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tère et de compassion, comme s’il voulait nous avertir d’un grand danger.

« Oui, mon ami, lui dit mon guide… mais patience, la justice aura son tour.

— Ah ! si je n’avais pas Séjan pour détracteur.
Pour juge, pour témoin et pour accusateur…

Puis, se penchant à mon oreille : « Avez-vous des enfants ? » me demanda-t-il, et, sans attendre ma réponse : « Jetez-les à l’eau, à l’eau, à l’eau, si vous ne pouvez pas leur donner un état indépendant. » Là-dessus il s’enfuit en poussant des cris. « C’est un pauvre employé, me dit mon guide d’une voix attendrie ; il a été destitué de son petit emploi par suite de rapports calomnieux, et le chagrin lui a fait perdre la tête »

« Écoutez, me dit mon guide ; voici le Philosophe : « Jamais ! jamais ! l’éternité ! l’éternité ! » murmurait sourdement, la tête enfoncée dans la poitrine, un vieillard à figure respectable qui paraissait étranger à tout ce qui se passait autour de lui, et qui se serait heurté contre nous si nous ne nous fussions pas écartés.

« — Cet homme est un martyr de la science. Il était incrédule, athée, ou plutôt, comme bien des jeunes gens, il n’était rien. Un de ses amis, pour le ramener au culte de la Providence, résolut de lui démontrer la vérité par des chiffres :

« La lumière du soleil met 8 minutes pour parvenir jusqu’à nous ; or le soleil est à 34 millions de lieues de la terre ; calcule maintenant la distance à laquelle peuvent être de notre globe les soleils dont la lumière, depuis le commencement de leur création, n’a pas encore eu le temps d’arriver jusqu’à nous… Et à quelle distance sont les soleils dont la lumière ne nous parviendra jamais, malgré l’éternité. »

« À ces mots, le jeune philosophe resta confondu. Il s’éloigna tout pensif, et, en se promenant dans la campagne, il murmurait à demi-voix : « Ne nous parviendra jamais ! jamais ! malgré toute l’éternité ! jamais ! jamais ! il y a de quoi devenir fou. »

« — Et vous voyez, ajouta mon guide : le malheureux n’a que trop bien tenu parole.

« Un peu plus loin j’aperçus un homme encore jeune, une figure d’artiste : pâle, de longs cheveux, les yeux en feu. Il tenait à la main une longue baguette, qu’il promenait par des mouvements saccadés sur une toile verte supportée par une sorte de chevalet. « Ah ! me dit mon guide, celui-ci est le peintre, un peintre incompris. Tous les tableaux qu’il présentait à l’exposition étaient refusés, à cause d’une simplicité par trop primitive. Voyez, il s’imagine avoir exécuté un chef-d’œuvre. Approchez et adressez-lui quelques questions sur son tableau. »

« Je l’abordai. Sa figure s’épanouit tout à coup : « Voyez, me dit-il, voici mon tableau.

« — Et il représente ?…

« — Il représente le passage de la mer Rouge par les Hébreux.

« — Pardon, mais où est la mer ?

« — Elle s’est retirée.

« — Où sont les Hébreux ?

« — Ils sont passés.

« — Et les Égyptiens ?

« — Ils vont venir. »

« En effet, il y avait là une passion exagérée pour le genre simple.

— Quels sont ces personnages qui gesticulent en venant à nous ?

« — Le premier s’appelle le maître d’école du genre humain ; l’autre se croit Adanson, le célèbre botaniste. Il passait des nuits entières dans son jardin, accroupi sur ses plantes. Un jour il s’imagina qu’il entendait la circulation de la sève dans les vaisseaux et qu’il en comprenait le mystère. Sa pauvre tête n’y tint plus. Écoutons-le !

« — Illustres voyageurs, voici l’orobanche, le dictame céleste, le type de la beauté morale.

« — La beauté morale, pauvre fou ! murmura le maître d’école. Qui sait ce que c’est que la beauté ? Le beau, c’est la splendeur du vrai, et le vrai la splendeur du beau, et voilà pourquoi ma fille est muette, ajouta-t-il en haussant les épaules. Rêveries, utopies, fatras que tout cela, et se tournant vers nous : « Messieurs, dit-il, je sais tout, je connais tout, je vous appprendrai tout. Voyons, par où faut-il commencer ?

