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OHE M

On peut encore considérer, dans les environs de Paris, comme chemins de fer de la banlieue les lignes suivantes, dont une partie fait du reste double emploi avec les lignes que nous venons d’indiquer.

Les services de banlieue dans les départements n’ont encore été organisés que pour trois grandes villes :

De Lyon à la Croix-Rousse. De Marseille à l’Estaque. De Strasbourg à Kehl.

Pour les autres grandes vifies de France dans lesquelles le chiffre de la population atteint ou dépasse 100,000 habitants, et sont de ce nombre Bordeaux, Lille, Toulouse, Nantes et Rouen ; aucun service spécial n’a encore été organisé, les trains ordinaires étant suffisants.

20 Les lignes uniquement destinées au transport des marchandises. Elles sont souvent construites pour faciliter l’exploitation des produits de certaines sociétés de mines, houillères, forges, etc. ; et, dans ce cas particulier, elles n’ont pas de services pour le public. Ces sortes de lignes tendent à disparaître, et presque toutes ont organisé des services dont les voyageurs et les marchandises peuvent également profiter.

3° Les lignes mixtes, destinées indistinctement au transport des voyageurs et des marchandises ; telles sont toutes nos grandes lignes de France, ainsi que leurs embranchoments.

On exploite une ligne de chemin de fer <m mettant en circulation un certain nombre de trains par jour.

Les trains sont de différentes natures :

Rapides, composés de voitures de 1" classe ;

Express de ire dusse j

Directs, 1 « et 2e ;

Omnibus, 1", 2» et 3e ;

Mixtes, 1™, 20 et 3°.

On a donné le nom de rapide à un train express régulier dont la vitesse dépasse celle des trains express, et qui circule de Paris à Marseille, et vice versut en 16 h. 15 m. (La distance de Paris à Marseille est de 862 kilom.) Sur ce temps de 16 h. 15 m., il faut défalquer le temps employé au ralentissement avec ou sans arrêt dans les gares principales. Pour le rapide, 2 h. 45 m. représentent le temp3 employé a ces ralentissements. Il s’ensuit que la vitesse moyenne de ce train atteint 64 kilom. À l’heure. Pour les trains express, la vitesse varie de 50 à. 70 kilom. a l’heure. Ces trains sont en général remorqués par des machines locomotives à grande vitesse du type Crampton, et ne comportent que les voitures de 1". classe. Ils ne s’arrêtent que dans lesi villes principales et dans les gares de bifurcation. Pour les trains directs, la vitesse varie de 45 à 55 kilom. ; ils ne comportent en général que des voitures de 1" et de 2e classe, et ne s’arrêtent qu’aux stations principales. Pour les trains omnibus, la vitesse varie de 40 à 45 kilom., et ils comportent des voitures de toutes classes ; ils s’arrêtent à toutes les stations.

Pourles trains mixtes, la vitesse varie de 25 a 45 kilom. Ce sont, en réalité, des trains de marchandises (ce qui explique leur faible vitesse), dans lesquels on introduit des voitures de voyageurs.

On a organisé depuis quelques années, sur certaines lignes, des trains de messageries qui, eux aussi, prennent des voyageurs de toute classe. Leur vitesse est à peu près celle des trains omnibus.

Les trains de marchandises, ainsi que leur nom l’indique, sont exclusivement réservés à ces transports spéciaux. Ils sont remorqués par des machines puissantes, à très-petite vitesse, il est vrai. Pour se faire une idée exacte du poids énorme que traîne une machine ordinaire de trains de marchandises sur nos grandes lignes, il suffit de faire remarquer que si pareil poids devait être traîné sur des routes, il ne faudrait pas moins de 270 à 342 chevaux, et si l’on examine le poids remorqué par les machines Engerth, il ne faudrait pas moins de 540 chevaux, et encore la traction s’opêrerait-elle avec une vitesse trois à quatre fois moindre. Par ces chiffres, nos lecteurs se feront une idée du nombre de shevaux qu’il serait nécessaire d’employer, en songeant surtout qu’il circule neuf trains da marchandises par jour de Paris à Dijon et huit trains de Dijon à Paris, tant réguliers, quei facultatifs. Il faudrait sur la route

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chaque jour, pour faire ce service, 39,780 chevaux.

