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sânt une énergique résistance aux prétentions de l’orthodoxie. Galilée n’était point un héros, mais un savant ; te temps des martyrs d’une idée était passé ; et l’on comprend jusqu’à un certain point, sans l’excuser absolument, qu’à ces subtilités théologiques, U ces attaques peu sincères, on peut le croire, il n’ait opposé, dans cette lutte ridicule au xvii1e siècle, que d’autres subtilités et une défense aussi peu sincère. Le courageux dévouement à la science, à la foi nouvelle, eût été plus beau ; mais tout le monde n’est pas Socrate. Quoi qu’il en soit, le système de défense adopté par Galilée fut celui-ci : son intention sincère avait été de défendre le système de Ptolémée, système orthodoxe, contre les erreurs de Copernic ; « mais il s’était laissé entraîner par le penchant naturel qu’on a enécrivant des dialogues à faire parler chaque personnage avec toute la force et toute la subtilité en faveur de l’opinion qu’on lui attribue. » Le pauvre accusé promettait même d’ajouter à ses Dialogues deux, nouvelles journées, dans lesquelles il montrerait clairement que telle avait été son intention. Il y a là assurément quelque chose de ridicule ; mais ce ridicule ne passe-t-il pas tout entier du persécuté aux persécuteurs, de l’homme de génie abaissé a ceux qui le contraignaient a se ravaler ainsi ? Encore, l’humilité du vieillard nelesdésarme-t-elle point. Appelé devant le tribunal le 21 juin, pour y subir un dernier interrogatoire, Galilée y fut retenu, d’après le témoignage exprès de Nicolini, jusqu’au lendemain. Quelques historiens se sont appuyés sur ce fait pour avancer qu’il fut, ce jour-là, mis à la torture. Rien ne vient confirmer cette opinion, que combattent, au contraire, et le silence de Galilée, pendant le reste de sa vie, et les paroles de Nicolini, assurant deux jours après, de visu, que le condamné se portait bien. Ce fut le lendemain de ce dernier ■ interrogatoire que Galilée fut conduit à l’église de la Minerve, pour v lire son abjuration solennelle. Dans cette pièce, qu’il a signée, il se voit forcé de déclarer : ■ 1° Que le soleil soit placé au centre du monde et immobile, c’est là une proposition absurde et fausse en philosophie, et formellement hérétique, parce qu’elle- est expressément contraire à 1 Écriture sainte ; 2° que la terre ne soit pas le centre du monde, qu’elle ne soit pas immobile, mais qu’elle ait de plus un mouvement diurne, c’est là encore une proposition absurde en philosophie, et qui, théologiquement considérée, est pour le moins erronée en foi. » On voit le singulier rôle de ce tribunal religieux., chargé de contester à la science ses vérités, et de borner ses découvertes au profit d’une science immuable, contenue dans les livres sacrés. Les imprudents ! ce n’était pas Galilée qu’ils condamnaient, mais laurs propres Écritures ; car le jour ne pouvait tarder a venir, où cette autorité scientifique de la •Bible, éu’ils mettaient tant de zèle à soutenir, tomberait sous les coups des découvertes humaines. Galilée, il faut le déclarer, ne fut point maltraité après sa condamnation. Laissé un jour ou deux dans les appartements du saint office, il obtint peu de jours après l’autorisation de subir sa captivité dans la villa Médicis, et bientôt il lui fut permis d’aller vivre auprès de l’archevêque de Sienne, qui se déclara hautement son ami dévoué. Il semblait que, par la douceur, le pardon, une bienveillance tardive, le pape voulût faire oublier ce qu’il y avait eu d absurde et même de révoltant dans cette campagne de l’orthodoxie contre la science, entreprise par un homme éclairé et* modéré, mais pape pour son malheur. Réduit à ces proportions, le procès de Galilée change d aspect ; il n’a plus cette couleur sombre et mélodramatique des sentences secrètes de l’inquisition ; le moyen âge était fini, et l’on ne pouvait le ressusciter. Tout cela s’est passé au grand jour, sans violences matérielles, sans tortures physiques ; aussi ce procès doit-il exciter le rire de la pitié plutôt que l’indignation ; ce n’est plus l’œuvre d’un despotisme écrasant pesant sur la pensée ; c’est le dernier et impuissant effort de la crédulité intolérante contre la science. Quant au fameux mot : E pur si muove, il faut bien reconnaître qu’il n’a pas été prononcé. Aucun témoignage contemporain ne le mentionne. Mais disons, avant de le réléguer parmi la foule innombrable des mots soi-disant historiques, qu’il est de ceux qui sont plus vrais que la réalité même, parcequ’ils résumentadmirablement les sentiments d’un homme. Ces mots-là, s’ils n’ont pas été dits, on peut être sûr qu’ils ont été pensés. Le E pur si muove, prononcé ou non, restera éternellement, parce qu’il est la réponse victorieuse de la science a quiconque veut étouffer sa voix.

