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six ans après, le roi son époux étant mort, elle se retira dans un couvent. Quelques historiens ecclésiastiques ont fait d’elle une sainte.


ÉLÉONORE D’ANJOU, reine de Sicile, morte à Catane en 1343. Elle était fille de Charles II, roi de Naples et de Sicile. Bien que fiancée à Philippe de Toussi, amiral de Naples, Éléonore épousa, en 1302, Frédéric II d’Aragon, roi de Sicile, dont elle eut quatre Fils et quatre filles. Après la mort de son époux (1337), elle entra dans un couvent de l’ordre de Saint-François.


ÉLÉONORE D’ARBORÉE, princesse sarde, morte en 1403. Elle était fille de Mariano IV, juge d’Arborée. Son frère Ugo IV fut massacré dans une insurrection après quelques mois de règne, et les seigneurs la proclamèrent elle-même juge d’Arborée en 1381. Éléonore gouverna le pays avec habileté, et son nom est resté légendaire dans l’Île. En 1395, elle publia un code connu sous le nom de Carta de Logu (charte du pays), qui devint, en 1421, à la demande des cortès espagnoles, le code général du royaume. Il était si bien approprié aux besoins du pays, que, grâce à la constance des mœurs et à l’immobilité des idées dans l’île, il est resté, sinon intact, au moins debout pendant quatre cents ans, sous le gouvernement espagnol et sous le gouvernement piémontais. Maneli a publié ce code en italien sous le titre suivant : Le costituzioni di Eleonora, giudicessa d’Arborea, intitolate Carta de Logu, colla traduzione letterale della sarda nell’ italiana favella (Rome, 1805, in-fol.).

ÉLÉONORE TELLEZ DE MENDEZ ; reine de Portugal, née vers le milieu du xive siècle, morte UTordesillas en 1405. Fille de Martin Tellez, femme d’un simple gentilhomme, Laurent d’Acugna, elle devint reine de par les charmes de sa beauté, les séductions de son esprit et le caprice de Ferdinand Ier, fils de don lJedro et de la malheureuse et poétique Inès de Castro. Quelques historiens ont dit que le roi de Portugal l’acheta à son mari ; d’autres qu’il la lui enleva. Quoi qu’il en soit, Ferdinand fit rompre le premier mariage de sa maîtresse et l’épousa en 1371, malgré le mécontentement de. son peuple, dont il eut même a réprimer un soulèvement.

Objet de la haine des Portugais, la nouvelle reine se rendit de plus en plus odieuse par ses amours adultères, ses cabales, ses crimes, et, b. la mort du roi (1383), un soulèvement lui arracha la régence. Avec Ferdinand s’éteignait la descendance légitime des rois de Portugal issus de Henriquez. Une fille cependant, nommée Béatrix, était née du mariage d’Éléonore et de Ferdinand, et celui-ci, voulant faire succéder à la couronne cette princesse, l’avait mariée, à l'âge de onze ans, . a don Juan, roi de Castille ; mais toutes ces espérances d’avenir furent déjouées par sa mort, advenue subitement peu de temps après le mariage de sa fille, par l’aversion que les Portugais avaient pour les Castillans, et surtout par la haine qu’Éléonore s’était attirée par ses désordres. Juan, frère naturel de Ferdinand et grand maître de l’ordre d’Avis, se mit à la tête du soulèvement ; de sa propre main il poignarda Jean Fernandez d’Andayero, favori do la reine, puis il fit chasser du palais Éléonore, qui se réfugia à Santarem, appelant à. son aide son gendre, le roi de Castille. Celui-ci alla mettre le siège devant Lisbonne, mais il fut défait par don Juan, auquel les états de Portugal, assemblés bientôt après à Coïmbre, donnèrent le trône. L’époux de Béatrix prit alors sa belle-mère en haine, et la fit conduire au monastère de Tordesillas. C’est là, derrière les grilles et les hautes murailles, gardée à vue, prisonnière, qu’Éléonore finit ses jours en 1405, vingt-deux années après la révolution qui lui avait arraché la régence.

ÉLÉONORE DE CASTILLE, reine de Navarre et tille de Henri II dit le Magnifique, roi de Castille, née vers 1350, morte k Pampelune en 141G. Elle fut mariée en 1375 à Charles III, roi de Navarre. Belle, instruite, spirituelle, elle joignit malheureusement à ces qualités une humeur inquiète et turbulente, un esprit léger, amoureux d’aventures. Ces défauts amenèrent bientôt une séparation entre elle et son époux (1383). Retirée en Castille, auprès de son neveu Henri III, mais non guérie d’un caractère toujours porté à faire du bruit, elle excita des séditions contre le roi, son hôte et son parent. Obligée de se réfugier dans le château de Roi*, — elle y fut assiégée et faite prisonnière par Henri III, qui la renvoya à son époux (1395). Celui-ci lui pardonna avec générosité, la reçut en épouse et en reine, et lui confia même le gouverneracm no la Navarre pendant un voyage qu’il' fit a la cour de France. À partir de ce moment jusqu’à sa mort, elle vécut tranquille auprès de Charles III, dont elle eut huit enfants.

