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l’École de médecine : rudes courses pendant les hivers ; mais, dans les autres saisons, un peu de pain et quelques fruits les rendaient charmantes, et, par-dessus tout, des causeries avec Bichat, avec Schwilgué, avec Roux, avec Landré-Beauvais, hommes de lumières et de cœur, qui avaient de l'amiitié pour Esquirol, et qu’à son tour Esquirol n’a cessé d’aimer et d’honorer toute sa vie : temps heureux de pauvreté, de travail et d’espérance, dont les souvenirs charmaient encore les dernières années d’Esquirol. » Se trouvant ainsi, grâce à MmeTexte en exposant Molé, à l’abri du besoin, Esquirol se livra tout entier à l’étude, devint l’interne de Pinel à la Salpêtrière, et aida ce célèbre praticien à rédiger sa Médecine clinique. Un attrait irrésistible l’entraînait vers l’observation des maladies mentales, ce domaine qu’il devait enrichir de tant de découvertes. Il consacra six ans de sa vie à suivre son maître au lit de chaque malade, observant attentivement les symptômes si souvent fugitifs, et, comme le dit M. Joly, si souvent bizarres, qui présagent les tristes naufrages de l’intelligence, recherchant les causes si difficiles à approfondir, en appréciant les terribles effets, conjurant le péril, s’il en était temps encore. Quand il fut sûr de lui, Esquirol se présenta devant ses juges et soutint devant la Faculté une thèse qui est restée célèbre. Le lauréat avait choisi comme sujet : Des passions considérées comme causes, symptômes et moyens curatifs de l’aliénation mentale. Esquirol fut reçu docteur. Sa dissertation produisit une sensation réelle, et elle fut bientôt traduite en anglais, en allemand et en italien. On peut la considérer comme le préambule du magnifique ouvrage que l’illustre aliéniste devait écrire plus tard sous ce titre : Des maladies mentales, et sur lequel nous reviendrons. L’attention du gouvernement fut appelée sur le jeune docteur, qui reçut la mission de visiter tous les hôpitaux d’aliénés de la France. Il consacra deux ans à cette tournée (1808 -1810), d’où il rapporta des observations précieuses et en même temps cette conviction que tout restait à faire. Il avait déjà fondé un établissement particulier dirigé d’après une méthode toute nouvelle. Les cures nombreuses qu’il y opérait ne pouvaient longtemps rester ignorées. Aussi, en 1810, fut-il chargé de la direction médicale de la Salpêtrière. Il ne remplaça pas Pinel, comme le fait très-bien observer M. Pariset, « il le continua. C’était le même esprit, c’était le même zèle et la même charité, et tandis qu’il provoquait par ses instances les améliorations qu’il était nécessaire d’introduire dans le matériel des bâtiments et dans toutes les parties du régime, il encourageait les infirmiers, il soulageait les malades en distribuant entre elles ses honoraires. Il entrait ainsi dans des cœurs toujours ouverts à la gratitude, parce qu’ils sont toujours ouverts à la justice. Il les formait ainsi à la confiance et à la docilité. »

Esquirol commença, en 1817, un cours de clinique des maladies mentales qui obtint un immense succès ; il fut suivi par un grand nombre de jeunes gens, dont quelques-uns sont devenus de célèbres médecins. Dans ces leçons, que des docteurs de tous les pays vinrent applaudir, Esquirol signala les abus qu’il avait observés dans ses fréquents voyages, et détermina le gouvernement à nommer, pour opérer les améliorations qu’il réclamait, une commission où sa place était marquée d’avance. Le cours d’Esquirol avait ce double mérite d’exciter l’ardente curiosité de l’esprit et de faire naître dans le cœur de son auditoire les sentiments d’humanité dont le professeur était animé. À ces éléments de succès, Esquirol voulut en ajouter un troisième, l’émulation. Chaque année, à la fin des cours, un prix de 300 francs, fondé par le célèbre aliéniste lui-même, était décerné par un jury spécial à l’auteur du meilleur mémoire sur un sujet relatif aux maladies mentales, et déterminé par le professeur. En un mot, Esquirol rendit d’immenses services à la science et aux malheureux qu’il avait pris à tâche de guérir ou tout au moins de soulager. Par ses constants efforts il parvint, sinon à guérir entièrement, du moins à adoucir la plus triste infirmité qui puisse atteindre l’homme. Il contribua surtout à faire modifier et améliorer le régime barbare auquel les aliénés avaient été trop longtemps soumis, et il s’occupa, entre autres choses, du détail des constructions destinées à renfermer les malades. Il ne craignait pas, quand il s’agissait de l’intérêt de ces malheureux, de faire entendre la vérité ; il la fit même arriver jusqu’à l’oreille des rois. Le roi de Sardaigne venait de faire bâtir, à Turin, un magnifique hôpital qu’il destinait aux aliénés. Instruit du passage dans la capitale de ses États du célèbre aliéniste français, il prie Esquirol de l’accompagner dans une visite qu’il se propose de faire au nouvel hospice, et, après le lui avoir montré dans tous ses détails : « Cet hôpital est très-beau, dit Esquirol, mais il ne répond pas à sa destination. - J’en ferai une caserne », dit le souverain, et il chargea le médecin de lui donner des plans, qu’il fit aussitôt exécuter. Ces plans sont à peu près les mêmes que ceux que l’on a suivis à Rouen, à Nantes et à Montpellier. Esquirol fut nommé, en 1823, inspecteur général de l’université près les facultés de médecine, et, trois ans plus tard, médecin en chef de l’hospice de Charenton. Ce dernier hospice, le premier établissement en ce genre, a été tout entier reconstruit sous la direction d’Esquirol, qui en a fait un modèle non encore dépassé. Le savant médecin de Charenton était depuis longtemps membre de l’Académie de médecine et de l’Académie des sciences morales, lorsque la mort vint le frapper au milieu de ses pensionnaires, qu’il n’avait pas voulu quitter malgré son âge avancé.