Galilée, le» droit* de la «cieuce et la méthode de* fecieucc* physique*, par Théodore-Henri Martin, doyen de la Faculté des lettres de Rennes. Quel bruit n’a-t-on pas l’ait autour du nom de Galilée ? à quelles controverses n’a pas donné lieu ce nom ? Qué n’at-on pas dit pour excuser, pour attaquer l’inquisition ? Mais il y a quelques années à peine que nous pouvons connaître la vérité sur ce procès, qui a soulevé tant de colères. C’est en 18C7 seulement que M. H. de L’Epinois a

fmblié, dans la Revue des questions historiques, es pièces importantes de ce procès. En 1850, un prélat romain sans bonne foi, Msr Mariai, avait prétendu livrer au public le dos GALI

sier complet de Galilée ; mais les pièces les plus importantes étaient omises à dessein’ ; aussi M. Martin a-t-il raison de dire que es prélat • a fait preuve de dissimulation, pour ne rien dire de plus. »

Le livre de M. Martin, qui a pour épigraphe un passage tiré d’une lettre de Stelliola a Galilée : « Ceux qui cherchent k mettre la discorde entre la science et la religion sont peu amis de l’une et de l’autre, » se divise en deux parties. La première est intitulée : Vie, découvertes, travaux, procès, séquestration, mort et gloire durable de Galilée ; la seconde est une étude sur la valeur scientifique des travaux de Galilée, où M. Martin montre et démontre que Galilééest un des premiers inventeurs de la véritable méthode des sciences physiques. Ce livre est donc à la fois un livré d’histoire et un livre de science ; la partie la plus originale est celle qui a trait au procès de Galilée. Il ne veut pas faire retomber sur l’Église la condamnation du nouveau système du monde, découvert par Copernic et Galilée, et adopté de nos jours

Far tous les savants. Ce ne fut pas, en effet, Église qui condamna Galilée, mais une congrégation de Rome. Toutefois, faut-il conclure de ce fait, avec M. Martin, que l’Église n’est pas responsable de cette condamnation ? Se peut-il que la « sacrée congrégation » n’ait pas, dans cette circonstance, représenté l’Église elle-même ?.Personne ne croira que cette congrégation fût une sorte d’individualité sans mandat, rendant des arrêts qui n’avaient pas force de loi ; on ne croira pas davantage, que les papes Paul V et Urbain VIII aient condamné le nouveau système astronomique comme simples docteurs particuliers, et non comme papes. Il est impossible à l’homme de se dédoubler ainsi. Quoi qu’en dise M. H. Martin, quels que soient les faits qu’il allègue, faits que, d’ailleurs, nous venons de discuter, nous n’en persistons pas moins à faîfe remonter jusqu’à l’Église la responsabilité de cette condamnation. Et puis, disons-le, nous n’aimons pas ces façons cavalières de jeter à l’eau une congrégation ecclésiastique et deux papes par-dessus le marché. Nous n’approuvons pas davantage cette façon légère de torturer les textes pour les accommoder à la science moderne, et faire •tourner et arrêter le soleil... par métaphore. À ces procédés jésuitiques, à ces distinctions de procureurs, nous préférons la brutale obstination d’un Veuillot ou d’un Berthaud frappant du pied à leur tour et retournant, pour l’appliquer au soleil, le prétendu mot de Galilée : E pur si muove l Voilà comment nous comprenons la foi.