Si, au lieu de considérer le nombre de chevaux qu’il serait nécessaire d’employer sur les routes pour obtenir un travail équivalent au travail produit par les chemins de fer et leurs moteurs, nous venons à rechercher l’économie de temps et d’argent qu’ils procurent tant aux voyageurs qu’aux marchandises, nous obtenons des résultats presque fabuleux. Laissons un instant la parole à M. Jacqmin, que nous avons déjà eu Vocca&ion de citer, comme une autorité des plus compétentes en fait d’exploitation de chemins de fer,

« On a tenté quelquefois d’apprécier l’économie que les chemins de fer permettent de réaliser directement dans les transports proprement dits ; c’est un des côtés de la question, mais ce n’est pas la question tout entière.

Un économiste suisse, M. Risler, a fait cette recherche pour son pays. Dans un mémoire adressé à la Société suisse d’utilité publique de Zurich, M. Risler a démontré d’une manière irrécusable qu’avec un réseau de 1,062 kilom., son pays réalisait chaque année, sur le transport des marchandises seulement, une économie de 60 millions de francs.

En ajoutant à ce chiffre les économies obtenues sur les transports de lettres, de troupes, la diminution de déchet dans les marchandises, la suppression des commissions, des factages, la diminution des frais généraux, M. Risler affirme que • l’économie totale qui résulte chaque aimée de l’établis■ sèment des chemins de fer dépasse déjà loo millions de francs pour la Suisse, et cette économie ira sans cesse en augmentant. »

En appliquant des bases semblables à la Grande-Bretagne et à la France, en tenant compte du nombre de kilomètres exploités, de la population, M. Risler trouve que, pour chacun de ces pays, les chemins de fer donnent une économie de 1 milliard de francs par an.

Dans un discours rempli de faits, et prononcé le 27 juin 1865 devant le Corps législatif, M. de Franqueville, directeur général des ponts et chaussées et des cAetltins de fer, arrivait, par d’autres considérations, au chiffre de l milliard, calculé par l’économiste suisse, et il ne craignait point d’affirmer que, le réseau des chemins de fer français achevé, les économies réalisées sur les frais de transport des marchandises et le temps gagné dans l’abréviation de la durée des voyages représenteraient une somme annuelle, de 1,500 millions, les trois quarts du budget des dépenses de la France.

Mais, nous ne saurions trop le répéter, le rôle des chemins de fer a été plus considérable encore ; non-seulement ils ont abaissé le prix des transports, mais surtout ils ont rendu possibles des transports auxquels personne ne songeait. Ils ont donné une valeur à des choses qui n’en avaient pas ; ils ont créé la richesse mobilière, presque inconnue il y a quarante ans, et dont nos codes font à peine mention ; ils ont permis au pays de payer des impôts dont le chiffre eût paru chimérique il y a peu d’années ; ils ont rendu à tous la vie moins pénible et moins rude ; ils ont enfin démontré, ce qu’affirmait Vauban il y a deux siècles, que le travail est la seule source et le seul principe de la richesse, » (De f exploitation des chemins de fer, par F. Jaeqmtn, t. II, p. 261.)

Importance des transports sur les voies ■ferrées. Les chemins de fer ont développé d’une manière prodigieuse le transport de certains produits agricoles ou industriels. Nous allons donner quelques renseignements à ce sujet, extraits du traité de l’Exploitation de M. Jacqmin.

Le transport du lait, par exemple, a atteint, pendant l’année 1865, le chiffre formidable de plus de 85 millions de litres, chiffre qui se répartit ainsi pour les six grandes Compagnies.

Paris-Lyon - Méditerranée 10,492,499 lit.

Orléans 13,090,240

Nord 37,377,086

Est 3,113.057

Ouest 31,053,600

Total, 85,126,482 Ht.