ÉLÉONORE DE BÉAUFORT, vicomtesse de Turenne, fille de Guillaume-Roger III, comte de Beaufort et vicomte de Turenne, morte à Pouil !y-le-Château (Beaujolais) en 1420. Elle épousa Édouard, sire de Beaujeu, qui mourut en 1400. En 1417, elle s’empara des comtés de Beaufort et d’Alais et des autres biens que sa nièce Antoinette avait légués a son mari, Jean Boucicaut II, prisonnier en Angleterre depuis la bataille d’Azincourt (U15). N’ayant

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point eu d’enfants, elle légua par' son testament les vicomtes de Turenne, de Valence et ses possessions d’Auvergne à son cousin Amadieu de Beaufort.

ÉLÉONORE D’ARAGON, reine de Portugal, morte à Tolède en 1445. Son père, Ferdinand d’Aragon, dit le Juste, lui fit épouser, en 1428, Édouard, infant de Portugal, qui devint roi en 1433, et mourut cinq ans après, laissant à Éléonore la régence et la tutelle du jeune Alphonse V, Dépouillée par les états du royaume du titre de régente, elle n’en continua pas moins à. gouverner ; mais, à la suite d’une insurrection populaire, elle dut abandonner le pouvoir k l’infant don Pëdre, duc de Colmbre, nommé régent ; elle se retira alors sur les terres du prieur de Crato, d’où elle fomenta des mouvements insurrectionnels dans le Portugal, puis passa en Castille pour demander au roi Jean II de la rétablir dans ses fonctions de régente. Jean venait d’entamer des négociations avec don Pèdre lorsque Éléonore mourut subitement.

ÉLÉONORE D’ARAGON, reine de Navarre et d’Aragon, fille de Juan II, roi d’Aragon, et de Blanche, reine de Navarre, morte à Tudela en U79. Elle.épousa, en 1436, Gaston IV, comte de Foix. Sur les sollicitations pressantes d’Éléonore et de Gaston, Juan II consentit à déshériter don Carlos et Blanche, les athés d’Éléonore, à désigner celle-ci pour lui succéder et à lui livrer immédiatement l’héritage de leur mère. Don Carlos prit les armes ; mais il fut battu, puis empoisonné, par l’ordre de son père, à ce qu’on assure. Sa sœur Blanche rut jetée en prison, et y mourut bientôt après ; probablement aussi de mort violente. Quant a Éléonore, elle ne jouit pas longtemps du fruit de ses crimes, car elle ne survécut qu’un mois à son père.

, ÉLÉONORE D’AUTRICHE, reine de Portugal, puis de France, fille de Philippe Ier et de Jeanne de Castille, sœur aînée de Charles-Quint, née à Louvain en 1498, morte en 1558 à Talavera, près deBadajoz. Élevée à la cour de son frère, elle fut mariée, en 1519, au roi de Portugal, Manoel ou Emmanuel le Fortuné. Deux années après elle était veuve. Il fut alors question de son mariage avec le connétable de Bourbon ; mais la victoire de Paris changea les projets de l’empereur, et le traité de Cambrai, dit Paix des dames, stipula le mariage d’Éléonore avec François Ier.

Le mariage fut célébré a l’abbaye de Capsieux, entre Bordeaux et Bayonne, le 4 juillet 1530. Tous les historiens s’accordent à dire qu’Éléonore était bonne et douce, et qu’elle ne se laissa éblouir ni par la position où la fortune de son frère l’avait placée, ni par les plaisirs bruyants de la cour de François 1er. Michelet, s’il n’en fait pas au physique un très-gracieux portrait, l’appelle « la bonne reine Léonore » chaque fois qu’il parle d’elle ; les poètes de son temps chantent et célèbrent a ('envi ses qualités de cœur ; Bèze, admirant le soin avec lequel elle s’efforce de maintenir la paix entre son frère et son époux, lui adresse même une petite pièce latine qu’on a traduite ainsi en français :

D’Hélène on chanta les attraits : Auguste Kléonore vous n’êtes pas moins belle,

Mais bien plus estimable qu’elle : Elle causa la guerre, et vous donnez ta paix.

