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raison ; or c’est précisément sur ces dernières que toutes les religions insistent le plus, comme pour mieux constater leur triomphe sur cette pauvre raison qui n’en peut mais de leurs anathèmes.

Mais les anathèmes ne sont pas des arguments. Affirmer sans preuves que la raison humaine conduit à l’isolement, à l’égoïsme, au désespoir et à la dissolution sociale, c’est trop commode. Les faits de chaque jour démentent ces accusations. Les classes éclairées font plus d’usage de leur raison que les classes inférieures en proie à la superstition, et nous ne sommes pas les premiers à remarquer que la moralité y suit les progrès de l’intelligence. Loin de mener à l’isolement, l’étude de l’homme développe les instincts de sociabilité, et quand on observe la marche de la civilisation, on s’aperçoit bien vite que les peuples tendent d’autant plus à se rapprocher, qu’ils s’affranchissent davantage des superstitions religieuses. Le libre arbitre a ses fanatiques, mais il ne les arme pas les uns contre les autres, et ses annales, qui ne datent pas d’hier, ne sont pas souillées des horreurs qui caractérisent les guerres de religion.

La foi, disent ses apôtres, est aussi ancienne et aussi universelle que le monde. Elle a veillé au berceau des sociétés naissantes, et, de nos jours encore, le sauvage préfère croire à ses fétiches que de ne croire à rien. Ces exemples nous touchent peu. Devons-nous, dans l’âge viril, prendre les enfants pour modèles ? L’enfant croit à tout, aux démons, aux sorciers, aux esprits, aux revenants, aux fantômes. Dans le sommeil de l’intelligence, l’imagination ouvre la porte aux chimères et en peuple l’esprit. La foi religieuse vient ensuite épurer les croyances ; mais, en s’imposant de force et comme par surprise, elle brise d’avance les ressorts de l’âme et ne tend qu’à affaiblir les caractères au lieu de les fortifier. Le libre arbitre qui a émancipé le monde, peut seul créer des générations fortes et vigoureuses, en habituant l’homme à user de ses propres forces et à ne compter que sur lui-même. La foi, tout au contraire, ne fait de l’homme qu’un pantin aux mains d’une fatalité inexorable ou d’une Providence capricieuse. Et lorsqu’elle parvient à envahir l’âme tout entière, elle ne fait que des ascétiques et des illuminés.

Dans notre siècle de transactions hypocrites et honteuses, il est de bon ton d’afficher un peu de foi en paroles, sauf à n’en tenir aucun compte dans les actes. Un petit grain de foi ne nuit pas. C’est une espèce de passeport à l’intérieur, qui, légèrement falsifié, pourrait encore servir, se dit-on, à l’étranger, c’est-à-dire dans la vie future. D’autre part, bon nombre d’âmes tendres, mais peu viriles, fatiguées du combat de la vie, se réfugient dans la foi religieuse, comme le malade recourt à l’opium pour obtenir le sommeil qui le fuit. Ce sont nos néo-catholiques. Mais, entre la raison et la foi, toutes les tentations de conciliation, rêves d’esprits généreux ou calculs d’hypocrites, échouent misérablement. Entre la raison qui éclaire et la foi qui aveugle, pas de milieu. Il faut choisir. Lors de l’invasion du choléra dans la Grande-Bretagne, le clergé anglican, qui, en superstition, n’a rien à envier au clergé catholique, demanda au Parlement de décréter un jour de jeûne pour combattre le fléau. Lord Pahnerston répondit qu’il croyait beaucoup plus à l’efficacité des mesures sanitaires. La raison eut raison contre la foi, et nous sommes de l’avis de lord Palmerston.