Le principal ouvrage d’Esquirol est intitulé : Des maladies mentales considérées sous le rapport médical, hygiénique et médico-légal (Paris, 1838). Dans cet ouvrage, il définit la folie « une affection cérébrale, ordinairement chronique, sans fièvre, caractérisée par le désordre de la sensibilité, de l’intelligence et de la volonté, » Il reconnaît cinq genres ou formes générales de folie : 1° la lypémanie (mélancolie des anciens), délire sur un objet ou un petit nombre d’objets, avec exaltation et prédominance d’une passion triste et dépressive ; 2° la monomanie, dans laquelle le délire est borné à un seul objet ou à un petit nombre d’objets, avec excitation et prédominance d’une passion gaie et expansive ; 3° la manie, dans laquelle le délire s’étend à toutes sortes d’objets et s’accompagne d’excitation ; 4° la démence, dans laquelle les insensés déraisonnent, parce que les organes de la pensée ont perdu leur énergie et la force nécessaire pour remplir leurs fonctions ; 5° l’imbécillité ou idiotie, dans laquelle les organes n’ont jamais été assez bien conformés pour que ceux qui en sont atteints puissent raisonner juste. Esquirol voit dans le retour de l’attention le signe le plus certain du retour de la raison, et dans l’isolement du fou le moyen le plus efficace pour le ramener à l’attention et a la réflexion. Outre cet important ouvrage, on doit encore à Esquirol un grand nombre de mémoires, de rapports, d’opuscules divers, dont plusieurs ont enrichi le Dictionnaire des sciences médicales et l’Encyclopédie des gens du monde.


ESQUIRONNEL s. m. (è-ski-ro-nèl). Ornith. Nom vulgaire du tiercelet ou épervier mâle.

ESQUIROS (Henri-Alphonse), littérateur français, né à. Paris en 1814. Il débuta dans les lettres par un volume de poésies, les iTïro ? irfe^«s(1834, in-8o) ; puis il collabora àdi vers journaux littéraires, tout en préparant des livres dont le public devait bientôt s’inquiéter davantage. Citons d’abord deux romans : le Afagicien (1837, 2 vol. in-8o) et Charlotte Corday (1840, in-S<> ; 1841, in-18 ; 1850, in-4o)., La deuxième édition de ce dernier ouvrage est précédée d’une préface signée Léon Gozlan : ■ Rien ne termine mieux ce récit, dit celui-ci, que l’amour divinement platonique d’Adam Lux pour Charlotte Corday, Adam Lux qui aime, qui doit mourir, et qui meurt pour qui ne l’a pas aimé. On croit entrevoir, a l’angle d’un portique d’Athènes, un de ces beaux visages grecs, un de ces jeunes gens pieux qui ne furent jamais plus attachés à Socrate que le jour où la Théorie apporta l’ordre de mettre à mort le plus grand homme de l’antiquité. Débutant comme un chapitre du Voyage sentimental, la narration traverse la tragédie pour arriver mourante à l’élégie ; Sterne commence, Chénier achève. » Sans donner à Marat la douceur d’un chérubin ou d’une colombe, l’auteur explique en beaucoup d’endroits ce caractère, ou plutôt cette maladie ; car Marat, selon lui, fut un malade. Il raconte avec un grand charme et à la fois une grande fermeté de style les misères du médecin, afin d’arriver à faire comprendre le tempérament haineux de l’homme. À son avis, « le sentiment de la réalité républicaine se résumait dans Marat, comme les tendances de la démocratie idéale des girondinsse formulèrent dans Charlotte Corday. Pour elle, la démocratie devait ressembler au socialisme politique de Jean-Jacques ; elle croyait que la république devait sortir du Contrat social. Exaltée par ces opinions qui ressemblaient tant à la poésie, elle devint le bras de cette faction dont Mme Roland était la tête. Celle-ci discutait, l’autre tua. La théorie engendre la pratique. Chose étrange dans l’histoire, que l’existence d’un parti dont les chefs sont deux femmes ! » Bien supérieur au Magicien, ce roman de Charlotte Corday fut accueilli avec une faveur marquée, et il restera peut-être comme le plus beau livre de M. Esquiros.

