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nombreuses dans le peuple que dans les autres conditions. (Buff.)

Le ciel bénit toujours les nombreuses familles. C. d’Harleville.

— Par ext. Ensemble des parents à un degré quelconque : Aimer sa famille. Être renié par sa famille. 21 est fort mal avec sa famille. Un repas, une fête de famille.

J’ai tu trancher les jours de ma famille entière.

Racine.

Va, "tu seras un jour l’honneur de ta famille.

Racine.

— Race, rejetons issus d’une même souche pendant une série d’années ou de siècles : Il appartient à une ancienne famille noble de la Normandie. Qu’est-ce qu’on appelle le lustre des anciennes familles ? La trace luisante que les limaces laissent derrière elles en rampant. (Lamenn.) L’égolsme et la rivalité des familles contribuent souvent à la ruine des États. (Bautain.)

— Par ext. Association de personnes ayant la même origine ou les mêmes intérêts : Le genre humain est la famille d’un grand homme. (Chateaub.) Le genre humain forme une grande famille, dans laquelle les aines tendent la main aùxplusjeunespour les élever à eux. (Lamenn.) Le droit civil est la constitution naturelle de la famille humaine. (Laurentie.) Un régiment est une famille, et le rôle de colonel, conçu dans son véritable esprit, est l’un des plus beaux à remplir. (Ste-Beuve.) La communauté est la famille de ceux qui n’ont pas de famille. (J. Simon.)

L’innombrable troupeau de la famille humaine Se disperse à travers le globe révolté.

—A. Barbier.

Il Catégorie de personnes ou de choses : La famille des sots est fort nombreuse. C’est une belle chose que la tranquillité ; oui, mais l’ennui est de sa connaissance et de sa famille. (Volt.) Le bon sens et le génie sont de la même famille ; l’esprit n’est qu’un collatéral. (De Bonald.) Les arts sont, de la même famille qi.e la poésie. (Ampère.)

Sainte famille, Joseph, la Vierge et l’enfant Jésus ; tableau qui représente ces personnages : Les Saintes familles de Raphaël, de Alurillo.

Père, mire de famille, Personne mariée qui a des enfants : Le père de famille est plus âpre au gain, plus impitoyable, plus insociable que te célibataire. (Proudh.) Il Chef de famille, Le père ou le plus âgé des mâles de la famille ; le plus âgé de la ligne directe, lorsqu’il y a des branches collatérales : Le travail est le premier devoir de l’homme comme chef de famille. (P. Janet.) Il Soutien de famille, Fils qui soutient la famille à laquelle il appartient : litre exempté du service militaire comme soutien de famille, h Fils, enfant de famillé, Fils d’une famille riche, considérée.

Conseil de famille, Conseil de parents légalement institué pour veiller aux intérêts d’un mineur ou d’un interdit.

Air de famille, Type particulier, ressemblance qu’on remarque souvent entre les membres d’une même famille, l ! Par ext. Ressemblance marquée : Toutes les colonies an ■ glaises avaient entre elles, à l’époque de leur naissance, un grand air de famille. (De Tocqueville.)

— Antiq. Ensemble des esclaves appartenant à un seul maître. Se dit encore en Italie des personnes attachées au service d’un grand : La famille d’un cardinal. Il Au moyen âge, Ensemble des vassaux d’un suzerain. Il Famille publique, Ensemble des esclaves romains attachés à un service public : Chaque région de Home possédait une famille publique. Il Famille de gladiateurs, Troupe de gladiateurs exploités par un même laniste.

— Hist. Familles secrètes, Familles patriciennes de Zurich entre les mains desquelles ie pouvoir se trouve concentré. Il Famille régnante, Famille dont un membre gouverne

. actuellement l’État, et chez laquelle la couronne est héréditaire. [| l’acte de famille, Traité conclu en 1761 entre Louis XV et Charles II, roi d’Espagne, il Société de famille, Société secrète fondée en France en 1834.

— Hist. nat. Réunion de genres qui se ressemblent par leurs caractères les plus essentiels : Famille d’animaux. Famille de plantes. Famille de végétaux. La famille des plantigrades. La famille des curculio.nides. La famille des cicadées. La famille des corbeaux est une des plus cosmopolites de l’Europe. (A. Maury.) Un arbre de la famille des conifères est le dernier représentant de la végétation arborescente. (Martins.)

