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époque, de héros qui sont des mythes : le mythe à part, cette formule banale convient merveilleusement à César. Il rejette les vertus surannées des temps antiques ; il sait qu’elles n’ont plus de chance de succès. Gardera-t-il le respect antique pour Jupiter ? Il vole avec effraction l’or du Capitule, pille les temples, se rit des augures. La sainte parcimonie des Fabius ? Il achète si cher certains esclaves, qu’il n’ose porter le prix sur ses comptes. La chasteté des Scipions ? Ses soldats, au milieu de son triomphe, comme ses ennemis dans leurs invectives, rediront à ses oreilles l’infâme amitié de Nicomède. La foi aux serments ? Il répète sans cesse ces vers d’Euripide :

« S’il faut manquer à la justice, il est beau d’y manquer pour le trône.

« Soyez pieux en tout le reste. »

« Et, plus tard, il dira : « Si les sicaires et les bravi m’eussent rendu service, je ferais consuls les bravi et les sicaires. » Il s’est fait malhonnête homme avec tout son siècle. »

— « Ses dettes. À son départ pour l’Espagne comme préteur, ses créanciers le tourmentant, César fut très-heureux que Crassus le cautionnât pour 830 talents (3, 837, 000 fr.), et partit en avouant qu’il lui manquait 250 millions de sesterces (48, 500, 000 fr.) pour que sa fortune égalât zéro. On comprend qu’un tel homme était le protecteur ardent de tous les prolétaires et des hommes ruinés, l’ennemi acharné de l’oligarchie des riches. »

— « Parallèle entre César et Bonaparte, considérés comme hommes de guerre. Bonaparte et César, si différents comme hommes politiques, se touchent comme hommes de guerre. L’un et l’autre s’affranchissent des lenteurs de la stratégie ancienne, craignent de dissiper leurs forces, de perdre le temps à des sièges sans fin, réunissent sous leur main leur forte armée, la poussent à la hâte partout où est le danger, la mènent par des chemins impraticables, lui font franchir des montagnes où un messager ne passerait pas, la décuplent en la rendant présente partout. L’un et l’autre, pour la manier ainsi, ont commencé par se la rendre propre et par mêler son âme à leur âme. Cette armée si prompte et si docile, et qu’ils opposent à tant d’ennemis à la fois, eux-mêmes l’ont faite, par cette puissance morale qui seule fait les grands généraux. »

Merivale (History of the Romans under the empire). « Portrait de César. Les renseignements que nous avons sur la personne de César nous le représentent pâle de figure, avec les veux sombres et perçants, un nez aquilin, la tête chauve et sans barbe. Dans sa jeunesse, il était remarquablement beau, mais d’une beauté un peu efféminée. Il fut toujours très-vain de sa personne, et prétendait même qu’il tenait sa beauté de sa divine ancêtre, Vénus. Sa calvitie, qui l’obligeait à ramener ses cheveux sur son front, était considérée comme une difformité par les Romains, et, en outre, l’exubérance de sa lèvre inférieure, que l’on retrouve dans ses meilleurs bustes, devait certainement déformer les lignes sculpturales de son admirable profil. Des bustes nombreux et un grand nombre de médailles nous ont conservé ses traits à diverses époques de sa vie ; mais, comme on doit s’y attendre, ils diffèrent beaucoup entre eux. On peut surtout dire qu’il y a une grande disparité entre les bustes et les médailles. Les premiers, plus vivants, plus réels, nous présentent une tête longue, mince, plus élevée que large, sillonnée de rides profondes, qui peuvent être le produit de la maladie, de grandes contentions d’esprit et de la débauche. Ce sont, au contraire, les médailles qui nous ont donné les linéaments de cette figure héroïque et majestueuse que nous reconnaissons pour celle de César. »