Le succès de Charlotte Corday ne porta pas bonheur à M. Esquiros ; car, en même temps, il était poursuivi pour son commentaire philosophique et démocratique de la vie de Jésus, intitulé : l’Évangile du peuple {1&40, in-16). Ainsi qu’en 1793, Jésus apparaît dans ce petit livre comme le premier sans-culotte. Cette réminiscence révolutionnaire valut à son auteur une condamnation à huit mois de prison et 500 fr. d’amende (30 janvier 1841). M. Esquiros se vengea en publiant de Sainte-Pélagie, où il était détenu, un volume de circonstance : les Chants du prisonnier (1841, in-8o). Ce recueil de vers fut bientôt suivi de trois petits ouvrages (in-32) qui parurent de 1841 a 1842, sous ces titres : les Vierges martyres, les Vierges folles, les Vierges sages. L’esprit socialiste se montre et s’affirme hardiment. Vient ensuite l’JJistoire des montagnards (1847, 2 vol. in-8» ; 1850, in-4o), écrite dans un style mystico-biblique. Ici l’auteur commet une erreur grave : il écrit que les girondins n’ont joué dans le grand drame révolutionnaire qu’un rôle rapide et subordonné.

« Non-seulement, dit-il, la Montagne leur a survécu, mais encore c’est dans son sein, au

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milieu des éclairs et des tonnerres, que se sont révélés les oracles de l’esprit humain transfiguré. De là sont parties la force et la lumière. » On dirait, d’autre part, en lisant ce livre, qu’Esquiros a vu en Robespierre la personnification de l’Être suprême, et s’il n’en convient pas, le lecteur du moins lui prête volowtiers ce sentiment. Indiquons en passant un curieux article publié dans l’Almanach des opprimés (1850) sous ce titre : Est-ce qu’on meurt de faim à lJaris ?

M. Esquiros a siégé à l’Assemblée législative sur les bancs de l’extrême gauche, comme représentant de Saône-et-Loire. Quand vint le coup d’État, il fut envoyé en.exil et se retira en Angleterre. Peu de temps auparavant, il avait publié son Histoire des martyrs de la liberté (1851, grand in-4o, orné de gravures). Cet ouvrage est précédé de la profession de foi du représentant du peuple aux électeurs de Saône-et-Loire, et se termine par cette dédicace, encadrée dans un médaillon : « Aux martyrs sans nom la Liberté reconnaissante. » On y trouve des pages chaleureuses et émouvantes sur les frères Bandiera, Godefroy Cavaignac, Manin, Lamennais, et sur les femmes de la Hongrie. Depuis lors, la Revue des Deux-Mondes a publié et continue de publier : l’Angleterre et la vie anglaise, série d’études dont la plupart déjà ont été réunies en volumes (1859-1SS4, 4 vol.). Traduit en anglais, l’ouvrage de M, Esquiros a eu un plein succès de l’autre côté du détroit. Le modèle a dû reconnaître la ressemblance du portrait, malgré l’intention parfois railleuse du peintre. L’auteur y truite des institutions politiques, des sectes religieuses, de J’armée et de la marine, des mœurs et des usages du high-life et du turf, du commerce et de l’industrie, des classes ouvrières et du paupérisme, de l’Irlande et des fénians, puis des clubs, de la littérature, des théâtres, du drame et de la comédie. Tous les aspects variés de la vie anglaise sont décrits et analysés dans cet ouvrage avec une grande sûreté de touche et dans un langage sobre et facile. M. Esquiros a publié en outre : la Vie future au point de vue socialiste (1857, in-8o) ; les Moralistes anglais (1859, in-12) ; la Vie des animaux (1860, in-18, 4 séries) ; la Néerlande et la vie hollandaise (1861, 2 vol. in-12), etc. En 1869, M. Esquiros est rentré en France et s’est présenté, comme candidat de l’opposition démocratique et radicale, dans la quatrième circonscription des Bouches-du-Rhône, où il a été élu député, après ballottage, lors des élections de juin 1869, par 12,000 voix contre 9,000 donnés à M. de Rougemont, candidat officiel.