— Épithètes. Belle, nombreuse, féconde, florissante, prospère, heureuse, chère, chérie, douce, aimable, gracieuse, charmante, intéressante, innocente, vertueuse, illustre, brillante, glorieuse, célèbre, fameuse, éclatante, immortelle, élevée, noble, ancienne, antique, considérable, considérée, riche, opulente, puissante, auguste, princière, royale, impériale, joyeuse, rieuse, gaie, insouciante, unie, désunie, malheureuse, infortunée, triste, affligée, désolée, inconsolable, délaissée, abandonnée, déplorable, dégénérée, déchue, ruinée, éteinte, funeste, dangereuse, redoutable, coupable, criminelle, maudite, paisible, ruatique, robuste, sauvage.

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"— Syn. Famille, lignée, maison, rnee. La

famille ùst]a. réunion des personnes unies par les liens de la parenté ; une famille est nombreuse, heureuse, honnête ; on la voit telle qu’elle est sans remonter a sa source, à son premier fondateur. Lignée est aujourd’hui d’un emploi assez rare ; il désigne proprement la descendance, les enfants qui sont comme la ligne, la trace qu’un homme laissera après lui. Maison, pris ici dans un sens figuré, désigne la famille dans ce qu’elle a de plus noble, dans ce qui attire et fixe les regards, dans ce qui en fait comme un grand édifice durable. Race se dit des animaux comme des hommes ; au propre, il suppose une communauté d’origine réelle : par le mariage une femme entre dans la famille, elle n’entre pas dans la race, bien que ses enfants en doivent faire partie. Par extension, race s’applique à ceux qui montrent les mêmes qualités ou les mêmes défauts naturels.

— Encycl. Linguist. Le mot famille vient du latin familia, que certains étymologistes rattachent à l’osque faama, maison. Faama serait le même que le sanscrit dhâman, maison, du radical d/iâ, poser, et avoir, posséder. Comparez : ancien irlandais domun monde, irlandais-erse domhan, proprement demeure ; ancien allemand tuom, maison, conservé dans les composés modernes eigenthum, heiligthum, etc., avec le sens plus primitif de condition, état, possession, etc., comme l’anglosaxon dom et le Scandinave domr. Pictet propose pour ce mdt une autre explication qui nous semble aussi naturelle et qui, d’ailleurs, est également indiquée par Kuhn et Benfey. Il croit que familia se rapporte tout simplement a famulus, serviteur. Famulus, pour fagmulus, se rattacherait lui-même à la racine sanscrite bhag, servir, honorer. Si les conjectures de Pictet sont fondées, comme nous le croyons pour notre part, le latin familia, pour fagmilia, de famulus pour fagmulus, serviteur, désignerait tout simplement l’ensemble du service. Bien que l’existence de la famille dès les temps les plus reculés nous paraisse évidente par elle-même, ses conditions et son degré de valeur ont dû varier considérablement suivant le caractère des races,

comme l’observe Pictet. Il y a là un problème qui se dérobe à toute investigation historique et qui ne devient accessible que par le secours de la linguistique, jusqu’à un certain point du moins, car les termes qui désignent les divers membres de la famille sont en général au nombre des plus anciens et des plus obscurs. Quelques-uns, comme les noms du père et de la mère, dérivent ordinairement des premiers bégaiements de l’enfant et n’ont jamais eu d’autre sens étymologique ; d’autres ont perdu leur signification primitive, qui aurait pu nous éclairer sur les idées que l’on y associait. Pour la race aryenne, toutefois, nous sommes placés dans des circonstances plus favorables. Les anciens termes de cet ordre se sont maintenus avec un ensemble remarquable et la plupart expriment encore, avec une certitude suffisante,1 le caractère ou le rôle attribué aux membres de la famille. On peut arriver ainsi à se faire une idée assez complète des rapports et des sentiments qui les reliaient entre eux. L’étude de ces termes a donc une importance particulière pour l’histoire morale et sociale des anciens Aryas, et Pictet, qui les soumet à un examen détaillé et approfondi, arrive à des résultats curieux et importants à l’aide desquels il reconstitue souvent d’une façon heureuse les mœurs et les habitudes de la famille chez nos ancêtres.

