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une traduction de la Pharmacopœa Borussica (1846-1848), et de nombreux articles dans les Annales de physique, dans le Répertoire de chimie pratique, etc.

DULK (Frédéric-Albert-Benno), poète et chimiste, fils du précédent, né il Krenigsberg en 1819. Il étudia la chimie et reçut le grade de docteur. Ses opinions politiques avancées ayant été pour lui un obstacle a ce qu’il embrassât la carrière de l’enseignement, il voyagea en Italie, en Égypte, et s’adonna aux travaux littéraires. On a de lui : Orla, poème dramatique (18-14) ; Lea, drame ; les Murailles, comédie politique (1848), etc.

DULKEN, ville de Prusse, province du Rhin, régence de Dusseldort’, cercle et à 13 kilom. S.-O : de Keinpen, à la source de la Nette ; 2,607 hab. Industrie linière ; fabriques de velours, de fil h coudre ; commerce de chevaux.

DDLL, village et paroisse d’Écosse, comté de Penh, à 7 kilom. O. d’Aberfeldy, près de la Tay ; 4,890 hab. Aux environs, ruines nombreuses de cercles druidiques.

TJULLAEUT (Heymann), peintre hollandais, né à Rotterdam en 1636, mort en 16S4.11 était fils d’un marchand de tableaux. Son père, frappé de ses dispositions artistiques, le plaça dans l’atelier de Rembrandt, où il fit des profrès rapides et parvint à imiter la manière e son maître avec une si grande perfection que les plus habiles connaisseurs attribuaient a Rembrandt les œuvres de cet artiste. Parmi ses tableaux, on cite particulièrement un Ermite à genoux et un Dieu Mars. À ses talents comme peintre Dullaert enjoignait plusieurs autres. Il était très-versé dans la culture des lettres et des sciences, savait plusieurs langues et était, en même temps, poëte et musicien. On a de lui, en hollandais, un recueil de poésies, des pièces de théâtre, une traduction de la Jérusalem délivrée du Tasse, etc. DULLEK (Édouard), poète et littérateur allemand, né à Vienne en 1809, mort en 1853. Il étudiait le droit et la philosophie lorsqu’il composa et fit représenter à Vienne un drame intitulé : Maître pèlerin (1828). Le grand succès qu’obtint cette pièce le détermina à abandonner la jurisprudence pour suivre la carrière des lettres. L’exaltation de ses idées politiques l’ayant contraint de quitter sa ville natale, où régnait le régime de l’absolutisme, Duller se rendit à Munich, où il écrivit ses Ballades et collabora au Journal des Dames et au Miroir du temps. En 1832, il alla habiter Trêves, puis se rendit à Francfort, y publia le Phœnix, qui dut cesser de paraître en 1838, passa alors à Darmstadt, où il fonda le journal la Patrie, devint, en 1848, un des défenseurs de la cause populaire, et abandonna, on 1849, Darmstadt pour Mayence. Là, il fit des cours publics et se livra à la composition d’ouvrages historiques et littéraires qui ont popularisé son nom en Allemagne. Comme poète et comme romancier, on a de Duller : Chants de vengeance (1829) ; Ballades (1831) j Aux rois et aux peuples (1831) ; Berlhold Schwarlz (1832) ; François de Sicfcingen (1833) ; VAntéchrist (1833) ; Contes et pièces fantastiques (1834) ; le Baptême de feu (1834) ; Histoires et contes pour les jeunes et les vieux (1834-1835) ; Couronnes et chaînes (1835) ; Tableaux fantastiques (1836) ; Loyola (1836,3 vol.) ; le Prince de l’amour (1842) ; Poésies réunies (1845) -} Nouvelles historiques (1844) ; Contes pour lajeunesse (1846-1852), etc. Comme historien, il a publié : VEmpereur et te pape (]83S) ; Histoire du peuple allemand (1840) ; Histoire des jésuites (1840) ; Histoire de l’indépendance des Pays-Bas (1841) ; les Pays du Danube (1839-1848) ; l’Allemagne pittoresque et romanesque ; Marie-Thérèse (1844) ; l’Allemagne et le peuple allemand (1845) ; l’Archiduc Charles d’Autriche (1S47) ; les Hommes du peuple (1847-1850), en collaboration avec plusieurs écrivains ; Histoire patriotique (1852), etc.

