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pratiquèrent les jeux âe^iarfes avfc passion. Paschasius Justus, qui voyaljea én’Espagne au xvie siècle, dit qu’il a fajj souvent plusieurs lieues dans ’ce passa sans trouver ni pain ut vin, mai§ qu’il jfy a si chétif village ni si méchants-hameau ■outil n’ait trouvé des cartes à jouer. Les Espagnols portèrent dans le nouveau inonde leur passion pour les cartes, et ils en faisaient avec des feuilles d’arbre. Il paraît aujourd’hui démontré que l’Espagne est le premier pays de l’Europe qui ait connu les cartes. De 1 Espagne elles passèrent en Italie, qui vivait dans un commerce assez intime avec l’Espagne, puis en Allemagne, et enfin en Fiance, vers l’époque où Duguesclin conduisit ses bandes en Espagne pour y combattre Pierre le Cruel. À son retour, cette expédition nous apporta les cartes. Le prévôt de Paris, par une ordonnance du 22 janvier 1397, lit défense aux gens de métier déjouer aux cartes et autres jeux en usage. Il est donc à peu près certain que la date exacte de l’introduction des cartes à jouer en France peut être assignée à l’année 1375 ou 1376 : mais il ne s’agit encore jusque-là que des cartes dites tarots, les cartes françaises n’ayant été imaginées que vers le milieu du xve siècle.

Jusqu’en 1423, époque de la découverte de la gravure sur bois, les cartes, qui étaient enluminées comme les manuscrits, coûtaient fort cher et étaient un objet de luxe permis seulement aux grands seigneurs. Visconti, duc de Milan, paya 1,500 pièces d’or à un peintre français pour un seul jeu. Mais aussitôt que la gravure permit de reproduire les cartes à l’inrini les graveurs d’Allemagne répandirent dans toute l’Europe leurs jeux de cartes qui, étant à bas prix ? devinrent populaires. La ville d’Ulm en faisait un tel commerce qu’on les envoyait par ballots en Italie et en Sicile, pour les échanger contre des épices et d’autres marchandises. Mais, avec la multiplication des cartes, leur caractère changea bientôt : les figures emblématiques des tarots disparurent pour faire place, à d’autres un peu barbares, et qui, successivement modifiées, devinrent celles du jeu de piquet. Le valet de cœur, appelé Lahire, représente Étienne de Vignolles, qui servait sous Charles VII ; le valet de carreau, Hector, est l’un des officiers de Charles VII, qui devint, sous ce même nom d’Hector, capitaine de la grande garde sous Louis’XI ; Je valet de pique, Ogier, représente Ogier le Danois, l’un des preux de Charlemagne, et enfin le valet de trèfle, Lancelot, n’est autre chose que le fameux Lancelot du Lac. Quant aux rois David, Alexandre, César et Charlemagne, on croit généralement qu’ils représentent les quatre monarchies juive, grecque, romaine et française ; quelques-uns cependant voient dans leurs noms des personnifications allégoriques, et pensent, notamment, que David représente Charles VII, dont le fils Louis XI serait alors un autre Absalon. La dame de pique, Pallas, c’est Jeanne Darc à. qui Charles V£I fut redevable de son trône, et que, par reconnaissance, il fit figurer dans les cartes sous le nom de la déesse de la guerre. Le nom d’Argine, la dame de trèfle, étant l’anagramme du mot latin regina, reine, cette dame représente la femme de Charles VII, Marie d Anjou. Rachel, la dame de carreau, c’est Agnès Sorel, la maîtresse du roi. Enfin Judith, la dame de cœur, n’est autre que la femme de Louis le Débonnaire, ou peut-être, ainsi que le prétend le Père Daniel, la mère de Charles VII, Isabeau de Bavière. Quant aux cœurs, carreaux, piques et trèfles, dont se composent les jeux de caries, les recherches des savants ont établi que ces différentes figures n’étaient que des symboles : le cœur est celui du courage et personnifie les gens de guerre ; les piques et les carreaux figurent les armes et les munitions, et le trèfle les fourrages. Le Père Ménestrier y voit l’emblème de la société représentée par les quatre ordres. Selon lui, les rois, les reines et les valets représentaient la noblesse ; le cœur, les gens d Église ; le pique, les gens de e-uerre ; le carreau, la bourgeoisie, et le trèfle, les paysans.