Dans le langage ordinaire, la foi se confond avec l’autorité des témoignages ; elle en a les inconvénients, les avantages et la légitimité. L’apparition de la doctrine de liant et les ravages qu’elle avait faits dans le champ de la certitude donnèrent au mot foi une acception qu’elle continue d’avoir et qui la caractérise aujourd’hui. Dans ce sens, la foi est la certitude immédiate et irrésistible ou nous sommes que les idées de l’entendement et les perceptions des sens ont trait à des sujets réels, en même temps que le sentiment de notre existence personnelle. À ce degré, la foi est un instinct qu’on ne saurait abandonner sans suicide intellectuel. « En dehors de la philosophie, dit M. Ad. Franck, dans les habitudes générales du langage et de l’esprit moderne, l’idée de la foi est sortie de ses anciennes limites, de la sphère purement religieuse et semble, si l’on peut s’exprimer ainsi, vouloir se séculariser. N’entendons nous point parler chaque jour de la foi de l’artiste en son œuvre et du poète dans la poésie, de l’homme d’État dans les principes suivant lesquels il doit gouverner, et de l’homme, en général, en lui-même ? Ces expressions, complètement inconnues au xviie siècle, désignent le même fait que les philosophes de l’Allemagne ont opposé au scepticisme de Kant et les philosophes écossais au scepticisme de Hume et à l’idéalisme de Berkeley. » Envisagée à ce point de vue, elle est le principe sur lequel chacun se fonde pour avoir confiance en soi-même. Chacun acquiert une somme d’expérience qui est le fruit naturel de la vie. Cette expérience, sous l’effort des circonstances, a reçu une direction particulière. Comme il est impossible à tous de l’acquérir également, la force des choses oblige l’homme à la supposer chez ceux qui disent l’avoir. Cela ne procure, il est vrai, qu’une certitude purement morale, comme tout ce qui relève du témoignage. Croire n’est pas la même chose que comprendre ; mais, à l’origine des sociétés, cette foi suffisait. Elle était, d’ailleurs, d’un secours immense à la faiblesse de l’esprit : elle suppléait à la science dont l’acquisition est si laborieuse, ou à l’insuffisance de l’entendement. L’homme, pour sortir, de l’ignorance brutale et s’élever à la conscience, a plus longtemps eu recours à la foi qu’à la science. Ce n’est pas celle-ci qui a fondé la vie commune, créé des empires, des cultes, des monuments, mis, en un mot, l’homme en possession du globe : c’est la foi ; car les législateurs et fondateurs de sociétés n’ont point enseigné, mais révélé.

La foi a pour berceau l’Orient. Elle est, d’ailleurs, inhérente au mysticisme, et les nations où le mysticisme n’a pas d’empire sont incapables de foi. « Dans quelles dispositions d’esprit as-tu quitté ton lit ce matin ? dit Mahomet à l’un des siens. — Je me suis levé croyant. — À quels signes reconnais-tu que ta foi est ardente ? — Ma langue se colle à mon palais, mon sang bat impétueusement dans mes veines. Les nuits entières, je les passe sans sommeil ; je suis dévoré par un amour brûlant ; devant mes yeux, les jours et les nuits s’enfuient emportés par une main puissante ; les siècles roulent comme des tourbillons de poussière. Les portes de l’éternité s’étaient enfoncées ; elles s’ouvraient à deux battants devant moi, je ne me comprenais plus moi-même » Voilà l’extase telle que la donne la foi.

La foi chrétienne, abandon après expérience de la raison pour guide de la vie, n’a pas cette violence de la foi musulmane. Elle est plutôt l’anéantissement de soi-même en Dieu. Son objet est Dieu. Elle doit sacrifier à Dieu sa personnalité sans retour, dépouiller le vieil homme tout entier, et le vieil homme, c’est l’homme raisonnant et ayant une volonté propre ; enfin, vivre systématiquement par le cœur et négliger l’entendement et la volonté jusqu’à ce que ces deux éléments de la vie se soient éteints par le manque d’exercice. Quand le résultat est acquis, il n’y a plus de mérite à s’y tenir : on est en plein quiétisme, pour parler le langage de Fénelon. Mais avant de l’atteindre, pour sacrifier ce qu’on possède en vue d’un but qu’on ne connaît pas, il faut une persévérance robuste.