— « Son immoralité. Les tentations auxquelles était exposé un jeune noble, si bien fait de sa personne, n’étaient point combattues chez César par la sévérité des principes et par le sentiment de sa dignité personnelle. À cette époque de dépravation sociale, où se faisait principalement remarquer par sa dégradation la classe à laquelle appartenait César, c’étaient les femmes, plus encore que les hommes, qui poussaient à l’immoralité générale. Lorsque, tout jeune encore, il fut l’amant avoué de Servilia, il devint évident que l’adolescent était entré à une bonne école de galanterie. À partir de cette époque, il poursuivit sans aucune vergogne les plaisirs les plus honteux, et s’abandonna au dévergondage le plus complet. Ses amours ont été célébrées en vers et en prose dans les épigrammes de Catulle, les satires de Caecina et celles de Pitholaüs. Il eut des intrigues avec Postumia, femme de Sulpicius ; et, successivement, Gabinius, Crassus et Pompée eurent, à cause de lui, à se plaindre de la fragilité de Lollia, de Tertullia et de Mucia. Eunoe, reine de Mauritanie, fut une de ses passions les plus singulières ; mais Cléopâtre l’eut bientôt attelé à son char, cette reine qui avait été surnommée la femme de tous les hommes. Il fut même accusé d’un vice plus honteux, accusations que semblait rendre probables la facilité avec laquelle il accorda des emplois, auprès de sa personne, aux plus infâmes débauchés. Ces attaques, qu’il est préférable de ne pas faire sortir de l’obscurité et du doute où elles sont tombées, étaient, selon Suétone, les seules auxquelles il fût sensible. »

— « Jugement des anciens sur le meurtre de César. Le jugement des anciens sur ce grand événement varie suivant leurs intérêts et leurs prédilections. Si la république eût été, par ce moyen, rétablie d’une manière permanente, peut-être son sauveur eût-il été unanimement applaudi, et eût-il commandé la faveur des Romains pendant une longue suite de siècles. Cicéron, qui, probablement, n’eût pas consenti à participer au meurtre, crut devoir le louer sans réserve, et exalta la vertu des tyrannicides libérateurs ; mais les courtisans des empereurs futurs traitèrent hautement cet acte d’assassinat, ou gardèrent un silence prudent et cependant significatif. Virgile, qui a pourtant loué Caton et loué le châtiment de Catilina, ne parle pas de l’exploit de Brutus. Bien plus, Lucain, qui considère ce meurtre comme un sacrifice nécessaire, admet pourtant qu’il fut généralement détesté. Auguste, prudemment tolérant, laissa Messala louer Cassius ; mais Tibère ne voulut pas souffrir que Cremutius appelât le compagnon de Brutus le dernier des Romains. Velléius Paterculus, Sénèque et surtout Valère Maxime, exprimèrent avec énergie l’horreur qu’ils avaient de ce meurtre, causé, disaient-ils, plus par la vanité, l’ambition et l’envie des conspirateurs que par un véritable patriotisme. Les auteurs grecs, quoique la Grèce eût contribué peut-être à cet acte par les théories de ses philosophes, ne craignirent pas de le qualifier de crime monstrueux et abominable (Dion Cassius et Appien). D’un autre côté, tandis que Tacite laisse tomber un coup d’œil philosophique sur les opinions des divers auteurs à cet égard, sans se prononcer lui-même, Suétone dit, à la vérité, que César fut massacré avec justice, mais sans absoudre les meurtriers. D’après Tite-Live et Florus, et l’abréviateur de Trogue-Pompée (Justin), nous devons supposer que les sentiments exprimés par Plutarque sont ceux qu’avait adoptés le parti le plus sain, et le plus raisonnable de Rome. Il déclare que les désordres de l’état politique réclamaient l’établissement d’une monarchie, et que César fut envoyé par la Providence comme un médecin pour la conservation d’un malade. En résume, lorsque nous considérons les vices de ce temps et l’ébranlement de tous les principes, il est intéressant de remarquer le peu de sympathie qu’excita un acte préconisé en principe par les philosophes et les historiens de l’antiquité. »

— « César littérateur. Le cercle des études littéraires de César embrasse à peu près tous les genres. Ses travaux historiques sont suffisamment attestés par les ouvrages qui nous sont parvenus sous son nom ; et il faut se rappeler qu’à une époque où les difficultés de la composition étaient si grandes et si nombreuses, la publication même d’un petit nombre d’ouvrages impliquait une grande érudition de la part de l’auteur, et une grande familiarité avec les modèles de la littérature. La clarté du style historique de César contraste heureusement avec la rudesse de Caton et de Varron, les artifices de rhéteur de Cicéron et de Salluste, bien qu’on ne puisse la comparer à l’élégance de Tite-Live et à la sublime concision de Tacite, Mais cet abandon, cette simplicité du style, qui semble une confidence de l’auteur au lecteur, sont supérieurs à tous les artifices littéraires. À la tribune, de l’avis de tous les Romains, César était un grand orateur. Il a composé un traité de grammaire et la fameuse satire contre Caton (l’Anti-Caton), ouvrage qui paraît avoir fait une grande impression sur ses contemporains. Bien que privé de ces qualités aimables qui font le charme des réunions privées, il se montrait sagace observateur et penseur profond, et il écrivit une série de maximes ingénieuses et subtiles où il avait condensé la sagesse des anciens âges, pour l’édification d’une nouvelle philosophie. Dans sa jeunesse, il avait écrit des tragédies imitées des chefs-d’œuvre de la Grèce. Durant sa marche rapide d’Italie en Espagne, avant sa dernière campagne, il s’amusa à composer un poème, peut-être dans le genre humoristique, sous le titre de : Mon voyage. En sa qualité de grand pontife, il fit une compilation officielle sur les augures, et, sans parler de la réforme du calendrier, qui s’opéra à son instigation, il avait, en outre, composé un ouvrage spécial sur l’astronomie. »

