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iioiV, son Effet de soleil couchant, qu’il acquit une véritable notoriété et se vit à l’abri des embarras d’argent. Le succès, on le voit, n’avait pas été rapide pour lui. Sa peinture, pénible, timide, d’une originalité incomplète, révèle mieux encore ce qu’elle lui a coûté de difficultés et d’efforts. Les Vaches dans le parc d’Osborne, la Matinée dans les prairies de Windsor, sont deux tableaux véritablement remarquables, les meilleurs de son œuvre. Ils étaient h Paris à la grande Exposition de 1855 ; mais ils Axèrent peu l’attention, écrasés qu’ils furent par les magnifiques toiles de Corot, de Français, de Diaz, de Daubigny, etc., ces rois du paysage. Cooper cependant est loin d’être sans mérite : son dessin est correct, savant, précis ; mais sa brosse, 1 trop habile ou trop prétentieuse peut-être, semble se complaire aux tours de force d’exécution, à la prestidigitation du métier. C’est là un défaut déplorable ; il vaut mieux pécher par l’excès contraire.

COOPER (Thomas), évêque anglais, né à Oxford en 1517, mort à Winchester en 1534. Il étudiait la théologie au moment ou la reine Marie monta sur le trône d’Angleterre ; mais il renonça ensuite à l’état ecclésiastique, et ne revint à l’étude de la théologie qu’aprèsl’avéneinent d’Elisabeth. Orateur et écrivain

distingué, il passa rapidement par les titres de doyen de Glocester en 1569, d’évêque de Lincoln en 1570, et de Winchester en 15S4. On lui a reproché un zèle excessif pour l’Église protestante. Il jouit d’ailleurs, pendant toute sa vie, d’une réputation sans tache. Ses principaux ouvrages sont : Abrégé des chroniques, depuis la dix-septième année après Jésus-Christ jusqu’en 1560 (1560, in-4o) ; Thésaurus lingues romance et britamiicœ (1565, in-fol.) ; Dictionarium historicum et poeticum. On a encore de lui des sermons et des. écrits théologiques.

COOPER (Samuel), peintre anglais, né à Londres en 1609, mort en 1672.. Il s’attacha à reproduire la manière flamande, et y réussit tellement qu’on le surnomma le Petit Van Dyck. Il excella surtout dans le portrait. Il a peint d’une manière fort remarquable Olivier Cromwell et ses principaux partisans, ainsi que Charles II, la reine et les plus grands personnages de la cour. Ses ouvrages ont été reproduits par divers graveurs de mérite.-Son frère, Alexandre Cooper, fut comme lui élève de John Hoskins, et devint peintre ordinaire de Christine, reine de Suède. Il peigniit surtout le portrait et le paysage.

COOPER (Jeun-Gilbert), écrivain anglais, né en 1723 dans le comté de Nottingham, dont il fut ensuite grand shérif, mort en 1769. Son principal ouvrage est la Vie de Sacrale (1749, in-8o), composée d’après les Memorabilia de Xénophon et les Dialogues de Platon. Elle a été traduite en français par Combes. On lui doit également : Épîtres d’Aristippe (1758, in-4«), où il a imité la manière de Gresset, dont il a traduit le Vert-Vert en an— glais ; des poSmes et la charmante chanson de Winifreda.

COOPER (Richard), dessinateur et graveur anglais, né vers 1736 (mort vers 1820. Il excella à reproduire les jeux de lumière de Rembrandt. On estime également ses estampes, à la manière noire et à l’aqua-tinta. On cite surtout de lui les Enfants de Charles Ier d’Angleterre, Vue de Véglise de Saint-Pierre et des environs, Vue de la même église et de la colonnade, l’Intérieur du Cotisée, la Campagne de Rome, etc.

COOPER (Samuel), théologien anglais, recteur de Morley et de Great-Yelverton, dans le comté de Norfolk, né en 1738, mort en 1799. On manque de détails sur sa vie, mais on a de lui des ouvrages de controverse et de piété, parmi lesquels nous citerons : Définitions et axiomes relatifs à la charité (1764, in-8«) ; Explication de différents textes de l’Écriture, -en quatre dissertations ; les Premiers principes du gouvernement civil et ecclésiastique esquissés dans des lettres au docteur Priestleg, à l’occasion de sa lettre à Edmund Burke (1791, in-8") ; Lettre à l’évêque de Glocester, où la mission divine de Moïse est ven ■ gée contre tes fausses interprétations des amis et des ennemis de l’auteur, et où l’on démontre clairement que ses mérites, comme écrivain, sont bien au-dessus des éloges de ses admirateurs les plus ardents (1766, in-8o).