« — Par te taire, maudit bavard ! répondit Adanson. Ta science est creuse comme une toupie d’Allemagne et baveuse comme un pot à moutarde. »

« Et il lui tourna le dos.

« Quel est ce jeune homme qui s’avance, la tête ombragée d’un énorme chapeau de paille, une petite pioche à la main et équipé comme l’archéologue qui va fouiller les ruines d’Herculanum et de Pompéi ?

« — C’est en effet une victime de l’archéologie, Ses camarades l’appellent le Mont-Sacré.

« — Enfants du ciel, s’écria en même temps le jeune homme ; la vérité est sous la terre ; fouillez, fouillez et vous trouverez.

« — Il sortit le premier de l’école des Chartes, ajouta mon guide, et passa dix ans à la recherche d’Alésia. Il l’avait trouvée, et ses mémoires étaient prêts pour l’Académie, quand un pauvre paysan, chez lequel il était venu demander l’hospitalité pour la nuit, lui démontra que l’endroit où il avait fait ses plus sublimes découvertes était les ruines d’une poterie, que son grand-père avait abandonnée depuis soixante ans à la suite d’un incendie…

« — Et il n’a pas quitté ses idées ?

« — Ah ! bien oui ! Il s’imagine qu’il voyage, et il continue ses fouilles ; chaque coin de cette cour a un nom : c’est Balbek, Thèbes, Palmyre, Memphis et Babylone. Il a dans sa poche la pierre sur laquelle reposa Jacob ; il creuse des trous à enterrer des éléphants, et, si on ne le surveillait pas, tout croulerait ici, et, lui-même avec nous, nous serions bientôt ensevelis sous les ruines.

« Un autre fou, pleurant à chaudes larmes, vint se réfugier près de nous.

« — Qu’est-ce ? demandai-je.

« — Ah ! ah ! me dit mon guide, c’est que le Taquin doit rôder par là.

« — Le Taquin ?

« — Oui, oui, c’est un malin drôle, d’un naturel très-doux, mais qui semble inspiré par le démon de la malice durant ses accès. Alors il est sans cesse dans une activité malfaisante. Il enferme ses compagnons dans les loges, et suscite à tout propos des sujets de querelles et de rixes. Voyez-le agiter un linge au bout d’un bâton et poursuivre le Pleureur. Celui-ci est un malheureux qui a épousé sa servante ; la servante devenue maîtresse l’a ruiné, battu, jeté à la porte et enfin rendu fou. Je ne sais comment le Taquin a pénétré le mystère ; mais, depuis cette découverte, il harcèle sans cesse celui-ci en lui criant : « Le torchon ! le torchon ! » et, quand il ne peut lui corner ces paroles aux oreilles, il tourne autour de lui et agite son mouchoir qui figure le torchon, et réveille chez ce pauvre fou des souvenirs qui le désolent.

« Plus loin, des éclats de rire attirèrent notre attention. Nous approchons. Ils étaient une douzaine rangés autour d’un fou assis par terre, occupés à lui lancer de petites boulettes de pain que celui-ci recevait dans la bouche avec une dextérité peu commune ; quand il réussissait, on riait bien fort, et chaque fois qu’il manquait son coup on riait plus fort encore.

« — Vous voyez, dit mon guide, le roi de l’Abyssinie. Il a lu dans je ne sais quelle histoire que c’est le grand cérémonial des souverains de ce pays : des esclaves coupent la viande en petits morceaux, les mêlent avec du pain et en pétrissent de petites boulettes qu’ils jettent dans la bouche de Sa Majesté, sans qu’elle ait la peine de rien couper et de toucher à rien ; et tout autour, ces bons enfants, qu’il appelle les grands dignitaires de son empire, s’amusent, comme vous le voyez, à lui lancer dans la bouche les petites boulettes qu’ils roulent entre leurs doigts, et que Son Altesse avale avec délices.

« — Allons plus loin, ajouta mon guide, et faites ce que vous me verrez faire.

« Et comme il venait de passer sur le corps d’un fou, étendu tout de son long par terre, sans le toucher, bien entendu, j’y passai également, et demandai la raison d’un si étrange caprice.