— Mor. et»polit. Au sein de toutes les sociétés on trouve toujours la famille : c’est la première assise de l’édifice social. Considérée au point de vue de la perpétuation de l’espèce, c’est le premier anneau de la grande chaîne de l’humanité. Elle se rattache enfin aux établissements politiques, dont souvent elle détermine la forme. La famille doit donc être envisagée tout à la fois commé étant d’ordre naturel, d’ordre social et d’ordre politique. Sous les variations qu’amène l’esprit du temps et des lieux, il reste un fait immuable que nous allons dégager tout d’abord.

La famille dérive d’un principe naturel, général et nécessaire : la conservation des espèces. En semant les germes a profusion, la nature atteste qu’elle se préoccupe plus des espèces que des individus ; mais les êtres nouveaux qu’elle produit sans cesse périraient en fleur ou dans leur éclosion s’ils étaient abandonnés. Sa sollicitude maternelle, si l’on peut s’exprimer ainsi, s’étend à tous les règnes. À ce point de vue, l’homme n’a rien qui lui soit particulier et qui ne s’applique à toutes les races animales. L’instinct parle même moins haut au cœur de l’homme que chez les êtres inférieurs de la création : les animaux n’abandonnent jamais leurs petits avant que ceux-ci aient acquis assez de force pour se suffire à eux-mêmes, et le dévouement (nous ne saurions trouver une expression plus juste) ne s’arrête pas à levu)famille naturelle. Les gallinacées, entre autres, étendent leurs soins jaloux jusqu’à la progéniture étrangère dont ils n’ont que favorisé l’éclosion. Belle leçon pour l’homme, qui en a encore beaucoup d’autres à recevoir des animaux ! Loin de suivre, en effet, la douce loi de l’instinct, l’homme ne la viole que trop souvent, soit pour obéir à des règles politiques nées de son caprice, soit par un égoïsme

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féroce qui lui fait tout immoler à sa propre conservation. De nos jours encore, au dire des voyageurs, dans la Polynésie la famille n’existe que de nom ; entre les parents et les enfants il ne se crée aucun lien solide et durable. Telle peuplade, comme dans la Nouvelle-Zélande, craint d’avoir une surabondance

de femmes inutiles et se débarrasse à leur naissance de toutes les filles premièresnées ; ailleurs, on exécute périodiquement, tous les cinq ou six ans, tous les enfants nés dans l’année. Ces boucheries odieuses, commandées par la rareté des subsistances et par la crainte d’en manquer, s’accomplissent de sang-froid, sans regrets comme sans remords. Emigre-t-on en masse d’une contrée à une autre, on abandonne à la fureur de l’ennemi ou des bêtes féroces et aux angoisses certaines de la faim toute, la partie des populations trop jeune et trop faible pour supporter les fatigues du voyage. Les hirondelles sont plus humaines : lorsque le premier souffle des vents d’hiver les chasse vers les contrées méridionales, elles attendent, au risque de compromettre le succès du voyage, que les dernières couvées aient acquis assez de force pour suivre le gros de l’armée, puis elles s’arrêtent en route pour attendre les traînards. Mais, on l’a remarqué cent fois, en dehors de la civilisation, l’homme est au-dessous de la brute, et si le développement graduel de ses sentiments de sociabilité ne venait suppléer à l’insuffisance de l’instinct naturel, la famille humaine serait, de toutes les familles animales, la plus exposée aux mauvaises chances de la fortune et du hasard.

