Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 8, part. 3, Frit-Gild.djvu/180

Cette page n’a pas encore été corrigée

1014

GARC

par le gouverneur royal Vaca de Castro au fils d’Almagro, et enfin se rangea dans le parti du vice-roi, Pedro de la Gasca, contre Gonzalo Pizarre révolté. En récompense de sa fidélité à la cause qui représentait l’autorité royale, Garcias Lasso fut nommé gouverneur de Cuzco et intendant de la justice. Il s’appliqua à améliorer le sort des Indiens, pour qui il fonda plusieurs établissements utiles, et mourut dans le chef-lieu de son gouvernement. Il avait épousé une princesse du sang des Incas.

GARCIAS LASSO ou GARCI LASSO DE LA VEGA, historien péruvien, fils du précédent, né à Cuzco vers 1530, mort à Valhidolid en 156S. Sa mère était une Péruvienne, loya ou princesse du sang des Incas. Elle lui apprit la langue de ses ancêtres et lui inspira le désir d’écrire leur histoire. Garcilasso parcourut le Pérou pour recueillir des renseignements, acquit une certaine influence sur les indigènes, et excita ainsi les défiances du gouvernement espagnol, qui finit par transporter à Valladolid ce dernier des Incas. On a de lui, en espagnol : Commentaires royaux qui traitent de l’origine des Incas, de leurs lois, de leur religion, de leur gouvernement, etc. (Lisbonne 1609, in-fol.), trad. en français par Dalibard (1744) ; Histoire générale du Pérou, trad. en franc, par Pradelie Baudoin, sous le titre de : Histoire des guerres civiles des Espagnols dans les Indes (1646), et divers autres ouvrages intéressants, bien qu’écrits d’un style emphatique et diffus, notamment une Histoire de la Floride (Lisbonne 1605, in-8°), trad. en franc, par Nicolas Le Comte (1G67). Les ouvrages de Garcias Lasso sont surtout intéressants, en ce que ce sont les seuls documents nationaux qui nous restent sur les Péruviens.

GARC1ER s. m. (gar-sié — rad. garce). Débauché, coureur de filles. Il Vieux mot.

GARCJLASSO. V. Garcias Lasso.

GAHCIN DE TASSV (Joseph-Héliodorc-Sagesse-Vertu), orientaliste français, né à Marseille en 1794.11 quitta sa ville natale, où il avait appris l’arabe vulgaire, pour se rendre à Paris, afin de s’y livrer à l’étude des langues, pour lesquelles il avait une aptitude toute particulière. Garein apprit le persan et l’indoustani sous la direction de M. Silvestre de Sacy, qui lui fit obtenir une chaire à l’Ecole spéciale des langues orientales vivantes. En 1838, il fut nommé membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres. Ce savant | linguiste fait également partie de la Société asiatique de Paris et de la Société asiatique de Londres. Outre des discours d’ouverture et de nombreux articles publiés dans le Journal asiatique, on a de lui : Les Oiseaux et les fleurs, allégories morales d’Azz-Eddyn-al-Moeadessi, trad. en franc. (Paris, 1821) ; Exposition de la foi musulmane, trad. du turc de Mohammed-ben-Pir-Ali-el-Berkeri (1S22) ; Coup d’œil sur la littérature orientale (1822) ; ■ Conseils aux mauvais poètes, trad. de l’indoustani (1856) ; Relation de la prise de Constantinople, trad. du turc de Saad-Eddyn (1826) ; Doctrines et devoirs de ta religion musulmane, trad. de l’arabe (1827) ; VFucologe musulman (1827) ; Rudiments de la langue indoustani (1829) ; Mémoire sur les particularités de la religion musulmane dans l’Inde (1831-1832) ; les Aventures de Jîamrup, roman-poëme, trad ! de l’indoustani de Ïahein-Udin (1834) ; les Œuvres de Wali, célèbre poète du Decan, avec trad. et texte (1834) ; Histoire de la littéruture indoue et de l’indoustani (1837, 2 vol. in-8<>) ; Manuel de l’auditeur du cours d’indoustaiii (1839-1847, 2 vol. grand in-8°) ; une édition de la Grammaire persane, de sir William Jones (1845) ; Rudiments de la langue indoue (1847) ; la Poésie philosophique et religieuse chez les Persans (1857, in-8°), etc.

M. Garein de Tassy a publié depuis lors : Description des monuments de Dehli en 1852 (lS61, in-s°) ; la Poésie philosophique et religieuse chez les Persans (1864, in-S»), etc.