COOPEU (Édouard), peintre et graveur anglais de la seconde moitié du Xvme siècle. Il était marchand d’œuvres d’art à Londres. Il peignit le portrait avec succès, mais acquit surtout de la réputation par ses gravures sur cuivre, d’après l’Albane, Lebrun, Kneller, etc. On trouve dans.son œuvre le portrait d’une certaine Marguerite Patter, âgée de cent trente-six ans.

COOPER (Samuel), général américain, né à New-York vers 1796. Il sortit de West-Point en 1815, entra comme sous-lieutenant dans l’artillerie légère. Conservé dans l’armée lors de sa réorganisation, à la fin de la guerre contre la Grande-Bretagne, il passa avec son grade dans le 1" régiment d’artillerie, en mai 1821, et fut promu lieutenant en juillet de la même année. De 1828 à 1836, il exerça les fonctions d’aide de camp de Macomb, général en chef des armées des États-Unis. Il devint capitaine en 1836, puis major en 183S, lieutenant-colonel en 1847, enfin colonel eu

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1848, pendant la guerre du Mexique. Le 7 mars 1861, il donna sa démission pour entrer au service des États du Sud, qui venaient de se séparer de ceux du Nord, et fut immédiatement pourvu de l’emploi d’adjudant général de l’armée confédérée. Le général Cooper est beau-frère de M. J.-M. Mason, de la Virginie, ex-sénateur des États-Unis, qui, pendant la guerre civile, représenta les États confédérés en Angleterre. Il est l’auteur d’un ouvrage assez estimé, publié à Philadelphie en 1836, sous le titre de Système concis d’instruction pour la milice et les volontaires des ÉtatsUnis.


COOPER (James-Fenimore), romancier célèbre, le Walter Scott américain, né à Burlington (New-Jersey) en 1789, mort en 1851. Il était fils d’un juge, riche propriétaire, qui a fondé dans l’État de New-York la ville de Cooper’s-Town, Le jeune Fenimore, peu docile au joug scolaire, interrompit le cours de ses études classiques pour entrer dans la marine en qualité de midshipman (1805). Après avoir navigué pendant cinq ans, fait de longs voyages, assisté à plusieurs combats, il revint dans la résidence paternelle de Cooper’s-Town. De 1826 à 1829, il remplit à Lyon les fonctions-de consul des États-Unis ; puis il parcourut l’Allemagne, la Suisse et l’Italie, se livrant partout à des études de mœurs, et, rentré dans son pays en 1832, il n’en sortit plus. Il avait débuté dans les lettres, en 1821, par le roman de Précaution, médiocre peinture des mœurs anglaises. À la fin de la même année parut l’Espion, où sont retracées, sous les couleurs les plus vives, les glorieuses luttes des héros de l’indépendance américaine. Fenimore Cooper complète ces récits par Lionel Lincoln (1824) et les Puritains d’Amérique (1828). Voilà la principale partie de l’œuvre historique du romancier, œuvre d’un puissant intérêt dramatique, sans doute, mais d’une moindre importance que celle où il nous peint les anciens possesseurs du sol, car c’est là, bien plus que dans certains livres à prétentions sérieuses, qu’il faudra chercher bientôt l’histoire et la véritable physionomie d’une race presque disparue. Cette seconde série se compose particulièrement des romans ci-après : les Pionniers (1822), la Prairie (1825), le Dernier des Mohicans (1826), chef-d’œuvre de l’auteur, le Lac Ontario, le Tueur de daims (1842), les Peaux-Rouges. Toutes les tribus indiennes, sous les noms les plus bizarres, y apparaissent dans leurs mœurs naïves et farouches, disputant leurs foyers aux colons, plus barbares qu’eux, et qui les déciment, ne pouvant les soumettre. Épisodes émouvants, types singuliers, descriptions grandioses d’une nature vierge, tout concourt à tenir le lecteur sous le charme. Cooper n’invente pas : il raconte ce qu’il a vu. Ses romans maritimes forment la troisième catégorie. Ce sont : le Pilote (1823), où les exploits héroïques de Paul Jones sont énergiquement dramatisés, le Corsaire rouge (1828), l’Écumeur de mer (1828), le Feu follet (1842), les Deux amiraux (1842), les Lions de mer (1849), etc. Il donne là les impressions de sa vie de marin, et il parle de la mer, des tempêtes et des abordages en homme du métier. Il a moins réussi dans la peinture de ses impressions de voyages en Europe : le Bravo (1831), qui rappelle Venise, l’Heidenmauer (1832), qui se rapporte à l’Allemagne du XVIe siècle, le Bourreau de Berne (1833), sont des compositions où l’on voit que l’auteur n’est plus dans son élément. On a comparé Cooper à Walter Scott : s’il lui est inférieur pour la finesse des aperçus et l’élégance du style, il le surpasse peut-être pour l’énergie et l’exactitude ; mais tous deux sont également originaux, et leurs ouvrages ont été accueillis avec une égale faveur. La traduction française la plus estimée des Œuvres de Fenimore Cooper est celle de Defauconpret (1838-1845, 25 vol. in-8o). La biographie qui précède du célèbre romancier sera peut-être considérée comme incomplète, par quelques-uns de nos lecteurs ; mais ils changeront d’opinion si, considérant quel est notre plan, ils veulent bien ajouter à l’exiguïté apparente de cette biographie les 1,000 lignes qui sont consacrées aux différents ouvrages du romancier américain. — Sa fille, Susan Fenimore Cooper, a publié, entre autres écrits : Heures à la campagne (1850, in-12), ouvrage dans lequel elle donne la description des sites de Cooper’s-Town, petite ville située sur les bords du lac Ostego, et dont son grand-père, qui possédait en ce lieu un immense domaine, a jeté les fondements ; la Rime et la raison de la vie de campagne (1854, in-4o), recueil de passages des meilleurs auteurs qui ont écrit sur la vie des champs. Ces ouvrages sont estimés.