"Le sauvage a-t-il une famille ? Assurément non : il n’en connaît ni les charges ni les devoirs. La famille, telle que nous la comprenons aujourd’hui, était-elle connue des peu-Eles primitifs ? Pas davantage. Quand les ommes se multiplièrent, le premier groupe social de quelque importance qui se forma fut ce qu’il est resté dans une grande partie de l’Orient : la tribu, conséquence nécessaire de la polygamie qui y règne encore. Or rien ne ressemelé moins a la famille que la tribu. Qu’est-ce tpue la tribu ? La réunion sous l’autorité d’un seul et même chef, patriarche ou émir, de tous les enfants ou petits-enfants nés sous son toit ou sous sa tente, de mères quelconques. À ces descendances directes s’adjoignent les descendances collatérales qui, en se prolongeant -à un degré indéfini, étendent fort loin les limites de la tribu. LàJ nous voyons partout le père et l’enfant, mais la mère n’apparaît nulle part, et, sans la mère, la famille n’existe pas. Chez les peuplades de l’Inde, du golfe Persique et de l’Arabie ne régnait sans doute ni la promiscuité ni même la communauté restreinte que nous montrent, dans diverses contrées, notamment en Ethiopie, Hérodote et Diodore de Sicile ; mais, tout en tenant compte de la puissance des sentiments naturels qui s’affaiblissent rapidement dans des sociétés où la femme ne compte pas, on peut dire que l’enfant n’avait pas de mère proprement dite, n’avait pas d’état. La femme était ce qu’elle est encore dans l’esclavage, une machine à produire des enfants qui ne lui appartiennent pas. C’était là le côté le plus-défectueux des sociétés primitives : on sait, en effet, que la tendresse maternelle est l’agent le plus puissant de l’adotfcissement des mœurs, et nous ne ferons que répéter une vérité passée à l’état d’évidence en affirmant que l’on peut juger d’une civilisation par la condition de la femme et par l’étendue des droits maternels.

Le patriarcat, dent la Bible célèbre les merveilles, était le gouvernement despotique par excellence. Autorité illimitée, droit de vie et de mort, liberté absente, garanties nulles. Sur la foi d’une hallucination, Abraham sacrifie son fils unique sans sourciller. Voilà l’idée qu’il se fait de la famille et de ses droits. Que la force, la conquête ou le libre consentement parviennent à réunir sous un même gouvernement quelques tribus voisines pour en faire un embryon de nation, le pouvoir suprême, concentré dans les mains d’un seul roi, juge, mage ou prophète, n’atteindra directement que les chefs de tribus et leur laissera toute l’autorité dont ils jouissaient auparavant sur les individus. On était bien loin alors de voir dans le gouvernement d’une société une sorte de juridiction morale, protectrice des faibles et servant de frein à la puissance des forts. Tout chef de groupe, famille on tribu, subissait la loi du chef de 1Etat, mais il restait souverain absolu dans son domaine, et telle a été, pendant plus de quarante siècles, la situation générale de l’humanité. Comment la famille aurait-elle pu se constituer dans de pareilles conditions ?

Si nous étudions la famille dans la Grèce antique, la femme nous apparaît comme la compagne et l’égale de l’homme ; elle est libre dans sa maison ainsi qu’au dehors, et, à cet égard même, mieux traitée dans ces temps barbares qu’elle ne le sera plus tard aux beaux jours de la civilisation grecque. La manière fort peu respectueuse et parfaitement familière dont Clytemnestre parle à son mari Agamemnon, le roi des rois, dans Homère, met hors de conteste ce point de mœurs. La polygamie est interdite, mais ce n’est pas à dire que les hommes gardent bien sévèrement la foi promise. S’ils n’ont pas deux femmes, ils ont de belles esclaves

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qui les distraient de leurs épouses légitimes et leur donnent parfois des enfants. Sur ce point, le degré de licence du mari dépend du caractère de sa femme, de son plus ou moins d’énergie. Laërte achète Euryclée au prix de vingt bœufs ; ■ mais, dit Homère, il n en fait point sa compagne de lit, parce qu’il craint son épouse. > Au reste, si la foi conjugale est, comme toujours, plus sévèrement exigée des femmes, il ne parait pas cependant qu’on punisse avec cruauté, comme en tant d autres pays, leurs manquements à cette foi. La femme adultère était seulement notée d’infamie. A Athènes, elle ne pouvait porter certaines parures ni assister aux sacrifices publics, sous peine de se voir arracher, déchirer ses vêtements ; il était permis de frapper une femme dans ce cas-là. non cependant jusqu’à la blesser. Il ne paraît pas d’ailleurs que la jalousie ait jamais été une passion bien violente chez les Grecs et qu’elle ait donné lieu à beaucoup d’actions tragiques. À la distance où nous sommes, il est certainement impossible de savoir si le nombre des femmes fidèles l’emportait sur le nombre des autres ; tout ce qu’on peut-dire, c’est que l’histoire et l’art nous offrent des types également accomplis dans les deux genres. Pénélope se place en face de Phèdre etAlceste fait vis-à-vis à Hélène.