Il a été nommé, en 18G9, membre de la Société royale des sciences de Copenhague.

GARCINIE s. f. (gar-si-nl). Bot. Genre d’arbres de la famille des clusiacées ouguttifères.

— Encycl. Les gareinies sont des arbres à feuilles portées sur des pétioles courts et renflés, à fleurs presque solitaires, axillaires ou terminales, offrant un calice à quatre divisions, une corolle à quatre pétales, seize étamines et un ovaire surmonté d’un stigmate sessile et persistant. Le fruit est une baie globuleuse, coriace à l’extérieur, couronnée par le stigmate, à une seule loge renfermant cinq à huit graines. Ces végétaux habitent les Indeset les îles voisines. }ls sécrètent un suc jaunâtre analogue à la gbmme-gutte. La gareinie cornée fournit à l’industrie le bois de corne, ainsi nommé à cause de son aspect ; ce bois est très-dur, d’un grain fin, et comme vermiculé quand il est poli ; il produit un très-bel effet, et on le recherche dans l’ébénisterie. Une espèce plus intéressante encore est le mangostan. I

GARCINIE, ÉE adj. (gar-si-ni-é —rad. gar-cinie). Bot. Qui ressemble à une gareinie.

•7-s. f. pi. Tribu de la famille des guttifères, qui » pour type le genre gareinie.

GARCINS (Mlle des), actrice française. V. Dbssarcins.

GARC

a

GARÇON s. m. (gar-son — V. l’étym. À la partie encycl.). Pils, progéniture du sexe masculin : Il a eu de sa femme trois garçons et cinq filles. Qui pourrait croire qu’une mère qui a trois garçons, dont l’aîné est marié, est sur le point de voir finir sa maison ? (Mme de Sév.) J’ai quatorze garçons, tous aussi grands que moi, Et qui sont tous quatorze au service du roi.

BoURSADLT.

Il Enfant du sexe masculin : Un petit garçon.

Un jeune garçon. Une fille qui aime à jouer avec les garçons. À trois ans, une petite fille a, intelligencietlement, un an d’avance sur un petit garçon. (Mm« Monmarson.) C’est par la perception, par les sens, que les petites filles distancient de beaucoup les petits garçons. (Mme Monmarson.) Une femme de trente ans, en France, n’a pas les connaissances acquises d’un petit garçon de quinze ans. (H. Beyle.) La pétulance des jeunes garçons est comme un apprentissage de hardiesse et de force. (Théry.)

^— Par ext. Homme d’un âge peu avancé. S’emploie très-souvent en ce sens avec un adjectif qui exprime une qualité bonne ou mauvaise : Un garçon fort entendu. C’est un habile garçon. Voilà un garçon diligent. Pauvre garçon, il n’a pas inventé la poudre ! Il est beau garçon, il/me Paul s’est amourachée d’un grand benêt de vingt-cinq ans ; elle l’épouse ; c’est un garçon brutal ; il la battra comme plâtre. (Mme de Sév.) Le prélat romain est souvent un gros garçon qui sort du séminaire avec une tonsure pour tout sacrement. (Ed. About.)

— Par anal. Ouvrier qui travaille chez un patron : Un garçon tailleur. Un garçon boulanger. Mon gentilhomme, donnez s’il vous plait, aux garçons, quelque chose pour boire. (Mol.) il Employé qui sert les pratiques dans certains établissements : Garçon de café. Garçon d’hôtel. Garçon de magasin. Le garçon de café est comptable de tout ce qu’il casse. (G. Sand.)

Versez, garçons, versez,

Versez, versez, tant qu’on vous dise assez,

Molière,

Il Aide affecté à un travail spécial : Garçon d’écurie. Garçon de cuisine. Cet employé a sous lui trois garçons pour l’aider à ne rien faire. Bans les auberges, l’avoine est plus souvent bue par les garçons d’écurie que mangée par les chevaux. (V. Hugo.) Il Domestique dans une administration : Le garçon es/ chargé de balayer le bureau, de tenir de l’encre dans les encriers, de l’huile dans tes lampes.' La pièce où se tenait le garçon de bureau est meublée d’un poêle, d’une grande table noire. (Balz.) || Employé subalterne d’une administration : Un garçon de recette doit être un homme sûr, et doit avoir quelque intelligence. Le garçon gui fait la poste n’est pas encore de retour. H Apprenti, homme qui n’est pas encore passé maître : Garçon boucher. Garçon boulanger.

