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dfxns la Russie méridionale, qu’il parcourut dans le but de voir quels avantages commerciaux la France pourrait tirer de relations directes avec cette contrée ; visita successiment Odessa, Nieolaïef, Kherson, Novo-Tcherkask, capitale des Cosaques du Don, Astrakhan, les bords occidentaux, de la mer Caspienne, Théodosie, Simphéropol, etc. ; retourna à Paria en 1S18, publia un extrait de son excursion dans les Annales des voyages de Malte-Brun, et reprit la route de Russie en 1819. Gama s’attacha surtout à explorer la Géorgie, regardée par le duo de Richelieu comme devant être le centre du commerce entre l’Europe et l’Asie, ’puis visita le Chirvan, le Daghestan, se rendit à Moscou et à Saint-Pétersbourg, obtint une étendue de terrain considérable pour faire connaître aux indigènes les procédés de culture les plus avancés, les arts industriels, dont ils n’avaient pas l’idée, et contribua à faire rendre par le gouvernement russe un ukase qui accordait de grands avantages aux étrangers qui s’établiraient en Géorgie. Vers le inêmetempSj l’empereur Alexandre ayant accordé la franchise pour dix ans sur toutes les marchandises expédiées de France en Asie, moyennant un simple droit de 5 pour 100, le gouvernement songea à profiter du débouché qui lui était offert pour les produits de ses manufactures et des facilités que donnait, pour un commerce d’échange avec la Perse et l’Inde, une voie si prompte et si peu dispendieuse. En conséquence, un consulat français fut établi à Tiflis, qui devait être l’entrepôt de ce commerce, et Gamba fut choisi pour remplir ce poste important. Ce fut dans « cette ville que mourut l’ancien négociant de Dunkerque, après avoir fait, en 1824, un dernier voyage à Paris, où il publia un intéressant ouvrage intitulé : Voyage dans la Russie méridionale, et particulièrement dans les provînceset au delà rfuCaucase(1824,2 vol. in-8°), avec atlas et cartes.

  • GAMBA (Barthélemi), bibliographe italien,

né à Bassano en 1766, mort à Venise en 1841. 11 fut, pendant de longues années, employé chez l’éditeur Remondini, de Bassano ; puis, après la création du royaume d’Italie par Napoléon, devint inspecteur de la presse dans le département de l’Adriatique et censeur royal. Plus tard, il devint administrateur de la bibliothèque Marciana à Venise. Gamba a rendu d’importants services à la science bibliographique par des travaux pleins do sagacité sur les éditions italiennes. Ses ouvrages biographiques ne sont pas moins estimables. Nous citerons de lui : Série dell' edizioni dé iesti di lingua italiana, (1805 et 1828, 2 vol.), livre où notre Brunet a puisé largement ; Bassanesi illustri (1807) ; Galeria dei letterati ed artisti délie provincie veneziane nel secolo xviir» (1824) : Vita di Dante (1826) ; Ritratiù di donne illustri veneziane (1820) ; Délie novelle itatiane in prosa, bibliografia (1833), etc.

GAMBA (Pierre, comte), philhellène italien, né à Ravenne en 1801, mort près Methana (Grèce) en 1826. Il était frère de la comtesse Guiccioli, que ses relations avec Byron ont rendue célèbre. Il se rendit en Grèce avec l’illustre poète anglais, tomba entre les mains des Turcs, rejoignit, après avoir été mis en liberté, Byron à Missolonghi, fit un voyage en Angleterre, lorsque Byron fut mort, puis retourna en Grèce et se battit vaillamment sous les ordres du colonel Fabvier- Gamba a publié en anglais le Récit du dernier voyage de lord Byron en Grèce (1825, in-8°), qui a été traduit en français par Parisot (1825).

çais par Parisot (1825)