« — Cet homme, me répondit mon guide, se croit en butte à la haine des méchants ; il s’imagine que tous les hommes conspirent contre lui, et, pour échapper à leurs persécutions, il se réfugie vivant dans le sein de la mort, et n’est jamais plus tranquille, content, heureux, que quand on lui passe ainsi sur le corps.

« Tenez, en voici un autre qui se croit roi ; voyez comme il regarde en pitié Diogène roulant son tonneau. Le Cynique pouffe de rire en montrant du doigt la frêle couronne de papier du monarque : « Il y en a trente mille comme cela chez mon épicier, dit-il. » Le monarque, choqué de l’irrévérence, se redresse, et, avec dignité :

« — Un roi !

« Et le Cynique :

« Eh bien ! pour être un roi, te crois-tu quelque chose ?

« Ma surprise augmentait à mesure que j’avançais dans ce voyage à travers la déraison humaine. Quel personnage était-ce donc que mon guide, que cet homme qui connaissait, qui sondait toutes les infirmités, toutes les plaies de ce corps malade, qui montrait une connaissance si approfondie du cœur humain ? Des réflexions profondes se mêlaient à son récit. Sans doute, me dis-je, mon cicérone est le médecin en chef de cet établissement, et je me disposais à lui prêter une attention plus vive encore. Un monsieur d’une quarantaine d’années, le cou enveloppé d’une cravate blanche fortement empesée, s’avançait vers nous.

« — Voici le chirurgien de l’hospice, me dit mon guide en souriant, acceptez le présent qu’il va vous faire.

« — Monsieur, s’écria en effet le disciple d’Esculape, je suis reconnaissant de l’honneur que vous me faites en visitant cette maison confiée à mes soins, et je vous prie d’accepter ce gage de ma gratitude.

« C’était une petite boîte.

« Je l’ouvris et j’en tirai un billet soigneusement plié.

« — Lisez, fit mon guide.

« Recette infaillible pour guérir les cors et les oignons : si vous avez un cor au pied droit, arrachez-vous l’œil gauche et posez-le dessus, et… allez vous promener, je m’en lave les mains. »

« Là-dessus, il nous tourna le dos et s’en alla en chantant :

« Va-t’en voir s’ils viennent, Jean…
       Va-t’en voir s’ils viennent.

« Un autre nous présenta un manuscrit.

« — Voilà un trésor, dit-il ; c’est le fruit de vingt ans de veilles et de travaux sur un objet de la plus haute importance… l’éducation des chats. Tous les désordres physiques et moraux qui minent la société viennent de ce qu’on ne s’est pas encore occupé de l’éducation de la race féline :

« Les chats sont des animaux donnes par la nature.
      Ture lure, ture lure, ture lure !

« — Je vais vous montrer, ajouta mon guide, le jeune Pic de la Mirandole ; le voilà qui gesticule, les yeux levés vers le ciel. Écoutons :

« — La science, la science, présent du ciel, est une fleur miraculeuse qui renferme mille autres fleurs, mais toutes recèlent un poison caché dans leur sein, un amour insatiable dont rien ne saurait apaiser les dévorantes flammes. La botanique compte 80,000 espèces de plantes ; un pied de pavot donne par année 32,000 grains ; un palmier, 36,000 ; un orme, 523,000. On compte seulement pour les insectes 50,000 espèces ; 17,000 facettes à l’œil d’un papillon ; une mouche donne en trois mois 70,000 œufs. Le nombre des minéraux est incalculable, et, dans les profondeurs de l’Océan, que de millions d’êtres qui resteront à jamais ignorés ! Les connaissances humaines se divisent en 128 sciences ; Varron comptait de son temps 288 sectes différentes de philosophie : les Indous adorent 333 millions de dieux. Levons les regards : voie lactée, lumière éclatante, incalculable amas de soleils… la science est un océan sans fond et sans rivages.

« — Kouac ! kouac ! s’écria un autre fou ; sornettes, balivernes que ta science. Je me meus, donc je vis ; je vis, donc je pense ; je pense, donc je suis ; je suis, donc Dieu est, a été et sera toujours. Chacun de nous est un rayon de l’âme universelle, et tout est dans tout. Kouac ! kouac !