Jean Volay fut le plus célèbre des cartiers français au xvt<= siècle ; on cite après lui Julien Rosnet, Pierre Leroux, Guillaume Guérin, Claude Astier, J. Gayrand et quelques autres. Les cartes qu’ils fabriquaient étaient de grossières images enluminées. Sous Henri II, on voit apparaître un jeu de cartes brodé sur satin blanc ; sous Louis XIV, on emploie des cartes sculptées sur nacre, et les gens du peuple se servent de figures sur carton presque semblables à celles de nos jours. La Révolution amena un changement radical dans les cartes. Les dénominations de rois, de reines, de valets furent proscrites, et les cartiers inventifs signalèrent leur patriotisme en imaginant de nouvelles figures et de nouvelles appellations. Les rois furent transformés en génies, et l’on eut le génie de cœur ou de la guerre, le génie de carreau ou du commerce, le génie de trèfle ou de la paix, le génie de pique ou des arts. Les reines" devinrent des libertés, liberté de cœur, liberté de carreau, etc. Les valeis se changèrent en égalités ; les as, en lois. D’autres novateurs allèrent plus loin : ils métamorphosèrent les rois en sages, et les appelèrent Caton, Solon, Rousseau, Brutus ; les reines en vertus : justice, prudence, union, force ; les valets en braves : Annibal, Horatius Coclès, Décius, Scévolaf. Seules les couleurs ne changèrent pas, et les points restèrent ce qu’ils étaient. Enfin il y eut des jeux de cartes

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les rois furent des philosophes : Molière, La Fontaine, Voltaire et Rousseau, et les valets, des républicains. Le jeu à personnages galloromains apparut vers la fin de la Révolution et sous le Consulat. Sous l’Empire, on imagina deS figures de fantaisie, et peu à peu les rois reparurent ; mais les dames furent Hildegarde, Statira, Calpurnie et Abigaïl ; les valets, Ogier, Parménion, Curion et Azaël. Tout cela fut de courte durée, et, dès le milieu de l’Empire, les anciennes cartes étaient revenues.

Les cartes ne servirent pas seulement d’amusement : en 1507, un cordelier imagina un jeu où les cinquante-deux cartes servaient à enseigner la philosophie ; sous Louis XIV, Desmarets publia le Jeu des fables, puis le Jeu de l’histoire de France, le Jeu des reines, le Jeu de la géographie ; Oronce Fine fit le Jeu des armoiries, toujours à l’aide des cartes ordinaires augmentées de figures spéciales. M. Leber mentionne un jeu de cartes dans lequel l’art de découper se trouvait enseigné. Des caries gastronomiques virent également le jour vers la fin du xvue siècle : la couleur de trèfle y est consacrée au poisson, celle de cœur à ta viande ; la volaille a pour sa part le carreau, et le pique a été réservé pour les mets préparés. Le roi de cœur règne sur un magnifique bifteck, celui de carreau sur un dindon, celui de trèfle sur un hareng, et celui de pique sur un pâté de gibier.

Nombre d’écrivains ont publié de savantes recherches sur l’origine des cartes, leur histoire et le rôle qu’elles ont joué ; parmi eux, il faut citer l’abbé de^Rives, Peignot, Leber et Duchesne. Tous ces" travaux ont été dépassés par ceux d’un Anglais, W. A. Chatto, qui a fait paraître, il y a quelques années, un livre plein de détails intéressants. On y trouve les figures des jeux de cartes employés chez les diverses nations, dont le génie s’y reflète d’une manière irrécusable. C’est surtout sur leur histoire en Angleterre qu’on y trouve des documents originaux. Ainsi, l’on apprend qu’un statut de Henri VIII ne permettait le jeu de cartes aux classes ouvrières que durant les fêtes de Noël. Le registre des dépenses particulières de la princesse Marie, devenue reine plus tard, mentionne de fréquents payements occasionnés par des pertes de jeu. La reine Elisabeth aimait également à faire sa partie, et lorsque le hasard la maltraitait, elle ne pouvait contenir sa mauvaise humeur, et s’emportait contre ses courtisans sous le plus léger prétexte. La satire et la réclame se glissèrent jusque dans les cartes ; en 1679, au moment où de prétendues conspirations tramées par les catholiques agitaient tous les esprits et faisaient couler le sang sur les échafauds, on mit sur les cartes l’histoire de tous les complots papistes ; une annonce accompagnant ces cartes affirmait que tous ceux qui n’en feraient pas usage ou les critiqueraient feraient par là même acte d’adhésion à la cour de Rome. Le xixe siècle n’a pas trouvé de réclames aussi puissantes et s’imposant avec tant de force. Peu de temps après la révolution de 1688, on vit paraître des cartes dont les sujets retraçaient les actes de mauvaise admir nistration reprochés à Jacques II. En 1720, on en imprima qui tournaient impitoyablement en ridicule la crédule avidité des actionnaires de la banque de Law. Il est étonnant qu’une semblable idée ne soit pas venue aux fabricants de cartes modernes ; ils avaient pourtant d’assez bons exemples sous les yeux. En France, en dépit des ordonnances civiles et cléricales qui, plusieurs fois, ont tenté de proscrire les cartes à jouer, ce jeu a toujours conservé sa supériorité et a été varié de mille façons diverses. Au tarot, qui fut longtemps en faveur, on a vu succéder le lansquenet, le piquet, la triomphe, la prime, le flux, le trenteet-un, la condemnade, le mariage, le boston, le whist, qui n’est autre que l’ancien jeu de l’ombre, et une foule d’autres, qui eurent successivement la vogue dans les tavernes et les salons dorés. Louis XII jouait au flux en son camp, à la vue des soldats. Rabelais dit que Pantagruel trouva à Bordeaux des matelots qui jouaient à la luette sur la grève. Henri IV ne craignait pas le jeu, surtout lorsqu’il lui était favorable, et l’on sait ses aventures avec son favori Zamet ; il différait en cela de Philippe le Bel, qui prenait chaque matin une somme d’argent chez son argentier, pour la perdre avec ses courtisans. C’est surtout sous le règne de Louis XIV que l’habitude de jouer aux cartes devint une véritable fureur, habitude funeste, d’autant plus difficile à combattre que la cour était la première à en donner 1 exemple. Déjà les désordres de la surintendance de Fouquet avaient développé à un degré incroyable la passion du jeu, et Gourville nous apprend qu on jouait, même en carrosse, des sommes exorbitantes. Dès que