Sur la constitution de la famille au temps de Platon, sur les mœurs domestiques de cette époque, nous avons plus de lumières. Le droit naturel qu’a le citoyen de se choisir une épouse à son gré recevait du droit civil de fâcheuses restrictions : par exemple, on ne pouvait pas prendre femme hors de la cité. Tout citoyen était obligé de se marier s’il ne voulait être en butte aux sévérités de la loi, à’certaines amendes plus ou moins con=sidérables. Chose plus grave encore, on pouvait être contraint à se marier avec une personne déterminée, avec une de ses parentes, par exemple, quand le père de celle-ci venait a mourir ne laissant que des filles ; sinon il fallait la doter. Au bout de dix ans, un mariage stérile était dissous de droit et le divorce prononcé. On sent partout dans" ces dispositions que l’intérêt public domine toutes les libertés particulières, et que le peuple croit avoir intérêt à ce que les citoyens donnent à la patrie le plus d’enfants possible. C’était-par cette raison encore que la femme veuve, le mari veuf, restés sans postérité, étaient tenus à un second mariage. Le divorce était permis pour incompatibilité d’humeur ; mais le père n’avait plus la faculté légale de vendre, fie tuer ni d’exposer ses enfants, droit qui existait et était incontestablement pratiqué dans les temps héroïques ; il lui était permis seulement de les renoncer. Cet acte de renonciation retranchait l’enfant de fa famille, brisait tous les liens entre lui et ses parents et le privait de leur héritage ; mais la renonciation n’était pas laissée au seul pouvoir du père. Il devait soumettre sa résolution à l’approbation d’un tribunal, qui entendait la défense de l’enfant menacé dans son état civil. Hors ce cas, la-loi mettait des bornes à la liberté du père relativement à la disposition de ses biens par testament. Elle lui permettait de favoriser un de ses enfants de quelque partie de sa fortune, non d’en déshériter aucun. Dans les successions ab intestat, la loi partageait également les biens entre tous les enfants. À défaut d’enfants, le testateur avait une liberté entière ; mais, s’il mourait sans en avoir usé, sans avoir fait de testament, la loi appelait à lui succéder ses frères d’abord, puis les fils et les petits-fils de ceux-ci ; à défaut des frères du père, les oncles, et, après ceux-ci, les frères de la mère du défunt. Un point important à noter, c’est qu’en suivant cet ordre on ne s’arrêtait pas aux femmes, on allait chercher même dans un degré plus éloigné le premier parent du sexe masculin, ce qui témoigne évidemment d’une certaine infériorité attribuée au sexe ’ féminin dans l’opinion publique. Rien n’indique, dans’ les lois grecques, que la fille majeure ou la veuve dussent rester sous la tutelle de leurs enfanta ou d’un étranger, comme cela eut lieu à Rome. A quarante ans, la veuve exerçait elle-même ses actions.

Voilà le droit, qui aurait pu être plus rigoureux assurément, vu l’époque : en fait, la condition de la mère de famille, dans ces temps si beaux à d’autres égards, s’était.singulièrement aggravée. Cela tint presque uniquement à la grande, à l’immense part que le Grec fit a la politique dans son existence. Revêtu pour une part de l’autorité souveraine, chaque citoyen, par son vote, influait directement sur le gouvernement de la cité, sur la direction des affaires extérieures, et les relations extérieures de ces petites républiques étaient généralement tendues. Le temps matériel que lui coûtait l’exercice de la souveraineté n était peut-être pas considérable, mais il demandait toute son application, tout son intérêt ; il ne lui en restait plus pour le ménage. Au- reste, dans ces pays, si bien dotés à regard du climat, on avait fhabitude, on l’a encore, de vivre toute la-journée dehors. Pour quelle raison le Grec serait-il demeuré chez lui ? pour quoi faire ?Tout travail manuel était servile, indigne d’un homme libre ; l’esclave seul travaillait. Le Grec promenait donc tout le jour son oisiveté ou ses préoccupations politiques, artistiques, du gymnase à 1 Agora, de l’Agora au Pyrée ou à l’Académie.

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