« M. Martin, dit M. H. Gaîdoz, loue Galilée de n’avoir pas été jusqu’au martyre. « Galilée savait bien que ses preuves resteraient bonnes après son abjuration. Sa mort sur

« le bûcher n’aurait été utile ni à la science ni à la religion, qu’il aimait toutes deux. » Je suis d’accord avec M. Martin pour louer Galilée de s’être conservé à la science ; je le loue aussi pour s’être conservé à lui-même, considération que M. Martin néglige, et qui avait probablement quelque importance pour Galilée. Mais comment M. Martin, qui ne marche toujours qu’appuyé de textes, peut-il abandonner ici sa prudence habituelle, au point de supposer que Galilée a évité le bûcher par amour de la religion ? * D’autre part, dit M. H. Martin, en se perdant par résis■ tance inflexible, il aurait nui beaucoup à la religion. Je suis convaincu qu’il n’aurait pas’

« Bubi le dernier supplice ; ni Urbain VIII ni les inquisiteurs n’auraient voulu aller jus> que-là ; mais il aurait été retenu dans tes prisons du saint office toute sa vie, comme un novateur dangereux et incorrigible. Par cette conséquence odieuse d’une erreur jun diciaire, les intérêts de la religion auraient été encore bien plus compromis qu’ils ne l’ont été par une sentence moins rigoureuse. » (P. 199.) Mais si, pour employer les expressions de M. Martin, Galilée ne voulait pas nuire à la religion, pourquoi se mélait-il d’astronomie ? 11 se fût évité les tracasseries perpétuelles de sa carrière et ie désagrément de son abjuration, s’il avait passé sa vie à rechercher plutôt comment on va au ciel que comment va le ciel. M. Martin nous parle à tout instant de Galilée comme sincèrement dévoué à la religion catholique ; c’est ainsi, en effet, que la question nous apparaît ; mais en Italie, au commencement du xvne siècle, pouvait-il se donner pour autre chose ? Poser la question dans ces termes, c’est la résoudre. »

Galilée, drame en trois actes et en vers, par François Ponsard, représenté au Théâtre-Français le 8 mars 1867. Le plus brillant succès a signalé l’apparition de cette pièce, qui cependant est loin d’être bonne ; aussi ce succès doit-il être considéré comme une manifestation de l’opinion publique en faveur de l’intention qui a guidé l’auteur, plutôt que comme une consécration de son triomphe littéraire. On a couvert Galilée d’applaudissements, et cependant la société n’a pas été bouleversée, l’athéisme n’a pas été proclamé, nulle émeute n’a ébranlé les statues de Corneille et de Molière sur leurs vieux, socles de marbre, en dépit des prédictions et des injures anticipées des feuilles cléricales et de l’interdiction de la censure, qui, sans l’intervention de l’empereur, n’aurait pas laissé jouer la pièce, et eût ajouté à bien d’autres cette nouvelle

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preuve de ridicule ineptie. « En réalité, dit M. Challemel-Lacour, ce drame, qu’on voulait proscrire comme un insultant défi à une puissance trop éprouvée ne peut guère porter ombrage à l’autorité romaine, car il ne dépasse pas les proportions bourgeoises. » Si l’on s’imagine voir un Polyeucte de la raison abattant les idoles du préjugé, on se trompe. L’auteur ne nous a pas montré un Prométhée de la science cloué par le Jupiter chrétien sur le rocher infâme du désaveu, mais un homme de génie abjurant, pour l’édification des chercheurs aventureux, des opinions qui pourraient nuire à l’établissement de sa fille bien-aimée, et donnant ainsi un exemple de sagesse qui le recommande, bien plus que ses découvertes, à l’approbation des pères de famille de nos jours. On avait donné Ponsard comme un descendant de Corneille, et c’est en songeant aux mâles tirades du vieil Horace que les cléricaux redoutaient d’entendre Galilée. Ils durent être rassurés : autre temps, autres mœurs. Ponsard était du sien ; aussi a-t-il pris le contre-pied de l’héroïsme cornélien. Le Galilée historique, brisé par les souffrances physiques et morales, a pu manquer à la grandeur du rôle que son génie lui imposait ; mais celui de Ponsard faiblit devant des tourments bien prosaïques ; et, au lieu d’offrir le spectacle d’une puissance nouvelle, la science née d’hier, luttant contre la vieille autorité de l’Église, il nous présente le tableau affligeant d’un vieillard reniant la vérité pour acheter un époux à sa fille. L’auteur a voulu transformer une chute morale en une victoire des vertus modestes du foyer. Il a rapetissé son héros ; nous pouvons lui accorder volontairement notre pitié ; si on réclame pour lui notre admiration, nous nous indignons. Il est vrai que notre colère abandonne promptement Galilée pour aller retomber, plus implacable, sur les fanatiques ignorants, qui méritent de voir ajouter à l’infamie de leurs persécutions la honte de l’abjuration arrachée à ce grand homme. > Tant, dit M. J. Labbé, dans cette France, qu’on nous représente comme en décadence, il y a de passion virile et généreuse pour cette première de toutes les libertés, la liberté de conscience I • Ponsard a très-bien compris que l’histoire nue de Galilée, ce duel entre la tradition et la pensée, entre l’autorité inflexible et la raison qui a secoué le joug, disons le mot, ce débat de Sorbonne serait fort peu dramatique, en dépit de l’animation qu’y jettent les invectives du faux savant Pompée, ce défenseur de l’orthodoxie scientifique, et des réponses ironiques de Vivian, ce futur héritier des doctrines du maître, que nous trouvons ici, par un anachronisme licite, son plus fervent disciple. Aussi a-t-il tenté de faire des souffrances du père et des tortures morales du savant l’élément tragique de la pièce. Quel parti en a-t-il tiré ?