François Ier, qUi, un instant, s’était laissé gagner par la candeur et les grâces d’Eléonore, la délaissa bientôt pour les maîtresses que sa trop habile et complaisante mère jetait sans cesse sur ses pas, pour la triste Châteaubriant, pour la blanche Anne de Pisseleu, pour cent autres beautés agréables et faciles qui peuplaient Blois et Chambord.

Éléonore d’Autriche se rit, au milieu de la cour, une espèce de retraite et vint se retirer dans son oratoire, priant, méditant sur quelque passage de la Bible, La sainteté de sa vie ne l’a pas mise, cependant, à l’abri des calomnies de certains historiens, qui ont fait du connétable de Montmorency son amant heureux. Nous signalons cette assertion odieuse sans prendre autrement souci de la réfuter.

Éléonore n’eut pas d’enfant de François Ier, et k la mort de celui - ci, en 1547, elle quitta la cour de France, ne voulant pas y vivre auprès de Taltière Diane, comme la reine Catherine. Elle se retira d’abord dans les Pays-Bas, auprès de l’empereur, puis en Espagne, en 1556.

ÉLÉONORE D’AUTRICHE, duchesse de Mantoue, née en 1534, morte en 1594. Elle était» fille de l’empereur Ferdinand Ier, et épousa, en 1561, Guillaume de Gonzague, duc de MantoiiH et do Montferrat. Les historiens ont fait l’éloge de la piété et de la douceur de cette princesse. Elle eut de son mari deux filles et un fils, Vincent, qui succéda à son père.

ÉLÉONORE DE GONZAGUE, duchesse d’Urbin. V. Gonzaguk.

ÉLÉONORE DE GUZMAN, favorite du roi de Castille Alphonse XI. V. Guzhan.

KLÉONORE DE SUÈDE et DE DANEMARK,

reines de Suède. V. Ulriqoe-Eléonork.

ÉLÉONTE, ville de l’ancienne Chersonèse de Thrace, au S. de Sestos, sur l’Hellespont, ancienne colonie d’Athènes où Miltiade s’embarqua lors de son expédition contre Lemnos, et dont le nom est souvent cité dans la guerre

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du Péloponèse et dans les harangues de Démosthène contre Philippe. C’est à Elconte

qu’Alexandre le Grand' s’embarqua pour la Troade. Près de l’emplacement de l’ancienne colonie grecque s’élève de nos jours une fortification grossière, à larges embrasures, nommée Eski-Hissarlik, qui couronne la crête de la falaise et qui est une dépendance du château d'.Europe (Kelid-ul-Bahar).

ÉLÉOPHAGE ou ÉL/EOPHAGE adj. (é-léo-fa-je — du gr. elaia, olive ; phago, je mange). Qui mange des olives, qui s’en nourrit : Les Provençaux sont élÉuphages. (Complém. de l’Acad.).,

ÉLÉOPTÈNE ou ÉLfllOPTÈNE s. m. (é-léo-ptè-ne — du gr. elaion, huile). Chim. Principe immédiat, liquide, volatil, qu’on trouve mélangé au stéréoptène.

ÉLÉOSACCHARUM ou ÉUffiOSACCHARUM s.m.(é-lé-o-sa-ka-romm — du gr. elaion, hn'ùe, et de l’ar. sacchar, sucre). Phann. Médicament que l’on préparait autrefois en triturant dans un mortier du sucre et une essence quelconque, ou en frottant un morceau de sucre sur 1écorce fraîche d’un citron ou d’une orange. ÉLÉOSÉLIN ou ELJEOSÉLIN s. m. (é-léo-sé- ! ain — du gr. elaia, olivier ; selinon, persil). Bot. Genre de plantes, de la famille des ombellifères et de la tribu des daucinées, comprenant deux espèces, qui croissent, l’une au pourtour du bassin méditerranéen, l’autre au Mexique. Il On dit aussi éléoséline ou

ÉLuEOSÉLINK S. f. et ÉLÉOSÉLINON OU ÉLÉOSÉLINON.

ÉLÉOSÉLINE ou ÉLJEOSÉLINÉ, ÉE adj. (é-lé-o-sé-li-né). Bot. Qui ressemble ou qui se rapporte au genre éléosélin.

— S. f. pi. Section de la tribu des daucinées, dans la famille des ombellifères, ayant pour type le genre éléosélin.

ÉLÉOSPONDE ou ÉLJEOSPONDE s. f. (élé-o-spon-de-du gr. elaion, huile ; spondé, libation). Antiq. gr. Libation d’huile en l’honneur d’un dieu, et particulièrement en l’honneur de Pluton.