Pour convive je suis d’une assez bonne étoffe, Suivant de Démocrite et garçon philosophe.

Reouard.

— Vaurien, homme libertin, débauché. Il Vieux en ce sens.

— Particulièrem. Homme célibataire : Un vieux garçon. Rester garçon. Je veux vivre et mourir garçon. Un garçon est plus dur, plus cruel qu’un homme marié. (Bacon.) Les dernières années d’un garçon sont tristes. (Volt.) Quand on est vieux garçon, il n’est plus d’avenir.

C. d’Harleville.

— Dans un certain nombre de cas que nous allons signaler, l’adjectif qui accompagne le mot garçon en modifie le sens ou en est mo- j difié, au point que la signification do l’un des deux s’en trouve dénaturée. Il Mon garçon I Manière familière d’interpeller un enfant où | un jeune homme : Mon garçon, je sonr/eais ! que tu serais bien mon fait si tu savais lire et j écrire. (Le Sage.) Mon garçon, je te fais compliment, tu t’es joliment montré, et je ne t’au- rais pas cru autant de courage. (Scribe.) Il Brave garçon. Jeune homme qui se conduit de ’ manière à plaire à ceux avec qui il est en ! rapport : Ali ! le brave garçon 1 Voilà parlercomme un oracle ! (Mol.) Il Bon garçon, Jeune homme sans malice, sans arrière-pensée, difficile à offenser ou à mécontenter. Se dit souvent avec une pointe d’ironie : Il est bon garçon, ma foi ! Arous étions vingt, tous bons garçons. // est bon garçon, bien complaisant, bien bêle. Bon garçon, cœur banal. (Bougeart.) Et puis, bon garçon., ., pour un homme a épouser, ce n’est pas un signalement, cela. (L. Laya.) Il Mauvais garçon, méchant garçon, Jeune homme turbulent, tapageur, prompt à faire une querelle : Enfonce ton bonnet en méchant garçon. (Mol.) Il Beau garçon, joli garçon, Homme qui se trouve dans une position fâcheuse ou embarrassante : Eh bien ! nous voilà beaux garçons à présent ! Ne trouvez-vous pas que vous êtes maintenant joli garçon ? Il Petit garçon, Homme de peu d’importance relative : Traiter quelqu’un en petit garçon. Les autres écrivains sont de petits garçons auprès de lui. Molière est traité tout à fuit en petit garçon par les Jay de l’époque. (Th. Gaut.) n Grand garçon, Personne avancée en âge et qui mérite certains égards ou a droit à certaine indépendance : Je suie trop grand garçon pour avoir des régents.

E. Aubier.

Garçons de la noce, garçons d’une fêle,

GARC

Jeunes gens chargés de faire les honneurs aux invités, dans une noce ou une fête : C’est mon droit, dit-il ; vous savez que je vous ai promis d’être votre témoin et votre garçon de moces. (G. Sand.) || Garçons d’honneur. Nom que l’on donne aux deux jeunes gens qui, dans la cérémonie du mariage religieux, tiennentle poêle au-dessis de la tête des mariés.

Ménage c’e garçon, Habitation de jeune célibataire, proverbiale par le désordre qui y règne d’ordinaire : C’est un chaos, un vrai ménage db ga ïçon. Il Vie de garçon, Vie libre, indépendante, exempte des soins qui accompagnent d’ordinaire la vie d’un père de famille : Il est marié et veut mener une vie de garçon, il Bepc s de garçon, Repas où il n’y a que des hommes, mariés ou non : Nous allons faire un charmant déjeuner de garçons.

— Hist. Garçon de la chambre du roi, Officier jouissant des privilèges des commensaux, et qui prêtait serment entre les mains du premier gentilhomme de la chambre en exercice. Il en existait six qui servaient par quartier. Leurs fonctions consistaient à être toujours dans li chambre au nombre de deux pour attendre les ordres ; l’un d’eux couchait dans l’antichambre, l’autre dans le cabinet <" a roi. Ils étaient chargés de faire apporter le bouillon du roi. et faisaient préparer les choses nécessaires à la chambre. Quand on jouait dans les appartements du roi, ils avaient les profits du jeu pour les cartes, qu’ils fournissaient. Il Garçot de garde-robe, Commensal de la maison du roi qui avait le droit de prendre le titre d’écuyer. Il y en avait quatre, dont deux devaient toujours faire le service. Leurs fonctions consistaient à prendre soin de tous les habits et du linge du roi. Ils avaient aussi la garde de plusieurs pierreries, épées garnies de diamants, et croix de l’ordre aussi en diamants. Ils entraient tous les matins, avec les autres officiers de la garde-robe, dans la chambre du roi, avant même qu’il fût sorti de son lit, afin de tenir tout pret l’habillement du monarque. Il Garçon de lévrier, Officier de louveterie qui suivait la cour sous les ordres du grand louvetier, et jouissait des privilèges des cammensaux de la maison du roi, || Garçon d.î limier, Officier commensal de la maison du roi, placé sous les ordres du grand louvetier de France et suivant la cour.