Louis XIV eut commencé à tenir des appartements, c’est-à-dire à donner à jouer ; tous les courtisans devinrent joueurs. Inutile de dire que les escrocs abondèrent alors dans le palais de Versailles, et leur nombre devint même si grand, qu’il nécessita l’intervention du grand prévôt attaché à la cour pour juger tous les délits qui s’y commettaient. Les choses allèrent si loin, que le roi recommanda au lieutenant général de police « de trouver quelque moyen d’empêcher les tromperies qui se faisaient au jeu. » La Reynie, ainsi consulté, composa un mémoire où on lit les passages suivants, qui montrent bien que l’industrie des escrocs a de tout temps été la même : « La piperie des cartes ’^diversement

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coupées ou marquées, est trop grossière pour la pouvoir craindre à présent. Le nombre des joueurs qui connaissent cet avantage est si grand, qu’il y en a peu qui osent s’en servir. Il peut être nécessaire, néanmoins, de défendre la fabrication et l’usage de cette sorte de cartes, à peine de punition exemplaire. Un des moyens les plus subtils, outre ceux des tours de main et du signal, est celui de faire ranger les cartes par séquences et de les disposer, en les pliant chez le cartier, dans une certaine suite, dont on convient avec ceux qui trompent et sur laquelle ils prennent leurs mesures ; mais on pourrait obliger les cartiers de les mettre et de les disposer par couleurs, et leur faire défense de les plier autrement. On peut encore faire défense aux cartiers d’employer plusieurs sortes de papier dans un même jeu de cartes, car on peut, avec un papier un peu plus blanc ou plus fin l’un que l’autre, marquer à ceux qui en savent le secret la différence des grandes ou des petites cartes d’une couleur ou de l’autre ; les obliger de mettre le papier dans un même sens, car encore que ce fût le même papier, étant mis à divers sens, en long ou de travers, il pourrait servir à marquer la différence des cartes, etc. » Toutes ces précautions étaient inutiles et ne diminuaient pas le nombre de ceux qui trompaient au jeu. Il faut le dire, d’ailleurs, l’escroquerie n’avait pas alors le caractère honteux et flétrissant que nos mœurs modernes lui ont infligé avec raison. Tricher au jeu était, comme voler chez les Lacédémoniens, une preuve d’habileté et d’esprit ; les plus grands seigneurs ne s’en cachaient pas, comme le prouvent les mémoires du comte de Grammont, et il paraît même que cette habitude n’était pas un obstacle à la canonisation, comme on peut le voir par l’exemple de saint François de Sales. À cette habitude de tromper, qui n’était au fond qu’une tolérance mutuelle, se joignait quelquefois un singulier scrupule.de conscience, et chaque jour, avant de se séparer, les dames de la cour se faisaient un abandon mutuel dé ce qu’elles s’étaient volé. Si les témoignages contemporains n’étaient là. pour l’attester, on se figurerait difficilement 1 acharnement des femmes de cette époque pour le jeu, et les sommes énormes qu’elles y risquaient. « Le jeu de Mme de Montespan, écrivait le 13 janvier 1679 le comte de Rebenac, est monté à un tel excès, que les pertes de 100,000 écus sont communes. Le jour de Noël, elle perdait 700,000 écus ; elle joua sur trois cartes 150,000 pistoles (7,500,000 fr.) et les gagna ; et à ce jeu-là on peut perdre ou gagner cinquante ou soixante fois en un quart d’heure. ■ Une autre fois, en une seule nuit, elle regagnait 5 millions qu’elle avait perdus. Comme cet argent sortait toujours de la poche de Louis XIV, rien d’étonnant à ce que le trésor royal se trouvât si souvent épuisé. Monsieur, frère du roi, avait été une fois obligé de mettre ses pierreries en gage pour payer ses dettes de jeu.