Nommé après la chute de l’Empire, le 5 septembre 1870, administrateur supérieur des Bouchos-du-Rhône, il eut la haute main sur l’administration de ce département, où les préfets de Marseille, Labadie et Delpech, devinrent successivement ses collaborateurs. M. Esquiros prit des mesures énergiques en vue de la défense nationale, fit appel au patriotisme du commerce pour la formation

d’un comptoir d’escompte et s’attacha à rétablir l’union et la concorde dans une population dont on connaît le caractère essentiellement inflammable. Mais, malgré tous ses efforts, son administration fut profondément troublée par les actes arbitraires et par tes exigences de la garde civique, qui s’était constituée en dehors de la garde nationale et qu’il n’osa point dissoudre. Accusé de tiédeur pour avoir donné l’ordre de relâcher M. de la Guéronnière, emprisonné à son arrivée à Marseille, et craignant de perdre sa popularité, M. Esquiros finit par céder à la pression du parti exalté. Ce fut alors qu’il devint un des chefs de la ligue du Midi et que, par deux arrêtés, pris le 13 octobre 1870, on le vit suspendre d’abord la Gazette du Midi, journal légitimiste et clérical, puis prononcer la dissolution de la congrégation des jésuites de Marseille, dont il ordonna l’expulsion sous trois jours, avec la séquestration de leurs biens. Gambetta répondit à ces actes en prononçant la dissolution de la garde civique de Marseille et en publiant, le 16 du même mois, au nom de la liberté, un arrêté par lequel il annulait la suspension de la Gazette du Midi et les mesures édictées par Esquiros contre les jésuites. Sous le coup de ce désaveu de sa conduite, ce dernier donna sa démission, qui fut acceptée ; mais, revenant bientôt sur sa détermination, il annonça qu’il retirait sa démission et que la Gazette du Midi demeurerait supprimée. L’anarchie matérielle et morale qui régna alors à Marseille détermina Gambetta à agir avec vigueur. Par un arrêté du 31 octobre, le jeune.et vaillant ministre remplaça Esquiros et le préfet Delpech par Alphonse Gent, chargé de pleins pouvoirs dans l’ordre administratif et militaire. M. Esquiros dut, à l’arrivée de Son successeur, rentier dans la vie privée. Mais, lors des élections à l’Assemblée nationale (8 février 1871), il fut élu député dans les Bouches-du-Rhôpe par 46,900 suffrages. Depuis lors il n’a joué quun rôle des plus effacés. — Sa femme, Mme Adèle Esquiros, a écrit dans divers journaux et publié un certain nombre de nouvelles, ainsi que plusieurs romans ; le plus connu porte ce titre au moins" singulier : Un vieux bas-bleu.

ESQUISSE s. f. (è-ski-se — de l’italien schizzo, venu du latin schedius, fait sur-lechamp ; lequel vient du grec schedios. Ce dernier mot appartient à la même famille que

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schediazein, faire à la hâte, et schedia, canot fait à la hâte, proprement collection de planches, ais ; de schedos, planche, ais, tablettes, lequel vient de schizein, fendre ; à moins qu’il ne se rattache, comme le pense Curtius, a la racine sanscrite skhad, fendre, disperser ; alliée à la racine kshad, briser, disséquer. Cette racine skhad a aussi produit en grec skedannumi, disperser, dissiper, et skedasis, dispersion. Un étymologiste allemand du dernier siècle, Wachter, rapportait esquisse et les formes romanes qui lui correspondent à l’allemand schatlen, ombre, obscurité. Ce mot allemand se rapporte sans doute au gothique skadus, ombre, pour skatus, que Dufrecht ramène, ainsi que le lithuanien scydas, scyda, bouclier, à la racine sanscrite cliad, couvrir, provenue de skad. Comparez l’irlandais sgathaim, couvrir ; sgath, ombre, et la racine voisine sanscrite sku, couvrir, proléger ; zend ski, même sens, d’où le grec skia, ombre. Suivant Wachter, esquisser signifierait ainsi ombrer, marquer par des signes grossiers et rapides, et esquisse désignerait proprement la délinéation grossière d’une œuvre commencée, faite à la hâte avec de la craie, du charbon ou un pinceau). B.-arts. Premier travail Par lequel l’artiste fixe son idée et arrête aspect général du sujet, mais qui n’est nullement un commencement d’exécution du sujet lui-même : Esquisser au crayon, à la plume, au pinceau. Esquisser en cire, en terre cuite, en terre glaise. Les esquisses ont communément un feu que le tableau n’a pas. (Dider.) On a des esquisses de BaphaSl où le même trait est recommencé dix-sept fois. (H, Taine.)