ÉLÉOTHÈSE s. m. (é-lé-o-tè-ze — lat. elœothesis ; du gr. elaion, huile, et tithêmi, je place). Antiq. Domestique ou esclave qui frottait d’huile le corps des baigneurs.

ÉLÉOTHÉSION OU ÉLÉOTHÉSION S. m. (é-lé-o-té-zi-on — du gr. elaion, huile ; tithêmi, je place). Antiq. gr. et rom. Lieu où l’on se frottait le corps d huile ou de parfums dans les palestres et les bains publics.

ÉLÊOTHREPTE s. m. (é-lé-o-trè-ptedu gr. elaia, olivier ; trephâ, je nourris). Oruith. Nom d’une espèce d’engoulevent.

ÉLÉOTRIS s. m. (é-lé-o-triss — nom grec d’un poisson). Ichthyol. Genre de poissons acanthoptérygiens, voisin des gobies, comprenant une vingtaine d’espèces, qui habitent pour la plupart les eaux douces de l’Amérique, de l’Afrique et de l’Asie, et dont on trouve une espèce sur les côtes de la Méditerranée. Il On dit aussi éléothk.

— Encycl. Les éléotris sont des poissons acanthoptérygiens, très-voisins des gobies, dont ils diffèrent par leur tête obtuse, un peu déprimée, leurs yeux écartés, leur membrane branchiale a six rayons et leurs nageoires ventrales distinctes. Ce genre comprend une vingtaine d’espèces, qui vivent pour la plupart dans les eaux douces, près des côtes et dans la vase. La plus remarquable est Véléotris dormeur, poisson d’assez grande taille, k joues renflées et a nageoires tachetées de noir. Il est assez commun aux Antilles, et on le trouve presque toujours en repos près des écores, où on le prend k la truble et à l’épervier. On mange et on sale-sa chair, bien qu’elle ne soit pas très-estimée. On trouve aussi des éléotris dans la Méditerranée, au Sénégal, aux Indes et jusqu’en Chine.

ÉLÉOOTES, nom donné par les Chinois aux habitants de la Dzoungarie. V. ce mot.

ÉLÉPHANT s. m. (é-lé-fan — du gr. elephas, même sens. Pour plus de détails, v. l’article encycl.). Mamm. Genre de pachydermes à trompe, qui comprend les plus grands mammifères terrestres actuellement vivants : On exposait anciennement les personnes coupables aux éléphants, qui les écrasaient, (Va.ugelas.) Les vrais philosophes font comme les éléphants, qui, en marchant, ne posent jamais le second pied à terre, que^ le premier n’y soit bien affermi. (Fonten.) L’u- LÉphaNT approche de l’homme par l’intelligence, autant que la matière peut approcher de l’esprit. (Buff.) /.'éléphant aime la société de ses semblables. (Buff.) Jamais /'éléphant ne fait abus de ses armes et de sa force. (Buff.) Un charge de quatre à cinq milliers n’est pas trop forte pour un grand éléphant. (Bonnet.) Le mastodonte avait, à peu de chose près, là taille et la forme de notre éléphant actuel. (L. Figuier.) Ceylan est la seule île où se rencontrent des éléphants. (A. Maury.).

tout petits que-noussommes, D’un grain moins que les éléphants.

La Fontaine.

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Que, pour son rare instinct, dans un corpB si grossier, Presque pour ses vertus, adore un peuple entier L’éléphant, en un mot, qui sait si bien connaître L’injure, le bienfait, fies tyrans et son maître.

DE LILLE.

Il Eléphant blanc, Variété albine d’éléphant, qui doit sa couleur à une espèce de lèpre : On respecte à Siam les éléphants blaKcs comme les mânes des empereurs. (Buff.) Il Eléphant mammouth. V. mammouth. Il Eléphant de mer, Nom vulgaire du morse et du phoque à trompe.

— Par ext. Animal relativement très-grand : L’autruche est ^'éléphant des oiseaux. (Buff.)

— Par anal. Objet qui a des dimensions gigantesques : La basse, cet éléphant, ce mammouth des instruments à cordes. (Th. Gaiit.)

Il Personne grosse, lourde et mal laite : C est un Éléphant, un vrai éléphant.

— Loc. prov. Faire d’une mouche un éléphant, Donner de l’importance a une chose qui n’en a pas.