Les travaux à consulter des anciens sont trop connus de tout le monde pour qu’il soit besoin d’en donner le détail. Qu’il nous suffise de citer, après Plutarque et Suétone, les noms de Cicéron, de Salluste, de Velléius Paterculus, de Lucain, d’Aulu-Gelle, de Dion Cassius et d’Appien.

La plus ancienne Vie de César, imprimée au moyen âge, est celle de Julius Celsius, qui parut pour la première fois en 1473. Dans l’édition donnée en 1827, par le professeur allemand Schneider, l’ouvrage est attribué à Pétrarque.

Vient ensuite un in-folio imprimé à Bâle, en 1540, par le grammairien italien Floridus. Il traite De l’excellence de César. Ce livre commence la série des œuvres publiées en latin sur César, au XVIe siècle.

AEneas Vicus nous donne, en 1560, une Vie de Jules César, d’après les médailles ; puis, en 1563, Hubert Goltzius, la Vie et les actes de César ; Pierre Ramus, De l’armée de César (1574) : J. Glandorp, Notice sur la famille de Jules César et d’Auguste (1576). Le XVIIe siècle ouvre par une discussion grave la série (toujours latine) des œuvres traitant de César : Jules César (in-fol.), par Louis XIV ; Sehelderup, Discours sur jutes César ; s’il fut tué justement ? (lSH) ; Henrik Fabricius, Discours sur tes belles actions de César (16*0) ; Godefroi Peschwitz, la Famille auguste des Césars (1662) ; Jean Sebald Fabricius, Jules César’numismatique (1678) ; Christophe Lang, De la sublimité de César (1679) ; George Shubart, C.-J. César, dictateur perpétuel, grâce au changement de ta République (1681) ; Daniel-Guillaume Moller, Discussion des circulaires de César (1687) ; la Guerre civile de César et de Pompée, avec tes caractères historiques de ceux qui ont été les principaux auteurs (en français, par le P. Quartier, de la compagnie de Jésus (1688) ; Henry Dodwelî, Dissertation sur la vie de César (1698).

Au xvmo siècle, nous voyons : Théophile Sturm, l’Empereur Jules César non empereur l’en latin, 1724) ; F. Oudendorp, Discours tur les études littéraires de Jules César (en latin, 1740) j Henry-Otto Duysïng, Dissertation sur la foi douteuse et faible de César (en latin, 1748) ; Richard de Burg, Histoire de la vie de Jules César (en français, 1758) ; Giovanni-Maria Secondo, Histoire de la vie de Jules César, d’après les auteurs originaux (en italien, 1776) ; Charles-Emmanuel de Warnery, Mélanges de remarques sur Jules César et autres militaires anciens et modernes (1782) ; Frédéric Rcesch, Commentaire sur les Commentaires de Jules César (en allemand, 1783) ; DePercis, la Guerre de Jules César dans les Gaules, avec des notes militaires (en français, 1786) ; Frédérik Rutœnschen, César, Caton et Frédéric de Prusse (en allemand, 1789) ; J.-R. Schnell, Spécimen d’observations sur les Commentaires de César en latin, 1789) ; Charles Coote, Vie de César en anglais, 1796) ; Jules César ou la Chute de ■a République romaine (en allemand, 1796-1800) ; Théophile Meissner, Vie de César, continuée par M. Ludwig Haken (en allemand, 1799).