DULMEN, ville de Prusse, dans la Westphalie, ù 20 kilom. S.-O. de Munster, cheflieu de la seigneurie ducale de Croy-Dulmen ; 3,000 hab. Château ducal ; tribunal de l" instance. Industrie linière ; teintureries, moulins à foulon, huileries. La seigneurie de Dulmen appartient au duc de Croy ; elle a 4 myriamètres carrés et 16,000 hab.. avec les villes de Dulmen, de Haltern, et le village de Sythe ou Siethen, où Pépin le Bref vainquit les Saxons en 758.

DULMEN (nonne de). C’est le nom sous lequel est généralement connue une paysanne, nommée Anne-Catherine Eramerien, qui, dès son enfance, fut affligée de visions prétendues surnaturelles, et qui, plus tard, religreuse au couvent des augustines de Dulmen, devint sujette à des accès de sommeil et d’extase magnétique excessivement longs. Eile mourut en 1824. Clément Brentano avait été en relation avec elle.

DULOIR, voyageur français qui vivait vers le milieu du xviie siècle. Parti de Marseille en 1639, il visita successivement Malte, l’Asie Mineure, Constantinople, où il assista aux cérémonies de l’avènement du sultan Ibrahim, la Morée, Zante, et débarqua à. Venise en 1641. Il a publié une intéressante et exacte relation de ses Voyages (Paris, Ï654, in-4»), ouvrage qui a été traduit en italien.

DULON (Frédéric-Louis), célèbre flûtiste prussien, né en 1779, mort en 1826. II devint

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aveugle a l’âge de trois mois ; mais, s’ètant exercé sur la iiûte, il y acquit une telle habileté quMl alla donner des concerts dans les principales villes de l’Europe, où il excita une vive admiration. En 1796, le czar Paul I« l’appela à la musique de sa chapelle. Wieland a publié la Vie et les opinions de Dulon (1807-1808, 2 vol. in-s°). On a de Dulon, qui composait avec beaucoup de facilité, des duos, des variations, des caprices, etc.

DULON (Rodolphe), théologien allemand, né à Stendahl (Prusse) en 1807. Il avait été Successivement recteur des écoles communales de Werben (1831), prédicateur à Flossau (1836) et pasteur à Magdcbourg (1843), lorsque, ayant combattu les mesures antilibérales prises par le ministre prussien Eiehhoni, et ayant refusé de s’associer à sa politique, il lut traduit par cet homme d État devant le consistoire do Magdabourg. Dulon défendit ses idées et sa conduite dans deux écrits : la Valeur des écrits symboliques dans l’Église réformée (Magdebouig, 1847), et le Combat pour la parole de Dieu (1S47) ; mais il n’en fut pas moins suspendu de ses fonctions. Sur ces entrefaites, éclata la révolution de 1848, qui renversa le ministre Eichhornet vint annuler cette sentence. Dulon quitta quelque temps après Magdebourg pour se rendre à Brème. Tout en remplissant dans cette ville les fonctions pastorales, il y fonda, en 1850, le Réveil, revue hebdomadaire, et la Chronique quotidienne de Brème, organe des idées démocratiques, qui fut supprimé au commencement de 1851 par le gouvernement de Brème. Vers la même épooue, Dulon, qui s’efforçait de ramener l’Eglisï aux croyances primitives, à l’enseignement de l’Evangile, et qui par cela même avait ameuté contre lut le clergé protestant, dont l’intolérance égale celle, du clergé catholique, se vit de nouveau en butte aux "accusations les plus vives, fut sommé d’exposer ses doctrines devant les autorités de Brème et frappé de suspension, l’année suivante, par la Faculté de théologie protestante de Heidelberg. Outre les écrits précités, on a de lui : De la lutte pour la liberté des peuples (Brème, 1849-1850), et le Jour est venu (Brème, 1855), ouvrage qui a eu un grand retentissement.