« — Celui-ci, me dit mon guide, est un ancien professeur de philosophie ; ses sorites renferment quelquefois des centaines de propositions. Ses camarades l’ont surnommé Galimatias.

« En ce moment, des cris de joie et de grands éclats de rire éclatèrent autour de nous. C’était une troupe de fous qui se pressaient bien fort les uns contre les autres et en portaient un sur leur tête. Ce malheureux, ne pouvant se tenir debout, ni assis, ni couché, égayait ses compagnons par les grimaces et les tours qu’il faisait en sautant sur le plancher mobile où il se trouvait. D’autres fous suivaient à la file, battant des mains, chantant, gambadant et gesticulant.

« — En voilà un, me dit mon guide, qui se croit un empereur romain ; ses camarades le portent en triomphe ; mais regardez,

Du triomphe à la chute il n’est souvent qu’un pas.

« En effet, tous les fous se séparèrent brusquement, comme s’ils eussent obéi à un mot d’ordre, et Sa Majesté impériale fut jetée sur l’arène.

« — Cave ne cadas, s’écria le philosophe, qui suivait le cortège à distance.

« Le malin drôle avait trouvé une nouvelle victime. Nous l’aperçûmes de loin ôtant, mettant, tournant et retournant son habit, et poursuivant un pauvre diable qui fuyait à toutes jambes.

« — Ce fuyard, me dit mon guide, vous représente un de ces personnages malheureusement trop communs de nos jours sur la scène politique. Très-haut placé sous tous les gouvernements qui se sont succédé en France, il a toujours été environné de l’éclat des grandeurs. Adroit caméléon, il changeait de livrée comme de maître ; mais la fortune s’est lassée de l’inconstance de cet adroit favori ; elle l’a précipité du faîte des dignités, et sa chute a été si terrible qu’il en a perdu la tête. Et le malin drôle, pour lui rappeler sa disgrâce et le désespérer, tourne et retourne devant lui son habit, comme ilagitait le torchon aux yeux de l’autre…

« Tout à coup nous fûmes interrompus par un cri terrible parti du fond des appartements, un de ces cris déchirants, que l’on ne fait entendre que dans les moments d’angoisses suprêmes et d’indicibles douleurs. Je m’arrêtai tout tremblant et péniblement impressionné.

« — C’est le cri d’une pauvre mère à laquelle la mort vient d’arracher son enfant, me dit mon guide d’une voix émue que je remarquais pour la première fois. Retirons-nous, je vais vous raconter cette lamentable histoire. C’est une pauvre dame, qui n’est ici que depuis quinze jours, et voilà quinze fois qu’à la même heure nous entendons ce cri perçant sortir de ses entrailles maternelles. Elle a perdu sa fille unique, une délicieuse enfant de douze ans, le bonheur de ses jours, le rêve angélique et radieux de ses nuits. Elle a fait placer dans sa chambre trois portraits de sa fille, de son Aline… Le premier, c’est Aline à six mois : comme elle est souriante ! Maman, ces deux syllabes magiques viennent d’éclore pour la première fois sur ses lèvres vermeilles ; l’heureuse mère a voulu garder ce souvenir ineffable, comme les conquérants éternisent, avec le bronze et le granit, une journée glorieuse. Maman ! maman ! c’est le grand jour, c’est le Marengo des mères. Comme tout chante, comme tout sourit, comme tout est beau ce jour-là ! L’âme nage dans un éther céleste, le cœur est inondé de délices !…

« Puis, c’est le jour de la première communion : Aline a dix ans ; elle est vêtue de blanc comme les séraphins ; c’est un vivant sanctuaire qu’illumine la présence d’un Dieu…

« Enfin, Aline est froide et pâle : la mort, comme un vampire, s’est posée sur sa bouche, et le cierge bénit projette ses lueurs blafardes sur son visage décoloré.