Soit, par jour, 200,621 litres.

b On estime, ajoute M, Jacqmin, la consommation journalière de lait faite par la ville de Paris a 320,000 litres environ. Les chemins de fer assurent donc les quatre cinquièmes de l’approvisionnement total, et si leur service venait à manquer subitement, 7 à 800,000 personnes seraient, chaque matin, privées de leur café au lait. »

Quant aux transports de la bière, dout l’importance ne dépassait pas, en 1860, 97,215 hectolitres, ils ont atteint en 1866 le chiffre de 197,404 hectolitres, c’est-à-dire qu’en sept ans la production de la bière expédiée k Paris a plus que doublé ; les quatre cinquièmes proviennent de Strasbourg, d’où il en part chaque jour, sauf le dimanche, un train complet. La bière ainsi transportée met moins de trente heures de la cave de l’expéditeur à Strasbourg à la cave du destinataire à Paris.

Si nous considérons le développement qu’a

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pris le transport des vins depuis dix ans, nous constatons un accroissement plus grand encore. Ainsi, sur les lignes de l’Est, tandis qu’en 1855 il n’avait circulé que 23,718,000 kilogr. de vins, en 1866 on avait transporté 355,107,000 kilogrammes. Il est juste de faire observer que l’exploitation de 1866 comprend un plus grand nombre de kilomètres ; mais aussi il n’en reste pas moins vrai que bien des vins, sans les chemins de fer, n’auraient jamais été exportés de leur lieu de production, où ils étaient vendus à vil prix.

Les résultats que nous venons de signaler se font également sentir pour le transport des vins en bouteilles.

Si nous recherchons les quantités de houilles et de cokes transportées par tes chemins de fer français, et que nous comparions les transfiorts de cette nature, M. Jacqmin nous fournit es chiffres suivants :

COMPAflNlES

EN 1857

Est

Nord

Ouest

Orléans.....

Midi

Lyon

Totaux.

Tonnes.

517,645

1,032,315

148,261

81,288

5,232

1,702,796

3,487,537

EN 186ÎS

Tonnes.

1,751,723

2,984,751

430,435

833,249

259,480

3,288,902

9,548,540

Les chemins de fer transportent la plus grande partie des céréales nécessaires à l’alimentation du pays à des conditions de prix presque sans influence sur la valeur de la marchandise.

En 1866, les chemins de fer ont transporté 37,050,000 hectolitres de céréales. Un des grands avantages des chemins de fer pour cette nature de transports est de faire disparaître les écarts considérables qui existaient, Aujourd’hui, dit M. Jacqmin, qu’une hausse de 1 fr. par hectolitre se produise sur un marche, les négociants placés dans un cercle de 2 ou 300 kïlûKi, du rayon tracé autour de ce marché en sont avertis par le télégraphe pendant la durée même du marché, et trente offres se présentent pour répondre aux besoins manifestés par cette hausse : l fr. par hectolitre représente 12 fr. 50 par tonne, nous ne saurions trop le répéter, et avec 12 fr. 50 par tonne on peut parcourir 200 à 300 kilom. sur les chemiw de fer. »

Nous arrêtons ici la nomenclature du déve CHEM

loppement considérable que prennent chaque jour les transports par voies ferrées. Coque nous avons dit pour les céréales, les vins, la houille, etc., peut s’appliquer complètement au transport des bestiaux, des engrais, des produits agricoles et industriels, etc., etc.

Dans un intéressant mémoire publié chez Chaix en 1866, sous ce titre : les Chemins de fer en France, M. C. Lavollée nous a donné des renseignements très-complets sur l’état actuel des chemins de fer ; nous y renvoyons ceux de nos lecteurs qui voudraient étudier cette question d’une manière plus complète que nous ne pouvons le faire ici.

Point de vue militaire. Si les ckamins de fer sont journellement pour tous les peuples le plus puissant instrument des relations pacifiques, ils sont facilement mis en réquisition pendant la guerre. En quelques jours, troupes, chevaux, vivres, matériel, etc., sont transportés sur un champ de bataille éloigné de plusiours centaines de lieues, et cela sans fatigue pour les soldats, qui doivent défendre, au risque de leur vie, l’honneur et l’intérêt du pays. Les remblais de chemins de fer sont de solides remparts, et les tranchées profondes garantissent les troupes contre les projectiles. En Italie, en Allemagne, en Amérique, les chemins de fer ont joué un rôle important pendant le cours des dernières guerres qui ont affligé ces riches contrées.