COOPER (Ant.-Ashley), homme d’État anglais. V. Shaftesbury.

COOPÉRATEUR, TRICE s. (ko-o-pé-rateur, tri-se — du préf. co, et de opérateur). Personne qui coopère, qui travaille ou agit conjointement avec d’autres personnes : Les coopbrateurs de votre salut aident à votre perte. (Mass.) M. Bouguer a dit, après son retour, qu’aucun de ses coopérateurs ne lui avait été plus utile que M. de Jussieu. (Condorcet.)

— Théol. Coopérateur de la grâce, Celui qui contribue à ce que la grâce divine ait en lui son effet, qui répond par sa bonne volonté aux mouvements intérieurs de la grâce.

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— Adjectiv. Qui coopère : Quand là mort eut séparé de l’âme un corps soumis et coopérateur à ses volontés... (Pasc.) La société coopÉRATRiCE des Anglais, gui s’unissent parfaitement pour telle affaire spéciale, tout en se haïssant, se contrecarrant dans telle autre où leurs intérêts diffèrent, ne convient pas à nos Français. (Michelet.)

COOPÉRATIF, ive adj. (ko-o-pé-ra-tiff, i-ve — rad. coopérer). Econ. soc. Qui réunit les efforts de tous les intéressés : Société

COOPÉRATIVE.

COOPÉRATION s. f. (ko-o-pé-ra-si-ondu préf. co, et de opération). Action de coopérer, action qui concourt avec une ou plusieurs autres : Le protestantisme ne s’est définitivement implanté dans la moitié de l’Europe que par la coopération des femmes. (P. Ventura.) En même temps que l’éducation est l’œuvre d’une haute autorité, elle réclame de celui qu’elle élèce la coopération d’une docilité respectueuse. (Dupanloup.) Dans le concours des efforts consacrés à un travail donné, la coopération des forces résulte de l’unité du sujet. (Ch. de Rémusat.)

— Théol, Coopération de la grâce, Action de la grâce qui se joint à la volonté pour l’accomplissement du bien moral.

— Econ. soc. Sociétés de coopération, Sociétés d’ouvriers fondées en vue d’une production en commun, aux frais et au profit de la société.