De la cour, cette passion du jeu descendait dans la ville, et nombre de maisons s’ouvraient aux femmes et. aux fils de familles désireux de ruiner leur père ou leur mari. Ces tripots étaient ouverts la plupart du temps par des grands seigneurs, qui n’avaient pas honte de transformer leur hôtel en maison de jeu et d’en tirer de gros bénéfices ; et que pouvait à cela le lieutenant de police et à quoi auraient servi ses remontrances, lorsque les exemples partaient de si haut ? Louis XIV lui-même avait été un grand joueur, et un Anglais voyageant à Paris à cette époque a dit de lui : « Le roi joue rarement à présent ; il se contente de regarder quelquefois les parties ; mais autrefois il a été un gros joueur, il a perdu des sommes très-considérables. M. S.... lui escroqua près de l million de livres à la bassette, en faisant usage de cartes fraudées ; mais il fut découvert, emprisonné et banni, il y a quelques années, o La banque de Law amena une révolution dans le goût des joueurs ; ce ne fut plus sur une carte, mais sur la hausse ou la baisse des actions qu’ils risquèrent leur fortune, et, depuis ce jour, c’est à la Bourse que se sont jouées toutes les grosses parties. La passion pour les jeux de cartes n’a pas cependant diminué pour cela, et jamais, on peut le dire, ce jeu ne fut si répandu que de nos jours : les cercles, les cafés, les sociétés particulières n’ontguère d’autre distraction, et le jeu a remplacé la conversation, au grand détriment de la bourse et de l’esprit.

Il est pourtant certaines occasions où les jeux de cartes ont été utiles, et voici l’aventure d’un soldat anglais qui avait fait du sien son livre d’heures et son almanach. Ce soldat étant, un jour de fête, entré avec sa compagnie dans une église d’Irlande, s’écarta de ses camarades, tira un jeu de cartes, l’étala gravement devant lui, et le considéra avec toute l’attention et le recueillement d’un fidèle remplissant ses devoirs religieux. Le sergent, instruit de cette action, conduisit aussitôt le jeune soldat devant le juge, pour le faire punir d’avoir ainsi violé la majesté du saint lieu. Interrogé sur le motif de son action, il répondit : ■ Pardon, monsieur, mais daignez entendre mon excuse ; je suis pauvre et on ne peut l’être davantage, puisque ma fortune consiste dans les 5 sous par jour que me vaut mon titre de soldat. J’ai de plus quelque éducation, et j’ose ajouter, les premières semences des sentiments religieux que doit avoir tout citoyen honnête. Faute d’ar CART

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gent, je me trouvais sans livre de prières, je suis jeune et distrait, par conséquent, malgré moi-même, bien moins attentif que je ne voudrais l’être à l’office divin. J’ai donc cherché de bonne foi le moyen d’y fixer convenablement mes idées, et j’ai cru pouvoir y