Au xixe siècle. Nous ne pouvons mieux commencer cette série qu’en mentionnant l’édition des Commentaires donnée par M. Le Déist de Botidoux ? n 1809. Elle se distingue surtout par les recherches exactes et les notes savantes qui accompagnent le texte. On peut la regarder comme une histoire complète de la vie de César et comme le meilleur commentaire de l’ouvrage. Edmond Lodge, Vie de César, avec des mémoires sur sa famille et ses descendants (1810) ; Jean-André"Wendel, Jules César, type de Napoléon Bonaparte (en allemand, 1820) ; Alphonse de Beauehamps, Vie de Jules César (1823):Michel Stœlti, C.-J. César (1826) ; Laya, Notice sur Jules César (en tête de la traduction Panckoucke, 1828) ; Bonaparte, Précis des guerres de Jules César, écrit par M. Marchand à. Sainte-Hélène, sous la. dictée de l’empereur (1836) ; Baudement, Vie de Jutes César (en tête de la traduction de Jules César (1837) ; Guillaume Dosring, De la foi historique de Jules César (en latin, 1837) ; Enrico Bindi, Discours sur la vie et les œuvres de C.-J. César (en italien, 18-44) ; Jacob Abbott, Vie de César (1849) ; De Champagny, les Césars (1841-1853) ; Lamartine, Vie de César (1865) ; J.-J. Ampère, César, scènes historiques (en vers, 1859), puis l’Histoire romaine à Rome (1864) ; F. de Saulcy, les Campagnes de Jules César dans les Gaules, études d’archéologie militaire (1865) ; Jacques Maissiat, César en Gaule (1865) ; Napoléon III, Histoire de César (1865).

César (vie de), par Nicolas Damascène ou de Damas, composée cinq ans environ avant la naissance du Christ. Cet ouvrage passait pour perdu, lorsqu’il fut découvert, en 1849, a la bibliothèque de l’Escurial, par M. Piccolos, qui le fit imprimer l’année suivante à Paris, avec une traduction française de M. Didot. Malheureusement pour les lettres, il n’est pas complet ; ce n’est qu’un fragment d’une grande étendue, il est vrai, qui comprend l’histoire du meurtre de César et le tableau de la situation de Rome et des partis à cette époque. Ce récit, plein de simplicité et de sobriété, est d’autant plus précieux que c’est le plus circonstancié et évidemment le plus exact que nous possédions sur la fin violente du dictateur. Nulle part l’état des esprits, à ce moment, n’a été aussi judicieusement apprécié, ni les causes des événements mieux développées. Néanmoins ces événements étaient encore trop récents pour que l’auteur pût conserver une entière impartialité, et, si la rivalité d’Antoine et d’Octave est parfaitement décrite, Nicolas élève trop la grandeur d’âme d’Octave. Cette Vie de César est d’ailleurs bien supérieure à celle d’Auguste ; l’histoire y est bien plus respectée que dans la Vie d’Auguste. Dans cette dernière, Nicolas de Damas semble avoir complètement oublié les débuts de son héros ; pour lui, Octave a disparu derrière Auguste, la fin a justifié les moyens. Dans la Vte de César, au contraire, l’ambition et les fautes du dictateur ne sont pas entièrement voilées, et l’exposé seul des faits suffit à un lecteur non prévenu, sinon pour excuser, au moins pour s’expliquer le meurtre du tyran et la conduite de Brutus. Quant à Octave, il est encore traité avec trop de ménagements ; l’auteur ne sait pas oublier qu’il fut son ami, et, pour l’épargner, commet un odieux mensonge historique. Nous disons odieux, car nous ne saurions permettre à l’historien courtisan de justifier les crimes d’Octave par la raison d’État ; agir ainsi, c’est ne pas respecter le caractère sublime de l’histoire, qui doit planer calme et sereine au-dessus des passions et des agitations humaines, et désigner à la postérité èèiix qui ont droit à son admiration comme ceux qui doivent être cloués au pilori pour avoir abusé de leur pouvoir et opprimé les peuplés dont le bonheur avait été remis entre leurs mains.

Malgré tous ses défauts, cette Vie de César, est un document précieux à consulter pour ceux qui voudront entreprendre d’écrire de nouveau cette biographie sans parti pris. En outre, le style en est correct, simple, précis et noble ; Nicolas Damascène est un historien suspect, mais un écrivain estimable.

Citar (COMMENTAIRES Mi). V. COMMENTAIRES DE CÉSAR.