GAMBACOUTAouGAMBACOUTI, nom d’une famille italienne, dont plusieurs membres possédèrent le pouvoir souverain à Pise. Les principaux d’entre eux sont les suivants : Andréa Gambacorta, mort vers 1354, avait acquis une grande fortune dans le commerce et était devenu le principal conseiller du comte Niero delà Gherardesca, chef de la république de Pise, lorsque celui-ci périt avec tous les membres de sa famille, fors de la peste de 1348. Les deux partis entre lesquels se divisait la ville, les Bergolini et les Raspanti en vinrent alors aux mains. À la suite d’une lutte sanglante, les derniers, qui représentaient l’aristocratie ; furent vaincus, expulsés, et Gambacorta fut investi du pouvoir, avec !e titre de capitaine général. Il s’attacha à rétablir l’ordre, à faire disparaître les anciennes divisions et à maintenir la paix avec la république de Florence. — Francesco Gambacorta, parent du précédent, mort en 1355, lui succéda avec le titre de conservateur, en 1354. L’année suivante, l’empereur Charles IV se rendit à Pise, où il fut magnifiquement accueilli par Gambacorta ; mais ayant pris parti pour Lucques, qui voulait s’affranchir du joug des Pisans, ces derniers se soulevèrent et assiégèrent Charles IV dans la cathédrale. Gambacorta, accusé par ses ennemis d’avoir fomenté la révolte, fut arrêté par ordre de l’empereur, avec plusieurs chefs de son

Ïparti, soumis à la torture et condamné à avoir a tête tranchée. — Pietro Gambacorta, neveu du précédent, après la mort duquel il fut exilé de Pise, mort en 1392. Il vivait depuis quatorze ans loin de sa ville natale, lorsqu’il y fut rappelé, en 1369, pour y exercer le pouvoir sous le titre de capitaine général. Il obtint, moyennant une forte somme, que Charles IV cesserait d’intervenir dans les affaires de Pise, et, délivré de toute pression

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étrangère, il s’appliqua à cicatriser les plaies de la patrie, pardonna les offenses faites à sa famille, maintint l’indépendance, la paix de la république, contracta d’étroites alliances avec les républiques environnantes, prit part à la guerre dite de la liberté, contre le pape, en 1376, et périt sous les coups des satellites de Jacopo d Appiano, jusqu’alors son ami et son confident.— Giovanni Gambacorta, neveu du précédent, fut exilé après la mort de ce dernier et de ses deux fils. Rappelé, en 1403, par les Pisans, alors assiégés par les Florentins, à qui Gabriel Visconti avait rendu la forteresse de Pise, Giovanni fut proclamé capitaine du peuple, mais se montra indigne de la confiance que lui témoignaient ses concitoyens. Il traita secrètement avec les Florentins et ouvrit, en 1406, la porte de Saint-Marc à leur armée, moyennant une somme de 50,000 florins, la souveraineté du comté de Bagno et trois palais à Florence.

’ GAMBADE s. f. (gan-ba-de — rad. gambé). Bond vif et désordonné : Faire des gambades. Des, gambades de singe.

Pendant qu’on donne au maître l’anguillade,

Le mulet fait sur l’herbette gambade.

La Fontaine. C’était alors des ris Des sauts, des gambades, des cris.

FLORIAN.

Amour fit une gambade,

Et le petit scélérat

Me dit : ■ Pauvre camarade,

Mon arc est en bon état.

Mais ton cœur est bien malade. •

La Fontaine.

— Fig. Marques de joie : Quoique je fasse des gambades sur le bord de mon tombeau, je n’en suis pas moins près d’y être couché tout de mon long. (Volt.) Il Action qui manque de règle et de suite ; boutade : J’ai écrit mon Hure d bâtons rompus, à sauts et gambades. (Montaigne.) Il Vieux en ce sens.

— Fam. Payer en monnaie de singe, en gambades, Donner des plaisanteries, au lieu des raisons qu’on devrait fournir ou de l’argent Qu’on devrait pajrer. Se dit par allusion à 1 ordonnance de saint Louis, d après laquelle les jongleurs s’acquittaient du droit de péage en faisant danser leurs singes devant le péager.

GAMBADELETTB s. f. (gan-ba-de-lè-tedimin. de gambadette, dimin. inus. de gambade). Petite gambade :

Les poissons Viennent aux sons Des rébus et des épineltfs, Et loin ou fond

De l’eau, font Peti tus tjambadelettes.

Des Perkiers. Il Inus.

GAMBADER v. n. ou int. (gan-ba-dérad. gambade"). Faire des gambades : Ils reçurent Vulcain autre leurs bras, comme il gambadait par l’air. (D’Ablanc.)

Les prêtres gambadaient autour du bœuf Apis.

CAStlL-BLAÏE.

Ce moribond chagrin, que brisait la douleur, Se mit & gambader ainsi qu’un bateleur.

PlRON.

— Fig. Se donner une peine inutile, s’agiter sans succès : La théorie de Fourier est debout ; la critique n’a fait encore que gambader devant elle. (Proudh.)