réussir au moyen d’un vieux jeu de cartes, que le hasard a fait tomber dans mes mains. Voici, monsieur, mon procédé. * Tirant alors un jeu de cartes de sa poche, il présenta- un as au juge : « Cette carte, lui dit-il, me rappelle qu’if est un Dieu, seul créateur et conservateur de toutes choses ; un deux me rappelle l’annonciation de la sainte Vierge par Je ministère de l’ange Gabriel ; le trois, le mystère de la sainte Trinité ; un quatre, les quatre évangélistes ; un cinq me retrace l’idée des cinq vierges sages et des cinq vierges folles qui n ont point été admises au festin de l’époux ; en considérant le six, je me rappelle l’ouvrage de la création, auquel l’Eternel aconsacré six jours ; arrivant au sept, je vois avec plaisir çju’il se reposa, et que nous devons, à son imitation, nous reposer ce jour-là, ’pour le prier avec plus de recueillement ; le huit et le neuf me peignent la guérison des neuf lépreux, dont un seul remercia le Sauveur ; le dix me remet en mémoire les dix commandements de Dieu. Pour le valet, je le laisse ; c’est un maraud, dit-il en le mettant de côté ; la dame est pour moi l’emblème de la reine de Saba, arrivant des extrémités de l’Orient pour admirer la sagesse de Salomon ; et le roi me représente celui du ciel et de la terre, que je dois adorer partout où sa providence me conduit. Enfin, en comptant le nombre de points de mon jeu de cartes, j’y trouve les 365 jours de l’année ordinaire ; de façon qu’il me sert à la fois de livre de prières et d’almanach, ce qui n’est pas à dédaigner pour un pauvre homme comme moi. * Inutile de dire que le juge l’acquitta, et admira fort son ingénieux système.

— Fin. Le droit de fabrication au profit du Trésor qui pèse sur les cartes à jouer remonte au xvie siècle. D’après le tarif actuellement en vigueur, les cartes à portrait français sont soumises à un droit principal de 25 centimes par jeu ; ce droit est de 40 centimes sur les cartes à portrait étranger et cartes quelconques, dont la forme ou la dimension diffère de celles des cartes ordinaires. La fabrication des cartes n’est permise légalement que dans les chefs-lieux de direction de la régie des contributions indirectes ; en fait, elle est autorisée dans tous les chefs-lieux d’arrondissement où l’organisation du service le permet. Les fabricants payent un droit de licence de 50 fr. par an et sont soumis à l’exercice. La fabrication des cartes ordinaires, c’est-à-dirs à portrait français, ne peut se faire qu’avec du papier fourni par la régie et portant l’empreinte de ses moules. On peut se servir de papier taroté ou de couleur pour le dessous des cartes. Les caries à portrait étranger peuvent être imprimées sur papier libre ; mais elles ne peuvent être employées qu’autant que toutes les figures portent la légende France et le nom du fabricant. L’imitation ou la contrefaçon des moules de la régie est interdite, sous les peines portées aux articles 142 et 143 du Code pénal. Les moules particuliers ne peuvent être confectionnés que sur une déclaration spéciale ; ils doivent être immédiatement déposés dans les bureaux de la

régie, et c’est seulement dans ces bureaux que les fabricants peuvent s’en servir. Le

Fapier fourni par la régie doit être payé à instant de la livraison, d aprèo un tarif arrêté par le ministre des finances. Ce tarif varie de 20 à 30 fr. pour mille feuilles. Les fabricants sont tenus de mettre sur chaque jeu une enveloppe indiquant leurs nom, demeure, enseigne et signature, en forme de griffe. Une empreinte de cette enveloppe est déposée au greffe du tribuual et dans les bureaux de la régie. Chaque jeu de cartes destiné à l’intérieur porte une.bande de contrôle à timbre sec, qui est apposé par les employés de la régie ; le droit de fabrication est dû au fur et à mesure- de l’apposition de ces bandes. Les fabricants sont tenus de justifier de l’emploi ou de l’existence du papier qui leur a été livré, sous peine de payer le double -îroit sur toutes les feuilles manquantes. Les ca-i tes déclarées pour l’étranger ne sont pas soumises au droit de fabrication, mais l’exportation doit être justifiée. La vente des cartes ne peut avoir lieu qu’en vertu d’une commission de la régie. Les fabricants tiennent registre de leurs ventes ; les simples marchands ont deux registres, l’un pour les achats, lesquels doivent être faits directement chez le fabricant, l’autre pour les ventes journalières. La recoupe des cartes et le colportage des cartes recoupées ou réassorties sont interdits. Les personnes qui tiennent des établissements où l’on donne il jouer doivent inscrire sur un registre tous leurs achats, avec indication des noms et demeures des vendeurs. Il leur est défendu, ainsi qu’à leurs agents et à tous particuliers, de vendre aucun jeu de cartes neuves ou ayant servi. Ces personnes sont, comme les fabricants ou débitants, soumises aux visites de lu régie. Les contraventions à cette législation entraînent la confiscation des objets de frauda et des amendes variant de 1,000 fr. À 5,000 fr., et en outre la peine de l’emprisonnement. L’imitation des moules, timbres et marques de la régie entraîne des peines infamantes.

Dans l’ancien régime, les droits de la régie étaient protégés par une.pénalité encore plus