Au début de la pièce, Florence entière semble s’être donné rendez-vous devant la maison de Galilée, attirée par le bruit que font ses découvertes. Pendant que Pompée et Vivian discutent, un moine cherche à ameuter contre le philosophe la populace, et, désespéré de ne pouvoir le torturer, se console en torturant les textes de l’Évangile.

Écoutez ce que dit l’apôtre : • Dans les deux Pourquoi, G&liléens, promenez-vous vos yeux ? »

Ce mauvais calembour a une excuse, il est historique. Un capucin de Florence, ie Père Caccini le prit pour texte d’un sermon contre Galilée. « D’ailleurs, fait observer M. de Biéville, dans toute cette scène, M. Ponsard n’a fait que traduire en vers pleins de franchise et de comique les absurdes objections formulées par les ennemis de Galilée. » Ce ne sont pas là les seuls déboire3 du philosophe ; il rencontre jusque dans sa famille des obstacles à ses travaux. Sa fille, sa chère Antonia, était fiancée à un jeune homm-) de riche maison, Taddeo ; mais, depuis qu’il est accusé d’hérésie, les parents de Taddeo neveulent plus entendre parler du mariage projeté. Les deux amoureux déplorent leur malheur dans un duo d’amour, que M. Sarcey appelle « un cours d’application de l’amour à l’astronomie. » Antouia est trop dévouée à son père pour exiger qu’il sacrifie son honneur à son bonheur ; mais sa femme Livie n’a pas les mêmes scrupules ; écoutez-la :

Ah ! que a’imitez-vous ces dignes professeurs, Qui disent ce qu’ont dit tous leurs prédécesseurs 7 Vçilà. des gens chez qui l’ordre et le bon sens règnent ;

Ils enseignent sans bruit ce qu’on veut qu’ils enseignent, Et, sans se travailler à débattre en public S’il fmit croire Aristote ou croire Copernic, ’ Ils tiennent sagement que l’opinion vraie Doit être celle-là pour laquelle on les paie, Et que, puisqu’Aristote ouvre le coffre-fort, Aristote a raison, et Copernic a tort.

Vous parlez d’or, madame Prudhomme, et faites, sans vous en douter, justice de ces professeurs accommodants, bien mieux que votre pauvre mari répondant :

Et qu’importe Aristote ? Faut-il jurer par lui, menie quand il radote ?

D’ailleurs, l’événement vous donne raison, et n’est-ce pas de nos jours le grand-rrrgument ? Un huissier de l’inquisition apporte-à Galilée une citation pour comparaître et se rétracter devant le saint office Sa femme et

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sa fille, épouvantées, veulent fuir avec lui ; il refuse :

Fuir est d’un criminel. De quoi qu’on menace, À mes accusateurs je prétends faire face.

Livie répond :

Ah ! je l’avais bien dit ! ah ! méchantes lunettes,

Fussiez-vous dans l’Arno, vous, avec les planètes !

Voilà le drame exposé.

Au deuxième acte, Galilée est seul dans son cabinet, méditant sur le ’Système du monde. Il prononce le plus long monologue qui soit au théâtre, cent sept vers., contenant une magnifique description des cieux et des astres. MM. Dumas et Leverrier ont dû se pâmer d’aise, mais non le public, qui regarde le théâtre comme une école de mœurs, non d’astronomie. Ce monologue a pourtant sa raison d’être. Il nous montre le savant dans son enthousiasme, prêt à souffrir le martyre pour la science et la vérité. Le drame va nous faire connaître les faiblesses de l’homme en face des affections de famille, les capitulations de la chair l’amenant à renier cette vérité pour laquelle il voulait mourir. Toute la pièce est là. Le premier assaut à la vertu de Galilée est livré par un inquisiteur, qui l’accuse de détruire la foi. Moi, détruire la foi, quand j’agrandis le culte 1

— N’importe...