GAMBAGE s. m. (gan-ba-ge). Coût, de Flandre. Droit seigneurial perçu sur les brasseurs, à raison de quatre pots par brassin. Il On disait aussi cambage, gambaigb et cam-

BMGE.

GAMBA1S, village et commune de France (Seine-et-Oise), cant. de Houdan, arrond. et à 31 kilom.de Mantes, sur la Vergre ; 1,004 hab. Ruines d’une ancienne forteresse ; beau château et parc de Neuville.

GAMBADA, bourg d’Italie, prov. et à 34 kilom. S. de Brescia, dans une plaine fertile, près de Redone ; 2,600 hab. Commerce de céréales. Ce bonrg renferme trois églises, dont une assez remarquable, et lçs ruines d’un vieux château.

GAMB Alt A (Véronique), femme poSte italienne, né à Prat’ Albuino, près de Brescia, j en 1435, morte à Correggio en 1550. File appartenait à une noble et ancienne famille ; une éducation des plus soignées développa de bonne heure en elle sa vive intelligence. Véronique avait à peine dix ans lorsqu’elle adressa un sonnet à Bembo, qui lui répondit par un sonnet sur les mêmes rimes, et, à partir de ce moment, commença à naître entre ces deux personnages une amitié qui fut sans tache comme sans nuages. La jeune fille ne se borna point à cultiver la poésie : elle apprit le latin, le grec, étudia la théologie, les Pères de l’Église, la philosophie, et l’on prétend qu’elle prit le grade de docteur. A l’âge de vingt-trois ans, Véronique Gambara, épousa Gilbert de Correggio, avec qui elle vécut dans la plus parfaite et la plus tendre union. Devenue veuve en 1518, au bout de dix ans de mariage, elle prit le deuil pour ne le plus quitter, resta jusqu’à la fin de sa vie fidèle a la mémoire de l’homme qu’elle avait aimé, et partagea son temps entre l’éducation de ses deux enfants et la culture des lettres. Lorsque Charles-Quint alla se faire couronner à Bologne, en 1529, Véronique se rendit dans

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cette ville, où’sa maison devint le rendez-vous des plus illustres personnages. L’empereur, en retournant en Allemagne, voulut s’arrêter à Correggio, dans la demeure de cette femme distinguée (1530), qu’il visita de nouveau deux ans plus tard. On a recueilli les Lettres et les Poésies de Véronique, qui ont été publiées à Brescia, sous le titre de Rime e lettere (1759, in-8"). Parmi ses Poésies, au style élégant et naturel, on remarque de belles octaves sur la vanité des biens terrestres. Elle a consacré six de ses sonnets à célébrer la beauté des yeux de son mari.

GAMBABA (Jean-François, comte), littérateur italien, né à Monticelli d’Ongina, près de Plaisance, en 1771, mort à Brescia en 1848. La Révolution française trouva en lui un partisan enthousiaste. Lors de l’arrivée des Français en Italie, il contribua au soulèvement qui eut lieu à Brescia en leur faveur (1797), devint adjudant général de l’armée bresciane, fut fait prisonnier par les Vénitiens, condamné à la peine capitale et n échappa à la mort que grâce à l’intervention de Bonaparte. Après la réunion de Brescia à la république Cisalpine, Gambara entra dans l’armée. II fit partie de la commission des Cinq, qui apporta à Bonaparte sa nomination de président do la république Cisalpine, fut pendant quelque temps disgracié, puis reçut du vice-roi d’Italie le grade de colonel (1805), et finit par rentrer dans la vie privée en 1809. À partir de ce moment, il consacra entièrement son temps à des travaux littéraires. On aide lui : Relazione degli avvenimenti di Salo (1797, in-s°) : Geste dei Bresciani durante la lega di Cambrai (Brescia, 1820) ; la Lega di Cambrai (1S25), poème épique ; Ragionamentt dé cose patrie (1842, 4 vol. in-S») ; Commente ad uso degli stabilimenti d’educaiione, etc. Enfin, on doit au comte Gambara des tragédies : Andreola, Aledea, Calliroe, Focwn, Resmunda in Verona, Rosmunda in Ravenna, Angelica Montanini, Isnelda, etc., et des comédies, également publiées à Milan, parmi lesquelles nous citerons : YErrore d’un buon Padre ; I dilletanti allefprova ; Il fanatico giuocator dilolto ; VAsurario ;Glispettri notturni, etc.