DULONG (Pierre-Louis), physicien et chimiste français, né à Rouen en 1785, mort à Paris en 1838. Il entra à l’École polytechnique à l’âge de seize ans, mais n accepta en sortant aucun service public ; il voulait embrasser la carrière médicale. Élève de Berthollet, puis de Thenard, il se signala bientôt par sa découverte du chlorure d’azote, dans la préparation duquel il perdit un œil et deux doigts (1812) ; par celle de l’acide hypophosphoreux, etc. Il refit, en 1820, en collaboration avec Berzêiius, l’analyse de l’eau ; le procédé qu’il employa, et qui est resté le plus parfait, consistait a faire passer un courant d’hydrogène bien sec sur de l’oxyde de cuivre chauffé au rouge et à recueillir la vapeur d’eau dans un récipient contenant de l’acide sulfurique concentré. En pesant le tube et le récipient avant et après l’expérience, on avait le poids de l’oxygène, celui de l’eau, et, par suite, celui de l’hydrogène. Mais c’est principalement comme physicien que Dulong s’est acquis une renommée impérissable. La théorie de ia chaleur a été le but constant de toutes ses études à partir de 1818. Il écrivit à cette époque, avec Petit, son fameux mémoire sur les lois du refroidissement, qui fut couronné par l’Académie des sciences et qui est resté un modèle. L’Académie ayant été invitée par le gouvernement, en 1825, à fournir les données scientifiques nécessaires pour la rédaction de la loi sur les machines à vapeur, Dulong fut désigné avec Arago pour procéder aux expériences et faire le rapport demandé par le ministre. Il s’agissait principalement de déterminer les. tensions maxjina de la vapeur d’eau à toutes les températures supérieures à celle de 100 degrés, Dulong et Arago commencèrent par graduer exactement un manomètre à air, comprimé par une colonne de mercure dont ils portèrent la hauteur jusqu’à vingt-quatre fois celle de la colonne barométrique. Ces expériences furent faites dans la tour du collège Henri IV. Le manomètre étant gradué, Dulong et Arago firent agir la pression de la vapeur sur le bain de mercure qui isolait l’air emprisonné dans l’appareil, et purent ainsi déterminer les tensions de la vapeur jusqu’à 212 degrés environ. Dulong entreprit ensuite avec Petit une série d’études sur les dilatations des liquides et des solides. Ce fut à cette occasion qu’il imagina le précieux instrument nommé cathétomélre, et le thermomètre à poids.

Dulong fut nommé maître de conférences a l’École normale en 1830, et professeur de chimie à la Faculté des sciences en 1832 ; bientôt après les-suffrages de ses collègues de l’Académie des sciences l’investirent des fonctions de secrétaire perpétuel ; enfin il fut chargé de la direction des études à l’École polytechnique, poste qu’il conserva jusqu’à sa mort. Ses mémoires se trouvent épars dans les Annales de chimie et de physique, dans le Journal de l’École polytechnique et dans d’autres recueils.

DCLOîSG (François-Charles), député de l’opposition, né à Pacy (Eure) en 1792, tué en duel par Bugeauà le 29 janvier 1834. Entré dans la magistrature en 1814, il n’y resta que peu de temps, embrassa la car DULO

rière du barreau, et s’acquit une certaine réputation parmi les jeunes avocats appartenant à l’opinion libérale. Après les journées de juillet 1830, il remplit un haut emploi au ministère de la justice, alors occupé par Dupont de l’Eure, son parent, se retira avec lui, fut élu députe de l’Eure en 1831, et siégea sur les bancs de l’extrême gauche. Une séance très-animée eut lieu à la Chambre le 25 janvier 1834, L’opposition accusait le maréchal Soult de despotisme et de tyrannie envers l’armée, M. Larabit soutenait qu’un militaire victime d’une injustice avait le droit de se plaindre, et même de protester. « On obéit d’abord, • répondit le général Bugeaud. Alors Dulong, faisant allusion au rôle joué par ce général à la citadelle de Blaye, où il avait gardé la duchesse de Berry, lui lança cette apostrophe : « Faut-il obéir jusqu’à se faire geôlier, jusqu’à l’ignominie ? » Cette parole n’eût peut-être pas été relevée sans les commentaires dont elle fut l’objet dans les journaux républicains et légitimistes. Alors Bugeaud en demanda raison à son collègue. Dulong accepta, bien qu’il fût convaincu qu’il courait à une mort certaine. La rencontre eut lieu au bois de Boulogne, le 29, au matin. Ses témoins étaient Georges La Fayette et le colonel César Bacot ; ceux de Bugeaud, le général Rumigny et le colonel Lamy. On se place à quarante pas : à peine les deux adversaires se sont-ils avancés l’un contre l’autre, que Dulong tombe frappé d’une balle à la tête, au-dessous du sourcil gauche. Emporté dans la voiture de Georges La Fayette, il expira le 30, à six heures du matin. La sensation causée par cet événement fut profonde. Le président de la Chambre, qui devait donner un bai dans la soirée, le contremanda sur-le-champ. Une foule nombreuse et sympathique suivit le convoi funèbre jusqu’au champ du repos.