— Mar. Garçon de bord, Apprenti embarqué pour son instruction sur un navire caboteur, ti Garçon du pelle, Manœuvre qui remplit les mesures de charbon sur les quais.

— Pêche. Garçon de bord, Aide qui se loue pour aider à la pêche. Il Garçon de cour, Ouvrier employé à la salaison des harengs.

— Art milit. Garçon-major, Officier qui faisait autrefois le détail du régiment sous le major et l’aide-irajor.

— Antonymes. Fille, homme marié.

— Encycl. Liiguist. L’origine de ce mot est très-difficile à déterminer. Sans entrer à ce sujet dans unj foule de détails inutiles et sans intérêt, nous nous rangerons à l’opinion de Chevallet, qui rattache garçon, gars, au germanique : gothique vceir, homme ; Scandinave ver ; ancien.allemand wer, anglo-saxon v>er, ver, que Pctt rapproche du latin vir. Déjà, au dernier siècle, Ûaseneuve et plusieurs étymologistes comparaient gars à cette forme celtique. Pott ramène toutes ces formes soit au san : : crit vira, héros, guerrier ; comme adjectif, fort, puissant, d’où virya, virata, force, prouesse, valeur, dérivé sans doute de la racine var, protéger, soutenir, le héros étant le défenseur, le protecteur de ses concitoyens ; soit au sanscrit vara, le mari, l’époux, proprement leprotecteur delà femme, aussi de la racine var. Pott et Benfey comparent également, comme provenu du moins de la même racine, le grec érôs pour Feras, avec digamma. On disait autrefois, et on dit encore dans certaines provinces, gars dans la même signification que garçon. Ce n’étaient point deux mots différents, mais deux formes du même mot.

« Un garz les vit e l’nunciad à Absalon. » (Livre des Rois.)

« Si li dist : Va, si m’aporte le saete que jo ei trairai. Cume li garz fud esmeuz, Jonathas traist un ultre par ultre le garchun. * (Livre des Rois.)

Chevallet remarque qu’Amyot écrit garson avec un s.- cette orthographe est, en effet, plus en rapport avec gars que ne l’est celle de garçon écrit avsc un e :

« Il estoit en grt nd’peine comme un jeune garson nourry aux champs, qui n’avoit encores jamais expérimenté que c’est que du brigandage d’amoi r. » (ùaphnis et Chloé.)

On disait aussi autrefois garse, garce, pour une jeune fille. C’est le féminin de gars ; « S’il avient que un home prent une damoiselle par force et li gaste sa virginité, ou par la volonté de lu garce., ou par sa simpleté, sans le seu dou f ère et de la mère, ou de ceaus qui l’ont en garde, la raison coutnande que se le père ou h. mère de la garce ou ces parents qui l’ont e.i garde, ou en cui poeir elle est, veulent avoir merci de celui qui l’a despucelée, et il e : ; t très home qui li afiere, et la deir prendre por feme. » (Assises de Jérusalem.)

« Mahomet promît aux siens un paradis tapissé, paré d’or et de pierreries, peuplé de garses d’excellente beauté, » (Montaigne,)

GARC

« M’amie, dict-il, au temps passé y avoit une jeune garse belle et jolie, en fleur d’eage comme toi. » (Daphnis et Chloé.)

Littré remarque avec raison que garçon, pas plus que garce, n’a par soi un mauvais sens ; v pourtant il y eut un temps dans le moyen âge où il prit une acception très-défavorable et devint-une grosse injure, signifiant coquin, lâche :

« Li malveis... quidtèrentle rei servir à gré E garçunt et putains unt snint Thomas hué.. Thomas le martys.

« Fol est et gars qui a dame se done. •

Quesnb.

■ Ne furent pas ce jour garçons lâches

Car vuidier firent maint arçon. •

(Roman d’Athis.)