Espérons que cette application des chemins de fer sera de moins en moins utilisée, et que, bien au contraire, ils aideront puissamment les hommes à réaliser la paix universelle.

Construction. Au 1er janvier J86G, le réseau des chemins de fer français concédés à des Compagnies s’élevait a... 21,000 kilom.

Sur lesquels étaient en exploitation 13,570

Il restait donc & achever, ,. 7,430 kilom.

Pour le réseau exploité, la dépense totale s’élève à 6,824,000,000, dont 5,840,000,000 ont été payés par les Compagnies, et 984 millions par l’État, les dépenses restant à faite par les Compagnies montent h environ 1,900,000,000.

Pour le réseau exploité, le kilomètre ressort donc à 500,000 fr., et pour les lignes à achever, il est estimé à 255,000 fr, pour la part des Compagnies.

À part quelques chemins d’intérêt particulier —et quelques lignes secondaires, le réseau français a été partagé en six grandes Compagnies.

Le tableau ci-dessous donne leur importance.

Entretien. La dépense d’entretien pendant l’année 1865 a été, pour le matériel de transport, d’environ 36,650,000 fr., soit 2,800 fr. par kilom., et pour le matériel de la voie, approximativement 15 millions de francs, soit 1,150 fr. par kilomètre.

En totalité, 51,650,000 fr., soit 3,950 fr. par kilomètre.

Trafic, Le trafic effectué pendant l’année 1865 a donné sur l’ensemble du réseau exploité les résultats suivants :

Nombre total moyen de kilomètres exploités pendant l’année 13,239

Nombre total de voyageurs transportés 84,025,516

Parcours moyen d’un voyageur en kilomètres 40

Nombre total de voyageurs transportés à 1 kilomètre... 3,330,639,807

Nombre total des tonnes de marchandises transportées.. 34,019,436

Parcours moyen d’une tonne.. 152 kil.

Nombre total de tonnes transportées à 1 kilomètre. *.... 5,172,847,825

Recettes provenant des voyageurs.... 184,215,213 fr Recettes provenant des marchandises...••• 314,609,184

Recettes provenant des messageries et diverses, 80,032,474

Recettes brutes totales..... 578,856,871 fr. Prix moyen du transport d’un voyageur a 1 kilomètre.. * 0 fr. 0553

Prix moyen du transport d’une tonne

à 1 kilom 0 fr. 0608.

Les dépenses totales d’exploitation s’élé veut

a 266,202,095 fr.

Rapport de la dépense à la recette moyenne générale, 45,98 pour 100.

Personnel. Le personnel employé par les Compagnies de chemins de fer est ou commissionné ou en régie. Le personnel eominissionné est en quelque sorte incorporé à la Compagnie. Le personnel en régie est variable ; il comprend ordinairement les ouvriers de tous états (ouvriers’ d’ateliers de réparations, etc.), et les manœuvres.

Ce personnel, attaché à l’exploitation, étail composé, au i« janvier 1866, de ;

Employés commisskmnés... 60,160 — en régie....... 5i,3po

Total...... iii,460

Ateliers de réparutions des Compagnies de chemins de fer. Les ateliers des Compa.- ’ gnies font, en général, tout l’entretien du matériel de transport ; ils occupent a cet effet un nombreux personnel d’employés et d’où-, vriers, dont le nombre total, pour le réseau français, peut aller à 20,000, et dont le salaire s’élève a environ 23,350,000 fr. ; soit, en moyenne, 1,167 fr. par personne.

Outre l’entretien, quelques Compagnies construisent, pour leurs propres besoins, des locomotives et des wagons neufs. L’importance de ces constructions a été, en 1865, de 32 locomotives, 37 tanders, 32 voitures et 2,570 ■wagons, représentantune dépense de 9,180,000 fr.

Les Compagnies de chemins de fer ont’ or-