DULONG DEROSNAY(Louis-Henri, comte), général français, né à Rosnay (Champagne) en 1780, mort à Paris en 1828. Il s’engagea dans les hussards, reçut le grade de capitaine pour sa brillante conduite au siège d’Ancône (1799), défendit pendant un mois la place de Pesaro contre des forces de beaucoup supérieures, fut nommé chef d’escadrons en 1800, major en ir»fi7 et colonel la même année, en récompense de l’intrépidité dont il fit preuve à Pontemreva et à Misarella, en Espagne. En 1812, Napoléon lui conféra le titre de baron et le nit, en 1813, à la tête d’une brigade. Pendant les Cent-Jours, Dulong devint lieutenant des gardes du corps et bientôt après général de division (1815), puis reçut le titre de comte. Après avoir commandé quelque temps la 17e division militaire, il fut mis en disponibilité en JS28.

DULONGIE s. f. (du-lon-jî — de Dulong, sav. fr.). Bot. Genre d’arbustes, delà famille des célastrinées, qui habite la Colombie.

DO LOBENS (Jacques), poëte français, né à Châteauneuf-en-Thimerais en 1583, mort en 1658. Successivement avocat au parlement de Paris et au présidial de Chartres, il devint, en 1613, président au bailliage de Châteauneuf, et conserva ces fonctions jusqu’à sa mort. Ce président avait l’humeur satirique, et il se fit connaître, à l’âge de trente et un ans, par un volume intitulé : les Satires du sieur Du Lorens, divisées en deux livres (Paris, 1624, in-12). Le premier livre en contient onise ; le second, quatorze ; en tout vingt-cinq. Les bibliographes se trompent en disant qu’il en publia une deuxième édition en 1646, 11 donna, en effet, au public, vingt-deux ans après la publication du premier, un volume sous le titre de : Satires de M. Du Lorens, président de Châteauneuf (Paris, 1646, in-4<>) ; mais ce volume est composé do vingt-six pièces, la plupart toutes différentes de colles qu’il avait t’ait imprimer en 1624 ; et celles qu’il a conservées sont tellement remaniées que l’on a peine à les reconnaître. La langue des premières est tout à fait celle qu’on parlait à la fin du xvie siècle ; le style en estlaeile, mais commun et sans caractère. Il y a plus d’art, plus de verve et d’énergie et une meilleurslangue dans les Satires de 1646.

Du Lorens était fort processif, et, si l’on en croit un factum de quelques habitants de Châteauneuf, avec lesquels, sans doute, il avait eu maille à partir, « J’une humeur si peu accommodante que jamais il n’y put vivre en paix et sans avoir de différends avec quelqu’un, n’ayant laissé un seul des officiers et principaux habitants exempt de ses offenses ordinaires. » Il avait eu, selon la même pièce, des querelles avec les magistrats de Chartres ; on l’avait condamné • en de grosses amendes et en de grands dépens, pour excès, injures et libelles diffamatoires ; > mais comme on n’a jamais mis en doute sa probité, et que ce factum n’a été publié qu’après sa mort, , nous croyons qu’il y a beaucoup à rabattre de ces excès, de ces injures et de ces libelles diffamatoires, dont on l’accuse. Lui-même dit dans sa V« satire : Jamais dans mes procès je ne suis demandeur, La malice du siècle en veut â. ma candeur.

Et, s’il ne faut pas l’en croire là-dessus au pied de la lettre, au moins paraît-il qu’il ne fut pas si noir qu’on l’a fait.

Ce factum, du reste, ressemble fort à une vengeance tirée du poëte défunt parquelquesunsdes personnages désignés dans ses satires,

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car il n’y nomme personne, " à l’exception d’un certain professeur Crassot,

Qui s’aime en un excès qui fait crier au sot, si même Crassot n’est pas un nom inventé.

Du Lorens était riche ; il aimait les arts, surtout la peinture et la sculpture. Lié iw ce Vignon et Biard, l’un peintre et l’autre sculpteur en renom, il leur a adressé des vers où il parle de leur art en homme qui s’y connaît. 11 eut aussi d’illustres amis, les présidents Mole et Briçonnet, Charles de Gonzaguo, le duo de Nevers, le président Nicole, Rotrou, Nicolas Bourdon, bon poste latin du temps, et quelques autres.