— Encycl. Econ. soc. Sociétés de coopération. Les sociétés de coopération, qui sont destinées a transformer complètement la situation des classes ouvrières, Sont d’origine toute récente. Elles sont nées de ce mouvement d’association qui, de nos jours, a uni les petits capitaux pour fonder les grandes entreprises industrielles. La théorie des sociétés coopératives est l’élimination des intermédiaires entre le producteur et le consommateur. Cette théorie n’a pas pour but l’élimination radicale et absolue du marchand, mais seulement la faculté de se passer d’intermédiaires dans les cas particuliers où cette modification est à la fois possible et utile, et de rapprocher, plus que cela n’a été fait jusqu’à présent, le producteur du consommateur. Les sociétés de coopération dont cette théorie est la base peuvent être ramenées aux trois types suivants : l" les sociétés de consommation, dont l’objet est d’acheter en gros-pour vendre en détail aux associés d’abord, et même au publie ; ce mode de société permet aux associés d’avoir des matières de consommation non sophistiquées et de retenir par la diminution du prix les profits que ferait sur eux le commerce de détail ; 2« les sociétés de crédit mutuel ; des ouvriers versent des cotisations périodiques qui servent à former, après un

certain temps, un capital social avec lequel Seront servis les emprunts des sociétaires ; tous n’empruntent pas à la fois ; la société réalise souvent son but avec ses propres ressources ; si les emprunts dépassent l’encaisse, appel est fait au crédit extérieur, aux conditions déterminées’par les statuts ; 3° les sociétés de production, qui ont pour objet la transformation des matières premières en produits fabriqués ; leur but est de retenir pour les associés le bénéfice que fait l’entrepreneur ou patron.

Les trois pays ou le mouvement de coopération a commencé à se développer ont choisi chacun un. type différent. En Angleterre, les sociétés de coopération sont surtout des associations de consommation ; en Allemagne, c’est principalement le crédit mutuel qu’elles ont pour objet ; en France, les ouvriers ont une prédilection marquée pour la société de production.

Ces préférences sont le résultat même de la situation industrielle de chacun de ces pays.

En Angleterre, pays de grande industrie, le capital est tellement puissant, que l’idée de lutter contre la grande production ne vient pas aux ouvriers ; aussi se sont-ils tournés vers les sociétés de consommation. En Allemagne et en France, cette puissance du capital étant beaucoup moins grande, l’ouvrier ne se sent pas découragé. Aussi pense-t-il à se dégager de ses rapports avec le patron. En Allemagne, les ouvriers, plus sagement inspirés, n’ont pas commencé par former des sociétés de production ; ils ont considéré le crédit mutuel comme la voie la plus sûre. Le génie français, plus hardi dans ses conceptions, a voulu, avant tout, produire.

— Cette forme de la coopération est la plus complète, c’est celle qui rapproche le plus les associés. Créée par des associés de même profession, elle les absorbe tous dans l’œuvre commune. L’associé ne travaille que pour la société ; tous les intéressés se réunissent chaque jour pour travailler dans les ateliers sociaux ; leurs rapports sont incessants au lieu, d’être presque accidentels et spéciaux, comme dans les sociétés de consommation et de crédit mutuel. Mais, à raison même de ce qu’elle est plus complète, la société de production est plus difficile à créer et surtout à maintenir. La vie individuelle a des avantages qu’au moindre mécompte les associés ne tardent pas à regretter. Une autre cause de difficulté vient de ce que la production est une spéculation qui peut amener des pertes. Le patron qui risque son capital attend une nouvelle campagne qui répare les pertes de la précédente, et fait ses calculs sur une moyenne de plu COOP

sieurs années. Les ouvriers associés n’ayant pas, au moins dès le début, de capital accumulé, ne sont pas en position de perdre. Sous peine de tomber dans la misère, ils sont forcés de faire des bénéfices. Quand la première année se balance en déficit, la dissolution de la société est inévitable. Au premier abord, la société de consommation semble être dans des conditions semblables, car, ses magasins étant ouverts aux étrangers, elle est par cela même une spéculation avec chance de gain et de perte. Mais elle a parmi ses associés une clientèle fixe qui assure un courant d’opérations suffisant pour alimenter l’entreprise. Ses ventes aux étrangers augmentent les bénéfices. Aussi, de toutes les tormes de la coopération, celle-ci est-elle celle qui présente le plus de chances de succès pratique.

