive lorsqu’on les a conquises par son propre effort, au lieu de les recevoir toutes faites par la complaisance facile d’un esprit sans résistance et sans ressort. Nul n’a moins cédé que lui à ce scepticisme flottant, si fréquent de nos jours, qui se plaît à donner successivement raison à tout lo inonde, parce

qu’il n’a pas assez de force pour choisir, ni assez de science pour se décider. »

Les principaux ouvrages de M. Garnier

sont : Pi-écis de psychologie (1830, in-s°) ; la

Psychologie el la phrénologie comparées (1839,

in-Su) ; Critique de la philosophie de Thomas

1 Heid, Quid sit poesis, thèses pour le doctorat

I (1840) ; Traité de morale sociale (1850, in-8°) ;

cet ouvrage a été couronné par l’Académie

française ; Traité des facultés de l’Ûme (1852,

3 vol. in-8<> ; 1865, 2o édit., 3 vol. in-12).

Il a publié, en outre, une excellente édition des œuvres philosophiques de DescarLes, et fourni plusieurs articles au Dictionnaire des sciences philosophiques de M. Franck, entre autres une notice estimée sur la vie et les travaux de Jouffroy son maître. Il a laissé des fragments d’une Histoire de la morale qu’il n’a point achevéej mais dont il a donné des extraits à l’Académie des sciences morales. M. Garnier avait préparé une 2° édition de son Traité des facultés de l’âme, qu’il n’a pas eu le temps de mettre au jour. La publication en est due à M. Paul Janet, qui l’a accompagnée d’une préface, suivie de notes

explicatives.

GARNIER (Hippolyte-Louis), graveur et lithographe, né à Paris en 1802, mort en 1855. Il apprit la peinture sous la direction d’Hersent, exécuta des marines et des paysages, dont le plus remarquable est une Vue d’un château gothique dans le Calvados, puis s’adoinia à l’étude de la lithographie, se créa une manière à part, composée de hachures, de grains, de frottis, de tons estompés, pro-