Il était marié, et tenait presque toute sa fortune de sa femme. C’était, au fond, peut-être une bonne femme, mais elle était exigeante, tracassière ; ne partageant presque aucun des goûts de son mari, elle se plaisait à le contrarier en toute chose. Aussi ne le- ’ pargne-t-il point dans sa satire intitulée le Mariage. Voici ce qu’il en dit : J’y suis par mon destin, ou bien par mon péché, N’en déplaise au lecteur, comme un autre attaché. Au lieu de me jeter un jour par la fenêtre. Je souffris que l’on mit à mon cou ce chevêtre. C’est où je tiens encor, d’où je puis de mon mal, En qualité d’expert, dresser procès-verbal, La tamme que j’ai prise est une des meilleures, ’ Mais cependant elle a de si mauvaises heures, Que Socrate y fût-il, que Xantippe exerçoit, La pire, à ce qu’on dit, des deux qu’il nourrissoit, Il seroit bien contraint de lui quitter la place. On peut juger de là ce qu’il faut que je fasse. Elle est mélancolique et hait tout passe-temps ; Si parfois elle rit, c’est signe de beau temps ; Son humeur est fâcheuse et contraire Ma mienne...

Tout ainsi qu’un prêcheur, s’il entend son métier, Sur un mot de saint Luc fait un sermon entier. Elle, sur un ruban, sur un linge, une écuelle. Un mouchoir égaré, bâtit une querelle Qui commence au matin et ne finit qu’au soir.

Etonnons-nous, après cette apologie, que Du Lorens ait consacré à la mémojre de sa femme cette épitaphe si connue :

Ci-gtt ma femme ; ah ! qu’elle est bieû.

Pour son repos et pour le mien I

11 fait, dans une autre de ses satires du volume de 1646, le portrait d’un vrai Tartufe, dont quelques traits ne manquent pas d’un certain comique. Nous citerons les suivants :

Je Suis bien dégoûté de la plupart des hommes. Mais surtout je hais ceux dont le Semblant est doux. Qui n’entendent jamais la messe qu’à genoux, Ne parlent que de Dieu, de sa bonté suprême, De se mortifier, renoncer a soi-même. Us disent a tous coups qu’avecque son prochain Il faut traiter en frère, et le cœur h. la main ; Que le monde n’est pas l’éternelle demeure Et qu’il en faut partir, mais qu’on n’en sait pas l’heure.

11 se laisse quasi mourir de faim chez -lui. Mais il parte des dents à la table d’autrui. Après ses oraisons, est-il hors de l’église, À son proche voisin il trame une surprise.

11 Cajole sa femme, et la prie en bigot De faire le péché qui fait un homme sot. Encor qu’il soit lenu plus chaste qu’Hippolyte, Il est aussi paillard ou plus qu’un chien d’ermite. Il porte un cœur de sang sous un dévot maintien. S’il prête, c’est en.juif sous l’habit d’un chrétien. Et son debteur le fuit, de même, s’il faut dire, Qu’un voleur un prévôt, une nymphe un satyre ; C’est le plus inhumain de tous les créanciers. Je le sais pour avoir été sur ses papiers.

Et encore :

Gardez-vous bien de lui les jours qu’il communie ; C’est lors que son prochain il tâche de tromper Et dans un vieux dessein, s’il peut, l’envelopper. On le prend pour béat a sa mine, a son geste. Et son discours de miel le fait juger céleste ; On croit tout ce qu’il dit, on ne penseroît pas Qu’il voulût décevoir après ce saint repas ; De la religion il dispute, il babille. Et vous fait un procès dessus un point d’aiguille.

II nous semble que ce ne sont pas là des vers trop mal tournés, et que ce président de Châteauneuf n’était pas tout a fait un indigne précurseur de Boileau. Ii y a bien d’autres endroits, dans ces satires de Jacques Du Lorens, touchés de la sorte, et que nous aurions pu citer, si nous avions voulu faire autre chose ici que donner une idée do la manière d’un auteur qui ne mérite pas, peut-être, de rester parmi ceux que personne ne lit.

DULOT, poète français de la première moitié du x.vne siècle. Il passe pour l’inventeur des bouts-rimés ; du moins il les mit à la mode. « Un jour, dit Ménage, Dulot se plaignit, en présence de plusieurs personnes, qu’on lui avait dérobé quelques papiers, et particulièrement trois cents sonnets qu’il regrettait plus que le r.este. Quelqu’un ayant témoigné sa surprise qu’il en eût fait un si grand nombre, il répliqua que c’étaient des sonnets en blanc, c’est-a-dire des bouts rimes de tous les sonnets qu’il avait envie de remplir. Cela sembla plaisant, et depuis on commença à faire, par une espèce de jeu, dans les compagnies, ce que Dulot faisait sérieusement. » Ceci se passait en 1648, et dès l’année suivante on vit paraître un recueil de sonnets en bouts-rimês. Ce badinage fit bientôt fureur, et tous les rimailleurs de la ville et de