Ton nom, d Galilée, est la rébellion.

— Non ! je suis l’examen, et voub l’oppression.

Après une joute brillante entre ces deux lutteurs, Galilée reste seul, bien seul ; car le grand-duc, son protecteur, l’abandonne par peur de Rome, et n’est pas séduit par cette perspective que lui ouvre le philosophe : Je ne puis m’empècher pourtant d’imaginer,

Que c’était un spectacle assez grand a donner, Q’un prince et qu’un docteur d’une égale vaillance, Défendant l’un son sceptre, et i’autre sa science.

On a supprimé cette scène à la représentation ; c’est un tort. Outre la leçon morale qu’elle contenait : Ne vous confiez pas aux puissants (le la terre,

elle préparait le voyage de Rome, et commençait le chapitre des désillusions’du philosophe.

Au grand-duc succède Antonia, qui répond d’abord vaillamment : Si ton honneur s’oppose & de (els désaveux, Fais selon ton honneur, et non selon nos veux ;

puis, lorsque son amant vient supplier son père, tombe presqu’en faiblesse : ’ Mis entre deux devoirs, quel des deux faut-il suivre ? Je ne puis me tourner vers l’une ou l’autre loi, Sans blesser la nature ou sans trahir ma foi,

s’écrie Galilée en proie à une perplexité qui redouble encore au troisième acte. Nous le voyons dans une salle du château de l’inquisition, séparé du tribunal seulement par un rideau. Livie, Antonia et Taddeo le conjurent de signer le désaveu, .qui seul peut le sauver du bûcher ; Vivian lui-n ;ême le lui conseille :

Un martyre inutile est un excès d’orgueil,

dit-il ; singulière maxime pour mettre sa conscience à son, aise t Galilée, accablé, s’écrie :,

Ah ! vous ne savez pas ce que vous exigez, Quel principe vital en.moi vous égorgez !

J’ai comme eux ma maitresse, et j’ai ma royauté, La science. J’adore à genoux sa beauté. Et vous pouvez juger de quoi coup on me tue Quand on veut, Dieu puissant ! que je la prostitue.

Et il lit l’acte d’abjuration qu’il- doit répéter à genoux ; il doit se rétracter. Cela ne suffit pas aux gens qui le retiennent à Rome ; il faut qu’il dénonce les hérétiques : Le délateur complète le parjure ;

Fort bien ! l’abaissement est encor plus profond. En fait de déshonneur, ils savent ce qu’ils fout.

Il froisse d’abord la rétractation ; puis, vaincu par son amour paternel’, il signe. L’inquisiteur fait ouvrir les rideaux pour que le peuple assiste au triomphe de Home, c’est-à-dire au fanatisme et de i’igiiora : ice. Galilée ment et blasphème, forcé par le tribunal, et murmure bien bas, de peur d’être condamné comme relaps, le fameux mot traditionnel :

Et pourtant elle tourne !

« Cette pièce, dit M. de Bièville, est d’une extrême simplicité. Point d’intrigue, point de nœud, point de surprise, point d’intérêt romanesque. Le seul intérêt, c’est l’intérêt historique, la vérité des détails, et surtout le style, qui : dans aucun dot ouvrages précédents de M. Ponsard, n’a été plus franc ni mieux approprié aux caractères. Il est admirable qu un auteur malade, comme l’était M. Ponsard en composant Galilée, ait pu écrire avec cette force, cette netteté’ et cette perfection. » Le style, tel est, en effet, le grand mérite de Galilée ; mais si sans le style, comme dit Butibn. les ouvrages ne cuvent vivre, le style seul ne suffit pas pour es faire vivre, « Or, dirons-nous avec M. Sarcey, tous les personnages sont en bois. On dirait qu’ils ne sont au monde que pour faire de beaux vers. Nous sommes charmés par des alexandrins bien frappés ; mais une situation vraie et touchante, un trait naïf do caractère ferait bien mieux notre affaire. Qu’on nous parle du mérite du style, nous renchérirons

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