Gamba™, roman, par H. de Balzac. V. Études philosophiques.

GAMBARA11E, bourg d’Italie, dans la Vénêtiô, province et a 13.kUom. O. de Venise ; 2,500 hab. Commerce de céréales, riz et bestiaux.

GAMBAROU, ville ruinée de l’Afrique centrale, dans l’empire de Bornou, sur la rive droite du Yeou, à 112 kilom. O. deKouka. Cette ville, ancienne résidence des sultans de Bornou, ne présente plus aujourd’hui qu’un ainas de ruines, qui indiquent, d’après certains voyageurs, que les anciens édifices de Gambarou étaient les plus remarquables de toute la Nigritie.

GAMBATESA, bourg d’Italie, prov. de Sannio, à 22 kilom. E. de Campo-Basso ; 4,200 hab. Belle église paroissiale ; hôpital.

GAMBE s. f. (gam-be). Forme ancienne du mot jambb, V. ce mot pour l’étymologie.

— Mar. Chacun des cordages en double, qui prennent de chaque bord, depuis le trélingage des bas haubans d’un grand bâtiment, jusqu’au bord des hunes. Ane. mus. Viole de gambe, Ancien instrument remplacé par le violoncelle, et qu’on tenait entre les jambes quand on en jouait. Jeu d’orgue qui imite cet ancien instrument.

GAMBESON s. m. (gan-be-zon). Armur. Gilet avec ou sans manches, fait de cuir, de toile ou de taffetas, rembouré et piqué, que les chevaliers du moyen âge portaient sous le haubert et la cotte de mailles, pour amortir le choc des armes blanches. « On l’appelait aussi

GAMBE, GAMBISSON, GOBISON OU COTTB GAMBOISÉE.

GAMBETER v. a. ou tr. (gamrbe-tè — rad. gambe). S’est dit pour gambader.

GAMBETTA (Léon^, avocat et homme politique français, né à Cahors (Lot) le 30 octobre 1838. Inscrit au barreau de Paris en 1859, il se fit d’abord connaître par ses succès dans les conférences des jeunes avocats et la part active qu’il prit aux réunions électorales de 1863. Dans le petit cercle qui se forme toujours autour des célébrités naissantes, l’avenir oratoire et politique de Gambetta n’était pas mis en doute. Cependant, lui, que distinguaient les facultés les plus brillantes, se ménageait visiblement au palais où, dédaigneux des affaires de mur mitoyen, il semblait attendre qu’il lui échût à dépendre une grande cause politique. Quelques procès de presse l’avaient déjà mis en relief, lorsque le ministre Pinard, en. déférant a la justice les journaux qui avaient ouvert la souscription Baudin, et en poursuivant les manifestations inoffensives du cimetière Montmartre (1868), offrit à Gambetta la plus belle occasion de faire pénétrer son nom dans les classes populaires..

Le Réveil, qui s’était fait le promoteur de la souscription, fut aussi le premier poursuivi et confia sa cause à Gambetta. Elle était en bonnes mains. Tout le monde se souvient encore de l’anathème éloquent lancé, en plein Palais de justice, par le jeune et ardent patriote contre le crime du 2 décembre et ses auteurs. Gambetta fit songer à Cicèron, et

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son discours rappela le Pro Roscio. Dans toute la presse, il ne fut question que de son immense succès. « L’éclat de la voix de Gambetta, écrivait M. Weiss, l’animation, de son, geste, le négligé même de sa tenue, tout dénotait en lui une inspiration violente et a contribué à produire un effet prodigieux. L’avocat impérial, le président ont essayé vainement à plusieurs reprises d’interrompre et de modérer une harangue aussi passionnée ; leur voix se perdait dans l’éclat de la voix de l’avocat et dans la précipitation puissante de son débit. »