— Iconogr. La Foi a été représentée allégoriquement de plusieurs façons différentes. Une des figures les plus originales que nous connaissions est celle qu’en a faite Andréa Solario : il l’a représentée debout, pour montrer qu’elle doit être active ; il lui a mis un bandeau sur les yeux, un flambeau allumé à la main et un œil ouvert sur la poitrine. Dans un tableau de Mignard, qui est au Louvre (no 355) et qui a été gravé par J.-B. de Poilly, elle est figurée par une femme assise auprès d’un autel, tenant une croix et ayant sur les genoux un livre ouvert (le Nouveau Testament) ; un enfant lui présente un calice et deux autres enfants soutiennent les Tables de l’ancienne loi. Un tableau de S. Vouet, du même musée, nous montre la Foi assise, tenant un cœur de la main droite et une palme de la main gauche ; au-dessus d’elle plane un ange ayant à la main une couronne de laurier. Un bas-relief de Slodtz, qui décore le péristyle de l’église Saint-Sulpice, à Paris, nous montre la Foi prosternée devant un calice surmonté d’une hostie rayonnante, et ayant auprès d’elle un ange avec la croix et l’Évangile. Au palais ducal, à Venise, est une belle peinture du Titien qui représente la Foi apparaissant à un doge sous la figure d’une jeune femme élevant d’une main un calice et soutenant de l’autre une énorme croix avec l’aide de deux anges. Le musée de Madrid a, du même maître, un tableau dont le sujet est la Foi catholique implorant la protection de l’Espagne ; ici, la Foi est figurée par une femme nue, désolée, attachée à un arbre et entourée de serpents : l’Espagne, sous les traits d’une guerrière, accompagnée de la Justice et suivie d’une troupe armée, se présente pour la défendre ; au loin, sur la mer, on aperçoit des embarcations turques qui viennent attaquer le catholicisme. Ce tableau allégorique, d’une fantaisie quelque peu profane, mais d’une riche couleur, ornait autrefois le palais de l’Escurial.

Parmi les autres représentations, nous citerons : une statue de Donatello, dans l’église Saint-Jean, à Sienne ; une composition d’Andréa del Sarto, gravée par Ch. Alberti (1580) ; un tableau de Paris Bordone (musée de l’Ermitage) ; une figure en ronde bosse par Rude, décorant la chaire de l’église de Saint-Étienne, à Lille ; un bas-relief de S. Challe (chaire à prêcher de l’église Saint-Roch, à Paris) ; un bas-relief en marbre de J. de Bay père (chaire de l’église des Missions étrangères, à Paris) ; une statue colossale, en bronze doré, tenant d’une main une palme et le labarum de l’autre, par B. Morel, placée au sommet de la tour de la Giralda, à Séville, etc.

— Féod. Foi et hommage. V. hommage.

— Hist. relig. Propagation de la foi. V. propagation.

— Allus. litt. Foi qui transporte les montagnes, Expression de Jésus-Christ après un de ses miracles.

Un homme s’approcha de Jésus, se prosterna devant lui et lui dit : « Seigneur, ayez pitié de mon fils, car il est lunatique et il souffre cruellement ; souvent il tombe dans le feu et souvent dans l’eau.

Et je l’ai présenté à vos disciples, et ils n’ont pu le guérir. »

Or, Jésus, répondant, dit : « Génération incrédule et perverse, jusqu’à quand serai-je avec vous ? jusqu’à quand vous supporterai-je ? Amenez-le-moi ici. »

Et Jésus l’ayant menacé, le démon sortit de lui ; et l’enfant fut guéri à l’heure même. Alors les disciples s’approchèrent de Jésus, et lui dirent tout bas : « Pourquoi n’avons-nous pu le chasser ? »

Jésus leur dit : « À cause de votre incrédulité ; car, en vérité, je vous le dis, si vous aviez de la foi comme un grain de sénevé, vous diriez à cette montagne : « Passe d’ici à là. » et elle passerait, et rien ne vous serait impossible. » (Saint Matthieu, ch. xvii.)

Ce mot profond de Jésus-Christ ne doit évidemment s’entendre qu’au figuré ; la foi la plus absolue, la plus enthousiaste, n’ébranlerait point un grain de sable, parce qu’aucun rapport sympathique ne peut s’établir entre la matière brute et la volonté. Mais Jésus-Christ a voulu dire que, dans l’ordre moral et intellectuel, c’est la foi qui produit les grandes choses, qui opère les prodiges ; le triomphe du christianisme est la preuve la plus éclatante de cette vérité. N’a-t-on pas vu, et ne voit-on pas encore tous les jours des êtres faibles ou ignorants, dépourvus de toutes ressources, livrés à eux seuls, mais soutenus par une conviction ardente, par une patience et une volonté qu’aucun obstacle ne peut briser, arriver à un but dont la seule pensée aurait fait frémir les hommes les plus forts et les plus intelligents ? C’est à la lueur de cette foi que Christophe Colomb apercevait les rivages inconnus d’un nouveau monde ; et c’est elle encore qui a fait pousser à Galilée ce cri sublime : « Et pourtant elle tourne ! »