— Par ext. Premier plan d’une oeuvre, indication de son ensemble et de ses parties : Esquisse d’un drame, d’un poëme épique, d’un opéra.

— Poétiq. Ce qui donne une idée en petit. Delille a dépeint ainsi l’oiseau-mouche :

Vif, prompt, gai, de la vie aimable et frêle esquisse, Et des dieux, s’ils en ont, le plus charmant caprice.

— Techn. Nom que l’on donne, dans l’industrie des tissus, au dessin régularisé, c’est à-dire ramené aux dimensions qu’il doit avoir dans l’étoffe, et, si le sujet se répète, répété autant de fois qu’il doit entrer dans le raccord : Non-seulement I’esquissb doit présenter le dessin dans sa grandeur naturelle, tel qu’on veut l’obtenir sur l’étoffe ; elle doit offrir, en outre, ’ tous les accidents de couleurs et de nuances convenables aux sujets qu’elle représente, et même la teinte du fond afin que le fabricant juge plus aisément de l effet qu’elle produira, et qu’il puisse prendre une détermination précise, les changements subséquents étant toujours très-onéreux. (Falcot.)

— Econ. domest. Nom que l’on donnait autrefois à des plateaux en bois supportés par des pieds, que l’on faisait figurer chargés de confitures et de gelées, dans les grands repas.

— Syn. Esquisse, cabotas, crayon, croquis,

ébauche. V, canevas. Mais ajoutons ici un mot essentiel sur la distinction de l’esquisse et de l’ébauche. L’Académie elle-même a confondu ces deux objets, faciles cependant à distinguer. L’esquisse, toujours distincte de l’ouvrage lui-même, est souvent de dimensions beaucoup plus restreintes, et peut être un dessin complètement achevé ; l’ébauche, qui n’est que l’ouvrage lui-même indiqué par grandes masses, est nécessairement grossière. L’artiste fait son esquisse pour la reproduire, et son ébauche pour la terminer.

— Encycl. B.-arts. L’es#m’sse est la première forme que l’artiste donne à son idée et qui lui sert à définir à ses propres yeux cette idée elle-même, à conserver le souvenir d’une vive impression, à rendre l’aspect général d’une conception ou même à le guider dans l’exécution d’une œuvre. L’esquisse faite, le peintre peut juger si son idée mérite d’être mûrie, travaillée, corrigée, si elle doit être amendée ou développée. Il arrivé parfois que la vue de cette esçtiisse fait naître une nouvelle conception ou la pensée de modifications dans la première façon de concevoir le sujet, ce qui donne lieu à une seconde esquisse et quelquefois à une troisième. Géricault fit ainsi quatre esquisses pour son Naufrage de la Méduse. L’esquisse définitive terminée, viennent alors les études d’ensemble ou de détails, de figures complètes, de membres détachés, d’objets divers.

L’es’quisse et l’étude, comme on le verra à ce dernier mot, sont deux choses bien différentes : l’étude est l’interprétation soit de la nature, soit du modèle vivant, soit enfin des accessoires qui doivent entrer dans le tableau, ou bien encore c’est la recherche des procédés les plus propres à produire certains effets, à augmenter l’habileté manuelle ou la puissance du coloris. C’est donc surtout une œuvre d’attention, de raisonnement, de réflexion et d’observation. L’esquisse est, au contraire, une œuvre d’imagination, de spontanéité, traitée avec fougue, verve, passion, chaleur, et rapidement faite. Là on ne s’occupe point des

firocédés qui font la science picturale ; on se aisse aller à l’inspiration. Aussi, malgré ses imperfections, une esquisse est-elle souvent fort agréable à voir et peut-elle être considérée, sinon comme une œuvre, du moins

comme un travail intéressant, qui parfois acquiert un grand prix soit à cause du maître qui l’a faite ou de l’originalité qu’elle contient, soit aussi à cause du senti ment qu’elle révèle, de la conception qu’elle indique ou de l’ha-