Dès cette époque, Gambetta était classé parmi nos principaux orateurs. Un journal, qui depuis a essayé de le traîner dans la boue, le Figaro, esquissait alors ce portrait du vigoureux tribun : « Ego nominor Léo. M. Gambetta est un orateur de race. Il l’est, non-seulement en cela qu’il tirera toujours grand parti d’une belle cause, mais encore en ceci : qu’il ne fera jamais un bon plaidoyer dans une affaire de mur mitoyen. Il faut à cette grande éloquence les grandes salles et les grandes questions ; les grandes salles, car sa voix a des éclats suffisants pour les remplir ; les grandes questions, parce qu’il saura toujours s’élever à leur niveau. Rien qu’à voir cette carrure large et solide, cette tête bien posée sur un cou puissant, ce poing vigoureux et fait pour marteler 1 idée sur Ta barre, cet œil de cyclope où se concentrent toutes les lueurs d’une âme ardente, on comprend qu^on n’a pas devant soi un bavard vulgaire, mais bien plutôt un bon dogue déCombat, de ceux qui dédaignent les roquets et se réservent pour les vrais coups de gueule. Parlet-il ; la voix sort large, pleine et sonore, avec ces redondances méridionales qui choquent dans la causerie, mais qui deviennent dans le discours une musique ; les idées se pressent énergiques et hautaines, dans une langue chaude et imagée, sobre pourtant, et élégante ; l’auditoire, charmé d’abord, subjugué ensuite, s’émeut, s’échauffe et s’enlève :1a cause est perdue légalement, mais elle est gagnée dans les consciences. »

Ainsi qu’il arrive toutes les fois qu’une personnalité se révèle ou s’impose, les journaux parisiens ne tarissaient pas sur le compte de ce brillant jouteur, dont l’avenir ne faisait plus l’objet d’un doute. Les racontars foisonnaient. On écrivait que depuis longtemps déjà Gambetta était classé, au quartier Latin, parmi- les premiers orateurs des temps modernes, et que le café Procope, les tables d’hôte et tous les lieux- de réunion avaient déjà retenti de sa parole véhémente. La curiosité publique, surexcitée par le succès du jeune avocat, s’intéressait à tout ce qui touchait à sa personne. La maladresse de M. Pinard trouva donc le terrain préparé et servit merveilleusement Gambetta, en le mettant en relief juste au moment des élections générales de 1S09. Le défenseur du Réveil fut simultanément adopté comme candidat à Marseille et à Paris. À Marseille, où il avait pour concurrents MM. de Lesseps et Thiers, il obtint, au premier tour, !a majorité relative des suffrages ; il fut élu au second tour. À Paris, sa victoire fut complète. Sur 35,417 votants, il réunit 21,734 voix contre un peu plus de 0,000 données à M. Carnot. Il opta pour Marseille et fit ainsi arriver Rochefort. Une maladie du larynx, survenue à la suite de cette campagne électorale, le tint pendant quelque temps éloigné de la Chambre. Rétabli enfin, il prit part aux travaux du Corps législatif, parut avec éclat à la tribune, tout en gardant une certaine modération de langage, et se plaça à la tète de la fraction dite des irréconciliables. Il défendit Rochefort lorsque, à la suite de l’assassinat commis par Pierre Bonaparte sur Victor Noir, le gouvernement demanda à la Chambre l’autorisation nécessaire pour poursuivre le député rédacteur de la Marseillaise, et il devint bientôt le véritable chef du parti démocratique.

En février 1870, il présentaàla Chambre un projet de loi sur 1 admission dans les maisons d’aliénés, projet motivé par les scandales tout récents de l’affaire Sandon. Enfin, le 5 avril, il prononça un magnifique discours sur le plébiscite. Le jeune député de Marseille justifia dans cette séance, d’une manière éclatante, la confiance des électeurs et les espérances de ses amis ; il se révéla orateur politique de premier ordre, non moins habile que puissant, puisqu’il sut se faire écouter avec sympathie d’une Assemblée si peu favorable à ses doctrines. Sa magnifique harangue restera comme un cours de théorie républicaine. Sentant dès lors sa force, et confiant dans sa popularité naissante, il commençait à faire pressentir quel serait son programme, si les événements lui permettaient de prendre une attitude prépondérante ; il lançait, sous une forme ou sous une autre, des sortes de manifestes. Ainsi, voici ce qu’il écrivait dans une lettre destinée à la publicité, à la date du 24 avril 1870. Il s’efforçait de se concilier le parti conservateur en le rassurant par les déclarations suivantes : » Il faut surtout, écrivait-il à un ami, s’attacher à dissiper les calomnies dont on couvre nos doctrines et nos aspirations. Il faut dire, redire et prouver que, pour nous, le triomphe de lo démocratie fondée sur de libres institutions, c’est la sécurité et la prospérité assurées aux intérêts matériels, la garantie étendue à tous les droits, le respect de la propriété, la protection des droits sacrés et légitimes des tra>