« Ces détails pourront paraître à quelques
personnes puérils et minutieux ; mais lorsqu’on
verra les projets de cette jeune fille
réussir au delà de ses espérances et de toute
probabilité, malgré les obstacles sans nombre
qu’elle avait à supporter, on se convaincra
qu’aucun motif humain n’aurait suffi
pour la conduire au but qu’elle se proposait,
et qu’il fallait pour une telle œuvre cette foi
qui transporte les montagnes : »
Xavier de Maistre.

« Voyons, sais-tu, Maximilien, de quoi le
comte de Monte-Cristo est capable ? Sais-tu
qu’il commande à bien des puissances terrestres ?
Sais-tu qu’il a assez de foi en Dieu
pour obtenir des miracles de celui qui a dit :
Avec la foi l’homme peut soulever une montagne ?
«Eh bien ! ce miracle que j’espère, attends-le. »
Alex. Dumas.


La foi du charbonnier. On entend par ces mots une foi simple et naïve, qui croit sans examen. On donne pour origine à cette locution le conte suivant. Le diable, déguisé en ermite, d’autres disent en docteur de Sorbonne, entra un jour dans la cabane d’un charbonnier, et lui dit pour le tenter : « Que crois-tu ? — Je crois ce que croit la sainte Église. — Et que croit la sainte Église ? — Elle croit ce que je crois. » Notre homme se renferma dans ses réponses sans vouloir en sortir, et l’esprit malin, voyant échouer toutes ses ruses, fut obligé de renoncer à son projet. Un auteur ajoute que c’était sans doute quelque jeune diable, qui n’était pas des plus fins ; autrement il aurait fort embarrassé le charbonnier en lui posant ainsi la question : « Que croyez-vous, toi et la sainte Église ? » On fait de fréquentes allusions à la foi du charbonnier.

« C’est une chose plaisante de voir des
écrivains, d’ailleurs distingués, se battre
pour des abstractions ou pour des logogriphes ;
ce qu’il y a de plus étonnant, c’est de
voir le public prendre part à des disputes
qu’il n’entend pas. On parlait jadis de la foi
du charbonnier, je crains bien qu’on ne puisse
parler aujourd’hui de la philosophie du charbonnier. »
Portalis.


« Le peuple de nos jours est loin d’être
blasphémateur et sacrilège, mais il est profondément
indévot. L’adoration est sortie de
ses habitudes. Séparant la religion de la justice,
il est convaincu que celle-ci suffit à
l’homme, que la première est de surérogation,
et il a inventé un mot pour traduire cette
pensée de haute indifférence, la foi du charbonnier. »
P.-J.Proudhon.
« Mes principes religieux sont ceux de ma
nourrice, morte chrétienne et catholique,
sans aucun soupçon d’hérésie. La foi du
centenier, la foi du charbonnier, sont passées
en proverbe. Je suis soldat et bûcheron, c’est
comme charbonnier. Si quelqu’un me chicane
sur mon orthodoxie, j’en appelle au futur
concile. »
P.-L. Courier.

Allus. hist. Foi punique. V. PUNICA FIDES.