« Ces trois tableaux sont les trois actes du drame dont nous venons d’entendre le terrible dénoûment. Chaque matin la mère se pare de ses plus beaux habits ; ses femmes ornent de fleurs sa blonde chevelure, comme en un jour de fête. Elle est heureuse, elle veut être belle. Puis, souriante, elle entre dans la chambre aux portraits. Alors ce sont des conversations divines, inénarrables, avec sa chère Aline, son chérubin de six mois !… Au portrait de dix ans, c’est un langage plus sérieux, mais toujours charmant. Enfin, elle arrive à l’image glacée, au cadavre de son enfant. « Morte ! mon Aline est morte ! » puis le cri que nous avons entendu ; alors elle tombe entre les bras de ses femmes, qui l’emportent loin de ce triste spectacle.

« Cette scène lugubre recommencera demain, et après-demain, et toujours, jusqu’à ce que la pauvre mère aille rejoindre sa chère Aline. Elle lui a donné sa raison ; dans quelques jours, elle lui donnera sa vie !

« Pendant ce lamentable récit, nous étions revenus à notre point de départ. Tout à l’entrée de la cour, j’aperçus un grand jeune homme immobile contre le mur, les bras élevés en croix, les deux pieds superposés, la tête penchée sur l’épaule gauche ; ses traits respiraient la douceur unie à une indéfinissable expression de tristesse et de douloureuse résignation. À peine mon guide l’eut-il aperçu :

« — Ah ! par exemple, s’écria-t-il, en changeant d’air et de ton, la folie de celui-ci est manifeste ; il s’imagine qu’il est Dieu le fils, et c’est à moi qu’il voudrait le faire croire, à moi, qui suis Dieu le père !

« La surprise, le saisissement m’ôta la parole ; le prétendu docteur était un pensionnaire de l’établissement ! Cet homme aux manières distinguées et du meilleur ton, à l’esprit élevé et cultivé, dans la compagnie et dans la conversation duquel je venais de passer deux des heures les plus délicieuses de ma vie ; cet homme qui me charmait tout à l’heure par sa science et par sa philosophie, n’était qu’un pauvre fou que la raison avait cessé d’illuminer. J’étais plongé dans ces amères réflexions quand un domestique vint m’avertir que le dîner était servi. Je quittai mon pauvre guide sans avoir la force de lui adresser un mot de remerciement, me réservant, au dessert, de raconter ma singulière aventure à mon ami le directeur. »


CHARENTONNE (la), petite rivière de France, naît dans le département de l’Orne, à la forêt de Saint-Evroult, arrond. de Mortagne, entre dans le département de l’Eure, arrose Broglie et Bernay, et se jette dans le Rille, près de Serquigny, après un cours de 65 kilom.


CHARÈS, général athénien, né vers 400, mort vers 330 av. J.-C. Il avait une taille d’athlète, et, suivant le mot de Timothée, qui était d’ailleurs son rival, il était plus propre à porter les bagages qu’à commander une armée. Le peuple athénien cependant l’investit de commandements importants. En 357, il remplaça Léosthène dans la direction de la guerre contre Alexandre, tyran de Phères, et, par une conduite contraire à la politique traditionnelle d’Athènes, favorisa le renversement de la démocratie à Corcyre, ce qui entraîna cette île à se prononcer contre les Athéniens. Pendant la guerre sociale, il assiégea sans succès Chios, rejeta tous ses revers sur Iphicrate et Timothée, ses collègues, et parvint à les faire dépouiller du commandement. Resté seul à la tête des troupes et n’ayant pas de quoi les payer, il se mit à la solde d’Artabaze, satrape révolté contre le roi des Perses, et faillit ainsi attirer les plus grands malheurs sur sa patrie. Pendant les guerres contre Philippe, il ne commit que des fautes et n’essuya que des revers. Il commandait avec Lysiclès l’année athénienne à Chéronée (338) ; mais il eut assez d’habileté et de crédit pour rejeter la responsabilité de ce désastre sur son collègue, qui fut condamné à mort. Il avait autant de bravoure comme soldat que d’incapacité comme général.


CHARÈS, statuaire grec, né à Lindes, dans l’île de Rhodes, florissait vers 300 av. J.-C. Il était élève de Lysippe. Ce fut lui qui éleva, après douze années de travail, la fameuse statue du Soleil connue sous le nom de colosse de Rhodes, qui était regardée comme une des sept merveilles du monde, et qui fut renversée cinquante-six ans plus tard par un tremblement de terre.