"— Numism. Figure que l’on représentait sur les médailles des Césars, d’abord par allusion au mot kaisar, qui signifiait éléphant en langue punique, et, plus tard, à cause de la victoire que César remporta sur Juba. Il Figure qui, sur les médailles des empereurs, fait allusion aux éléphants qui avaient paru dans le cirque, il Type des médailles d’Apumée. Il Figure qui, sur une médaille de l’empereur Philippe, indique l’éternité, et cause de la longévité de l’éléphant.

— Archéol. Petit cor d’ivoire, plus ordinairement appelé olifant.

— Art milit. anc. Eléphants de guerre, Eléphants dont certains peuples anciens se servaient comme de montures dans les combats.

— Comm. Sorte de papier.

— Ichthyol. Nom vulgaire d’un centrisque, appelé aussi bécasse.

— Encycl. Linguist. Eléphant vient directe" ment du grec elephas, éléphantos. Mais l’origine de ce mot est très-obscure, et, pour l’étudier, nous prendrons pour guide un remarquable article qui a paru dans le Journal asiatique, en 1843. Cetarticle est signé dunom de M. Ad. Pictet, qui, plus tard, a publié de belles études sur les Origines indo-européennes. Le nom grec a passé dans toutes les langues européennes, mais, chose singulière, il ne se retrouve, du moins ostensiblement, dans aucun des idiomes de l’Orient. Comme l’attention des linguistes s’est portée naturellement sur ca nom avant tous les autres, les efforts tentés pour le rattacher soit aux langues sémitiques, soit au sanscrit, ont été très-nombreux, mais suivis, il faut le dire, de bien peu de succès. Et cependant, puisque ce mot n’est pas grec, puisqu’il est venu sûrement de l’Orient avec l’ivoire, auquel il s’appliquait déjà, du temps d’Homère, il est impossible qu’en cherchant bien on ne retrouve quelques traces de son origine. Rappelons d abord brièvement les étymologies diverses proposées jusqu’à ce jour par les autorités les plus graves.

Le savant Bochart, dans son Hiérosoïcon, cite, comme déjà proposée de son temps, i’étymologie qui rattache elephas au nom sémitique de l’animal fil, sur lequel nous reviendrons plus tard. En le faisant précéder de l’article arabe, alfU, on lui donne eu effet une analogie lointaine avec eleph ; mais outre que la ressemblance est bien imparfaite, elle laisse de côté la moitié du mot, le anto des cas obliques, qui cependant ne peut pas avoir été ajouté gratuitement par les Grecs. Pourquoi ceux-ci n’auraient-ils pas dit alphilos ou elphilos, nom harmonieux et dans lequel on aurait pu chercher un sens indigène, ce qui décide bien souvent de l’adoption d’un mot étranger. Cette première étymologie, que, de reste, personne ne défend plus, n’est pas même acceptée par Bochart, qui en propose une autre plus spécieuse. C’est le nom hébreu du bœuf eleph, qui lui semble avoir

Nous ne nous prisons pas,

Qu’importe a ceus du ûrmament Qu’on soit mouche ou bien élèplumt ?

La Fontaine.

L’admirable éléphant, dont le colosse énorme Cache un eBprit si un dans sa masse difforme.

passé à l’éléphant. Nous avons ici, il est vrai, identité de son pour les deux premières syllabes, mais la terminaison anto reste également inexpliquée. Bien que le bœuf ne ressemble guère à l’éléphant, l’exemple des Romains, qui donnèrent a ce dernier le nom de luca bos, parce qu’ils l’avaient vu pour la première fois dans la Lucahie, avec l’armée de Pvrrhus, prouve la possibilité de cette substitution chez les peuples sémitiques. Mais alors ne pourrait-on pas s’étonner de n’en trouver aucune trace dans les langues de ces peuples ? Or, non-seulement elles n’offrent rien de semblable, mais le mot eleph, comme nom du bœuf, est même isolé dans l’hébreu, bien que sa racine alaph (il s’est accoutumé), se retrouve dans l’arabe âlifâ, dont les dérives, toutefois, âlif, ilf, ulfat, ne signifient que compagnon, associé, amitié, etc.

Ces objections, qui ne semblent pas sans valeur, n’ont pas empêché le savant et ingénieux Pott de reprendre, pour son compte, l’explication de Bochart, en cherchant à la compléter en ce qui concerne sa terminaison. Dans ses Recherches étymologiques et dans le Journal de Zossen, il a essayé de rendre compte du anto final, par l’adjonction au mot eleph de hindi, indien. Il obtient ainsi eleph hindi, bœuf indien. Le changement un peu anormal dé hindi eu anto ne l’arrête pas, parce qu’il l’appuie de l’exemple d’un nom d’arbre, le tamarin, en arabe tamàr hindi, dattier iu-