Foi et raison, ou la Lettre tue, mais l’esprit vivifie, par Frédéric Esmenjaud, curé démissionnaire (Paris, 1887, 1 vol. in-12, 2e édit.). Ce livre est la touchante confession d’une âme qui a cru à la vérité et qui l’a cherchée à travers les systèmes et les religions. Préoccupé de bonne heure par les grandes questions qui ont de tout temps tourmenté l’âme humaine, M. Esmenjaud entra dans les ordres et devint curé d’une modeste paroisse de campagne. Mais l’habitude de la réflexion qu’il avait contractée ne l’abandonna point et il comprit bien vite que sa robe de prêtre ne pouvait le protéger contre le doute et les défaillances. Bien plus, cette carrière ecclésiastique qu’il avait choisie comme un refuge lui apparaissait maintenant comme la plus forte des tentations. « Dans la solitude éternelle des passions, dit-il, en face de soi comme au contact brûlant du monde, les incertitudes et le doute ne tardent pas à renaître pour l’âme qui ne peut languir dans l’inertie intellectuelle. Les passions se réveillent d’elles-mêmes, ainsi qu’en toute chair et plus qu’en toute chair, parce qu’elles sont enchaînées. Alors l’exercice du ministère sacré devient un fardeau, un tourment inexprimable qui n’a point d’analogue ici-bas. C’est le supplice simultané et irrémédiable de l’esprit, du cœur et des sens : renoncement cruel, ou plutôt triple malédiction qu’il porte sans cesse avec lui sous l’emblème de son habit noir. Et, avec cela, personne, ami ou étranger, personne qui veuille ou ose seulement vous donner une parole de paix et de consolation. Le siècle vous repousse, les supérieurs vous dominent, les confrères vous surveillent et quelquefois vous trahissent. Oui, une invisible inquisition vous entoure et vous impose le silence avec la peur : il faut donc vivre et mourir dans le vide qu’on a, sans y songer, creusé autour de soi. » M. Esmenjaud ne se résigna pas à ce parti désespéré. Il lut, il étudia, il compara, flotta longtemps d’un système à l’autre, du catholicisme à la libre pensée et se décida enfin pour la raison indépendante contre la foi imposée. Il envoya sa démission à son évêque en le suppliant de le réfuter et, s’il le pouvait, de le convaincre.

Son ouvrage est l’exposé des recherches qui l’ont amené aux croyances qu’il professe aujourd’hui. En étudiant le Pentateuque, il remarque des contradictions irréductibles entre les conceptions cosmologiques des livres saints et les données des sciences naturelles. Il relève aussi des notions et des appréciations morales que la conscience moderne ne saurait accepter ; d’où il conclut que si l’autorité de l’Église est fondée sur l’inspiration infaillible des Écritures, il faut abandonner l’autorité de l’Église. Mais ce n’est pas à dire qu’on doive pour cela renoncer à toute religion ; il convient seulement de distinguer la lettre qui tue de l’esprit qui vivifie. Aussi proclame-t-il la permanence du sentiment religieux et la supériorité du christianisme sur les autres cultes. Bien plus, il ne croit pas possible de fonder solidement la morale en dehors de l’idée religieuse.

M. Esmenjaud se rattache par là à la tradition déiste du xviiie siècle et particulièrement à la Profession de foi du vicaire savoyard. Plus conséquent pourtant que celui-ci, il ne conçoit pas qu’on reste ministre d’un culte qu’on repousse pour soi-même. Mais sa critique n’est pas plus avancée et plus compréhensive que celle des écrivains du siècle dernier. Ainsi il accuse Jésus d’avoir dédoublé la personnalité divine en proclamant la réalité du Saint-Esprit. Il incline à croire que les apôtres ont eu recours à la fraude pour assurer leur succès et que les visions de Pierre et de Paul ont été de purs stratagèmes pour justifier devant les fidèles de l’Église primitive leur universalisme religieux. Ailleurs, il parle de la Trinité comme d’une importation des religions de l’Inde. Évidemment, il y a là un manque de critique. Mais ce qui fait le mérite et l’attrait du livre de M. Esmenjaud, c’est d’être une histoire vraie, une confession sincère, la révélation d’une belle âme.

FOIE s. m. (foi — du latin ficatum, proprement jecur ficatum, foie d’oie engraissée avec des figues.

Pinguibus et ficis pastum jecur anseris albi,

disait Horace dans une de ses satires. Le mot ficatum, qui était chez les Latins un terme de cuisine, est devenu dans toutes les langues, romanes le nom du foie et a fait disparaître complètement le mot propre jecur). Anat. Organe sécréteur de la bile et du fiel, situé dans l’hypocondre droit, chez l’homme et les animaux supérieurs : Maladie du foie. On retrouve le foie dans des animaux qui n’ont ni rate, ni pancréas, ni cœur, ni cerveau. (Nysten.) Les longues fièvres intermittentes laissent souvent après elles le germe d’une maladie de foie, de rate ou d’intestins. (Maquel.)

— Fam. Le cœur lui devient foie, Il perd courage.

— Pathol. Foie chaud, Nom populaire d’une prétendue maladie qui donne un excessif appétit.

Il a le foie trop chaud, Se dit d’un homme qui a été marié plus de deux fois ; le peuple dit que les femmes qu’il a perdues sont mortes