La première des règles fondamentales des sociétés de consommation, c’est que toutes leurs opérations doivent se faire au comptant, tant it l’achat qu’à la vente. Ces sortes de sociétés sont de grands marchands, quoiqu’elles vendent à de petits acheteurs, et de grands capitalistes, quoiqu’elles soient formées par des prolétaires. Elles font leurs approvisionnements en gros et les payent comptant, double raison pour les payer moins cher. Elles sont exonérées de tous frais de luxe ; elles n’ont besoin ni d’affiches ni de réclames, elles échappent à la plupart des exigences fiscales. •Connaissant à fond les besoins de leur clientèle, sonc le nombre est d’ailleurs à peu près invariable, elles font leurs achats à bon escient et ne sont exposées ni aux erreurs de mévente, ni aux longs emmagasinages. À tous ces titres, elles peuvent livrer leurs marchandises à bien meilleur marché. En s’obligeunt strictement à ne vendre qu’au comptant, elles suppriment une des grandes chances de perte, et font contracter à leurs acheteurs une habitude également précieuse au point de vue de l’économie et de la morale.

Certaines conditions sont nécessaires, même indispensables au succès de ces sociétés. La ■ copulation à laquelle elles s’adressent doit être assez permanente pour que la vente puisse être prévue avec quelque certitude, et assez rapprochée pour permettre un service régulier et peu coûteux. Elles doivent vendre au public aussi bien qu’à leurs associés, bien choisir leur clientèle, et n’acheter que les denrées ordinaires et consommées par les ouvriers. L’expérience a démontré que les sociétés coopératives de consommation ainsi organisées et administrées étaient certaines de prospérer.

■ Le mérite de la fondation des sociétés coopératives ne revient ni à des philosophes, ni a des économistes, ni à des politiques, mais à de simples ouvriers. La ville de Rochdale, dans le comté de Lancastre, qui a aujourd’hui trois grandes sociétés de ce genre, a vu naître la première en 1844. Les débuts de cette société furent des plus modestes. Les quarante fondateurs, ouvriers tisserands pour la plupart, rassemblèrent, avec de minimes cotisations périodiques, un petit capital pour acheter des épiceries qui devaient être revendues en détail aux associés. Ses opérations commencèrent dès qu’on eut réuni une somme de

28 livres sterling (708 fr.). Les boutiquiers, avertis par un secret instinct du développement que devait prendre cette entreprise, ne tarissaient pas en sinistres pronostics ; les ménagères attachées aux anciens magasins, où elles avaient leurs habitudes et trouvaient du crédit, ne voulaient pas les quitter pour aller se fournir au magasin coopératif, dont la première règle était de vendre au comptant. Les railleurs disaient alors que les marchandises de la société pouvaient tenir sur une charrette à bras. Cela était à peu près vrai. La société ne vendait que des épiceries, de la farine, du beurre et du gruau d’avoine. La boutique (il n’y en avait qu’une) était ouverte seulement le samedi soir et tenue sans rétribution par des associés de bonne volonté. En présence des difficultés qui accompagnèrent les débuts, des railleries des voisins et de l’obligation de payer une cotisation toutes les semaines, plusieurs fondateurs se retirèrent. Mais ceux qui restèrent ne tardèrent pas à se féliciter de leur persistance. En moins d’un an, le capital tripla. Les affaires furent augmentées en proportion ; on evrit de nouvelles salles de vente, on eut t.«s employés salariés à qui l’on permit de vendre tous les jours et à toute heure de la journée. La société s’adjoignit successivement une boucherie et des fabriques de vêtements et de chaussures. En 1845, lors du premier inventaire, le nombre des membres était de 74 et le bénéfice se montait à 32 livres sterling sur 710 livres d’affaires. Le 20 décembre 1864, la société coinptait.4,747 membres ; elle avait un capital de 55,221 liv. sterling. Les achats de l’année courante s’étaient élevés à 151,221 livres, les ventes à 174,937 livres, et de cet ensemble d’opérations résultait un bénéfice de 22,717 livres. Tout prélèvement fait, ce bénéfice a permis de distribuer un dividende de 12 pour 100. Le succès de cette société est dû en premier lieu à la sagesse et à la persévérance de ses fondateurs, et en second lieu à l’excellence de son règlement, dont les dispositions n’ont cependant rien de bien neuf. Pour être membre de la société, il faut être propriétaire de cinq actions d’une livre chacune ; cependant on n’est point obligé de payer ces 5 livres à son entrée dans la société, il suffit de payer un schelliug d’entrée qui n’est jamais rendu, un