Cé « nr (SCÈNES HISTOHIQUES EN VERS), publiées en 1859 par J. Ampère. Ce volume de poésie, le seul qu’ait écrit M. Ampère, est une sorte d’épopée, de biographie rimée du héros1 romain. Au début, nous entendons la prédiction de Sylla, qui voit, dans ce jeune homme à la ceinture lâche, plusieurs Marins ; c’est le prologue. La pièce commence (car c’est là un véritable drame) par la captivité de César au milieu des pirates et le courage indomptable qu’il y montre ; déjà se révèle la fermeté inébranlable du futur dominateur de Rome. Nous suivons, à partir de ce moment, pas à pas l’épopée césarienne, esquissée à grands traits, jusqu’à la mort du héros. Elle est trop connue pour que nous l’analysions ici.

César remplit à lui seul toute la pièce ; c’est le centre unique autour duquel viennent converger tous les événements. Nous le voyons flatter le peuple, ce grand dispensateur de la’ faveur à Rome ; humilier le sénaten corps, tandis qu’il caresse séparément ses membres les plus influents, dont l’appui peut lui être de quelque utilité ; se plier, comme Alcibiade, au caractère de chacun ; prendre Crassus par l’avarice, Cicéron par la vanité. Toute la conduite du futur dictateur n’est qu’une longue comédie destinée à le conduire à sou but ; il va jusqu’à faire, avec tous les signes du plus profond respect, des sacrifices publics à ces dieux dont en particulier il se moque si spirituellement avec ses amis.

C’est bien le César historique ; mais, selon nous, M. Ampère a rapetissé la taille de son héros en mettant trop en relief les moyens de comédie auxquels il a recours ; l’âme de César était réellement plus grande qu’elle ne nous apparaît dans ce drame. Quelques passages ou les citoyens de Rome exposent leurs jugements sur le vainqueur des Gaules sont de bonnes études; les sentiments devaient être tels parmi le peuple. Lés plus belles scènes sont : celle où Caton, chassé du forum, rentre pour tenter d’éclairer le peuple aveuglé, et celle cù César, pleurant devant la tête de Pompée, s’incline en soupirant :

Je plainu un grand destin qu’achevé un grand malheur.

On peut encore remarquer des monologues de Caton, ceux de Brutus, imités de Lucain, et les discours de César et de Caton lors de la. conjuration de Catilina, traduction poétique de la prose concise de Sailuste. Cicéron est peint assez fidèlement ; c’est bien là le grand homme vaniteux ; mais nous adresserons à son sujet le même reproche à M. Ampère que pour César : il a trop laissé dans l’ombre —le grand citoyen pour mettre en lumière le littérateur plein de lui-même. Cicéron aimait trop passionnément la liberté pour dire :

S’il Doua faut an tyran, que ce soit un grand homme. Il avait peut-être aussi, dans sa vanité, trop de délicatesse et de bon goût, pour se permettre le vers suivant :

Démosthènes,

Que l’on appellera le Cicéron d’Athènes. • M. Ampère nous fait assister k une scène entre Cicéron et César, peu digue de ces deux grands hommes, et qui a le tort de rappeler celle de Trissotin et Vadius. C’est là, pour ne plus y revenir, le défaut capital de son livre : il s’y est trop amusé à peindre le petit côté de deux grandes figures, et une pareille affectation, indigne d’un biographe, convient bien moins encore à un poète. Sous le rapport du style, ces Scènes historiques sont assez remarquables ; mais les vers sont souvent durs et quelquefois presque incorrects ; on sent une muse inexpérimentée ; c’est plutôt de la belle prose rimée que de la véritable poésie. La chaleur fait aussi trop souvent défaut ; le César de M. Ampère reste trop froid. Ses calculs qui, en prose, auraient contribué à mettre en relief son caractère ambitieux et habile, ralentissent le’mouvement de la pièce et diminuent l’intérêt. César raisonne trop et n’agit pas assez ; même en tombant, U reste comédien, ce qui est de l’exagêr ration ; la licence poétique ne doit pas aller jusqu’à violer la vérité des caractères historiques, surtout lorsqu’elle met en scène un héros comme César.

César (histoire de Jules), par l’empereur Napoléon III. Les deux premiers volumes de cet ouvrage ont paru, le premier en 1865, et le second en 1866. L’un et l’autre se composent de deux parties : la première partie du premier volume est un précis de l’histoire de Rome jusqu’à César ; la seconde conduit la biographie de César jusqu’à la guerre des Gaules, La première partie du second volume contient le récit de la guerre des Gaules, et la seconde, celui des événements qui précédèrent et amenèrent la guerre civile.

Il y a dans l’histoire tels personnages, tels’