Aujourd’hui, ajoute Littré, il ne s’attache plus rien de pareil à garçon, et c’est garce qui est tombé très-bas. M. Ampère veut que garçon soit le cas oblique de gars, comme sapin est le cas oblique do saps. Mais Génin s’éloigne complètement de cette opinion. Selon lui, gars etgarçon différaientdesens. Garsest tout uniment un jeune homme, garçon emporte une idée de mépris ; c’est un gars de mauvaise extraction et de mauvaises moeurs, tout au moins un valet.

Et dieut qu’elle a mescoisi tyiêchaisi) Quand d’un garçon fist son ami. Tant bons cavaliers l’atten’doient. Qui tant bel et tant rice estaient 1 Bien Ta ses talens sorportée,

Quant à un garçon s’est copiée.

(Parllienopeus.)

« Sa passion l’a bien soutenue, pour qu’elle ait osé s’unir à un garçon, »

Charlemagne, revenu sur le champ de bataille de Roncevaux, défend que personne, écuyer ni garçon, reste auprès des morts avant qu’ils ne soient vengés : Laissez gésir les morz tut issi cum il sunt... Que (nul) n’i adeist esquier ne garçun...

(Roland.)

Garçon, dans ce dernier exemple, a le sens que nous lui conservons encore quand nous disons à un garçon de café : a Garçon ! » c’est le premier sens du mot, selon Génin.

Garsun, dans la vieille traduction des Bois, comme garcio, dans tous les écrivains du moyen âge, signifie un laquais, un mauvais sujet.

« Et avec ce, lui dist plusieurs injures et villenies en l’appelant garson. • (Procès-verbal de 1376, cité par Du Cange.)

— Admin. Garçon de bureau. Cet honorable fonctionnaire est chargé de tenir propres les bureaux d’une administration, de faire les commissions, d’introduire les visiteurs, etc. Sous le premier Empire, le type des hommes destinés à cet emploi était beaucoup moins varié qu’aujourd’hui. On avait réservé ces places subalternes aux soldats devenus inutiles par suite des mutilations de la guerre. Dans ce temps, les bureaux pouvaient être regardés comme une succursale de l’hôtel des Invalides. Depuis lors les choses ont bien changé, et le troupier a été vaincu par le valet de chambre. Les ministres et les hommes influents qui ont passé plus ou moins rapidement aux affaires ont récompensé plus d’une fois les services intimes des gens de leur maison par des places de garçon de bureau dans un ministère quelconque. Cette diversité de provenance» produit la diversité des types. Pris en masse et dans leurs habitudes générales, les garçons de bureau sont, comme les employés, jaloux et défiants l’un de l’autre ; on peut dire d’eux ce qu’on dit des moines : ils sont entrés sans se connaître ; ils vivent ensemble sans s’aimer ; ils se quitteront sans se regretter. Et puis la politique est un obstacle à ce que ces hommes puissent s’accorder. Chacun d’eux représente, en effet, un système qu’il défend avec acharnement, parce que c’était celui du ministre qui l’a fait placer.

Le garçon de bureau rêve de devenir huissier ; , mais comme les ministres et les hauts fonctionnaires exigent un certain physique, une certaine figure, des mollets et des manières, cette place est le bâton de maréchal des garçons de bureau. Parvenu au grade d’audiencier général, il faut voir quel aplomb, quelle assurance, quel contentement de lui-même rayonne sur la face de cet homme im- ’ portant ! C’est la mouche du coche, c’est le mouvement perpétuel. Il s’occupe de tout, répond à tout, excepté pourtant à la sonnette des chefs de bureau. Quand il éconduit des solliciteurs, c’est avec une irréprochable gravité, la tête haute et d’un geste solennel. I] répète dix fois sans y rien changer la formule du refus d’entrée : « Non, messieurs, vous n’irez pas plus loin ; j’ai mes ordres, et je ne puis rien y subroger, «

« Véritables piliers des ministères, experts des coutumes bureaucratiques, ces garçons, sans besoins, bien chauffés, vêtus aux dépens de l’administration, riches de leur sobriété, a dit Balzac, sondent jusqu’au vif les employés ; ils n’ont d’autre moyen de se désennuyer que de les observer ; ils connaissent leurs manies, savent jusqu’où ils peuvent s’avancer dans le prêt, et font d’ailleurs les commissions av^ec discrétion. Ils engagent ou dégagent au montde-piété pour les employés, achètent les reconnaissances et prêtent sans intérêt. Voici

pourquoi : aucun employé ne prend d’eux la moindre somme sans la rendre en y joignant